
6 °. Mais fur - tout il eût vu qu’il ne devoit pas tenir coitlpfe darfs fo'Ute cètfé carte
de la diminution qu’éprouyoit le parallèle à la hauteur. du 3.6e. degré de latitude.
Le fond d’exaélitude de cette carte d’Eratofthènes, contrafte trop avec l’ufage qu’il
e'i ht , pour que les connoiflances que ce travail fuppofe, puffent appartenir à fon fiècle ,
ni à lui-meme. D ’abord, dans l’erreur qu’on lui voit faire de la longueur du continent
comparée à la circonférence du parallèle de Rhodes ;.en fécond- lieu, parce qu’aucun des
peuples qui exiftoient alors ne poffédoit affez de Géographie aftronomique, pour avoir
pu déterminer, avec tant cl’exaûitude, les diftances indiquées fur fa carte, Car fi l’on compare
■ ces travaux géographiques "avec' ceux des Géographes françois du dernier fiècle ,
on. verra que ceux-ci étoient bien loin d’avoir: fur la longueur de la Méditerranée.&
fur la - diftance -du - Gange , des notions qui approchaffent de la jufteffe- de celles qui
lë trouvent dans là-carte qu’Ératofthènes copioit, quoique ces efpaces euffent été parcourus
fans relâche pendant plus de 1900 ans depuis l’époque de la publication de cette carte.
Nicolas Samfon, en 1 6 5 1 , & Guillaume Samfon, en 1668, comptoient encore du cap
Sacrum à Ijfus 60° d’intervalle ; ce qui donnoit à la Méditerranée , une étendue de
près d’un tiers de plus quelle n’a réellement. Ils plaçoient auflî l’embouchure du Gange
à 1 2 50 du cap Sacrum, & c’étoit 250. de trop vers l’orient, lefquels donnoient plus, de
600 lieues d’erreur, à 1 ouverture du compas; tandis que dans la carte d’Eratofthènes qui
le trouve reflifiée dans l’ouvrage que j’analyfe , l’erreur n’eft que de, 1 4 lieues, provenant
vraifeinblablement de ce que cet ancien, ou d’autres avant lu i , avoient négligé quelques
fractions, afin de fixer - la fomme des diftances en nombres ronds.
Ou fait très-bien aâ'uellement combien il eft nécéffairë dlayoir, pour fixer les longitudes ;
des obfervations correlpôndantes de quelques phénomènes céleftes, tels qu’une éclipfe de
feleil , ou de fatelhtes , pour croire qu’aucun des anciens peuples dont nous avons j’hiftoirë
ayent pu s’en occuper. Et même malgré les progrès de l ’aftronomie , la découverte des
fatellites de quelques planètes & la perfection des inftrumens, nous n’avons encore qu’un
allez petit nombre de lieux déterminés avec une exactitude rigoureufe : à plus forte raifon
les peuples de l’antiquité venus-à. notre connoiffance n’ont-ils pu nous égaler dans ce genre
de' travail. * -
Pour s’en alîiirer il fuffira , dit le. C. Goffelin , de jeter un coup d ’ceil fur les principales
nations qui occupoient alors les bords de la Méditerranée. ,
Les Phéniciens, il eft v r a i , avoient pu parcourir cette mer;, mais il.eft certain qu’ils
n’ont; jàmais fu de Géographie 'aftronomique , S e que, deux fiècles après Eratofthènes ,
ils n’avoient encore que des principes fort erronés fur cette fcience ; car il eft facile d’en
juger par les erreurs que Ptolémée relève dans les. oüvrages Sc dans les cartes que Martin
de T y r avoit compofés.
On fait que les E g yptien sa v an t l’invalion de Cambyfe,, fortoient peu. de leur pays ,
Se que, depuis cette époque-, jufqu’à l’arrivée d’Alexandre, ijs n’ont fait que perdre ,lès
connoiflances qu’ils avoient pu .recueillir. ;
Les Romains occupés à foumettre l’Italie, n’ont commencé à conftruire des flottes que
' pour la première guerre punique , qui précéda de peu d’années le. tëmpS oit .écrivoit
Eratofthènes ; ainfi ils ne pouvoient par eux-mêmes avoir aucune notion fur l’étendue
de' la Méditerranée.
Les Carthaginois n’étoient pas plus habiles que les Tyriens, à en juger par le Périple
qui nous refte de l’expédition d’Hannon. On y voit que cette nation commerçante
n’êmployoit pas les obfervations aftronomiques dans fes voyages; d’ailleurs, fi Eratofthènes
avoit puifé chez eux quelques connoiflances, il eft probable «qu’il n’auroit pas mis
ginois n’avoient aucune notion exaûe même fur les pays qui avoifinoient le leur.
Parmi les Grecs, fi l’on excepte Pythéas, dont on parlera bientôt, on n’en voit aucun
qui fe foit occupé de Géographie aftronomique , avant la fondation de l’école d’Alexandrie.
Les defcriptions de la terre les plus amples qu’ils euffent faites jufqu’alors , n’étoient -que
des récits vagues fur la difpofition Sc l’étendue des différentes contrées , Semblables à
celui qu’Hérodote ( Hcr. Melp. Lib. IV , § . 4 0 , 45 ) lifoit aux jeux olympiques de l’an
456 avant J..C. On y trouve le réfultat des recherches qu’il avait faites dans fes voyages
à T y r , en Égypte, dans l’Afie mineure , où il venoit de confulter les peuples qui avoient
envoyé des colonies jufqu’aux extrémités de l’Europe. On doit croire qu’Hérodote préfèntoit
à la Grèce affemblée le corps de Géographie, le plus complet Sc le plus exacte qu’il eût
encore v u , & fon ouvrage nous femble fixer , à cet égard, l’état des connoiflances de fon
fiècle. Cependant on n’y découvre aucun principe, aucun élément qui annonce la plus
légère idée d’une obfervation même fur les. latitudes, Sc qui puiffe aider à deviner comment
il concevoir-l’arrangement des différentes parties du globe.
Hérodote fait même une erreur étrangè en aflurant, comme uüechofe très-connue
alors , que l’Europe feule étoit plus longue que l’Afie Sc l’Afrique prifes enfembîe.
Une'pareille aflertion , née SC foutenue au milieu des nations qui naviguent le plus, fait
affez ' Voir qu’elles n’âvoient encore aucune..efpèce de notion fur la diftance que leurs
vaiffeaux dévoient parcourir pour arriver à Gadès, Se qu’elles y alloient, à-peu-près,
.comme-otf ,va à la.recherche d’un pays dont on ne fait.que foupçonner l’exiftence.
Dans la fuite , les-Grecs parvinrent à raflèmbler quelques Itinéraires fèmblablesà celui
de, la' marcho d’Alexandre qui n’avoit à fa fuite perfonne qui fût, capable dè..faire une
obfervation tant foit peu exaûe. Ils eurent aufli des périples dans le genre de celui de
Sylax, où lés diftances le long, des fcôfes étoient eftimées tantôt en ftades, tantôt en
journées de. navigation- Mais on conçoit combien ces Méthodes étoient infuffifimtes pour
faire connoître la lituatien des pays & pour en fixer le s , limites correspondantes, aux
cercles de la fphère.
Ces détails rapides doivent fuflire, Continue notre auteur, pour démontrer qu’aucun
des peuples qui naviguoient fur la Méditerranée -, n’étoient en état de: fournir des connoif-
fances précifes fur. fon étcnduef Chacun d’eux pris féparément poùyoit bien connoître
quelques parties ides riyageside cette mer : mais fon enfembîe leur étoit auflî impoffible
à faifir, qu’il l’étolt pour;,npiis; dans; le, dernier fiècle., avant; que .nos aftronomés fuffent