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jeter clans un lac appelé la Hardia , • à fix milles
de Monpillieri, & dont la courfe détrmflt beaucoup
d’édifices & de maifons dans les villages voifins.
Le lendemain 12 mars, le fleuve enflammé dirigea
fa courfe vers le pays appelé Malpajfo, où
réfidoient huit cens habitans, & dans l’efpace de
vingt heures il fut détruit- La lave prit un nouveau
cours, qui alla renverfer d’autres villages.
Enfuite le mont de Monpillieri fut percé &
détruit, ainfi que toutes les habitations de ce petit
pays.
'■ Le 23 de ce même mois de mars, le fleuve de
feu avoit acquis deux milles pas de largeur à certains
endroits. Il attaqua les habitations du gros village
de Mazzalucia, & il fe fit, ce jour même, un
vafte gouffre , qui jeta des cendres ou des fables,
qui produifirent un mont bicorne, ayant deux
milles de circuit, & cènt cinquante pas d’élévation
perpendiculaire. On a obferve qu’il etoit
formé de pierres jaunes , blanches, noires, grifes,
rouges & vertes.
Le nouveau mont Nicolofi jeta, pendant trois
mois , tant de cendres , qu’il couvrit toutes les
campagnes dans l’étendue de quinze milles. Les
vents en portèrent jufqu’à Mefline & en Calabre ;
& le vent du nord arrivant, tous les pays méridionaux
du côté d’Agoffa, de Lentini, & au-dela,
en furent couverts.
.Tandis qu’à, cette hauteur de Nicolofi ilfe paffoit
tant de chofes extraordinaires par leur violence,
la bouche fupérieure de l’Etna n’avoit rien perdu
de fa tranquillité ordinaire. .
Le 25 mars, à une heure après-midi, toute la
montagne , jufqu’à la pointe la plus élevee, fut
agitée des plus violens tremblemens de terre. Alors
le cratère fupérieurde l’Etna, qui étoit une partie
très-élevée, s’enfonça dans le foyer du volcan,
& n’offrit plus qu’un vafte gouffre de plus d’un
mille d’ouverture, d’où ilfortoit des gerbes énormes
de fumée, de cendres & de pierres. Ce fut à cette
époque que fut jeté, félon l’hiftoire, ce fameux
bloc de lave qui fe voit fur le mont Frumento.
Peu de temps après, le torrent de feu qui cen-
tinuoit toujours, s’acheminoit vers Catane, avec
les redoublemens de bruit, de feux, de cendres
& de pierres enflammées. La variété des accès
caufa, pendant plufieurs mois, divers tremblemens
de terre des plus affreux & des plus multipliés.
La ville étoit menacée de la manière la plus inquiétante
par ce torrent de feu. On oppofa en
vain des obftacles à l’impétuofité de fon cours. La
lave furmonta les murs de la v ille , & entra par
un angle, à la partie méridionale qui avoifine les
Bénédictins, paffant près du Forum, & elle alla
directement au port par-deffus les murs de la villé ;
elle côtoya le couvent de Lindrizzo, & couvrit
tout cet efpace. Cette lave s’étendit enfuite jufqu’à
plus d’un mille au-delà vers le couchant ; & plus on
remonte vers le nord, plus ce torrent de lave a
de largeur. Tous ces feux ceffèrent le n de juin
s 1 c
fnivant. On 'trouve lés relations de ce funefte
événement dans François Monaco, Charles Man-
cino, Vincent Auriez, & dans Thomas Tedefchi.
25’ . Quelques annéçs après cet incendie , un
gouffre de feu, ouvert au mois de décembre 16$2,
fur le fommet du mont, épancha fes laves fur
la colline de Mazzarai
26°. Le 24 mai 1686, fur les dix heures du foir,
une nouvelle éruption éclata au haut de la montagne
, du çôtè de la montagne del Bue. Elle jeta
tant de matières enflammées, qu’elle confuma les
bois , les vignes, les rooiffons dans toute l’éténdue
de quatre lieues. Ce torrent s’arrêta dans la grande
vallée, près du château de Mafcali. Plufieurs
habitans qui voulurent ou voir ce torrent enflammé,
ou faire quelques obfervations fur fon
cours, étoient montés fur une colline, entre les
bois de Catane & les confins de Cirrita. Mais
tout-à-coup cette colline s’écroula, & ils furent
engloutis tout vivans.
270. L’Etna fe tut depuis, & demeura tranquille
pendant la première .moitié de ce fiècle. Mais en
1755 , il fe réveilla de nouveau, & il s’ouvrit
près du mont Lepre, jetant du feu & de la fumée,
félon fon ufage, & il ne refta tranquille que huit
"ans. '
A tant d’éruptions j’ajouterai ce qui s’eft vu de
nos jours.
28°. En 1763 , il y eut une éruption qui dura
deux mois, mais à plufieurs reprifes. L’Etna fit
d’abord entendre fes mugiffemens. On vit fortir
enfuite des flammes & des nuages de fumée qui
paroiffoient tantôt d’argent, & tantôt de pourpre ,
félon que le foleil les frappoit. Enfin, emportés
,par les vents, ils répandirent fur leur paffage une
pluie de feu qui s’étendit au-delà de Catane.
L’éruption éclata bientôt : fon principal torrent fe
divifa en deux bouches /'dont Furie prit fon cours
vers le levant, du côté du bois, & fe précipita
•dans une immenfe & profonde valléel
Cependant les flamihes qui fortoient de ce nouveau
cratère, offroient un fpe&acle magnifique.
C ’étôit une pyramide de foixante-dix coudées de
haut, qui s’élevoit en l’air, femblable au plus beau
feu d’artifice, & accompagnée d’une batterie continuelle
& formidable , qui faifoit trembler la terre
fous les pieds des fpe&ateurs. Des ruiffeaux de
métal fondu qui couloient de la montagne , jetoient
un vif éclat, qui répandoit du jour dans l’obf-
curité de la nuit.
On s’apperçut, au lever du foleil, que la lave
enflammée s’étoit attachée autour de plufieurs
chênes qui étoient encore de bout, & quelle ne
les avoit pas brûlés : elle en avoit grillé toutes les
feuilles. Plufieurs oifeaux y tombèrent, & y furent
confumés. Les domeftiques de plufieurs obfervateurs
y jetèrent du bois qui s’enflamma. Ces lavés gardèrent
de la chaleur & donnèrent de la fumée
pendant deux ans ; & pendant cinq, on ne vit pas
1 de neige fur le fommet du mont Etna.
»9°. En 1764 , il s’ouvrit.une nouvelle bouche
dans un lieu très-diftant dn mont Egilte.
30°. En j 766, il s’en ouvrit une autre fur la
grotte de Paterno. Il en fortit du feu, de la fumée,
& un petit torrent de lave qui ne fut pas confi-
rdérable. . .
31°.'En 1780 , le 27 janvier, il le fit une
bouche à deux milles aü-deffous du cratere fupé-
rieur. Le 28 février & le 24 mars, les tremblemens
de terre recommencèrent du côté du nord , avec
des bruits affreux.
Du 6 avril jufqu’au 7 mai, le volcan reprit fes
fecouffes & fes bruits, & jeta des fables fins &
des pierres ponces.
Le 18 mai, les tremblemens de terre recommencèrent.
Le 23 la.montagne s’ouvrit une bouche aux
flancs du pont, Frumento, au fommet de la montagne
, & jeta ce torrent de lave qui fe répandit
dans la vallée de Landezza. Ce torrent avoit deux
cents pas de large. Il fi? fit deux autres fentes à la
montagne, à l ’endroit des découvertes de Paterno,
très-près l’une de l’autre. Les laves qui fortirent
de ces deux bouches, firent, en -fept jours, plus
de fix milles de chemin ; & le 25 elles étoient à neuf
milles.
Le 25 même , r il s’ouvrit une nouvelle bouche ,
qui jeta fort loin une multitude de pierres enflammées
, pendant i’efpace d’une heure, & un torrent
abondant de lave, qui couvrit deux milles de pays
dans le même efpace de temps.
On remarqua que plufieurs parties de ces torrens
de lave, refroidies à leur fuperficie & devenues des
maffes folides, furent fondues & renverfées par
un nouveau flot de lave brûlante, quoique ce
nouveau flot ne fondît pas l’ancienne lave. ( Extrait
d'une lettre imprimée à Païenne, par Michel Picciotto ).
On fent bien que je n’ai nommé ici que les principales
montagnes de cette île ; j’aurai occafion de
faire eonnoître les autres dans le cours de cette
defeription.
Fleuves. Entre les fleuves de la Sicile, que je
ferai eonnoître, en décrivant fucceflîvement les
côtes,
Les principaux fleuves étoient,
i° . Sur la côte orientale:
Le Simathus, qui prénoit fa fource dans les montagnes.
de l’intérieur de l’île , à l’oueft de l’Etna,
au fud de la ville appelée Engyum, couloit vers
le fud-eft , recevoit à la gauche le Chryfas ( 1 ) ,
qui prenoit fa fource à-peu-près au même lieu. Il
le rendoit à la mer, près & au nord àe-Murgentium.
On trouve à l’embouchure de ce fleuve de gros
morceaux d’ambre» i
i B lû ^ur *a ca.rte inférée dans la géographie de Cel-
B f c , ’. on, a raù.le Chryfas à la droite du Simotthus j
fleuve^cieSn3phie moderne dément cette pofition du
Le Mêla, au fud du précédent,: couloit dans une
direction plus droite de l’ouefl: à l’eft. Il avoit fa
fource dans les montagnes, qui étoient affez loin
au nord de Gèles.
20. Sur la côte méridionale
UHimera, qui avoit fa fource au mont Artejînus ,
aux environs d'Enna. Ce fleuve fe rendoit à la
mer près de Phintia.
L’Hÿpfa, qui, venant de l’intérieur de l’île, fe
rendoit à la mer près & à l’eft dé Selinus.
Les fleuves de la partie feptentrionale étoient
moins confidérables.
Defeription des lieux, &c.
Pour mettre plus d’exaétitude - dans cette defeription
, en partant du promontoire Pelorum, je
delcendrai du nord au fud, je parlerai des lieux
que je trouverai fur la route; puis, m’arrêtant à
chaque fleuve, je prendrai occafion de les nommer,
& de pénétrer, en les remontant, jufqu’à leur
fource. Ce fera, ce me femble, un moyen de
mettre un peu plus de méthode pour la defeription
de l’intérieur du pays.
Pelorum promontorium (cap Paffaro). Ce promontoire
termine au nord le fameux détroit de
Mefline. Il eft formé par l’extrémité de la montagne
appelée par les anciens mons Miconius. Ils
nous y ont fait eonnoître un temple de Neptune.
Mais on peut préfumer qu’il y avoit quelque bourg
ou village dont fils ne nous ont pas donné con-
noiffance. M. Hoüel y a trouvé des reftes de
différens édifices, entre autres ceux d’un aqueduc.-
Mejfana ( Mefline), à l’eft, fur le détroit de fon
nom, avoit d’abord porté le nom de Zanele , écrit
de même en^latin , & ^n grec Sa.yK\if. Thucydide
nous apprend que ce premier nom lui avoit été
donné à caufe de fa forme, qui étoit celle d’une
faulx, appelée garnie chez les Siciliens. On fait que
des Mefféniens lui donnèrent depuis leur nom.
( Foye{ Mess an a ) .
La côte qui commence au fud, à caufe des
débris des vaiffeaux péris daus le gouffre ou fur
les rochers de Charybde, étoit nommée Copria.
La route s’avànçoit au fud, entre le bord de
la mer & le mont Chalcidique ( Chalcidis mons).
Ce fut là que les Romains, l’an 265 avant J .C .,
gagnèrent une bataille fur Hiéron II.
Le mont Petorias, au fud, en s’avançant un peu
à l’eft, formoit le promontoire nommé Argennum*
On conjeâure que c’eft celui que Ptolemèe nomme
Drepanum.
À l’embouchure d’un petit fleuve appelé Chry-
forhoas ( nom donné par les anciens, à bien des
fleuves ) : on voyoit un petit lieu nomme Tama-
ritium.
Taurominium ( Taormina), étoit plus au fud.
Uné v ille, appelée Naxos, & bâtie par des Chal-
cidiens, 720 ans avant l’ère vulgaire, ayant été
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