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i°. Qné le Tibet fournit de l’or, en allez grande quantité, & que la plupart de fés fleuves-
en châtient. Les Iffedons, dit Ælien, font furnommés M y r im a s , du nom des fourmis, qui.
chez eux gardent les mines d’or ;
2°. Què toutes les montagnes qui entourent les fources de Xlndus & du Gange, renferment
des mines de fer ; & ce fer, félon Thevenot & Kiatib-Tchéléby, eft très-rëcher-
ché dans l’Afxe. Pline en a éteindrait ; il dit que de toutes les efpèces de fer connues, celui
de la Sérique eft le meilleur, & que les Seresle vendent aux étrangers,, ainfi que leurs
étoffes & leurs pelleteries-
Arien parle auffi des fourrures de la Sérique, que l’on tranfportoit, en défendant
XIndus jufqu’à Minnagara , où les navigateurs Grecs & Romains alloient les chercher. Et
Tavernier allure que l’on pourroit tirer beaucoup de pelleteries du Tibet, fi les habitans
avoient plus d’adrelfe qu’ils n’en ont maintenant, pour tuer les martres Si les autres animaux
qui peuplent lès montagnes-
Ces pays produifenf encore du cryliai, du mufc, de la rhubarbe, & fur-tout une laine
précieufe, queBernier & Bogie difent furpaffer en beauté, enfineffe, & en longueur,,
toutes les autres laines.
Il paroît donc fort probable au citoyen Goffelin,. que cette laine étoit la Serica-materies
des anciens. Ils l’apportoient en Europe lorfqu’elle, n’avoit encore reçu qu’une main-
d’oeuvre grolîière ; & les femmes la cordoient-, la filoient de nouveau , & s’en fàifoient
des vêtèmens extrêmement légers. _
A cet égard, l’induftrie des Tibétains n’eft pas plus avancée aujourd’hui, qu’élTe ne
l’étoit au temps de Pline ; ils ne favent pas encore employer leurs belles laines, ce font
les habitans du Cashmir qui la leur achètent, pour la préparer & en faire ces châles., fi
recherchés dans toute l’Afie, en Afrique , & même en Europe. Nous ne connoiflons rien
de plus beau, de plus'parfàit que ces étoffes ; leur extrême fineffe les rend réellement
tranfparentes, comme l’expreflion de Pline l’annonce. Lé haut prix que1 les Orientaux les
paient, celui que les Européens y mettent depuis.quelques années,. explique comment les
femmes romaines ont pu les rechercher autrefois pour leur parure-
Il ne faut pas confondre cependant la Serica-rnateries, avec ce que les Latins appeloient
Sericum. Cette dernière fubftance ne peut être que la foie; elle leur venoit auffi de la Se^-
rique ; mais le Seri-nagar eft trop froid pour en produire, ainfi il faut indiquer un canton
allez proche de cette province pour qu’il ait pu en faire partie , & quelquefois avoir été
confondu avec elle. Il faut que ce canton ait porté le nom. de S érique; or, fi- on retrouve
ce même nom ancien dans un nom moderne ; fi dans celui de fa capitale on retrouve
celui de Sera, & qu’enfin il foit fitué fous-un climat allez chaud pour que lès vers à foie
ayent pu s’y multiplier facilement dans tous les temps , ces conditions exigent que l’on
fe tranfporte dans l’Inde , fur le revers immédiat de la grande chaîne de l’Afie» où quelques
anciens’ont placé la. Sérique.
On convient unanimement, dit Strabon, que le pays fitué au-delà de l’Hypanis, eft
le meilleur de l’Inde, mais on n’en connort rien avec certitude- La diftance & le peu de
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connoiffance des lieux ont fait exagérer, jufqu’au prodige, ce que l’on en a raconté : on
dit que les fourmis y tirent l’or des mines ; que certains animaux, & même des hommes ,
vont des-propriétés extraordinaires ;. que les Seres, par exemple, vivent fi long-temps,.
qu’ils vont au-delà de cent ans-
O n v o it par ce paffitge, que Strabon plaçoit la Sérique à l’orient de !'Hypanis, entre ce
fleuve Si le Gange, dans la partie feptentrionale de l’Inde;, cette pofition-répond préclfé-
ment au midi du. Seri-nagar-
Arrien dit auffi qu’il’ n’a pu fe procurer aucune connoiffance fur- les pays fituésà l’orient
de l’Hyphafs , le même que l'Hypanis de Strabon.
Etienne de Byfance ne fait que citer les Sefes,. pour dire qu’ils font une nation Indienne j
mais voici un fait plus pofitif.
Procope de Céfarée rapporte, que deux Moines venus de lTnde, ayant appris que Tuffi-
nien. eherchoit à. affoiblir la puiffimce des Perfes, & à leur enlever le commerce de fo
foie , que ces peuples fàifoient avec les-Romains-, & dont ils retiraient de grandes fommes:
d’argent, proposèrent à l’Empereur de les envoyer dans une province de l’Inde, nommée
Serinda, où ils avoient déjà féjourné, & s’engagèrent à lui apporter des oeufs de vers à
foie. L’Empereur accepta leurs offres, & les Moines remplirent leurs promeffes.
Il eft parlé des peuples de Serinda dès le temps de Julien. A peine ce prince fiit-il aflïs-
fur'le trône dé Conftantinople, qu’un grand, nombre ’de nations s’emprefsèrent de lui envoyer
des ambaffadeurs pour lui demander la paix. Il en vint des pays les plus éloignés ,,
dit Am mien-Marcellin.
Cette province de Serinda eft très-cormue aujourd’hui dans l’Inde, fous le nom de
Ser-hend ; elle eft fituée au midi, de Seri-nagar , dont elle n’eft féparée que par les montagnes
de Sera-.ick , qui font les Serici-montes des anciens. La province entière eft fituée à!
l’orient de l’ffypliajis, entre ce fleuve & le Gange , comme Strabon l’a indiqué ; de forte1'
qu’il n’y a pas de doute que les Seres de cet auteur ne foient les mêmes que les Serindi de1
Procope & d’Ammien-Marcellin..
La capitale du Ser-hend porte le même nom que la province elle n’eft qu’à environ!
foixante-dix lieues en ligne droite de Seri-nagar ; 8C quoique fa latitude ne foit que d’urr,
degré moins élevée que celle de cette dernière ville ; cependant, comme elle eft défendue1
des vents du nord par les hautes montagnes deSera-lick & de Nagat-cor,. elle jouit, d’une1
température très-chaude & très-propre à élever les vers à foie.
Les noms de Serindi, dé Serinda, & de Ser-hend, font vifiblement des noms compofés..
de celui de Seres , & de celui de Inde ou Hend, comme l’écrivent les Géographes orientaux.
On a défigné par-là les Seres Indiens, la Sérique,.de l’Inde, Serica Indien , comme
écrivent les auteurs du.moyen.âge la ville de Sera.,, fituée dans l’Inde,- par oppofitiom
'à d’autres Seres, à une autre Sérique , & à une autre Sera, placées, hors des limites de-
l’Inde , & que ftfen retrouve dans le Seri-nagar;.
Les nombreufes conquêtes ; les fréquentes émigrations des peuples Scythiques. dans des;
contrées méridionales, de l’Afie , font affez connues. & fuffifenf pour expliquer comment