
hauteur, & prefque inacceflible ; la plupart des
habitans font Juifs, & il n’y a qu’un très - petit
nombre de Tartares.
Les anciens ont compté dans la Cherfonèfe Tau-
rique trois principales montagnes. Le mont Trape^us,
comprenant les montagnes de Jathelon, de Batche-
ftra'i & de Katchi ; le mont Cimmtrius , qui eft
Aghirmickt - Daghi, & le mont Berofus, qui com-
prenoit la montagne de Tçhavir- Daghd, la plus
haute de toute la prefqu’île, 8c celles de Baly-
jfClava & de Çabarta.
Géographie de plufieurs- contrées des enyirons du
Pont-Euxin ( i ).
Je vais placer de fuite les opinions dé M. Peyf-
fonel, fiir la géographie ‘ de la Colchide, fur
celle des environs du Pont-Euxin, & enfin fur celle
qui appartient à la navigation des Ruffes,
Defcription de la Latfique & de la t Colchide.
Nous trouvons dans Procope une defcription de
Ja Lazique. Suivant cet auteur, le fleuve Boas prend
fa fource dans le pays des Arméniens, qui habitent
Pharangion, proche des frontières des Tzaniens ; il
coule affez loin vers le côté droit, toujours étroit
& .guéable jufqu’aux extrémités de l’Iberie & aux
pieds du mont Caucafe, contrée qui^eft habitée
par diverfes nations, les Alains, les Abafques
chrétiens & alliés des Romains,. les Zéchiens &
les Huns Salviniens. En cet endroit le fleuve
s’accroît par un grand nombre de ruiffeaux qui
s’y déchargent-; il quitte le nom de Boas, prend
celui de Phafe 3 & porte de grands vaiffeaux
iufqifà fon embouchure d?ns le Pont-Euxin. C ’eft
fur les bords de ce fleuve qu’eft la Laziqüe. Le
côté droit de cette province eft fort peuplé jusqu’aux
frontières de Plbérie, & comprend diverfes
villes, dont les principales font Archeopolis, qui
(eft trèsrforte, Sebafiopolis, Rhodopolis & Monorifis :
pn y voit aufli les forts de Pytium, Defcandra
8c de Sarapana. Le côté gauche eft un efpace
d’une journée de chemin ; mais cet efpace eft
défert, & n’.eft habité que par quelques Romains
furnommés Pontiqups. C’eft dans cette partie inhabitée
de la Lazique, ajoute Procope , que Juftinien
bâtit la ville de Pétrèe, au nord de laquelle étoient
les frontières de l’empire & plufieurs villes fort
peuplées, comme RLçée, Athènes 8c Traptçonde.
Cette relation de Procope a rapport à la géographie
du moyen âge, & du temps où il écrivoit.
Dans les fièçles plus reculés, la Lazique faifoit
partie de la Colchide proprement dite, Le fleuve
(i) Ceci doit être, felon moi, trajifporté, lors d’une
nouvelle édition, à l’article V o n tu s - E u x in u s ; on pour-
roit aufli transporter à la Colchide, au Danube, &c.
tes articles qui fembknt plus particuliérement leur apbafteoir*
■ Boas, les villes d’Archeopolis, de Rhodopolis &
de Monorifis, ont été inconnus des anciens géographes.
Je penfe devoir placer ici quelques ob-
fervations géographiques que j’ai faites fur cette
contrée, d’après les relations exaâes que je me
fuis procurées dans mon voyage de la mer Noire.
» La Colchide proprement dite comprenoit autrefois
toute l’étendue qui eft depuis Trébizonde
jufqu’au Phafe, & au-delà de ce fleuve jufqu’aux
frontières de l’Ibérie, & au pied du mont Caucafe.
Strabon étend fes limites vers le nord jufqu’aux
villes de Pythium & de Diofcurias, où il dit que
finit la côte du Pont, prife depuis les Bofphoriens,
& que commence celle de la Colchide. Ptolemée
rapporte que la côte maritime de la Colchide
étoit habitée par les Laziens, & la partie fupè-
rieure par les Mancdi, qui font vifiblement 'les
Mingreliens d’aujourd’hui. Le Phafe divifoit la
Colchide à-peu-près par le milieu, & en formoit
deux parties, que j’appellerai Tranfphafienne 8c Cif-
phafienne. Ce fleuve célèbre a confervé jufqu’au-
jourd’hui le nom qu’il portoit autrefois les Turcs
l’appellent encore Nehr Fâche, le fleuve Fâche :
Strabon, Pline, Mêla & Ptolemée en font mention
; Pline & Strabon font d’accord avec Procope
touchant fa fource, qu’ils placent dans les montagnes
d’Arménie. Les anciens géographes indiquent
dans l’étendue de la Colchide Tranfphafienne
une infinité de fleuves & de rivières ; j’en
retrouve à-peu-près le nombre, mais il eft, je
penfe, bien difficile d’en déterminer l’ordre,
quoiqu’Ortélius leur en ait donné un dans fa carte
du Pont-Euxin. On peut feulement deviner à-peu-
près la pofition de quelques - uns de ces fleuves
qui ont retenu le nom qu’ifs avoient autrefois.
Ceux que L’on trouve cités dans Ptolemée, Pline ,
Strabon & Arrien , font le Corax, l'Anthemus , le
Hippus, le Cyaneus ou Glaucus, YAfielephus, le'
Tartura, le Singanus ou Tiganeus, le Chryforrhoas ,
le Charifius ou Charus, ou Charieis , 8c le Chobus,
C’eft .précifément-là le même nombre de fleuves
que l’on compte aujourd’hui depuis le Pbafe
exclufivement jufqu’au Charvafiday, qui fépare la
Géorgie du pays des Abajfes, qui font les Abfidec
de Pline, & les Abafgi de Procope & de Conf-
tantin Porphyrogénète. Les noms modernes de
ces fleuves dans l’ordre qu’ils occupent véritables
ment du nord au midi, font le Charvafiday, le
Koudouri y le Mamid{khali, le Mochtdfithali, Y A {t-
gour , 1e Lourlé, Y Erdifkhali, YAnakria, le Cianidç*
khali & le Kobidçkhali que les Turcs appellent par
corruption Kemkhal. Le mot D^hali en géorgien
fignifie eau courante, ou rivière; il paroît donc
manifeftement que le Kobi-dçkhaLi & le Cianir
d {khali font le Chobus Fluvius 8c le Cianeus Flavius
des anciens, dont les noms n’ont abfolument point
été altérés. Ceci renverfe l’ordre établi par Or-
têlius, qui place le Hippus & le Singanus entre
le Cianeus oc le Chobus, tandis que ceux-ci doi-
vent fe fuivre immédiatement. Il met aufli mal-à-j
propos le Charifius entre le Chobus . 8c le Phafe,
qui fe fuccèdent dans le même ordre , fans que
l’on trouve aucune autre rivière dans l’efpace qui
les fépare; de foi te que le Charifius, le Singanus
& le Hippus doivent être plus feptentrionaux que
le Chobus & le Cianeus. La conformité des noms «
modernes de ces deux derniers avec les anciens,
détermine inconteftablement leur pofition. Ceux
des autres fleuves font fi fort défigurés, qu’on ne
peut pas faire ufage du fecours des étymologies
pour les retrouver, & l’on ne fauroit former que
des conjeéflires. Le Charvafiday doit être le Corax,
le dernier fleuve de la Colchide vers le nord ; il
répond en effet à la place qu’Ortélius lui a aflignée
dans fa carte; Ceft un peu au-delà de ce fleuve
que devoit être le fort de Pythium, cité par Strabon
comme une place importante, & regardé par la
plupart des auteurs comme le dernier terme du
Pont & de l’empire Romain. Pline dit que cette
place étoit extrêmement floriffante, & qu’elle fut
ravagée par les Hénioques, Je penfe que la véritable
place de Pythium eft le lieu appelé aujourd’hui
par les Turcs Pejtvend; il eft éloigné d’environ
neuf lieues du fond du golfe de Sohoum ,
où devoit fe trouver l’ancienne Stbafiopolis ou
Diofcurias ; ce qui revient à la diftance de 3 50
ou 360 ftades, indiquées entre ces deux villes par
Strabon & par Arrien : cet éloignement fait à-peu-
près aufli les deux journées de Procope. Cet auteur
dit que les Romains bâtirent fur le rivage de
la mer les deux forts de Stbafiopolis & de Py-
'thium, éloignés l’un de l’autre de deux journées.
Il a fans doute parlé des journées de troupes &
de celles qu’on appelle en Levant des journées
de caravanes, qui font d’environ cinq lieues.
Toutes les indications des anciens géographes
concourent à prouver que Diofcurias ou Sebafio-
polis devoit fe trouver auprès de la ville appelée
ajourd’hui Sohoum, dans le fond du golfe de ce
nom. Tous les auteurs difent unanimement que cette
ancienne ville étoit- fituée dans le pqiiit le plus
avancé du Pont-Euxin vers l’orient, & dans l’endroit
où commence l’ifthme qui fépare cette mer
■ de la mer Cafpienne. Le golfe de Sohoum, en
effet, peut être regardé, comme l’extrémité orientale
de la mer Noire, & le véritable point où
i’ifthme commence de fe former. Arrien détermine
un efpace de 2.260 ftades entre Trapc{us & Sebaf-
topolis ; l’on compte aujourd’hui de Trébizonde à
Sohoum environ quatre-vingt-dix lieues, qui font
à-peu-près les 2260 ftades d’Arrien. D’ailleurs les
ruines d’une ancienne ville que l’on voit auprès
de Sohoum, & que les gens du pays appellent
encore Savatopoli, ôtent tous les doutes qui pour-
roient encore refter fur ce point. Mêla & Pline
prétendent que la ville de Diofcurias fut ainfi
appelée du nom des Diofciires, ou Cafior &
Pollux, qui en furent les fondateurs. Pline paroît
la diftinguer de Sebafiopolis ; mais Cellarius a démontré
affez clairement fon erreur. Ortélius a mis
dans fa Carte deux Sebafiopolis ; je ne fais pas où
il a pris la fécondé, qu’il place au midi du Phafe ,
à l’embouchure du fleuve Acinafis.
Il n’eft pas aifé de décider quel étoit le fleuve
qui çouloit auprès de Diofcurias ; Strabon veut
que ce foit le Chorus, Tîspi S'é rw Aïoo’KxpiciS'a.,
peï 0 %dpis YloTafAos ; Pline prétend que c’eft
Y Anthemus y Coraxi urbe Colchorum DiofcUriâdejuxta
fiuvium Antemunta ; & Ptolemée place immédiatement
après Diofcurias l’embouchure du fleuve Htp-
pus. Peut-être ont-ils raifon tous les trois ; car
trois fleuves fe déchargent dans le golfe de Sohoum
, le Koudouri, le MamidfkhaU, & le Mo—
chid{khali. L’ancienne Diofcurias ou Sebafiopolis
placée, comme je l’ai démontré, an fond du
golfe de Sohoum 3 devoit être peu éloignée de
ces trois fleu v e sq u i font fort voifins les uns des
autres : ainfi l’on doit raifonnablement conclure de
cette obfervation, que le Koudouri3 le Mamidfkhali
& le Mochidfkhali, font le Hippus, Y Anthemus & le
Charus y fans qu’il foit poffible cependant d’affignèr
précifément à chacun de ces trois fleuves ■ le
nom ancien qui doit légitimement lui appartenir.
Les autres fleuves -A{tgour, Lourlé , Erdidfkhali
8c Anakria doivent être YAfielephus, le Tarfurd,
le Singanus 8c le. Chryforrhoas. Mais je laiffe à
quelqu’un de plus intelligent que moi, le foin de
les ranger dans l’ordre où ils doivent être, & de
faire la jufte diftribution des noms. ’
Je ne trouve abfolument point les villes de
Nedpolis 8c de Thiapolis 3 qui n’ont été connues
que de Ptolemée, 8c dont aucun autre auteur
ancien n’a parlé. Je ne fais non plus où placer
Æa ou Æapolis, que Ptolemée dit être maritime ,
8c que Pline indique fur le bord du Phafe à quinze
milles de la mer. Annollonius en parle comme
d’une ville où l’on alloit par eau, fans dire fi elle
étoit fituée fur te mes, ou fur le fleuve. Le pafïage
de Pline donne lied® de croire que cette place
étoit confidérable : maxime autem inclarüit Æa x v
miilibus pajfuum à Mari.
Je ferois affez porté à croire que , la ville fYA-
nacria d’aujourd’hui, fituée à l’embouchure du
fleuve du même nom, eft l’ancienne Hcra'cleum
de Pline. Cet auteur la place à foixante-dix milles
de Sebafiopolis, ce qui revient à-peu-près aux
quinze lieues que l’on compte àlAnacria au fond
du golfe de Sohoum, où font les ruines de Sebaf-
topolis, mais je penfe que Ptolemée s’eft trompé
fur la ville dé Gygàneum Tuycli/sav , qu’il place
au-delà du Phafe ; cette ville pourroit bien être
Gugniéy fituée fur la mer Noire, au midi du fleuve
- T cn o ro k le nom s’eft aflez bien confervé, &
l’étymologie n’eft point forcée*.
La plupart des villes Mêditerranêes de la C o l-
Tranfphafienne citées par les anciens géographes
font faciles à retrouver : car leurs'noms n’ont
prefque point été akêrés, 8c les* veftrges en fub-
fiftent encore. La ville Méditerranée voifine ch*
I Phafe, appelée par Pline Cyta, & par Etienne de