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. L’itinéraire ajoute les diftances qui fe trouvoient
fur la route juiqu’à Hyduntrurn. 1
Jjiptas. J . . . . .......................................... MP. x x v .
Hÿdntntam . ............................................... XXV.
Mais, on le répète , Appius n avait conduit le
chemin que jufqu’à Capoue. Non - feulement le
paffage de Jules Frontin eft formel fur ce point,
quand il dit : Appiaaqua induSta ejl, ab Appui Claudio
cenfore : qui cjl viarn Appiam à porta Capena , ad urbem
Capuam muniendam curavit. Et même de fon temps
les parties de la grande Grèce qu’elle parcouroit
au-delà de Capoue-n’étoient pas encore des provinces
-dans la dépendance des Romains. Mais il
telle à favoir par qui fut fait ce fécond ouvrage ;
on préfume que c’a pu être par Jules Céfar, qui
fut nommé par le peuple commiffaire de la voie
Appienne ; & Plutarque affure qu'il y employa
une grande fomme d’argent: Avpioe. curatorem jac-
tum , plurigium ptcunicz in. eam itnpendijfe.
Je ne croirai pas trop m’éloigner de mon fujet,
& en même temps je répandrai un peu d'agrément
fur cet article, en mettant ici le récit que fait
Horace de fon voyage le long de cette route.1
C’eft prefque transporter le leéfeur fur les lieux ;
& comme cette route fe trouve fur les bonnes
cartes de l’Italie ancienne, entre lefquelles je puis
citer celle que j’ai donnée dans mon Atlas, il
feroit, ce me femble , agréable & facile de fuivre
ce voyage, & d’avoir une idée un peu plus nette
de cette partie de l’Italie au temps d’Horace. La
defeription de fôn voyage fe trouve dans fes fati-
res ( L. 1 . n°. v ) , & commence par ces mots:
Egrejfum magna , ■ &c.
Voyage d’Horace fur la voie Appienne.
^ u An fortir de la plus grande ville du monde ( i)
je vins loger dans une modefte auberge de la
(i) Ces notes font extraites en grande partie du
favarit &. itlifible ouvragé de M. l’abbé Chauppi fur
la découverte de la rnaifon de campagne d’Horace,
3 vol. in-8°. d’environ 550 pages chacun. Yoye\\ol. III,
page 367 .8t. fuiv.
La voie Appienne commençôit à la colonne milliaire,
appelée le Mille doré, dont i’hiftorien Dion nous apprend
qu’Augufte fe fervit comme d’un point unique
pour la mefure générale de toutes les voies. Il é^oit
alors curator viarum. Çet:e colonne étoit à la tête du
Forum du coté du témplede Saturne qui en occupôit
la partie orientale : c’eft donc devant ce temple qu’étoit
le Millium Aurgum.
La voie tournoit le mont Palatin , non par le côté
droit vers le cirque , mais par le côté gauche , en
filant les arcs de. Titus Ôt de Conflanûn, 8t paflant
devant le feptizone de Sévère. Elle fortoit par la porte
Capène , placée alors non où eft la porfe S. Sébaf-
tien, mais vers l’églife de Saints Nérée & Achilde, où
elle dçbouchoit fur les voies Appienne 81 Latine. Ce
£ut donc par cette perte qu’Horace fortit de la plus
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ville d’Aricié (2). J’avois avec moi le rhéteur
Héliodore, le plus favant de tous'les Grecs. De-là
nous allâmes à Forum Appii (3), lieu principalement
habité par des bateliers & des cabaretiers
fripons. N’en voulant prendre qu’à notre aife,
nous fîmes cette route en deux jours ; des gens
plus -aélifs l’auroient faite en un. Mais la voie
Appienne eft moins fatigante- au petit pas. Dans
cet endroit, à caufe de l’eau qui y eft cléteftable,
je déclarai la guerre à mon pauvre eftomac ( que
je mis à la diète ) , & j’attendis, non fans quelque
impatience , mes compagnons de voyage qui
foupoient de leur mieux.
j» Déjà la nuit commençoit à étendre fes ombres
fur la terre & à parfemer le ciel d’étoiles : alors
. commence le tapage ; les efclaves jurent contre
les bateliers les bateliers contre les efclaves....
allons, aborde ici.... tu fais entrer plus de trois
cents perfonnes.... hola donc, on eft affez. Tandis
qu’onfait payer, que l’on attelle la mule, il s’écoule
plus d’une heure. Les coufins importuns, les grenouilles
criardes repouffent loin de nous le fommeil.
Le batglier ivre chante fa maîtreffe abfente; un
grands ville du monde (magna urbe}, De ce côté la
ville de Rome s’étendoit au moins jufqu’au cinquième.
mille ; mais cet agrandiffement n’eut lieu que dans la
fuite.
(2) Riccia, ville moderne , n’occupe que la place
du château de l’ancienne Aricia : cette ville etoit muée
dans un bas, 8c l’on en voit encore les ruines. Là
montée de la voie la conduifoit, au fortir d’Aricie,
fur la hauteur que les anciens nommoient mens Vir-
bius : deux voies fe détachoient de cette première,
dont une alloit au temple de Jupiter Latialis, 8c l’autre
au temple de Diane# au fond du cratère du lac d’A ricie.
'
(3) Forum Appii, que quelques auteurs nommant en
françois le Fore d’Appius , d’autres le marché d’Appius,
étoit une petite ville fituée à 43 milles du' Mille-doré :
on n’y voit que des ruines. Ce lieu eft vis-à-vis le
lieu moderne appelé Se^relfetia , dont il rejëve, ,8d
une petite voie y conduifoit. 11 n’y avoir que 30 milles
entre Aricie 8c Forum Appii, La premierè étoit au
treizième mille ,'8c la fécondé au quarante-troifième. 11
avoit divifé cette route en deux journées , §£ il avoir dû
s’arrêter à l’endroit appelé très Tabernx. , les-trois Tavernes
, qu’il ne nomme pas fans doute à caufe du peu
d’importance du lieu , mais parce que ce nom auroit màl
figuré dans des vers. Quelques commentateurs, d’après
l’expreffion d’Horace , Aldus prx.cinB.is ,faifant allulion
à la marche d’un homme qui a retroufle fes vêtemens
pour marcher plus vite ; quelques auteurs, dis-je ,
s’étoient cru en droit de conclure qu’Horace avoit fait
la route à pied -, mais c’eft plutôt parce qu’il étoit en
voiture que le cahot de la route de voit l’incommoder.
A Aricie, Horace prit une vdfture par eau: Ce voyage
fe continuoit au travers les marais Pomptins. Ordinairement
on. s’embarquoit le foir, 8c l’on débarquoit
à fix heures du matin -, mais comme le conducteur de
la mule après s’être avifé de boire, s’étoit amufé à
dormir, on ne put arriver qu’à,la quatrième heure du
jour. O r , le jour corrfmençarit à fix heures chez les
Romains , la quatrième'étoit dix heures. Mais pour que
l’on pût aller par eau-, la voie continuoit par terre
jufqu’à Anxur ou Ter racine.
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paffager en fait autant. Enfin, celui-ci:Vendort;
& l’autre , cédant à fa pareffe, attache le bateau
à- la pierre qui marque le mille, lâche fa mule
dans le pré, & s’étend fur l’herbe pour dormir.
>> Il étoit déjà grand jour lorfque nous nous
apperçûmes que la barque n’avançoit pas ; l’un de
nous, plus expéditif que les autres , faute fur la rive,
& tombant fur la mule & fur le*muletier , leur ca-
reffe un peu rudement la tête & les reins avec un
bâton de faule. Enfin nous débarquâmes à grande
peine fur les dix heures. Nous nous lavons les
mains & la bouche avec l’eau de la fontaine ô Fe-
ronie ( 4 ) ; nous dejeûnons , puis nous rampons
(5) de notre mieux l’fcfpace de trois milles', jufqu’à
Anxur, place fur des rochers qui s’appeicevoient
de loin. Là dévoient fe rendre l ’excellent Mécène
& Gocceïus, tous deux chargés d’affaires importantes,
tous deux accoutumés à réconcilier des
amis. Pendant que je m’occupe à foulager mes yeux
malades ajec un noir collyre, Mécène arrive, puis
Coccei’us avec Fonteïus Capito, le plus aimable
des hommes , & le meilleur ami.d’Antoine. Nous
quittons fans regret Fundi & Aufidius Lufcus,
ce préteur qui, jadis feribe, porte aâuelleraent
la robe* bordée -de pourpre avec le laticlave, &
fait placer devant lui la caffolète , dignes récom-
penfes de fes anciens fervices,
» De-là nous allâmes, pour nous délaffer, paffer
un jour dans la ville des Marmures (6), où Murena
(4) Les eaux dont parle Horace étoient certainement
celles qui fe trouvent au lieu où font les tours
de Terracine. M. l’abbé Chauppi le conclut, i° . de
ce que la voie ne put les rencontrer plutôt, ni plus
tard, puifqu’elle fe trouvoit jufques-là dans la plaine
Pométine, dans laquelle on eft certain qu’il n’y a aucune
fource , toutes les eaux s’y rendant des montagnes
des environs -, 2*. parce que c’eft-là uniquement
que l’on trouve.une eau belle, douce & tranfparente ,
telle que l’on peut en avoir fait une divinité : on y
voit de plus les ruines d’un temple St d’un canal qui
y conduifoit Peau.
(5) Horace millia... répimus, nous rampons trois milles.
C’eft qu’à partir de la fontaine, il falloit monter pour
arriver au haut des monts fur lefquels il'avoit apperçu
de loin la ville d 'Anxur i car cette ancienne ville $ Anxur
étoit au haut de la montagne, 8t l’on y voit encore
de très-fuperbes reftes. La ville de Terracina, qui fuc-
céda à Anxur, fut bâtie au bas de la montagne-, mais
elle n’exiftoit pas encore. La ville aftuelle eft fur la
côte , &> participe des deux fituations anciennes. Je
crois l’avoir dit en plus d’un endroit. Je foupçonne
que là principale raifon qui fait qu’une ville ne fuc-
cède pas phyfiquement pour l’èmplacempnt à une autre
vnle détruite, c’eft l’embarras d’en déblayer tous les
matériaux. Il eft cent fois plus aifé de là bâtir ailleurs
pour y établir des fondations nouvelles, 8c de ne regarder
les ruines de l’ancienne ville que comme un vafte
atfelier où l’on prend les pierres dont on -â befoin. C’eft
probablement d’après ce principe, que_ceux qui .bâtiment
la ville actuelle de Terracine ne mirent ,ni fur
la montagne, ni dans le bas , mais a mi-côte.
*es entterens commentateurs d Horace , atnii je ne( pui
juger s’ils n’ont pas eu la même idée que iftoi. Il mi
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nous, fournit le logement, & Capito la bonne
chère. -
Le lendemain fut un jour délicieux pour nous,
par le plaifir que nous eûmes de trouver à SinueJJa^j)
Piaiuius, Varius & Virgiiës, les plus belles âmes que
le ciel ait jamais créées, & auxquels per fon 11e n’çft
plus attaché que moi. Quelle joie i quels .tendres
embraffemens ! Tant que je conferverai la raifon ,
rien ne -me fera auffi précieux ' qu’un véritable
amir:
jj Nous nous, arrêtâmes enfuite dans la petite
métairie que l’on voit près du pont de Campanie j
les chefs de ce lieu nous y fournirent.le bois le
Tel, comme ils le dévoient. De - là nous allâmes
faire repofér nos mules à Capoue; (8),; Mécene
femble que ce poète, en difant, la ville des Marmures
fait allufioo au nom de cette ville , qui a du rapport avec
Formia., une fourmi, que l’on nomme en.grec :
du moins je ne vois pas tfâutre étymologie en ce moment.
Dans tout l’efpaçe qui s’étend de Fon^i 8c même
de Terracine à Minturne, on paffe encore fur la voie
Romaine. ,
.(7) La ville de Sinuejfa étoit fur les bords de.la mer*
8c la voie Appienne y conduifoit , ainu que le dit
Horace, 8c l’on en voit encore des ruines, entre autres
de très bèlles pierres veinées comme des marbres : on
voit auffi les ruines de la ville. On retrouve auffi des
anciens bains, fur lefquels les nouveaux ont été\conf-
truits-, car on y trouve encore des eaux fulfureufes.
La forme même de la côte eft une preuve que la ville-
étoit en ce lieu : car, félon lu i, elle'avoit pris le nom
de Sinuejfa, du mot Sinus , qui , ' en latin, fignifie un
golfe -, auffi dit-il S ivuïov« ev jtoXyr».... La ville de Sen\a.
atruelle répond à l’ancienne Suejfa Auruncaou Sueffa
des Auronques, 8c une voie y conduifoit j mais ce fût
une voie particulière à cette ville , 8c elle fut faite,
par Hadrien, comme on le voit par une infeription qur-
fe trouve à Senza même.... Parihici F. Divi Nervæ Nepos
Trajanus Hadrianus, Aug. Pont. Max. Trib. Pot. yII /
Çof. III Viam Su ES s i AS l municipibus fua pecum
Lorfque L’ufage eut fait abandonner la route qui fui-
voit le bord de la mer, on donna également à cette
route-fci le nom de voie Appienne ; mais ce nom ne
lui vint que par fucceffion de temps.
La véritable voie Appienne fortoit de Sinuejfa par le
lieu où eft_ a&uellement le gros bourg de Mont-Dra-
gone -,. ôn y en voit encore la colonne miliaire c x i.
Mais, qui le croiroit ? dans un pays où tout ce qui
tient -à l’antiquité dévoit être un objet de recherches'.
8c de foins, cette pierre a. été employée à bâtir, 8c
elle fert de pierre angulaire à un vieux arc des prifens :
on n’en apperçoit l’infcription qu’avec difficulté. Au-
delà de ce heu la voie Appienne eft bien plus dégradée
que dans toute la partie qui précède.
(8) La ville de Capoue, vers laquelle la voie Appienne
étoit dirigée, 8c à laquelle on ceffoit de compter
les milles indicateurs de Feipace entre Rome 8c cette
ville, n’eft pas celle qui fubfifte aujourd’hui fous le-
même nom. On ne voit plus que les ruines de Pan-
cienne , dans une pofïtion admirable-, mais cestriunes'
attellent la magnificence 8c la grandeur de cette ville.
Cependant Pamphithéâtre feüt rappelle des formes connues
8c majeftueufes : on a porté à la nouvelle Capoue-
tout cè que les ruines de l’ancienne-offroient de- curieux.
Au-delà de Capoue on voit par des milles encore-
exiftansy qu’on avoit recommencé à compter pat I , '
II, III, ôcc, :