
La position des bâches doit être la même que
cellé des Serres, csefta-dire , entre le midi &
le levant j elles valent mieux lorfqu’elles font fur
un terrain incliné & de nature très-fèche, &
qu’elles ont de grands abris au nord & au couchant.
Leur éloignement de l'habitation du jardinier
doit être peu confidèrable, à raifon de la
néceflité de leur furveiilance à toutes les époques
du jour & de la nuit.
Le local déterminé, on creufe une foffe de la
largeur & de la 1 ngueur fixées, plus l’épaiffeur
des murs dont je parierai plus bas, & la place
de l’efca'ier à l ’un des bouts, foffe à laquelle on
donne quatre pieds de profondeur. Cela fa it, on
-élève tout autour des murs en pierres de taiile ou
en briques, liées à chaux & à ciment, celui du
côté du midi ne furpaffant pas de .plus d’ un pied
Je niveau du fo l , c lui du côté du nord le furpaffant
au moins de ieux pieds & au plus de quatre,
les latéraux defcendant obliquement.
A un pied ou un pied & demi du mur du fond,
on en élève un autre en briques ou en pierres de
ta ile de champ jufqu’ à la hauteur de celui de
devant : quelquefois ce mur eft remplacé par des
planches épaiffes.
Je dis que ces mu*s doivent être à chaux & à
ciment, parce qu’ il eft fort important que les eaux
pluviales ne les pénètrent pas, car elles nuiroient
confîdérablement aux cultures par l’humidité fur-
abondante & le froid quelles apporteroient dans
la bâche. Pour plus de fûreté, il conviendroit
de faire deux murs moins épais & parallèles, réparés
par un intervalle de fîx pouces au plus, qu’on
réupiroit hors de te r re , après leur defficcation
complète, par de larges pierres plates 5 mais on le
fait rarement, à raifon de l’augmentation de la
dépenfe & du peu d’importance que la plupart
des cultivateurs mettent aux inconvéniens ci-
deffus, quelle que foit leur gravité.
Les briques verni (fé e scom m e étant un plus
mauvais conducteur de la chaleur que les pierres,
doivent être préférées toutes les fois que cela eft
poffible.
Du charbon de bois ou du laitier, groffière-
ment p ilé, fera mis au fond de l’intervalle des deux
premiers murs , en lit de l’épaiffeur d’un pied ,
& c’eft fur ce lit qu’on pofera les dales de pierre
deftinées à fervir de fond à la couche de terre qu’on
doit y former. L’efpace d’ un pied & demi qui
eft entre cette couche & le mur le plus élevé, eft
deftiné au paffage pour le fervice de la bâche.
Dans quelques bâches on fait le couloir fur le
devant, ce qui eft plus agréable pour l’afpeCt,
mais ce qui en fait perdre la partie la plus pré-
cieufe j dans d’autres, qui ont plus de largeur que
celle indiquée, on fait deux couches, une fur le
devant & l’autre fur le derrière, & le couloir eft
entre-deux. J’aime beaucoup ces dernières.
A une des extrémités de la bâche eft la porte,
au niveau du paffage. On y defeend par un efcalie
r, à côté duquel eft un fourneau d’une grandeur
proportionnée à celle de la bâche. Une petite
chambre de là largeur de la hache, de quatre à
cinq pieds de hauteur, & pourvue auffi d’une
porte , recouvre cet efcalier & l’ouverture de ce
fourneau.
C ’eft dans cette petite chambre qu’on place
la cuvette deftinée aux arrofemens, & le bois né-
ceffaire pour chauffer le fourneau pendant U
nuit.
Le tuyau de chaleur tourne tout autour de
la partie qui doit fervir à établir l.i couche, &
vient aboutir à une cheminée 'élevée au-deffas de
i’oüverture du fourneau. Il ne diffère pas de celui
du fourneau de la Serre.
L'es châffis avec lefquels on recouvre la baçhe
ne diffèrent pas non plus de ceux des S. rres ; ils
fe pofent fur des fablières & fur des folives longitudinales
pourvues de rainures, couvertes, air.fi
qu’eux , de trois couches de peinture blanche
à l’huile : au conrraire de ceux mobiles qu’on
place fur les couches, ils fe foulèvent par leur
côté le plus bas. On peut les enlever à volonté,
tous ou chacun en particulier.
Voilà la bâche terminée > il ne s’agit plus que
de remplir de tannée neuve, mêlée avec plus ou
moins de tannée v ieille, pour amortir le grand feu
de la première , la partie qui lui eft deftinée , &
qu’on nomme la couche, enfuite d’ y placer les
pots garnis de plantes ou de femences, ce qu’on
ne fait qu après que les murs & la peinture font
complètement defféchés.
La chaleur que les rayons du foleil donnent
aux bâches bien conftruites eft telle, que les graines
qui ne leveroient pas fous les châffis, même dans
la Serre chaude, y germent -promptement ; que
les plantes* qui fleuriffent rarement dans cette
dernière, faute d’une température fuffifante, le
font toutes les années ; ajoutez à cela que leur
conftruétion eft peu coûteufe, & leur entretien
nullement confidèrable. Auffi les jardiniers qui
fpéculent fur la-vente des primeurs, en font-ils
tous ufage pour avoir des fraifes, des cerifes, des
petits pois, des haricots, des falades, & c . pendant
l’hiver, desmelons au printemps, pour avancer
de plufieurs femaines tous les légumes qui
peuvent être repiqués en pleine terre, pour, ainfi
que je l’ai déjà annoncé , cultiver les ananas &
autres plantes dés pays intertropicaux qui ont
befoin d’une chaleur très-élèvée & très-confiante;
pour rétablir les plantes de Serre ou d’orangerie
malades, pour multiplier par boutures une grande
quantité d’ arbres & d’arbuftes des pays chauds
qui ne donnent pas de graines dans nos climats,
pour faire lever les graines des mêmes pays ou
celles qui font racornies par fuite de la vétufte;
enfin, les bâches font d’ un ufage fi étendu , qu'il
eft étonnant, je le répète , qu’elles ne foient pas
plus multipliées. ,
On ne fait ordinairement du feu dans les fourneaux
neaux des bâchés, que lorfqu’ il gèle ou qu’ on a
befoin d’ une très-haute température. Je fuis j>er-
fuadé que fi on les couvroit de plufieurs châffis
fuperpofés, & dan's l’intervalle defquels l’ air extérieur
ne circuleroit pas, on obtiendroit, comme
je l’ai obfervé à l’occafion des Serres, une chaleur
te lle , qu’il ne feroit néceffaire de faire du
feu pour les chauffer qtre dans les très-grands
froids, c’eft-à-dire, dans ceux au-déffous de dix
degrés, froids fort rares dans le climat de Paris.
La conduite des bâches eft bien plus difficile
que celle des Serres. On a furtout à craindre les
coups de foleil pour lés plantes faites, & les émanations
des gaz de la terre pour les femis ; j’ai vu
plufieurs fois toutes les feuilles de ces plantes y
noircir en un jou r, tous les produits des femis y
fondre en une heure. En conféquencê', le jardinier
ne peut trop veiller à ce que les vitrages
foient couverts de toiles ou de paillaffons dans les
jours les plus chauds, au moment des orages, à ce
qu’ils foient le vés, pour donner iffue aux gaz délétères,
toutes les fois qu’il craint leur influence.
Il eft en général avantageux d’avoir plutôt plufieurs
bâches petites qu’ une trop grande, à raifon
delà poflibilitéde ces acçidens, & il faut éviter,
autant que faire fe peut, de mettre dans la même
des plantes d’une nature trop difparate , c’eft-à-
dire, celles qui aiment la chaleur humide avec celles
qui aiment la chaleur fèche.
Les cultivateurs chinois favent accélérer la flo-
raifon des plantes déjà en boutons, en faifant bouillir
de l’eau dans la bâche où elles font renfermées.
Je ne fâche pas qu’on ait tenté cet ingénieux
moyen en France. Au refte, il n’eft pas douteux
pour moi, quoique je n’en aie. pas l ’expérience,
qu’ii ne peut pas être employé long-temps fans
inconvénient. Voye£ Humidité.
Le plus fouvent on faille pendant toute l’année
dans la bâche les plantes étrangères qu’on y cultive
j . feulement on lève les panneaux plus^ ou
moins, même on les enlève, félon la température
de l’atmofphère & l’afpeél de ces plantes.
Tout ce que j’ ai dit précédemment des foins à
donner aux plantes placées dans les Serres, s’applique
à celles placées dans les bâches : on les a.r-
rofe, on les ferfouit, on les rempote, on les nettoie
pofitivement de même.
Quelque long que foit cet article, il paroîtra
peut-être court à quelques lecteurs, mais je les
engage à confidérer qu’ il n’ eft que le complément
de ceux où il eft queftion de chacune des ëfpècès
qui fe cultivent dans leS Serres. Je m’ arrête donc.
( Bosc,)
Serre portative. On applique mal-à-propos
ce nom à des caiffes en bois qui offrent un vitrage
d’un côté, & qui font deftinées à tranfporter,
principalement fur mer, lé5 plantes pfécieufes qui
craignent le froid & l’eau fàiéfe, & qui veulent
beaucoup de jour* Je dis mal-à:propos, parce
Agriculture. Tome V I .
que, n’ y faifant pas de fe u , ces caiffes fe rapprochent
davantage des orangeries.
J'en dirai autant de ces châffis en fe r , garnis
de Vitres dans tout leur pourtour, ayant quinze a
dix-huit pouces carrés de bafe, fur trois pieds
de hauteur, terminés par un to it, châffis qu’on
met, dans les écoles de botanique, furies plantes
en pleine terre, au printemps, pour accélérer
leur végétation , & en automne pour favorifer la
maturité de leurs graines. ( B o s c .)
Serre pour les légumes. 11 eft des légumes
d’hiver qui craignent les gelées. Pendant les fortes
gelées, lever ceux q u i, ne les craignant pas , ref-
tent en terre, eft quelquefois fort difficile. C ’eft:
pour conferver les premiers & avoir fous la main
les féconds, que cette forte de Serre eft deftinée.
Dans les grands jardins, la Serre à légumes eft
une voûte fous une terrafle, fous une orangerie,
fous le logement du jardinier, & dans les petits ,
ce n’eft qu’une partie de cave ou une chambre baffe.
Les plus importantes des confidérations qui
doivent guider dans les conftruétions ou le choix du
local d’une Serré à légumes, c’ eft que l’humidité y
foit la moindre poffible, & que les plus fortes g e lées
ne puiffent y pénétrer. On doit lui donner
deux portes, dont l’une eft fermée lorfqu’ on ouvre
l’autre pour entrer.
La capacité de la Serre à légumes doit être proportionnée
à là quantité de légumes qu’on doit y
renfermer: trop ferrés, ils feroient expofés à
pourrir; trop écartés, ils pourvoient fe deffécher.
Il eft très-important que la chaleur des Serres à
légumes foit inférieure à dix degrés du thermomètre
, afin que les objets qu’on y place n’y végètent
pas, leur végétation, excepté celle d elà
chicorée fauvage, altérant leur faveur, les rendant
même impropres à la nourriture du maître :
en conféquence, on laiffera la porte & la fenêtre
ouvertes dans les jours froids, pour que la température
s’abaiffe jufqu'au-deffous de ce degré,
après quoi on les fermera rigoureufement.
Les légumes s’y placent dans du fable, p u , à fon
défaut, dans de la terre fèche ; les uns, comme les
falades, les choux-fleurs, & c . , debout & placés
près à près; les autres, comme les betteraves*:
les carottes, & c . , couchés & formant des lits plus
ou moins é le vé s , plus ou moins larges. Quant
aux raves, aux oignons, aux pommes de terre, & c .,
on peut les mettre en tas. .
Vifiter fréquemment la Serre à légumes pour
en ôter tous ceux qui fe gâtent, pour, en ouvrant
la porte, renouveler l’ air lorfque cela devient
utile , eft du devoir d’un jardinier foigneux ,
car les légumes gâtés concourent puiffamment à
Tajtération des autres, & un •air trop ftagnant
l-leur communique une odeur qui n’eft pas agréable.
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Il eft de§ légumes, tels, que les choux-Reurs, qui
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