
auflî eft-il rare qu'il vive plus de fept à huit ans
en plein vent. Par la Taille on le conferve trente
ans & plus en efpalier, & on lui donne une étendue
quadruple de celle qu'il -eût naturellement
acquife abandonné à lui-même.
Je ne puis mieux' faire que d’emprunter les
expreffions de mon collaborateur Thouin, pour
décrire la Taille de la formation du pêcher en efpalier.
« Après que l’arbre eft planté, 8c avant que
la fève entre en mouvement, on coupe fa tête
à quatre à cinq ye ux au-défi us de la greffe ;
chacun de ces yeux pouffe ordinairement fon
bourgeon. Il eft des perfonnes qui fuppriment ,
à fur & mefure qu’ils croiffent, les bourgeons
mal placés , & qui fe trouvent fut le devant ,ou
fur le derrière de l’arbre ; d’autres laiffent croître
les bourgeons jufqu’ à la fin de la ceffation de$U
fève printanière , fuppriment alors les inutiles 8c
pâli fient les autres. Il en eft quelques-unes qui
préfèrent de laifier croître tous les bourgeons ;
les gourmands des fauvageons exceptés , & de
ne donner ni pincement ni coup de ferpette à
leurs arbres jufqu’au moment de la fève fuivante.
Celles-ci agiffent prudemment, par la raifon qu’ en
diminuant les bourgeons on diminue le nombre
des feuilles, & par conféquent le nombre des
branches qui nourriffent les racines j & comme,
dans cette première année, il eft plus effentiel de
confolider la reprife des arbres & de les affurer
fur leurs racines, que de leur former la tê te ,
cette pratique me paroît préférable, & d’autant:
plus que les arbres, une fois bien piétés , auront ;
bientôt réparé le temps perdu, 8c deviendront
enfuite plus vigoureux que ceux qui auront été
taillés dès l’année de leur plantation. Ainfi donc
il eft bon de ne pas toucher à la pouffe des arbres
cette première année, & de fe contenter de leur
adminiftrer la culture de tous les arbres nouvellement
plantés.
. » Pendant les jours doux du premier printemps,
on choifît, fur chaque pied, les deux bourgeons
les plus favorablement placés 5. il faut qu’ ils foient
très-fains & très-vigoureux, & en oppofttion des
deux côtés de l’arbre ; ce choix arrêté, on fup-
prime tous les autres bourgeons, eu les coupant
avec une ferpette bien acérée, le plus près pof-
lîble de la tige , afin, que l'écorce de l’arbre puiffe
recouvrir fans peine 8 c promptement ces petites
plaies.
» Refte à opérer les deux branches-mères. La
longueur qu’on laiffe à chacune doit être déterminée
par la vigueur de l’arbre qui les a produites,
8 c par la leur particulière: fi l’arbre a pouffé vi-
goureufement, on taille les branches au-deffus du
fixième ceil ; s’ il n’a pouffe que médiocrement,
on le raccourcira.au quatrième 5 enfin, fi la pouffe
eft chétive, on le taille au fécond.
» Lorfque ces deux rameaux font d’inégale
: fo r c e , on laiffe plus de longueur à celui qui eft
plus vigoureux, & on raccourcit davantage, au
contraire , celui qui F eft le moins. Par ce moyen
très-fimple, on rétablit promptement l’équilibre
de vigueur entre les deux branches. Ces coupes
des deux rameaux doivent être faites^ fur les
yeux latéraux, afin que les bourgeons qui en for*
tiront fe dirigent naturellement dans le fens des
branches-mères. On fixe enfuite, par des attaches,
fuit au mur, (oit au treillage, ces deux mères-
branches , de manière à ce qu’elles commencent
à prendre leurs directions à l’angle de quarante-
cinq degrés. Si on ne peut arriver à ce but cette
première année, par la crainte de rompre les
branches, on les en approche le plus qu’il eft
; poflible, 8c on remet aux années fuivantes à les
y amener infenfiblement.
j . » Voilà tout ce qui appartient à la première
pouffe de l'arbre.
» L’époque la plus favorable à l’éboufgeonnage,
qui eft une efpèce de Taille, eft celle delà fin de
la fève du printemps,-lorfque les bourgeons, parvenus
au maximum de leur grandeur, s’arrêtent
& reftent en repos jufqu’ à la féye d’automne.
» On fupprime d’abord les bourgeons qui fe
trouvent placés fur le derrière, 8ç qui fe dirigent
à angles droits fur le mur, 8c ceux qui ont pouflé
fur le devant de l’arbre; on abat encore ceux qui
font tortueux, mal-venans, gommeux & atteints
de quelques vices de conformation. Les : faux
bourgeons , ainfi que les rameaux latéraux qui
croiffent fouvent à l'extrémité des gourmands,
doivent être coupés auflu
• » Enfin, fi les bourgeons qui ont crû fur ces
côtés de l'arbre font trop rapprochés les uns des
autres pour être paliffadés à une diftance raifon-
nable, il convient d’ en fupprimer un entre deux,
& quelquefois deux de fuite j cela dépend de la
place à garnir.
H Ces fuppreflîons faites, il faut apporter attention
à conferver les bourgeons qui ont crû à l’extrémité
des deux mères-branches, à moins que
quelques-unes, qui ont crû en deffous^ n’offrent
plus de vigueur , & ne foient difpoféês d’une manière
plus favorable à la prompte formation de
l’arbre, auquel cas on rabat cette branche fur le
bourgeon-qui en prend la place*
« Tous ces autres bourgeons réfervés doivent
l’ être dans toute leur longueur, fans .être raccourc
is , arrêtés ni pincés^ S’il fe trouve quelque
gourmand qui ne foit pas difpofé à remplacer le
canal diredl de la fèv e, il faut le conferver dans
toute fa longueur, mais en lui donnant une pofi-
tion ipclihée, car il peut devenir un membre
très-utile.
33 Si une des deux ailes de l’arbre ^ fe trouvoit
plus foible que l’autre, il faudroic faire une opération
inverfe à celle de la T aille , rétablir l’équilibre
entre les deux parties. Au lieu de tailler long
le côté le plus vigoureux, & de raccourcir celui
qui i ’eft moins, il conviendroit, au contraire > de
laiffer plus de bourgeons fur le côté foible que
fur le côté fort. La raifon en eft fimple.
» Les bourgeons, garnis de leurs feuilles, pompent
dans I’atmolphère les fluides aériformes qui
s’y rencontrent, 8c furtout une humidité favorable
à la végétation; après s’en être alimentés,
ainfi que les boutons qui fe trouvoient à la bafe
des feuilles, le furplus defeend dans les racines,
& occafionne leur croiffance. Ainfi la férié des
racines, qui fe trouvent deffervies par un grand
nombre de bourgeons garnis de leurs feuilles, fe
trouve mieux nourrie Ôc devient plus vigoureufe
que les autres racines qui font moins fournies de
bourgeons.
33 C'eft pour cette même raifon, 8c en même
temps pour le parfait accrofffement des boutons,
qu’il convient de ne fupprimer aucune des feuilles
des bourgeons réfervés.
33 La fécondé Taille, qui s’exécute au commencement
de la troifième année , commence à devenir
plus compliquée ; mais comme la bafe en
eft la même que la première, on fe contente d’ indiquer
les différences.
»‘’Par la première Taille on s’eft procuré les
deux branches-mères , defquelles font provenus
aùtant de bourgeons qu’elles portoient d'yeux-. Il
s’agit dans celle-ci d’établir des branches montantes
8e defeendantes , ou ce qu’on appelle membres.
On les choifit parmi les bourgeons des deux
mères-branches.
33 Si l’arbre a pouffé très-vigoureufement, 8c
que les yeux réfervés, au nombre de d ix , aient
fourni chacun leur bourgeon, il convient de tailler
fur tous les rameaux qu’on à dépaliffadés, 8 c plus
court que l’année précédente, parce que l’arbre
a acquis de l’étendue.
» Mais telle vigueur qu’ait un jeune arbre à la
fécondé année de la plantation, tous les bourgeons
ne font pas également forts ; ceux qui ont
cru fur les mêmës branches , dans l’intérieur
du V, fe trouvant dans une pofition plus favorable
à l’écoulement de la fèv e, font ordinairement
plus gros & mieux nourris que ceux placés à l'extérieur
des jambages du V , & qui (e rapprochent
davantage de la pofition horizontale.
» Enfin, les deux bourgeons qui font venus en
prolongement des deux branches-mères, méritent
encore un traitement particulier à raifon de la
place qu’ils occupent.
» Dans cette fuppofition la plus favorable, il
convient de tailler les quatre branches de l’inté—
1 rieur du V , qu’ on appelle branches montantes,
au-deffus du cinquième oeil ; celles de l’extérieur,
ou branches defeendantes, au troifième. Comme ces
deux bourgeons de l ’extrémité des deux branches-
meres font deftinés à les alonger, 8c qu’ il eft
offentiel à la formation des arbres de leur donner
toute l’extenfion dont elles font fufceptibles, on
peut ne les tailler qu’au-deffus du troifième, cinquième
ou feptième oe il , fuivant la force ou la
vigueur de ces bourgeons.
>3 Si une des ailes de l’ arbre étoit plus vigoureufe
que l’autre, il faudroit bien fe garder de
les tailler également ; il conviendroit au contraire
de charger' beaucoup, ou d’alonger la Taille de
l’aile vigoureufe, & de raccourcir , au contraire,
celle de l’autre. Si la vigueur de cette.aile menaçait
l’exiftence de fa voifine, il faudroit s’en tenir
à la différence de Taille pour maintenir l’équilibre
entre les deux ailes; il feroit néceffaire de recourir
à un remède plus aétif, mais en même temps
plus dangereux, c’ eft celui de découvrir, à l’automne
, les racines, de couper quelques-unes de
celles qui abouiiffent au côté trop vigoureux , 8c
au contraire de mettre fur celles du côté maigre ,
après en avoir coupé jufqu’au v if la carie, s’il y
en avoit, une terre neuve 8 c fubftantielle.
33 Si la rupture de l’équilibre de vigueur entre,
non-feulement les deux ailes de l ’arbre, mais encore
entre les branches d’ une même aile, pro-
venoit de la nailfance d'un gourmand, ce qui
arrive très-fréquemment aux pêchers, cet événement
eft dans ie cas de changer tout le fyftème de
la taille.; ii ne faudroit pas couper ce gourmand ,.
comme cela fe pratique dans beaucoup de jardins
, parce qu’il en naîtroit d’autres qui abfor-
beroient la fève, & conduiraient l’arbre à fa ruine;,
il faudroit, au contraire;, le conferver 8c le porter
à donner de bannes branches à bois & à fruit.
Pour cet effet on doit lui faire de la place, &
tailler deffus l’ un des membres ou la branche-
mère , fur laquelle il fe trouve , afin qu’ il la remplace.
Si la belle ordonnance de la diftribution
des branches de l’arbre fait répugner de prendre
ce parti, & qu’ on puiffe placer ce gourmand en
fupprimant quelques branches qui fe trouvent
dans fon voifinage, il convient alors de le tailler
très long , comme, par exemple, depuis un pied
jufqu’à quatre, fuivant la force de l’arbre 8c celle
du gourmand, devenu plus modéré lui-même ;
on le taille enfuite comme les autres branches. S i,
enfin, ce gourmand devoit être abfolument fup-
primé, il eft un moyen de s’en défaire fans rifque ;
c’eft, lorfqu’ il eft parvenu au maximum de fa croiffance,
& lorfque fa fève commence à defeendre ,
d’enlever à fa bafe un morceau d’ écorce; la végétation
s’arrêtera, il fe formera un bourrelet a la
partie fupérieure de la plaie, 8c à l’automne on
pourra le couper fans danger.
Tout ce qui vient d’être dit fur la Taille de
cette fécondé année, eft dans la fuppofition d’ un
arbre plein de vigueur, placé en bon terrain & fous
un climat qui lui eft favorable. On va actuellement
indiquer les procédés qu’il faut employer pour
un arbre de même âge de plantation, qui fe
trouve en terrain de mauvaife nature 8c fous un
climat défavorable. Les deux points les plus