
Byfance Kvtci, eft inconteftablement la ville de
Cutatis , capitale de Ta (Géorgie Turque, & , fituée
à cinq ou fix lieues au nord de ce fleuve. Properce
6c Valérius plaçais en ont parlé. Etienne
de Byfance prétend quelle a été la patrie de .
Médée. On retrouve, à peu de diftancé de-là ,
le fort de Scandra, dont Procope a fait mention ;
c’eft le vieil* fort de Skender, liras a fix lieues a
l’eft de Cutatis. A-dix lieues au fud-eft de cette
ville étoit le château de Sarapana , que Strabon
place dans le lieu où le Phafe celle d’être navigable,
& qu’iLdit être fi vafte qu’il pourroit
contenir une ville. Ce château a retenu fon ancien
nom : les Turcs l’appellent encore Choraban ; ils •
y .ont bâti une forterefle, & y tiennent garnifon.
On y voit encore des relies de murailles, de tours ,
& tous les débus du fort bâti par les Romains.
Pline indique fur les bords du Phafe les vides
de Tyndaridc, de Cïrcmun & de Cygnus. Je ne
retrouve ni le noin ni la place de là derniere.
Tyndaride eft le lieu appelé par corruption Pan-
dary fur le bord feptcntrional du Phafe, a huit
lieues de fon embouchure, & environ à fept lieues
au fud - ouçft de Cutatis : on y voit encore les
débris d’un vieux château ruiné.- Cirçmm appartient
à la Colchide Cifphafienne, & j’en parlerai ci-
après. L’ancienne McchUJfus eft aujourdhui Meckhel,
au nord de la Géorgie turque , vers la rivière de
Rioun-: à un certain éloignement du village moderne
on retrouve des monumens de l’ancienne
viile Zadris ou Zadra vers la frontière, des O fies,
où l’on voit encore un château ruine. Madia,
qui eft fans doute^ le Matium de Pline , Soit
être 1e village de Mais finie fur la mer Noire ,
un peu au nord" de l’emtochure.du Phafe , .&
auprès du cap du m e n n om . Ptoiemee met
çette ville au nombre des Méglicerranées; mais
Pline, pius exa& fur ce , la -place fur la
côte du Pont-Euxin. J’ignore où ^pouvoir être
Sarace. Suriiim n’efl point du refîort de la Colchide
Tranfphafienn'e, & j’en parlerai en traitant des
villes en-rdeçà.du Phafe. Au nord de la Géorgie
turque, à douze.ou quinze lieues du Phafe, vers ■
la frontière de Souanes, & , comme dit Procope,
auprès des limites de fîbérie , on trouve les véftiges
de l’ancienne Rhodopolis ; les Géorgiens ont change
y R en D, 8c en ont fait Dodopoii, qui fignifie en leur
langue nouvelle Mariée. Ils prétendent que cette
ville fut bâtie par une jeune princefle, dont ils
racontent une hiftoire fàbuleule , 8c qu il feroit fu-
perflu fie rapporter. Je me retrouve point Archoeopolis
que Procope dit avoir été la métropole des Lazes
du temps de Jufiinien, lorfque ces. peuples habitoient
fort avant dans la Colchide, vers les confins de
î’Ibèrie. Voilà cé qui concerne là Colchide au-r
dç-là du Phafe, Paflons à la Cifphafienne.
La plus * célèbre des villes qui bordoient le
Phafe, étoit Phafiis citée par Strabon, Pline 8c
Pomponius Mêla, 8c qui avoit donné fon nom
J. çç ^eirve» Elle étoit fituée R*' 1$ rive rnéri-?
dionalè vers l’embouchure. Elle fubfifte encore*?
8c n’a point changé de nom ; les Turcs l’appellent
aujourdhui Fâche. : il y a une forterefle avec une
garnifon de Janiflàircs. Mêla prétend, que cette
ville fut bâtie par Thémiftagore, Milélien. On
y voyoit le temple de Phryxus, 8c un bofquet
renommé par la fable de la toifon d’or. Circceum
étoit placé aufli fur la rive méridionale du fleuve,
8c devoit être indubitablement le vieux château
ruiné, dont les Turcs ont un peu défiguré le .nom,
Sc qu’ils appellent Irké. Il y a auprès du village un
pont qui porte fon nom , 8c que les gens du pays
nomment Irké-Kcuprujfi. La ville de Surium efl
aujourd’hui Sria , qui fe trouve environ a douze
lieues au nord de Riçé. Des gens du pays m ont
afliiré que le nom de Sria fignifie grande dans
la langue des Lazes, J’ai découvert à cette occa-
fion que les Lazes de nos jours, indépendamment
de la langue turque qui leur efl familère , ont
encore une ancienne langue lazienne, qui n’a rien
de commun avec le turc, l’arménien, le géorgien
, le circafiien 8c les autres langages voifins.
Ôn retrouve encore les vefliges dé la plupart des
autres villes de la Colchide Cifphafienne 8c leurs
noms même n’ont prefque point été défigurés.
Athènes efl Aihina à douze lieues au nord dé
Ri^é, ville aujourd’hui très - Sondante par fon
commerce 8c qui a confervé fon ancien nom
Rhiçium. Opius efl la ville d’&ph, fimée un peu au
nord de Trébizonde. Le vieux château ruiné 8c deshabité
, que les T lires appellent aujourd’hui Kordile,
doit être Chordyla de Ptolemée. Il efl fitue a fix ou
fept lieues au midi de Gugnié, que je foupçonne,
comme je l’ai déjà dit, être l’<mcienne r vydvsoev ,
que Ptolemée a. placée mal-à-propos dans la Colchide
Tranfphafienne. A trois lieues 'de Kordylé
on trouve d’autres ruines d’une ancienne v ille ,
qui pourroit être Morthula, rapportée par le même
géographe. Le lieu appelé aflnellement par les
Turcs IxÜ , reflemhle beaucoup à Jfylina, dont
Ptolemée a aufli fait mention. Il n’y a pas lieu de
douter que Trébizonde d’aujourd’hui ne fort l’ancienne
Trape^us, 8c tout concourt à le prouver.
Je penfe que les refles d’une ancienne ville que
les Turcs nomment Eski-Trabzan , ou l’ancienne
Trapeçus , font les débris de la ville de Pétrie, citée
par Procope, qui fut bâtie par l’empereur Jufiinien,
8c dont le nom ne fubfilb plus.
Les anciens géographes ont compté dans la
Colchide Cifphafienne, ou la Lazique proprement
dite , à-peu-près le même nombre, de fleuves* 8c
de rivières qui arrofent aujourd’hui cette contrée. En
recueillant les noms de tous ceux qui font rapportés
par Pline , Ptolemée 8c Arrien , on en trouve
dix-fept. Ortélius en à arrangé comme il a pu le
plus grand nombre dans fa carte du Pont-Euxin ;
mais je penfe néanmoins qu’il efl bien difficile de
déterminer leur ordre précis. Ces fleuves font
VIfis, YAcinafis, le Bathis y\'Apforrus ou Apfarus,
ŸA/chabis , le Fixités , Ig Prytanis, le Zagatis,
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T A u
l’ Aditnus, YAfcurus, le Rhifius', le Pfychra oit^
Ophis 8c le Hyfius. Ortélius a paffé fous filence
le Ciffa de Ptolemée , le Mogrus oc le Calus d’Arrien
, 8c Y A camp fis Sc YHcracleum de Pline. On ne
eut tirer à ce fujet que très-peu de lumières de
line 8c de Ptolemée, parce qu’ils ne rapportent
l’un 8c l’autre qu’un très - petit nombre de ces
fleuves fitués depuis le Phafe jufqu’à Trébizonde.
Pline paroît marcher, dans fa defeription, du
midi au feptentrion ; il place après Trapezus le
fleuve Pixites, au-delà les peuples appelés San-
niens & Hénioques, puis le fleuve Apjarus, avec
un château de ce nom à fon embouchure, éloignée
de Trapezus de 140 milles; enfuite les
fleuves Acampfis , Ifis, Mogrus, Bathys ; les Col-
ches , la ville de Matium, fe fleuve 8c le promontoire
Heracleum, 8c enfin le Phafe, le plus célèbre
fleuve du Pont. Ptolemée fuit la même direction
que Pline, du fud au nord. Après Trapezus, il
indique Opius , puis Chordyla, Morthula y Xylina,
l’embouchure du fleuve Ciffa , 8c celle de Y Apfarus.
Le» relations fuccintçs de ces deux géographes
fournifient peu d’éclairciflemens, mais me paroiffent
conformes à la vérité. Je .’ne penfe pas de même
de celle d’Arrien , qui efl cependant la plus étendue
& la plus détaillée. Ce dernier defeend du feptentrion
au midi de la manière qui fuit. Il place
d’abord à 110 Rades'du Phafe le fleuve Mogrus,
qu’il dit être navigable ; il met enfuite Y Ifis,
VAcinafis 8c le Bahtys, puis Y Apfarus ; après celui-
ci YArchflbis, le Pixites 8c le Prytanis, éloignés
de 90 ftades les uns des autres ; enfuite Athènes , à
180 Rades de laquelle l’Aditnus, puis YAfcurus à un
moindre intervalle, enfuite le Rhifus, le Calus, le
Pfycra ou Ophis , & à 00 ftades par-delà, le fleuve
& le port de Hijfus, éloignés de Trapezus de 180
Rades.
Pour manifefter les erreurs d’Arrien, je dois
commencer par établir l’ordre dés fleuves qui
coulent dans la Lazique ou la Colchide Cifpha-
fienne. Tous les fleuves connus aujourd’hui depuis
le Phafe jufqu’à Trébizonde, en defeendant du
nord au fud , font le Batoum, le Tchorok, le
Nigal-Khevi, .dans lequel fe jettent les rivières de
Mogaridzé 8c de Gourgour ; enfuite v ien n e Fortuna-
Soiii, 8c deux petits ruifîeaux anonymes ; le Soouk-
Soui 8c un autre ruifleaiï fans nom ; YEsbet, deux
ruifîeaux anonymes, la petite rivière d'Oedibeffi,
8c une alitre plus méridionale, qui fe jette dans
la'mer un peu au-deflùs de Trébizonde. Les informations
que j’ai eues fur ce point font conformes
à la carte de la petite Tartarie 8c de la
mer Noire, gravée par Ottens, d’après les pofi-
tionsde D e l ’Ifle, 8c à celle de la mer Noire que
feu mon père a fait drefler à grands frais 8c avec
beaucoup dlexaelitude. Le fleuve Bathys a confervé
fon nom; les Turcs l’appellent encore aujourd’hui
Bathoum ; ainfi l’on ne fauroit douter de fa pofi-
tion ; fon embohehure eft dans la mer Noire, à
fix lieues au midi de celle du Phafe. Il n’y* a
Géographie ancienne. Tome f f l .
T A U i J J
pas la moindre eau courante entre ^ ces deux
fleuves ; ainfi le Mogrus, Y Ifis 8c VAcinafis d Arrien
que ce géographe a places dans cet intervalle,
ne peuvent s’y trouver, 8c cette indication me
paroît totalement faufle. Suivant le fyfteme de
Pline , le Mogrus étant plus méridional que le
Bathys, pourroit être la rivière Mogaridzé, dont
le nom moderne femble aflez clairement dérivé
de l’ancien; alors Y Ifis 8c VAcinafis, que je crôis
être le même que Y Acampfis de Pline; feront le
Tchorock 8c le Nigal-Kevij Y Apfarus qu’Arrien
place immédiatement après, fera le Fortuna-Souï,
dont l’embouchure eft éloignée de vingt-huit lieues
communes de Trébizonde ; ce qui revient préci-
fément à la diftancé de 140 mille pas indiquée par
Pline depuis Trapezus ou Trébizonde, j^ufqua
l’embouchure de ce fleuve, en évaluant le pas
des anciens fur le pied de cinq mille pour une
lieue commune, comme je’ tâcherai ae le dér
montrer ci-après. Je ne vois point de place pour
le fleuve Heracleum de Pline ; je ne fais non plus
où placer le Ciffa de Ptolemée, ŸArchadis, qui
doit être le même que YArcabis, le Pixites, ni
le Prytanis, qu’Arrien place entre YAbfarus 8c
Athènes. Cette ville a retenu fon ancien nom ;
c’eft incontefiablement le château ruiné appelé
aujourd’hui Athina par les gens du pays ^ & fitué
environ à douze lieues au nord de Rizé. Entre
Athènes & le fleuve de Fortuna - Soiü, qui doit
néceflairement être YAbfarus , on ne trouve que
deux petits ruifleaux anonymes. Il eft bien difficile
par conféquent d’accorder le fyfteme d’Arrien
avec la géographie moderne 8c la connoiflanc©
des lieux. Ce géographe indique après Athènes ,
YAdienus, YAfcurus 8c le Rhifius. VAdienus^ pourroit
être le SooukSoui ; mais je ne hafarderai point
des conje&ures fans aucun fondement, & je veux
dans ce que j’avance pouvoir m’appuyer tout an
moins fur les étymologies des noms. Il eft certain
que le Rhifius doit être la petite rivière qui fe
décharge dans la rade de j j r a | ville aujourd’hui
extrêmement peuplée & d’un grand commerce,
& dont le nom n’a point été altéré. VAfcurus
reflemble beaucoup aufli à la rivière ou au ruif-
feau qui pafle auprès d’un bourg appelé aujourd’hui
Curé, auquel cette rivière a peut-être donné
fon nom. C ’eft aux environs de ce bourg que font
les mines inépuifables d’où l’on tire le cuivre qui
va à‘Trébizonde, à Rizé, à Tripoli & à Asbié,
qui eft l’ancienne Abifa. L'Esbct pourroit être lé
Calus d’Arrien, qui n’eft connu que de lui feul.
Le nom de Y Ophis ou Pfychra détermine incon-
teftablement la pofition de ce fleuve ; ce ne peut
| être que le dernier rnifleau que l'on trouve avant
Trébizonde en venant du nord au fud, fuivant
la dire&ion d’Arrien. Ce ruifleau pafle auprès de
la ville d’Qph ou l’ancienne Opius, qui a pris fon
nom, ou lui a peut-être donné le Uen. Voici à
préfent une erreur manifefte d’Arrien, qui prouve
indubitablement le peu d’exaftitude de fa relation