
Sud-Oueft; elle eft moins délicate qu’aucune des
autres.
5°. Le T abac de V érin e, ou T abac d’As
ie , ou T abac du Brésil (nicotiana panicu-
Uta Linn. ). Cette efpèce étant fort douce , on
la préfère en Turquie pour la pipe} c’eft la plus
petite & la plus délicate. Elle exige un climat
très-chaud & peut fe paffer d’arrofement.
Très-peu de temps après l’ introduélion du Tabac
en France, fa culture y fut reftreince à quelques
cantons par des lois fifcales, & bientôt après totalement
prohibée. La révolution ramena la liberté
fur cet objet ; mais après quelques années, cette
culture fut de-nouveau limitée , & elle l’eft encore,
malgré les dommages qui en réfultent pour les
propriétaires de terres, & la mauvaife qualité du
Tabac, qui eft la fuite de l ’emploi prefqu’exclufif
des feuilles du Nord.
Le Tabac étant cultivé pour fes feuilles, c’eft
à rendre ces feuilles- les plus grandes & les plus
nombreufes poflîble qu’on doit tendre 5 ainfi les
terres fraîches & très-fer tiles-font celles-où. il faut
le placer de préférence'. De plus , comme il eft fén-
fible à la g e lé e , & qu’il lui faut un certain degré
de chaleur pour arriver au degré convenable de
maturité, ce n’eft que dans lès climats dont la température
fe rapproche de celle de Ton pays natal,
qu’ il peut parvenir^ à toute fa 'perfection 5 auflï
les Tabacs du Maryland, dé là Virginiè, de la Caroline,
font-ils les plus-eftimés de ceux qui entrent
dans le commerce & qu’on cënfomme en France.
On a plufieurs fois élfevéi’la1 qüeflion de favoir
s’ il étoit avantageux à la Frah'cë de cultiver5 le
Tabac, -& fouvent ejle a été réfolue négativement.
En lifant les écrits de .ceux , qui la' proficri-
v en t , on juge fans peine qu’ils ont été diéfcés fous
l ’ influence de l’intérêt perfonnel,- & qluè; les:rai-
fonnemens les plus abfurdes, les faits les plus con-
trôuvés, ont feuls été employés. En effet, le Tabac
étant devenu, entre les mains du Gouvernement,
l’objet d’ un commerce exclufif qui enncHiffoit
beaucoup d’agens fifcaux, il a paru bien plus commode
à ces agens de Tacheter en'maffe dans l’A mérique
feptentrior.àle, où ils n’ ëtoiênt pas fur-
veillés, que de l ’acheter en détail (les cultivateurs
français, qui favoient fouflraire une partie de;l!eur
récolte pour la vendre en contrebande. Les deux
principaux motifs, dans Tintérêt du petipie, car il
fa llo it, à cette époque, pallier les plus injuftes
mefures de quelques prétextes plaufîbles, que fai-
foient valoir les écrivains en queftion, :fè fondoient
fur ce que la culture du Tabac épuife beaucoup la
terre, & fur ce que le Tabac d’Amérique eft meilleur
que celui de France. Ces faits méritent explication.
Puifque c ’eft pour les feuilles qu’on cultive le
T ab a c, on peut toujours, à un. petit nombre de
pieds près, confervés pour la re-produéfi^n/empêcher
la graine de fe former, & on l’empêche dans
toute culture bien conduite 3 a in fi il doit moins
épuifer la terre que le froment.& autres céréales,
que le chanvre & autres oléifères, dont on n'a
pas encore propofé de profcrife la culture en
France. ( Voyei Feuille, Ra c in e , T erreau,
Engrais, Prairie artificielle.) Toujours
des engrais peuvent rétablir l’état de fertilité de
la terre, toujours on peut fe contenter de feuilles
plus petites , comme je le dirai plus bas, : Cette
grandeur des feuilles qu’on exige dés cultivateurs
de Taba c, a pour principes l’ ufage , les premières
cultures ayant eu lieu dans les terres vierges de
l’Amérique; mais quoiqu’elle foit toujours défi râble
, puifquè fa conféquence eft une récolte plus
avantageufe fur une étendue donnée de terrain,
elle n’ influe en rien fur la qualité. ‘
Plus les cultures font variées dans une exploitation
rurale, & plus on peut retarder le retour
des mêmes AssOleMens:; ainfi; d’après les principes'développés
à ce mot celui Succession
de culture , il eft d’autant plus à defirer qu’on
y taffe entrer le Tabac partout où cela'eft poflîble,
qu’il eft d’une nature fort différente de toutes les
autres plantes cultivées.
Sans doute lé Tabac de nos départemens méridionaux
n’a pas la qualité de celui qui nous étoit
fourni par la Virginie & contrées voifines; mais il
ne doit pas y avoir de différence fenfible quand on
compare ces derniers à ceux cultivés fur les bords
de la Méditerranée ou au-delà de Tonloufe & dé
Bordeaux. Les Tabacs de Nérac, canton où on en
cultivoit autrefois beaucoup, paffoient pour fupé-
rieufs aux Tabacs américains, aux yeux de quelques
amatèurs, parce qu’ ils étoient plus doux par
leürnatüre..
• En tour pays, la culture du Tabac eft extrêmement
profitable à ceux qui l’ entreprennent, lorfque
des lois fifcales ne viennent point la gêner ; elle
faifoit.la fortune dès propriétaires dés parties méridionales
de l’Amérique feptentrionale ayant la
révolution françaife. Elle a confidérablement relevé
l’ aifancé des cultivateurs qui s’y font livrés,
en France, dans les premières années de cette’révolution.
Je crois pouvoir affurer que le rétablif-
fement du privilège exclufif de la venté dë la
feuille préparée, dans la main du Gouvernement,
a été non-feulement très-nuifible aux profits généraux
de l’agriculture françaife, mais encore aux
retenus bien calculés du Gouvernement.
Une très-grande quantité d’ouvrages ont pour
objet la culture du Tabac ; les uns , ceux publiés
par des praticiens, décrivent fans,critique ce qu’ils
ont vu faire dans tel lieu',- fans penfer que cette
culture devoir varier félon les climats, les terrains,
les expofitions, &c. 3 les.autres, ceux dus à des
hommes de cabinet, font le plus fouvent diètes
fous l ’influence d’ un efprit fyftématique.. Je vais
effayer d’en tirer ce qu’il y a de bon, & de le coordonner
avec ce que j’ai vu en Caroline, où j’ai
fuivi cette culture pendant deux années, ainü
qu’en France, où elle a été fort étendue pendant
douze à quinze années confécurives.
En tout pays, une terre profonde, ni trop légère
ni trop fo r te , ni trop fèche ni trop humide,
fort furchargée d’humus ou d’engrais, eft celle qui
convient de préférence au Tabac.
En général, lé. Tabac profpère mieux dans les
vallons que fur les coteaux , à raifon de là. plus
grande humidité , de la plus grande chaleur &: de
la moindre aétion des vents. Les bords des rivières
lui font principalement favorables; on gagne encore
à cette fituation la plus grande facilité pour
Tarrofer, lorfque cela devient, indifpen.fab.le à fon
fuccès par la prolongation de la féchereffe.
La culture du Tabac dans les marais defféehés
eft extrêmement fruCtueufie , mais fes réfultats
font dé mauvaife qualité. S i, au contraire, on le
cultive dans un fol fablonneux , le plant brûle, pour
me fervir de l’expreflîon reçue , c ’eft-à-dire, refirent
trop l’impretlion des féçherefE-s.
La terre deftinée au Tabac doit être labourée
le mieux poftible, foit à la houe, foie à la bêche,
le labour à la charrue étant inférieur èn ce qu’ il
n’approfondit & ne di-vife pas autant... Voye^ L a bour.
Le motif qui oblige d’approfondir & de divifer
autant le terrain, c’eft que le Tabac a une racine
pivotante fort longue , avec des fibrilles très-fines ,
& que, pour pouffer de, grandes feuilles, il doit
parcourir le plus rapidement poflîble les phafes de
fa végétation.
Cette dernière condition'engage de plus à employer
des engrais très-confommés, c’ eft-à-dire,
où la partie foluble foit,en- fur abondance, & à les
placer immédiatement contre les racines. .
Le Tabac étant extrêmement fenfible aux gelées,
ne peut être femé ou planté en pleine terre que
lorsque celles du printemps ne font plus à craindre,
& doit être récolté avant les premières d’automne.-
Ces principes généraux pofés.,. j’entre dans ie
détail de la culture du Tabac, i° . en Caroline
(celle de la Virginie n’en diffère pas); 2°. dans les
parties méridionales de la France 5 30. dans le nord-
eft du même pays ; 40. en.Hollande, fans cependant
négliger de parler de celle des autres pays
lorfque l’occafion s’en préfentera.
Ce font, autant q;ue poftible, les.terrains neufs,
c’eft-à-dire, ceux dont les arbres ont été arrachés
nouvellement, qu’o-n confacre; à> la culture du
Tabac en Caroline j parce que: leur fertilité écant.
extrême,, ils produisent' des feuilles gigantefques
(celles d’unipiêd & :<iemi de large fur trois à quatre ;
pieds de long ne font pas rares) , & que cette
même fertilité ne permet d’ y femer ni au maïs,
ni du coton, qui n'y donneroient que des Feuilles.
Voye^ ce mot.
La première année, comme il refis dans le ter-
raiu beaucoup de groffes fouches qu'on n’a pas
enlevées, à raifon de la dépenfe, & même quell
e s gros arbres qu’on s’eft contenté de frapper de
mort en enlevant leur écorce à deux ou trois pieds
de terre, on ne peut pasfaire un labour régulier,
& en conféquence on n’utilife que les places les
plus dégarnies. C ’eft toujours la houe qu’on emploie
dans ce cas. Ori y plante le Tabac fans ordre,
mais cependant à des diftances convenables, c ’eft-
à-dire, proportionnées à la fertilité préfumée du
terrain. Des binages plus multipliés que dans les
terrains anciennement cultivés fontindifpenfables,
à raifon de la multitude des racines qui repouffent
ou des graines qui germent. Les Tabacs de cette
première culture étant produits fous l’influence
d’une végétation plus vigoureufe & d’une humidité
plus confiante, font plus doux que les autres, ,
à raifon de cela, préférés par les planteurs pour
leur ufageî
* Tant qu’ uri propriétaire a des bois à défricher ,
il en confacre, chaque année, une portion proportionnée
au nombre de bras dont il peut difpofer,
i à la culture dont je viens de parler. Tous fe plaignent
de c i que leurs pères ont trop accéléré leurs
1 défrichemens, parce que ces terres d’ abord fi fer-
; tiles ne tardent pas à devenir impropres à la çul-
; tare du T abac, furtout lorfqu’elles font en pente
& expofées au midi, à laquelle on fubftitue celle
du cocon, puis celle du maïs, celle des patates, & c .
LorfquTm champ deftiné à la culture du Tabac
eft complètement dégarni de fouches , on lui
donne, au commencement de l’hiver, fouvent un
premier labour à là charrue, pour enterrer les plantes
qui y ont crû naturellement en automne , &
un fécond labour au printemps, à la houe, immédiatement
avant la plantation du Tabac. Quelques
planteurs, pour éçonona-ifier leurs bras , font auflî
ce fécond labour à la charrue , & fe contentent de
faire labourer plus profondément avec la bêche ou
avec la houe , dans un efpace d’environ un pied,
les places où doivent être placés les pieds de
Tabac.
Ces places font diftantes de trois pieds les unes
des autres , difpofées; en quinconce au moyen
d’un cordeau garni de noeuds, & indiquées par de'
petits piquets. L ’expérience a prouvé que cet écartement
éc cette difpofîtion étoient les plus favorables
pour les plants de Tabac & les opérations
de culture qu’ils exigent. Quelques planteurs préfèrent
cependant la difpofîtion en carré,; mais il
.eft évident qu’ ils ont to r t, du moins lorfqu’ ils n’é-
cartent pas davantage leurs plants. Voyez Q uinco
n c e .
J’ai déjà parlé plufieurs fois de plant de Tabac
fans dire ce que ç’ étoit : il faut l'expliquer.
Naturellement on devroit femer la graine de
Tabac fur le terrain, foicà la v olé e , foit en rayons ;
mais on le fait rarement, d’abord parce que dans
ce mode, même au moyen des farclages & des re-
j piquemens» il eft impoftible de mettre le plant à
une diftance convenable ; enfuite parce que le
plant tranfplanté dans uns terre nouvellement labourée
profite plus que s’il étoit laiffé dans le lieu