54a U L I.
en bouchant avec du plâtre, avec de l'onguent de
Saint-Fiacre ou autrement, l'ouverture par où entre
l'eau des pluies.
L'altération du bois des arbres par les Ulcères
eft plus ou moins rapide félon fon âge j les plus
vieux font plus tôt creufés > félon l’efpèce, le peuplier
eft plus tôt creufé que le chêne j félon les
lieux , ceux en terrain humide font plus tôt creufés
que ceux en terrain fec.
Jamais un arbre altéré par un Ulcère ne peut fe
rétablir dans fon intégrité première.
M. Boucher, auquel on doit de très-bonnes
ohfervations fur les Ulcères des arbres, a reconnu
qu'ils ne s'ouvroient jamais au nord.
Vauquelin a fait l'analyfe de l'humeur d'un Ulcère
d'orme, arbre qui y eft fort fujet, à raifon
de l'élagage inconfidéré qu’on lui fait fupporter
prefque partout, & il a trouvé qu'elle Gontenoit
fur iooo parties :
Carbonate & fulfate de potaffe...... 0,340
—— de chaux............................. 0,051
----de magnéfie................. 0,004
Eau............... 0,605
1,000
(Bo$c.)
ULET : arbre de l’Inde, qui fe trouve dans
les mêmes cas que I'Ulassi.
ULIGINEUX ( Terrain ). Tout terrain creux
ou en plaine, quelle que foit fa nature, où l’eau
féjourne conftamment, eft un marais, que cette
eau provienne directement des pluies, qu'elle
provienne de l'écoulement d'une ou plufieurs
fontaines, des infiltrations ou des débordemens
d'une rivière, d'un ruiffeau , d’un étang, &c.
Tout terrain en pente & inférieur à des fommets
fufceptibles de biffer facilement infiltrer les eaux
«les pluies , eft toujours marécageux ou mieux uli-
gîneux (1), lorsqu'il eft formé d'un banc de marne
très-argileufe, furmonté d’une couche de terre
tourbeufe, qu’on prend pour de la terre végétale,
au plus d'un pied d’épaiffeur, terme moyen,
& lorfque l’eau qui le rend marécageux eft celle
de la pluie tombée fur les fommets, & arrêtée
par le banc de marne argileufe, laquelle s'épanche
par 'filets imperceptibles & très-nombreux, de
forte que la totalité de la couche fupérieure en eft
à peu près également imbibée.
Cette eau eft toujours un peu coulante, &,
comme celle des véritables tourbières, elle ne
gèle que dans les hivers les plus rudes > fes émanations
font peu dangereufes, car ce n’eft que
dans les. jours les plus chauds qu'elles font fen-
fibles à l’odorat.
Les terrains uligineux offrent quelquefois ou
(1) J ’ai dû employer ce m o t , emprunté du latin & très-
connu des botanilies, pour accoutumer les agriculteurs à
mettre de la différence entre ces deux fortes .de .terrains marécageux.
U L I
des fources, & par fuite des ruiffeaux, dans les
dépreflions parallèles à leur pente, mais ces fources
ne font jamais abondantes, ou des efpaces véritablement
marécageux, dans les dépreflions. perpendiculaires
à ces mêmes pentes} mais ces efpaces
ne font jamais fort étendus.
Lorfqu’on marche fur un terrain uligineux,
il cède & paroït élaftioue : quand on creufe un
foffé perpendiculaire à la pente de ce terrain, il
s'y fait conftamment des fuintemens d’eau rouffe,
fuintemens qui augmentent dans les années plu-
vieufes, mais qui font rarement affez forts pour
pouvoir former un ruiffeau.
Quelquefois ce foffé , lorfqu'il eft prolongé
dans toute la longueur du terrain uligineux, def-
fèche la partie qui lui eft inférieure} quelquefois
il n'y produit aucun effet, parce qu'il fe trouve
alors dans le banc d’argile des fentes qui donnent
paffage à l'eau au-deffous du fond du foffé.
Dans quelque fens qu’on faffe les foffés dans
les terrains uligineux, on doit être certain qu'ils
feront comblés en peu d’années, à moins qu'ils
ne foient d'une grande largeur, parce que la marne
inférieure, délitée parlaféchereffeou parla gelée,
tombe dans fon fond, & que la terre végétale
fupérieure tend toujours à defeendre lorfqu'elle
eft gonflée & pouffée par l’eau ; auffi, dès le premier
hiver, fait-elle unefaillie plus ou moins forte
fur le bord qui eft du côté de la defeente , faillie
qui finit par tomber auffi dans le foffé.
Il eft probable que la plupart des defeentes de
terrain qu’on a citées comme remarquables, ont eu
lieu des cantons uligineux.
La végétation eft très-vigoureufe dans les terrains
uligineux , mais elle ne fe compofe que de
plantes qui leur font propres, & qui, pour la
plupart, ne conviennent pas aux beftiaux. Prefque
partout cependant on les utilife en y mettant pâturer
les vaches pendant quelques neures chaque
jour.
L’aune eft le feul arbre utile qui s'accommode
des terrains uligineux, & il y pouffe fi foiblement,
que fes tiges, à dix ans d’âge, ne font pas plus élevées
que celles en bon fonds qui n'ont que deux
ans. Le faule aquatique, la bourdaine & l’obièr y
font affez communs, & offrent la même foibîefle
de végétation. On y fait, avec quelques foins,
reprendre le bouleau & le frêne, & ils y offrent
le même phénomène.
Deux caufes m’ont paru concourir à la moindre
vigueur des arbres aquatiques dans ces fortes de
terrains: la température toujours égale, c'eft-à-
dire , froide pendant l’été, de l'eau qui l’imbibe,
& la petite quantité de parties folubles que contient
cette terre végétale, j’aurois pu ajouter le
peu de profondeur de cette dernière couche,
quoique l'aune ait ies racines traçantes.
En effet, fi l’eau des fources ou des puits,
n’ayant que dix degrés environ de température,
retarde évidemment dans nos jardins la végétation
U L 1
des plantes qu’on en arrofe une ou deux fois au
plus chaque jour, quel doit être fon effet lorf-
qu’el’e abreuve conftamment le pied des arbres en
queliion ? Inutilement j'ai cherché , en y mettant
tous les foins poflibles, principalement en apportant,
dans un trou fuffifamment grand, de l'excellente
terre de jardin, à y planter des choux & à y
femer des fèves de marais, qui, de tous les légumes,
font ceux qui aiment le mieux l’eau : les
premiers n’ont pas pouffé , & les fécondés n’ont
pas germé.
Quant au manque de parties folubles' dans la
terre végétale, cela demande quelqu'explication-
La tourbe des véritables marais , c’eft à-dire,
la tourbe pure, ainfi que je crois l’avoir fait voir
le premier à fon article dans le n o u v ea u D i c t i o n n
a ir e d ’ H iJ îo ir e n a tu r e lle en 24 vol., ne diffère du
terreau que parce qu'elle n'a pas perdu toutes les
parties continuantes des plantes qui ont fervi à
la former. En conféquence elle brûle prefque
comme ces plantes auroient biffé, & n’eft propre
à la végétation qu’après qu'on a achevé de la dé-
compofer Ou lentement, en la laiffant expofée
en couche mince pendant plufieurs années à l’air,
ou rapidement au moyen des alcalis ou de la chaux.
Or, la terre végétale des lieux uligineux eft auffi
une tourbe, mais un peu différente de celle que
je viens de citer, car elle eft toujours mêlée de
terre argileufe, de fable & de terreau , & ce,
parce que toutes les plantes qui lui ont donné
naiffance n'étoient pas couvertes d'eau, comme
celles qui croiffent dans les eaux ftagnantes, &
qu’une partie des tiges &.des feuilles de ces plantes
fe font decompofées à l’air. Auffi eft-elle bien plus
tôt propre à la végétation que la véritable tourbe,
c'eft-à-dire , qu’il fuffit de l'expofer , en couches
minces, à l’air pendant un an, pour la transformer
en un excellent engrais, ou lui donner une fort
petite quantité de chaux, pour la rendre en peu de
jours propre à la végétation.
Ces faits, j’en ai acquis la preuve perfonnelle
par des effais directs.
Il y a des terrains uligineux partout où des
montagnes perméables aux eaux des pluies repo-
lent fur un banc d’argile d’une épaiffeui un peu
confidérable. La chaîne calcaire primitive qui lie
les granits des Vofges à ceux des environs a Au-
tun, chaîne où fe trouvent Langres, Dijon,
Beaune,&c., en offrent beaucoup, & c'eft fur
cette chaîne, où ma famille poffède des biens ,
que j’ai paffé ma jeun elfe. Ils font communs autour
de toutes les butees à plâtre des environs de
Paris, principalement autour de celles fur lef-
quelles eft fituée la forêt de Montmorency. On en
voit beaucoup dans le voifinage de la maifon que
j habite depuis vingt ans dans cette forêt. Ainfi
j ai été à même de les obferver en géologifte,
en botaniffe &. en agriculteur.
Ces terrains étant peu productifs, comme je
l’ài déjà obfervé, on a du fréquemment tenter
U L I 5 4 5
d’y faire des travaux dans le but de les utilifer ,
& naturellement ces travaux ont dû d’abord être
dirigés vers leur defféchement, mais très-rarement,
faute de connoiffance de leur nature, on
en eft venu complètement à bout.
M. Douette - Richardot, dont le nom a été
fouvent cité, a voulu deffécher un vafte terrain
uligineux de nul produit, fitué dans le domaine
de Servin près Langres, appartenant à une de mes
foeurs 5 & malgré qu’il y aie fait en foffés une dé-
penfe beaucoup plus confidérable que la valeur
du fonds, ce terrain , lorfque je l’ai vifité dix ans
après, annonçoit n’avoir que légèrement changé
de nature, & devoir revenir dans peu au point où
il étoit avant ces travaux inconfîdérés.
L’infpe&ion du terrain des parties uligineufes
de la vallée du château de la Chaffe , fituée au
centre de la forêt de Montmorency, prouvoit, il
y a une douzaine d'années, qu'on y avoit fait
anciennement des travaux femblables 5 ce qui n'a
pas empêché l’adminiUration des' forêts de les
recommencer il y a fix ans ; mais quelque multipliés
que foient les foffés, avec quelqu’intelli-
gence qu’ils aient été dirigés, ils n'ont produit
aucune amélioration relativement au but qu’on
fe propofoit, c’eft-à-dire, que les aunes qui fe
trouvoient dans ces terrains n’ont pas aCtivé leur
végétation ; qu’il n'y a pouffé ni plus de bouleaux,
ni plus de frênes, ni plus de chênes, quoiqu'on
y ait difféminé des graines de ces arbres;
feulement quelques plantes différentes de celles
du fonds ont pouffé fur les terres enlevées des
foffés, terres qui étoient, par moitié, de la
marne & de la terre végétale, & qui par confé-
quent rempliffoient les données les plus favorables.
En voyant travailler à ces difpendieux foffés ,
j'étois fi convaincu de leur inutilité, que j'ai été
tenté d’adreffer des obfervations à l'adminilha-
tion foreftière ; mais confidérant que, dans le cas
même où ces obfervations euffent été accueillies,
la marche adminiftrative ne permettroit pas de
prendre une décifïon en temps opportun , j'ai dû
me borner à profiter de cette vicieufe opération
pour faire une expérience nouvelle & en grand ,
expérience qu’il fera facile d'aller étudier fur le
'lieu même.
Si j'étois appelé à tenter de nouveau de remplir
l'objet que s'étoit propofé l’adminiffration
foreftière , je ne rétnblirois de tous ces foffés ,
encore en augmentant leur largeur, que ceux qui
font à la partie la plus baffe de chaque vallée latérale,
& je ferois faire, des deux côtés de la
grande vallée, en fuivant lesfinuofités du terrain
uligineux à fa naiffance même, un foffé de fix
pieds de largeur & de profondeur, lequel fe dé-
gorgeroic dans les foffés latéraux dont je viens de
parler, & par leur moyen dans le ruiffeau qui
coule au fond de la grande vallée. Si enfuite ii y
avoit quelques parties , a-étu elle ment uligineufes,
qui reftaffent telles par fuite de l’infiltration des