
falloit franchir pouf trouver le climat où cela avoit fieu, étoit de plus de 10,300 ftades; où
de 29 degrés. Mais l'ignorance Sc le menfonge ne combinent pas les faits ou les combinent
ma!-adroitement.
Pythéas ajoute des fables à fes erreurs, quand il dit que le flux & le reflux cefloient de
fe faire fentir lorfquaprès avoir pafle le détroit de Gadès on étoit parvenu au cap Sacrum;
& qu il affure enfuite qu au-deflus de la Bretagne le reflux montoit à la hauteur de 80 coudées;
De même, lorfqu il dit que dans les environs de Thule, il n’y avoit plus ni terre, ni mer,
ni a ir , mais un eompofé de tous ces élémens, d’une confiftance femblable à celle de la
fubftance du poiffon nommé Poumon de mer ; que l’on ne pouvoit ni y marcher, ni y
naviger : & cependant s’il faut l’en croire , il ymarchoit, il y naviguoit, & il y refpiroit !
après des contradiflions fi frappantes, ne peut on "pas affiner fans crainte, que jamais
Pythéas n’a fait le voyage dont il a écrit la relation !
Cependant, au milieu de ce chaos on découvre encore un fonds de vérités inconteftables
que Pythéas ne pouvoit deviner , qu’aucun Grec ne favoit avant lu i , & que l’on n’a pu
vérifier que long-temps après fon fiècle.
Premièrement, l’exiffence du promontoire Calbium, dont la pofition, beaucoup trop
occidentale , prouve feulement que Pythéas n’y avoit pas é té , & qu’il ignoroit, ainfi
qu Eratofthènes , que la Gaule 8i l’Ibérie fuffent féparées par un ifthme.
Secondement, la mention faite de 1 île de BaJïUa ou Baltîa, qui ne peut avoir de rapport
qti avec la Scandinavie & dont le nom fe conferve encore aujourd’hui dans celui de Baltidue
que la mer y a retenu. ’
Troifiemement, la hauteur ou il plaçoit l’extrémité feptentrionale de la Bretagne ou de
lîle d Albion q u i, à 1 , 23' près, répond à la latitude des parties les plus élevées de
l’Angleterre.
Quatrièmement enfin, la pofition de Thule q u i, fi elle doit être une î l e , comme les
anciens Iont cru, ne peut convenir qu’à llflande. Cette île étant la feule qui préfente
la hauteur indiquée par Pythéas & les mêmes çirconftances par raport au tropique.
Obfervons de plus que la jufleffe des latitudes de Pythéas p rouve qùé, dans les matériaux
qu il employoit, on avoit tait ufàge de ftades de 700 au degré du grand cercle ; que cette
évaluation eft par conféquent bien antérieure à Eratofthènes , qui fe l’eft appropriée
dans la fuite. Pour reconnoitre 1 exactitude de cette ancienne mefure de la terre, ce n’étoit
pas la bafé, infidieufement indiquée par Eratofthènes entre Syène & Alexandrie, qu’il falloit
prendre pour terme de comparaifon, mais-la diflance de l’ équateur à Thule, ou celle du
cap Sacrum de Plberie à l’embouchure du Gange, en eonfidérant cette dernière comme
prife fur une carte" à projection plate.
Il nous femble, continue l ’auteur, que ces rapprochemerts démontrent que Pythéas avoit
découvert d anciens mémoires ou recueilli d’anciennes traditions qu’il aura défigurées pour
faire meconnoitre leur origine, mais qui ne pou voient être que la contre-partie de ceux qui
avoient fourni a Eratofthènes les connoiffances exactes qu’il a altérées ; & comme elles
ne pouvoient être dans ces deux auteurs lesréfultats d’aucune combinaifon , puifqu’elles
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font indépendantes les unes des autres & de toutes les données intermédiaires, il faut
croire qu’elles ont appartenu à une fcience acquife par les obfervations, & dont les débris
ont été féparés par des circonftances inconnues jufqu’aujourd’hui ; ce qui nous perfuade
que, dans des temps très-reculés,, la Géographie de l'ancien continent a été à peu près aufli
avancée que celle. que nous poffédons maintenant.
, Hypparque.
Hypparque, qui vint après Eratofthènes, conçut que la Géographie rie pouvoit faire
de progrès qu’autant qu’elle feroit foumife aux obfervations aftronomiques. Mais les ob-
fervateurs & le talent d’obferver étoient trop rares dans le fiècle où il vivoit, pour qu’il
pût efpérer quelles fe multipliaffent rapidement. Ce fu t , fans doute pour les faciliter, qu’il
calcula & marqua les différentes apparences célefles par chaque degré du méridien de Rhodes,
depuis l’équateur jufqu’àu pôle feptentrional. Il embraffqit, dit Pline, les éphémérides
propres à chaque nation, les jours, les heures, le fite refpeflif de chaque lieu , Si les divers
afpeâs du ciel, relativement aux divers peuples. Strabon nous aconfervé une partie de ces
tables: nous penfons que celles qui font rapportées dans Pline pourroient aufli lui appartenir:
il n’en cite pas l’auteur, mais il, dit qu’elles font l ’ouvrage des Grecs ; & nous ne voyons
qu’Hypparque à qui on puiffe en attribuer au moins l’origine.
Cet ouvrage, entre les mains des voyageurs, devoit en effet produire des obfervations
fur les latitudes. Ptolémée nous apprend qu’Hypparque fe procura aufli quelques obfervations
d’éclipfes de lune au moyen defquelles il conclut les longitudes de plufieurs villes. Mais
jl paroît qu’il retira peu de fruit de ces foins; ca r ,, dans la. difcuflîon qu’il entreprit dps,
ouvrages d’Eratofthènes, il ne fit guères qu’y ajouter des erreurs ou bien en fubftituer à
celles qu’il combattoit.
Il foutenoit, par exemple, que l’Océan, qui environne la terre, ne formoit pas une feule
mer; qu’il étoit partagé par de grands ifthmes qui le divifoient en plufieurs baflins particuliers;
que l Indus, à fa fortie des montagnes, couloit au fud-eft & que fon cours formoit, avec le
méridien de fes fourees, un angle de 45 degrés.,
Le plus grand changement qu’Hypparque propofa de faire dans les cartes d’Eratofthènes,
fut d’élever , au nord du parallèle de Rhodes, la chaîne du mont Taurus à mefure qu’elle
nvançoit vers l’e ft , de manière qu’en approchant de la mer orientale , elle devoit fe
trouver à 30,000 ftades au-deffus du parallèle de Méroé. Ainfi dans fon opinion, ces
montagnes fe feroient élevees jufqu’au foixantième degré de latitude,, qui eft celle de la
Sibérie, & bien au-delà, par conféquent, du grand plateau d e . l’Afie & de la demeure
des Scythes. Il avoit puifé cette erreur, dans les ouvrages de Mégafthènes & de Déci-
machus q u i, par leurs fauffes combinaifons, reculoient la chaîne du Taurus beaucoup
plus au nord qu’elle ne devoit-l’être.
Hypparque, -fuivant Strabon , admettait, comme Eratofthènes , la divifion du grand
cercle de la terre en 36,0 parties qui valoient chacune 700 ftades-, ce qui en donnoit
3.51,000 pour la circonférence duglohe. Cependant, fi l’on en croit Pline, Hypparque
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