
eft fermé, au fil long- temps qu’on n’ a pas befoin
du local ou qu'on ne les vend pas. Les feuilles cependant
ne doivent être laiffées à la fécherie que
le temps néceflaire à l’évaporation de la furabon-
dance de leurs parties aqueufes : lorfqu'elles font
trop fèches, elles perdent de leur on&uofité & de
leur arôme : pour les en retirer, on choifit un
temps humide, & on les entaffe, toujours en
liaffes, dans un lieu fec & a é ré , jufqu’ à deux à
trois pieds de hauteur 5 de temps en temps elles
font vifitées , & fi elles s’échauffent, on les retourne,
afin d’expofer à l’air froid cellesqui étoient
au centre.
Lorfque les temps fecs fe prolongent trop , on
fupplée aux brouillards en faifant évaporer de
l’eau dans la fécherie.
Comme c’efi la grofife cô te ( principale nervure)
qui retarde la defliccation des feuilles de Tabac,
quelques cultivateurs des environs de Scheleftat,
furtout les Anabaptiftes , qui font bien plus foi-
gneux que les Luthériens & encore plus que les C atholiques,
la fendent ou l ’écrafent. Cette opération
eft très-propre à remplir le but; mais elle a
contr’elle la dépenfe de temps ou d’argent.
Le défaut de greniers ou de hangars pour la
defliccation des feuilles de Tabac dans quelques
localités, la lenteur de cette defliccation dans les
années pluvieufes, a fait imaginer à M. Truchet
de les ftratifier entre des couches d’un à deux pouces
d’épaiffeur de paille de froment ou autres céréales.
Il ne lui a fallu, dans le climat d’Arles, que
deux fois vingt-quatre heures pour opérer, par ce
moyen, leur complète defliccation. Quelque longue
que foit l’opération de faire ou de défaire les
li t s , quoique la paille puiffe être regardée comme
devenant impropre à la nourriture des beftiaux, j
ce mode me paroît dans le cas d’être pris en con-
fîdération.
Les feuilles de terre & celles des gitzens fe lèchent
fur des planches au foleil, & s’entaffent de
même 5 elles fervent à faire du Tabac de pipe, de
qualité inférieure.
C e n’eft guère qu’ au milieu- de l’hiver que les
cultivateurs des bords du Rhin vendent leurs T a bacs.,
Cette manière de deffécher les feuilles de Tabac
prouve encore l ’ inutilité des deux fermentations
que leur font éprouver les planteurs de la Caroline.
Le climat de la Hollande étant encore plus froid
& plus humide que celui de la ci-devant Alface,
il a fallu quelques foins de plus pour que les cultivateurs
puiflent amener celui de leur récolte à un
degré de bonté approchant de ce d e r n i e r& ils y
parviennent dans les années favorables.
Dans ce pays , principalement aux environs
d’Armersfort, on fème la graine de Tabac fur
de grandes couches , hautes de trois pieds,
larges de d ix , & d’une longueur indéterminée,
recouvertes d’ un demi-pied de terreau. On les
entoure de fumier pour retarder la perte de leur
chaleur. Pendant la nuit, & même quelquefois'pen-
dant le jour, on couvre ces couches de paillaffons
ou mieux de grandes caifles, pour les garantir du
froid & encore plus des gelées, qui, malgré toutes
les précautions, caufent Couvent de grandes pertes.
Lorfque les plants de Tabac ont acquis iix à
huit pouces de hauteur, on les tranfplante fur
d’autres couches conftruites dans le voifinage , à
fix ou huit pouces l’un de l’autre, en (quinconce
ou en lignes dirigées du midi au nord. Là , on leur
donne un léger binage tous les quinze jours , &
on les arrofe au befoin. Le foin de les garantir du
froid pendant la nuit n’eft pas plus négligé fur
cette fécondé couche que fur la première, quoi-
qu’alors les gelées foient moins à craindre.
Il n’ y a pas de doute qu’il feroit plus économique,
& d’un réfultatplus certain, de femer le Tabac
fur des couches eneaifle.es dans des murs en briques
verniflees & recouvertes de châflis vitrés, qui fer-
viroient un grand nombre d’années; mais je ne
fâche pas qu’on le faffe nulle part. Voye[ C hâssis
: '& C ouche.
i Une couche deftinée à fournir des plants pour
| couvrir deux arpens , c’eft-à-dire , douze milles f
j aura douze pieds de long fur quatre de large.
Dans le midi & dans le nord de la France, on
n’enclôt pas les. champs qui portent du Tabac ,
quelqu’avantageux que cela fû t, au moins relativement
aux grands vents, qui fouvent lui nuifent
confidérablement/En Hollande, on ne néglige
pas cette précaution; le Tabac eft partout protégé
ou par des haies fort élevées, ou par des
plantations de houblon , qui eft un article de
grande culture dans le No rd , & qui profite mieux
& donne des récoltes plus abondantes lorfqu’il’
eft en lignes peu épaiües, que lorfqu’il eft en
quinconce. Voye^ Ho u b lo n .
Les cultivateurs de la Flandre font un grand
ufage des matières fécales, qu’ ils appellent courte-
graijfe, fur les terres qu’ ils deftinent à porter du.
Tabac ; mais fl cet engrais eft puiflant, s’il procure
un plus grand nombre de feuilles, & des
feuilles d’ une largeur plus confidérable, il affaiblit
néceffairemeftt leur qualité. Voye[ E n g r a is .
La plantation des plants de Tabac a lieu un peu
. plus tard qu’aux environs $e Scheleftat r mais
comme ces plants ont été fort avancés dans leur
croiflance fur la fécondé couche où ils ont été
placés, ils fe trouvent à peu près- au même point
à l’époque où on doit leur donner le premier binage
: -ces binages font aufli au nombre de quatre
à cinq. On coupe ou on pince le fommet des tiges,
on cueille les feuilles de te r re , celles des repouffes
axillaires , enfin les bonnes feuilles, pofitive-
ment comme ii a été dit plus haut.
La récolte du Tabac, en Hollande, eft encore
plus fujetté à manquer par fuite des intempéries
de la faifon qu’aux environs de Schéleftat. On
•n’eft même pas toujours fûr de la finir, quelque
favorable que le temps paroi fie lorfqu’on la commence,
tant les variations de l’atmofphèfe font
grandes dans cette contrée. Le Tabac qui en ré
fuite, malgré \zs plus grands foins, car cette culture
eft un modèle à fuivre, eft fouvent fans qua-
! lité, & feroir de nulle vente s’il ne fervoit à de: mélanges avec les Tabacs des pays chauds.
Je n’ai point encore parlé des plants de Tabac
réfervés pour graine, parce que, prefque partout,
c ’eft dans les jardins ou dans le voifinage de la
• maifon qu’on les place, & qu’ils reçoivent une
culture particulière & aufli foignée que celle en
plein champ; feulement on leur donne l’expofi-
tion la plus chaude pofiïble, & on ne touche
pas à une feule de leurs feuilles : l’important eft
qu’ils fleuriflent de bonne heure. Comme ce font
I les premières capfules mûres qui dopnent la meil-
! Jeure graine, il faut conferver allez de pieds pour
en avoir fuffifamment, en rejetant toutes celles
qui ne font pas mûres, parce que les produits de
ces dernières feroient plus foibles. Au refte,
I comme chaque capfule contient plufieurs centaines
j de bonnes graines, une demi-douzaine de pieds fuf-
I fifent à uqe culture dune étendue déjà remarquable,
mais que je ne fixe pas, car il eft mieux d’avoir
de la graine en furabondance que d’être dans le
I cas d’en manquer.
On récolte la graine du Tabac en arrachant ou
I coupant les pieds, & en les confervant, en bottes
I & debout, dans Un coin du grenier, après avoir j enlevé,toutes les capfules encore vertes, la graine
profitant jufqu’à la complète defliccation des pieds;
I après quoi on coupe le refte des capfules, & on
I les met dans un fac de papier qui refte dans un
j lieu fec jufqu’à l’époque des femis de l’année
K fuivante..
La graine de Tabac eft bonne lorfqu’elle eft
I groffe & d’une couleur; brune très-foncée. On
I doit, autant que poflibîe, n’employer que celle de
I la dernière récolte, car plus elle vieillit, & plus
I elle perd de fa faculté germinative.
I Les feuilles des pieds.de Tabac qui ont porté
I de la graine font moins grandes que celles de ceux
i <1U1' été pincés; on les regarde aufli comme de
I qualité inférieure, peut-être à tort; elles ne fe
I mêlent pas moins avec les autres, ou entrent dans
lia partie que réfervent les cultivateurs pour leur
j PJPe °u celle de leurs voifins.
- Lorfque la culture du Tabac étoit libre , Une
I grande quantité de cultivateurs plantoient dans I !fUr jar(^n un plus ou moins grand nombre de pieds
Ide Tabac, difpèrfés çà & là ou en bordure, dans
|e *eui but d’avoir fuffifamment de feuilles pour
eur uJ*a§e & celui de leur famille. Aujourd’hui
jeette culture eft prohibée ou limitée à quelques
pieds pour l’ ufage de la médecine. J’ai vu des pieds
lainh cultivés acquérir une grandeur remarquable,
F 0 qui prouve qu’on gagne toujours à éloigner
1 les uns des autres ceux qui fe cultivent dans les
champs.
Par contre, pendant que la vente du Tabac
étoit fous le monopole d’une ferme avide & fans
pitié, on en cultivoit frauduleufement dans les
bois de quelques parties de la France. J’ai vu les
bûcherons & les charbonniers des vaftes forêts de
l’eft de la France tirer , à cet égard, un parti fort
avantageux de leurpofition; en effet, ils femoient
en avril, à la volée & fort clair, du Tabac dans les
éclaircis des taillis, dans les places à charbon
principalement, après leur avoir donné un léger
binage ; ils renouveloient ce binage & éclaircif-
foient le plant une ou deux fois dans le courant de
l’é t é , & obtenoient des feuilles, non pas de la
beauté de celles des pieds cultivés régulièrement,
mais d’une excellente qualité, & qu’ils vendoient
fort b ien, dans les environs, pour la pipe. Comme
le fonds n’appartenoit pas à ces bûcherons & à ces
charbonniers, que le femis, les binages & la récolte
fe faifoient à des heures où les commis de
la ferme étoient loin, ces derniers n’avoipnt d’autre
moyen d’empêcher la fraude que d’arracher
les pieds, ce qu’ils n’ entreprenoient jamais fans
rifques, & ce qu’ ils pouvoient rarement faire complètement,
vu la grande étendue des bois & leur
gnorance des localités. J’ai vu dans majeuneffe un
grand nombre de ces cultures clandeftines, & elles
me font affurer que, fous les.rapports des abris &
de la fraîcheur permanente de l’air, c’eft dans les
tailljs en bon fonds d’ un à-fix ans, furtout dans
des vallées, qu’ on devroit cultiver exclufivement
le Tabac en France, puifque le terrain ne coûteroit
rien, que la récolte feroit plus affûtée, & que la
repouflè du taillis y gagneroït. V T a i l u s .
V o ic i, d’après mon collègue à l’Inftitut, Olivier,
la manière dont on cultive le Tabac dans les
environs de Latakie, ville qui pi (Te pour fournir
le meilleur de l’Orient.
« Vers la fin de ventôfe (mars), on fème la graine
dans une terre graffe, humide &: meuble; un mois
ou quarante jours après, on arrache les jeunes
plants, & on les porte dans un champ préparé,
pendant l’hiver ,• par plufieurs labours; on y fait
des rigoles; on plante le Tabac à un pied ou
trente pouces de diftance l’un de l ’autre, & on
Tarrofe une ou deux fois, pour qu’il reprenne &
pouffe avec vigueur; on ne l ’arrofe plus en fuite J
afin de ne pas en détériorer la qualité, mais on a
l’attention de remuer la terre une ou deux fo is ,
& d’enlever toutes les plantes étrangères qui nui-
roient à l’accroiffcm. nt de celle-ci.
« Quand la plante eft bien fleurie, on cueille routes
les groffes feuilles, on les enfile & on les fait
fécher, fufpenduesau plancher, dans des chambres
( habitées ordinairement ) ouvertes de toutes
parts ; on a foin de brûler de temps en temps, au
milieu de la chambre, des plantes aromatiques,
telles que U famette , le thym, le ferpolet, la fange
F 1 f i ;