
e me fuis attaché uniquement à rapporter ce que
nous- en apprenons des écrivains anciens.
3°. Quelques modèrnes rapportent à la première
fortie des Gaulois de leurs pays, quelques
excurfions dont je n’ai pas parle. L’auteur du
Fiorus Gatlicus fait paflèr une colonie de ces
peuples dans l*îlle de la Grande - Bretagne. On
peut répondre d’abord que l’on ignore où il a
puifé l'on affertion. On ne connoît aucun auteur
qui l’autorife. Enfuite, Bertault ne dit pas quel
peuple des Gaules c’étoit. Le même écrivain,
ainfi que d’autres , rapporte encore vers le même
temps une fécondé expédition des Gaulois en
Elpagne. Le fait eft vrai, étant appuyé du témoi- :
gnage de plufieurs anciens. Mais, d’un autre coté ,
on ne convient pas de l’époque, puifqu’il fe trouve
plulieurs graves auteurs modernes qui placent
cette tran {migration au cinquième fiecle de la
république romaine. Les auteurs de la nouvelle
hiftoire du Languedoc paroiffent embraffer ce dernier
fentiment. Au refte , à cette difficulté , qu’il
eft prefque impoffibie de réfoudre ,• il s’en joint
une autre, non moins épineufe. C’eft de fa voir fi
c’étoient des Tedofages, ou bien d’autres peuples
delà Celtique , quipaffèrent en Efpagne. Les anciens
écrivains ne foumiffant aucune lumière ,
puifqu’ils ne parlent que des Celtes en gênerai,
le parti le plus fur, c’eft de -garder un profond
filence là-deffus. Tout ce que l ’on pourroit dire,
ne porteroit que fur de pures conjectures.
4°. Enfin, il y en a qui croient que les Teéto-
fages ont eu part aux expéditions d’Italie. Les
Bénédictins ont très-bien répondu à cette difficulté
dans leurs notes fur l’hifioire du Languedoc. On
peut voir ce quils difent à ce fujet , & en général
dans ces notes on trouvera certains éclair-
ciffemens fort inréreffans & relatifs principalement
à l’objet de cette troifième partie.
1 y .
De l’étendue de la partie de la Celtique pojfédée par
les Teciofagcs avant Ventrée des Romains dans
leurs états.
Il s’agit maintenant de déterminer l’étendue de
cette contrée que les Teâofages occupèrent autrefois
dans la Celtique , avant l’entrée des Romaines
dans leur pays. Pour iatisfaire à cette quef-
tion , je crois qu’il eft à propos de rechercher les
divers cantons qui étoient de leur dépendance. Car,
quoique le territoire de Touloufe fut, pour ainfi
dire, le chef-lieu de ces peuples , il y avoir encore
plufieurs autres territoires qui dépendoient d’eux.
Ptolemée nous en marque la plus grande partie,
quand il dit que les villes d’Iliberis, Rhufcinum,
Tolofa, Ceffero , Carcafo , Bætiræ & Narbon ,
appartenoient aux Teétofages.
MM. Catel & Andoque, dans leur hiftoire du
Languedoc, ainfi que les Bénédictins dans la leur ,
& plufieurs autres modernes, ont embraffé le fentiment
de Ptolemée. On eft d’autant plus auto-
rifé à le fuivre, qu’il n’eft pas contredit par les
anciens écrivains. Strabon , quoi qu’en dife Samfon j
eft peut-être le feul , dont oh puiffe s’appuyer
pèur l’infirmer ; encore ne feroit - ce qu’en partie.
Cet auteur femble attribuer aux Volces Aré-
comiques la ville de Narbonne. Mais, outre que
cela ne peut être vrai, ce nie femble, fuivant la
defeription qu’il donne lui-mème de l’étendue du
pays des Volces Te&ofages, voici la réflexion de
Cellarius à ce fujet : Videtur Strabo Volets Areco-
micis Narbonem tribuere. Horuni , inquii , navale
Narbo dicitur. Sed dum ibidem dicit caput Areco-»
micorum Nemaufum effe , quee , ut ipfe'cenfet, cum
Narbone non conjerenda erat, ilium extra Arccomicos
pofifum effe non obfcurï jubindicavit, quod Ptole-
mesus clariiis adfirmat , in Volcarum TeHofagum
urbibus Narbonem numerans coloniarn.
De plus , quand on lit avec quelque attention
la fuite de l’endroit où Strabon donne aux Aré-
comiques, la ville de Narbonne , on s’apperçoit
facilement que ce géographe n’a pas deffein de
parler des Volces Aretomiques en particulier,
mais - des peuples qu’il qualifie en général Aré-
comiques, & qui, félon lui, poffédoient tous les
pays qui s’étendent jufqu’aux Pyrénées. J’aurai oc-
cafion de citer le paffage dans la fuite.
J’ai dit que les Bénédictins, dans leur hiftoire
du Languedoc, étoient du nombre de ceux qui
ont fuivi le fentiment de Ptolemée, fur l’étendue
du pays poffédé par les Teétofages. Cela eft clair,
en effet , par la defeription qu’ils en donnent.
« Les Volces, difent-ils, étoient divifés enTec-
» tofages & en Arécomiques. Il paroît que ceux-
» là occupoient au midi toute 1a côte , depuis
» Çervera & le promontoire de Vénus en Rouf*
n fillon , jufqu’au cap de Cette & aux confins
» du diocèfe de Montpellier , & qu’ils s’éten-
« doient depuis les Pyrénées jufqu’au nord &.au
j, midi des Cévennes ». M. de Mandajors, de l’académie
des inferiptions & belles-lettres, eft encore
du nombre de ceux qui paroiffent avoir fuivi
la même opinion. En effet, dans une differtation
qui fe trouve dans le huitième, tome des mémoires
j de fa compagnie, il donne aux Volces Te&o-
fages les villes de Narbonne, de Touloufe & de
Béziers. - ' ' ■
Enfin , cela eft conrfirmé par Strabon lorf-
qu’il dit : Cemmenum porro mohtern attingunt, ejufque
auflrinam partem ufque ad promontoria accolant Volcarum
Te&ôfages..........Tc&ofages ad Pyrenam accedunt,
& Jepientiionalem Cemmenorum montium partem
non nihil attingunt.
Cependant, dans ce qui vient d’être dit , 1 é-
tendue de la partie delà Celtique que les Tefto-
fages poffédeient, n’eft marquée que d’une maniéré
générale. Il faut donc entrer dans un certain
détail, pour la déterminer d’une manière particulière
; c’eft-à-dire, qu’il eft uécejTaire de axer
* les
les limites des états de ces peuples. C’eft ce que
je vais tâcher de faire , fans m’écarter des principes
généraux qui ont été pofés , & qui vont
fervir de bafe à ce qui fuit.
i°. Les Tolofates , qui n’étoient diftin^iïes du
refte des Te&ofages que par le premier rang
qu’ils tenoient , occupoient , félon quelques modernes
, tout l’ancien diocèfe de Touloufe. En
conféquence , on leur donne non-feulement les
diocèfes de Pamiers , de Rieux, & c . , mais encore
celui de Lombez au de-là de la Garonne.
Je crois que c’eft trop étendre de ce côté-là les
bornes du pays des Tolofates. En effet, les Bénédictins
q ui, entre autres, ont fuivi ce dernier fen- ;
timent , fe fondent fur ce que le gouvernement
eccléfiaftique s’étant d’abbrd réglé fur le civ il, la
connoiffance de l’étendue des anciens diocèfes doit
fervir de règle pour fixer celle de chaque ancienne
cité , ou peuplé particulier. Adopter ce
principe fans reftriCtion, à moins , comme ajoutent
ces favans, qu'on n’ait des preuves des cliange-
mens .qui peuvent être arrivés , c’eft s’expofer à
prendre, foüvent le faux pour le vrais En voici
des preuves tirées des pays même voifins de celui
des Tolofates.
Perfonne n’ignore que le diocèfe de Condom,
par exemple , fitué dans FAquitaine, le long de la
Garonne , entre ceux de LeCtoure & de Bazas,
fàifoit anciennement partie du diocèfe dAgen.
Suivant l’opinion que je combats , il s’enfuivroit
que toute cette contrée de l’Aquitaine qu’on nomme
aujourd’hui Condomois , appartenoit autrefois aux
Nùriofcroges , peuples de la Celtique. Suivant la
même opinion , les Vafates, qui étoient compris
dans l’Aquitaine, auroient fait partie des Celtes,
puifque le diocèfe de Bazas s’étend dans la Celtique
, au de-là de la Garonne, jufques vers la
Dordogne. Encore , le diocèfe de Bordeaux fe
trouve-t-il également partagé par la Garonne, d’où
il faut conclure^, ou que la partie de ce diocèfe
renfermée dans la Celtique, dépendoit de l’autre
partie qui étoit dans l’Aquitaine , ou, réciproquement,
que celle-ci dépendoit de la première. Et/
pour montrer en peu de mots combien un pareil
principe eft capable d’induire en erreur , félon
Céfar, Strabon, Pomponius Mêla , Arnmien Marcellin
, &c. , dont- les paffages feront cités ci-
après , l’Aquitaine étoit féparée du refte des Gaules
ou de la Celtique , par la Garonne. O r , cela feroit
infoutenable d’après ce qui précède , puifque
la Garonne auroit à peine borné les Aquitains ,
dans la quatrième partie de fon cours. De ces
courtes réflexions, on doit inférer que les moyens
dont les Bénédictins, en particulier , fe font appuyés
pour déterminer les bornes de la province
Narbonnoife & des divers peuples qui la compo-
foient, doivent néceffairement les avoir engagés
dans plufieurs erreurs. On pourra s’eu apperce-
yoir daris ce que je vais dire.
Comme on ne peut donc , ce me femble , fou-
Géographîe ancienne, Tome 111,
t'enlr raifontlablement que le pays des Tolofates
s’étendît au - delà de la Garonne , du moins d’ar
près les raifons dont je viens de montrer les
inconvéniens , il faut voir fi l’on ne pourroit
pas établir, d’après d’autres raifons qui portaflent
fur des fondemens pius foüdes, que ces peuples
étoient bornés du côté de l’Aquitaine par la Garonne.
Pline dit que les Te&ofagcs étoient voifins
des Aquitains , ou limitrophes de la province
d’Aquitaine , Aquitanitz contermini. D’autres, tels
que Strabon , Pomponius Mêla , Céfar 6c Ajumien
Marcellin , rapportent que les habitans dé cette
'dernière contrée étoient renfermés entre la Garonne,
les Pyrénées & l’Océan. La le£hire- de leurs
pafiàges ne fera pas inutile. Strab. fines eorum.
( Aquitan. ) Garunina & Pÿrene , ho s inter habitant.
Pomp. Mêla- à Pyrenteo ad Garumnam Aqui-
tani. Cæf. G allas ab Aquitqnis Garumna flumen. . . .
dividiti Aquitania à Garumna fiumïne ad Pyrentzos
montes , & eatii partem Octant quez ad Hifpaniam
pertinet, fpeclat. A mm. Marcell. & GalUs quidem
qui Celtes, funt , ab Aquitanis Garumna difierminat
flumen.. F. Ces paffages, comme on v o it , mon- ,
trent évidemment que les Aquitains étoient fé-
parés du refte des peuples des Gaules par le fleuvé
de Garonne. D’un autre côté , les Teélofages
n’ont jamais étéveompris, ni" en tout ni en partie,
parmi les habitans de l’Aquitaine. Ils en dévoient
donc être fèparés par les bornes qu’on donne à
c®s derniers., c’eft-à-dir e , par la Garonne , puisqu’ils
étoient limitrophes.
Auffi Bauclrand- marque - 1 - il ce fleuve peur
limites des Te&ofages ; & M. d’An ville- dit :
« Deux peuples , auxquels le nom de Volces étoit
n commun , l’un diftingué par le nom d1 Areco--
» mici, l’autre par.celui de Teélofagcs, occupoient
»■ dans la province Narbonnoife, tout l’intervalle
» qu’il y a du- Rhône à la Garonne ».
Au refte, les Bénédiâins prévoyant fans 'doute
les objections de toute efpèce que l’on ne mai>
queroit pas de faire contre leur fentiment , ont
entrepris de répondre d’avance à celle-ci. « On
» pourroit ne pas convenir, obfervent-ils, que la
» partie de l’ancien Touloufain , qui eft à la gauche
» de la Garonne, dépendît de la Narbonnoife,
» fur ce que les anciens itinéraires qui comptent
» par milles dans toute cette , province , & par
» lieues dans le refte des Gaules, emploient cette
» dernière manière de compter ,. depuis Bour-
» deaux jufqu’à Touloufe inclufivement, comme
» l’on peut voir dans l’itinéraire de |Boiirdeaux à.
» Jérufalem. ( Obfervez que ce qui fuit, confirme
» ce que je viens d’établir.) On peut répondre,,
» continuent-il s , à cette difficulté, en fuppofant
» avec affez de vraifemblance , que, quoique le
» pays des Te&ofages , ou le Touloufain, s’é-
» tendît anciennement des deux côtés de la Ga»
» ronne , il n’y eut cependant d’abord & avant
h le temps dé Céfar, que la partie de ce pays