
chure du Boryfthène , & dans le périple de l’Anon
ym e , on lit que cette ville eft bâtie dans le
confluent de YHypanis & du Boryllhene j à 240
ftades de la mer. Le fleuve que nous appelons
aujourd’hui le Bog, fe jette dans le «Boryftbène,
à une très - petite diflance de fon embouchure.
Si le Bog était YHypanis, comment pourroit-on
retrouver les'240 flades qu’il doit y avoir de
l’embouchure du Boryflhène à la ville d'Olbia,
laquelle doit fe trouver au confluent de ces deux
fleuves? D ’ailleurs, où fera YAxiacc? Tous les
auteurs conviennent que ce fleuve doit etre entre
le Tyras & YHypanis, comme on Ta vu par les
paliages que j’ai cités ; ce doit aulîi etre un
grand fleuve, puifque Ptolemée nous dit qu’il
parcourt la Sarmatie, un peùau-deflùs de la Dacie ;
il doit enfin, fuivant Mêla , féparer les Callipides
des Axiaces. O r , je me fuis convaincu par mes
propres y eu x , que depuis le Bog, que l’on prend
mal-à-propos pour YHypanis, jufques au Dnicfter
ou le Tyras, il n'y a que des petits ruiffeaux , qui
ne méritent pas même le nom de rivières. \ l Axiacc
ne peut donc pas fe trouver entre le Tyras &
YHypanis, puifque ce doit être un grand fleuve
qui parcourt la Sarmatie, & non pas un petit
ruilfeau. D’ailleurs C le fleuve fe trouvoit dans le
lieu où on l’a placé, il ne fépareroit plus, les
Axiaces des Callipides, qui étoient au - delà de
YHypanis. Ainfi, dans l’hypothèfe que YHypanis
foit le Bog, il eft impofflble de retrouver YAxiacc.
Voici donc le fyftême que j’ai imaginé pour
pouvoir accorder tous ces divers auteurs, 11 faut
nécefîàirement fuppofer que le Bog eft YAxiacc des
anciens. Les Turcs, en effet, le nomment Akfou,
qui n’eft autre chofe que le nom d'Axiacc, dont
ils ont fait, fuivant leur coutume ordinaire, le nom
flgnificatif Akfou, qui fignifie eau blanche. Cette
hypothèfe arrange tout. Alors YAxiacc fe trouve
être un grand fleuve parcourant la Sarmatie, comme
le veut Ptolemée ; il fépare alors les Callipides,
qui fe trouvent au nord de ce fleuve, des Axiaces,
qui font au midi, & qui prennent fon nom.
VHypanis devient Ylngulaç , qui fe jette dans le
Boryflhène, à-peu-près à l’éloignement de 240
flades de fon embouchure, indiqué dans le périple
de l’Anonyme ; & ce nouvel Hypanis inclut alors,
comme dit Mêla, les Callipides , qui fe trouvent
dans l’intervalle que çe fleuve fait avec le Bog,
& les fépare dés Boryjlhcnitcs, qui font dans
l’angle oppofé que celui-ci forme avec le Boryflhène.
Le golfe Beregen devient le Sinus Sagaricus , Se fe
trouve dans la véritable place qui lui eft pflignée.
La rivière de Beretyn, qui eft au fond de ce golfe ,
eft le Sagaris ; le Safik-Bcrepn eft le Rhodus ; 8e
le Lycus & le Pcnius d’O vide, font les deux
petites rivières de Ddigheul 8e d'Atchily. |
• B me refte à retrouver les trois villes d'Axiacc,
à'Odeffus & d’Olhiopolis. Etant à Ok^akow , à la
•fin de l’année 1758, j’appris qu’il y avoit environ
q 60 (Billes vers le (tord «ne ancienne ville ruinée,
que les Cofaques appellent C\arna. On me dîé
aufli que l’on avoit découvert les débris d’une
autre ville ancienne à une très - petite diflance
iïOkçakow, vers la rivière Bereçen, & que les
Turcs s’étoient fervi des pierres & des marbres
qu’on en avoit tirés, pour réparer les murs d’0&-
T^akow, que les Ruffes avoient fort endommagés,
lorfqu’ils prirent cette place dans la dernière guerre.
On m’affura que M. Venture de Paradis, conful
auprès du khan des Tartares, & l’un de mes pré-
déceffeurs, avoit envoyé alors des gens fur les
lieux, & avoit enlevé plufieurs inferiptions grecques
, qui ne font jamais venues à ma connoiffance.
Cette dernière ville nouvellement découverte, pour-
roit bien être la ville d'Axiaca dont parle Mele-
tius, perdue depuis long-temps, & dont les Ruffes
ont véritablement tiré le nom ftOk^akow, qu’ils
ont transféré à la ville exilante aujourd’hui. Alors
Okqzkmv d’aujourd’hui, que bien de gens ont pris
pour l’ancienne Olbia'ou Olbiopolis, fera Pancienné
OdcJJus 9 dont lgs Turcs ont corrompu le nom .,
& en ont fait Odou. Enfin Olbiopolis trouvera naturellement
fa place, foit dans le confluent de
YInguletç & du Boryflhène, où eft aujourd’hui
Kaçikirman, foit dans le lieu où fe trouve la ville
ruinée de Cçarna, & en toutes manières elle fera
chez les Boryfihenitts, auxquels elle doit appartenir,
puifque ces peuples avoient tiré leur nom de celui
de Boryjlhenis , qu’elle portoit autrefois. Cette ville
(FOlbiopolis étoit une colonie des Miléfiens, &
elle a été aufli appelée Miletopolis.
Si mon fyftême n’eft pas vrai, il me paroît au
moins le plus vraifemblable, & j’ofe le foumettre
au jugement des favans. Au refte, ce que je viens
de dire regarde la géographie la plus ancienne ;
dans celle du moyen âge on voit les pays occupé*
d’abord par les Turcs hongrois, enfuite par le*
Patzinacites, & enfin par les Cofaques & lei
Tartares.
Sur Us peuples qui ont habité ces contrées dans
Vantiquité & dans le moyen âge.
Plufieurs de ces peuples qui ont inondé les parties
orientales de l’Europe, n’ont pas été connus de
l’antiquité & ne font pas plus connus aujourd’hui.
Leurs incurfions forment un intermédiaire entre
l’ancienne & la nouvelle géographie. J’ai parlé de
la plupart à leurs articles particuliers ; mais trouvant,
au moyen de l’ouvrage de Peyftonel, à
donner un enfemble qui aide à lier ce que j’ai
dit de chacun d’eux, je vais le préfenter, en
parlant féparément des peuples appelés Barbares
par les Grecs, dont les uns vinrent du nord,
les autres de Y qucJ I , d’autres de Yejl,
Première incurfion des Scythes für les rives occidentalek
du Pont-Eux in dans les temps Us plus reculés.
Les Argonautes étant venus dans le royaume
de Colchide, aujourd’hui la Géorgie turque, pour
t
y chercher la toifon d’o r , donnèrent Heu à ta
première tranfinigration des Scythes fur les rives
Occidentales du Pont-Euxin. Médée devenue amou-
reufe de Jafon , chef de cette expédition célèbre ,
le mit en poffeffion de la toifon & s’enfuit avec
lui. Aéthès, fon père , roi de Cholehos, la pour-
fuivit pendant long-temps, & Médée, pour l’arrêter,
mit en pièces fon frère Abfyrte, oc difperfa fes
membres fur la route. Ovide a décrit très-élégamment
cette tragique aventure dans fes Triftes;
il prétend même que le nom de T omis, To/xis,
ville ft célèbre par l’exil de ce poète, & qui a
été long-temps métropole de la Scythie Pontique ,
tire fon étymologie du mot grec Topoc ", qui
fignifie ce qui eft coupé.
Inde T omis diElus locus hic, quia fertur in illo
Membra Cor or fratris con/écuijfe fui.
Ovid. lib. m , T . E. 9.
Quelques auteurs aflurent qu’Abfyrte, appelé
(Egide par Diodore de Sicile, ne fut point mis à
mort par Médée fa foeur, mais qu’il pourfuivit
fa route le- long du Danube , & s’arrêta dans les
îles de i’Illyrium, qu’on appeloit d’abord Phiy-
ceides, enfuite Abfyrtides, & qui font aujourd hui
les îles- de Cherjo , d’Olcro , de Veglia & de Pago.
Pline n’adopte pas cependant cette opinion , & parle
dans fon troifième livre du fleuve Abfyrres de la
Colchide, qui_ fut formé par le fang du malheureux
Abfyrte maffacré par Médée fa foeur.
Rudsbekius s’eft rendu célèbre par le favant
roman qu’il a donné au public, pour établir fon
paradoxe de l’île Atlantique. Il la confond avec
la Suède fa patrie , & y tranfporte la plupart
des événemens des fiècles fabuleux ; il prétend
fur-tout que les Argonautes, après leur expédition
en- Colchide, étoient montés vers le nord,
& fuivant le cours de quelques-uns des fleuves
etni -fe jettent dans la mer Glaciale , avoient pénétré
dans l’Océan par le détroit de Weigath, &
s’étoiçnt rèpatriés en rentrant dans la Méditerranée
par celui fie Gibraltar. Quoi' qu’il en foit de ce
fyftême, fi l’on en croit le témoignage de Juftin,
les Argonautes,' après l’enlèvement de la toifon
& de Médée, furent pourfuivis par les Scythes de
la Colchide jufques fur les bords, occidentaux du
Pont-Euxin, où quelques-uns s’établirent. Ils peuvent
être regardés comme les premiers colons de
la Scythie Pontique, & du pays des Gètes & des
DaceS, connus dans les premiers temps fous le
nom d’ IJlriens ou habitai!s des bords du Danube.
Le même auteur ajoute que ceux des Scythes
de la Colchide qui s’obftinèrent à la pourfuite des
Argonautes , remontèrent le Danube & la Save,
& portant enfin leurs bateaux fur leurs épaules,
traversent les terres jufqu’à, Acjuilée, où n’ayant
point trouvé les Argonautes, & honteux de rè-
tourner dans leur pays fans avoir exécuté leur
coiumiflion , ils s’arrêtèrent dans cette contrée ,
Géographie ancienne. Tome III,
1 qui, depuis ce temps, a été appelée Ifirie , du nom de
! ces nouveaux peuples venus des rivages/de Yljler ou
du Danube ; ils y fondèrent une république,
refpublica Polenfis, ou ' là république des Exilés ;
le mot polo, ayant dans la langue feythe cette figni-
fication, Spon , qui dans fon fécond livre rapporre
ce fait, d’après le poète Cailimaque, parle d’une
infeription qu’il remarqua dans cette v ille , dépendante
de Venife, fur le piédeftal d’une ftatue
de l’empereur Sévère ; elle y eft appelée refpublica
Polenfis. Elle fut aufli, fuivant le rapport de Pline,
colonie romaine fous le nom de Pietas Julia: cette
ville a donné le nom au golfe de Pola , Sinus
Polaticus, & au promontoire appelé promontorium
Polaticum.
Des barbares Orientaux fous Us Pcrfes 6» les
Macédoniens.
Sous le règne de Cyaxare, roi de Perfe, 635
avant J. C . , des Scythes, fortis des environs du
Palus Mceotides, après avoir chafîe les Cimmé-
riens , s’avancèrent dans la Médie, y battirent
l'armée de ce prince, fe répandirent de - là dans
l’Afie & jufqu’en Egypte, Sç biffèrent une colonio
dans la ville de Bethfan, de la tribu de Manaffé ;
elle fut appelée de leur, nom Scythopolis : Jofephe
la nomme Antiqua Scytopolis. C ’eft dans cette ville
que les Philiftins fufpendirent le corps de Saül,
comme on le voit dans le chapitre treizième du
premier livre des rois.
Environ 5 20 ans avant J. C ., Darius, premier
roi de Perfe , ayant formé le deffein de châtier les
Scythes de l’incurfton que leurs pères avoient faite
dans la Médie, vo .lut porter la guerre dans leur
pays ; il groflit fon armée des fecours des Ioniens
| & de plufteurs autres nations grecques qui habi-
! toient les côtes de l’Afie mineure; il paffa fur
un pont de bateaux le Bofphôre de Thrace, &
s’avança fur les bords du Danube, qu’il traverfa
de la même manière. Les Scythes évitèrent d’engager
une aftion ; & fuivant la méthode pratiquée
encore par les Tartares d’aujourd’hui, ils fe contentèrent
de reculer à mefure que les Perfes avançoient,
& de les attirer ainft le plus avant qu’il leur fut
poftible, ayant foin de boucher les puits & les
fontaines dans tous les endroits où leurs ennemis
dévoient paffer : de forte que l’armée de Darius
courut rifque d’être entièrement anéantie, & de
périr miférablement dans ces déferts. Ce prince fe
vit forcé de renoncer à cette entreprife, & s’eftima
heureux de pouvoir paffer le Danube, & ramener
fes troupes en Afie. Après la retraite, des Perfes,
les Scythes paffèrent eux - mêmes ce fleuve , &
ravagèrent la Thrace.
Cette incurfion des Perfes & des Grecs dans
la Scythie, peut avoir donné origine à quelques
colonies que ces derniers fondèrent fur les rives
occidentales du Pont-Euxin. O vide, dans fes Triftes,
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