
PHYSIOLOGIE 710 ET PATHOLOGIE.
Pour compléter les effets résultans des altérations
matérielles des hémisphères cérébraux, nous
devons dire un mot du trouble qui se remarque
quelquefois dans la manifestation de l’intelligence.
Tantôt il y a perversion de l’intelligence par la
lésion d’un seul hémisphère cérébral, tantôt cette
lésion unilobaire est sans effet sur les facultés intellectuelles.
C’est sur-tout lorsque l'altération est
bornée, que cette intégrité de l’intelligence a été
observée ; et c’est aussi pour en donner l’explication
, que l’on a imaginé qu’un hémisphère suppléait
à l’autre, ou mieux encore qu’on ne pensait
que par un seul hémisphère, comme on ne voyait
que d’un oeil, qu’on n’entendait que d’une oreille.
Cette manière d’expliquer l’unité de l’être sentant,
au milieu de la duplicité des organes des sensations
, ne mérite pas une réfutation sérieuse :
c’est le dernier terme de l’abus d’une supposition
de Locke.
L’action simultanée des deux hémisphères
semble mieux prouvée, daus les cas où la perversion
de l’intelligence est perçue par le malade
même : tel est celui où un seul hémisphère étant
profondément affecté, le malade comprend les
questions qu’on lui adresse, médite sa réponse,
e t , lorsqu’il veut l’exprimer, parle tout différemment
qu’il n’a pensé, profèredes mots, des phrases
et des réponses qui ne sont ni les réponses, ni les
phrases, ni les mots qu’il avait intention de proférer.
Le malade qui s’aperçoit de cette incohé-
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rence, s’interrompt, se reprend , recommence
et ne parvient jamais à exprimer sa pensée. 11 faut
avoir été témoin du combat intérieur que se livre
le malade, pour concevoir ce déplorable état. 11
semble, dans ces cas, que l’action des deux hémisphères
est désunie ; que l’hémisphère sain pense,
perçoit, réfléchit, et que l’hémisphère malade exprime.
L’âme se juge elle-même.
Tels sont encore les cas d’altération unilobaire ,
dans lesquels les malades ne peuvent proférer
qu’une seule phrase , toujours la même. Ih ! ..La.
Not... Seigneur !... répondait toujours une femme
à toutes les questions : elle exprimait nettement
ces mots à la suite les uns des autres ; mais s i,
on voulait les lui faire prononcer isolément, si
par exemple, on lui disait de commencer par Seigneurj
elle faisait des efforts inouis sans y parvenir,
etenfin après un instantelle proférait sa phrase
dix ou douze fois de suite, comme par une espèce
d’explosion. Tel était encore un ancien jardinier,
qui prononçait avec Une volubilité que pas un de
nous ne pouvait égaler, Bè Bé Ré... A .. O....
Telle est encore une jeune femme qui vient une
ou deux fois l’an dans ma division, et dont tout le
vocabulaire est renfermé dans te s mots : eh bien !
pas toujours comme ça !... Nous avons inutilement
fait tous nos efforts pour lui faire proférer isolément
bien!.... toujours.... pas.... ça... comme,...
cette association de mots paraît irrésistible chez
cette femme hémiplégique, dont la douceur et