
lettes de la café; ces tas s’appellent manofqu.es.
Souvent, & on devroit toujours en agir ainfi, on
fait trois lots des feuilles de chaque tige : (avoir,
celles d’en haut, ce font les plus douces ; celles du
milieu, ce font les plus grandes & les plus pourvues
de montant; celles du bas , ce font les moins
eftimées : fouvent auffî on mêle toutes ces qualités
ou au moins les deux premières, quoiqu’on prétende
toujours, au,moment de la vente, que la
réparation a eu lieu, ce qui né trompe, au relie,
que les acquéreurs ignorans.
Les manofques complètement defféchées fo n t,
par un temps humide, étendues dans des tonneaux
faits exprès, & en les y empile au moyen d’ efforts
puiifans. De la plus grandé force de compreflion.
réfulte la meilleure & la plus longue confervarion
du Tabac; ainli il ne faut pas ménager fa peine fi
on veut que la vente foit la plus avantageufe pof-
fible. En Caroline on emploie pour cette opération,
tantôt une preffe à vis, tantôt une prelfe à
long le vie r, tantôt le coin chaffé à refus de maillet.
C ’eft dans cet é ta t, où il peut relier fans inconvénient
pendant plufieurs années, puifqu’une
nouvelle fermentation ne peut s’y développer, à
raifon de la grande compreffion dans laquelle il fe
trouvé, que le Tabac eft vendu en Caroline. Avant
d e tte exporté, il fubit l’examen d’infpeéleurs
publics qui en fixent la qualité. Celui qui a été alté
ré , fait dans les. préparations que je viens de
détailler, foit parce qu’il a été mouillé dans le tonneau
en route ou autre p art, eft brûlé par ordre
de ces infpeéteurs. C ’eft principalement cette inf-
titution qui a valu aux Tabacs de la Virginie, du
Maryland & de la Caroline, la réputation dont ils
jouiflènt ; réputation d’ailleurs fondée, comme je
l’ ai obfervé au commencement de cet article, fur
la fupériorité réelle que leur donne le climat.
Quelques planteurs de la Caroline mettent en
carottes une certaine partie de leur récolte de
Tabac, & l’expédient ainfi pour les ports de mer.
Une partie de ces carottes eft employée à la con-
fommation des fumeurs de ces ports & des équipages
des vaiffeaux , & l’autre à une exportation
de contrebande, fi je puis employer ce terme, puif-
qu’il n’y a pas de droit de fortie fur les Tabacs
dans les Etats-Unis, c’eft-à-dire, à une exportation
qui n’eft pas lurveillée par les infpeéteurs publics.
Les feuilles qui repouffent des pieds de Tabac
après que la tige a été coupée,: font en partie ré<-
coïtées par les nègres & préparées pour l’ufage
de leur pipe ou de celle des plus pauvres blancs.
Il eft défendu par la loi d’ en exporter les produits.
La moindre âcreté de ces feuilles les rend cependant
très propres à être employées de préférence
par ceux qui ne font pas biafés par l’habitude
de fumer avec excès.
Les tiges d e : Tabac fe biûlent ; leurs cendres
font très-riches en porafîe.
On évite sffzz communément de remettre du
I Tabac dans un champ qui vient d’ en porter ; cependant
, dans les terres neuves ou d’ une nature
| très-fertile, on ne craint pas de braver les principes
des aflolemens, furtouc dans les années où la vente
, eft fort avantageufe.
Il eft extrêmement rare qu’on mette des engrais
dans les terres à Tabac de la Caroline ; mais comme
les mauvaifes herbes y croiffent en grande abondance,
leur enfouiffement, par les labours, équivaut
louvent à un fixième, même fouvent à un
quart de fumure.
La culture du-Tabac, dans le midi de la France,
eft bien inférieure à ce qu’elle devroit être pour
la quantité, & je n’en puis deviner le motif,
puifque la qualité des feuilles eft bien fupérieure,
& par conféquent la vente plus avantageufe : de
plus, la récolte y eft beaucoup plus allurée que
dans le nord.
Dans les environs de Clairac, on fème le Tabac
fur des couches de fumier de cheval mêlé avec des
feuilles fèches & autres matières végétales, couches
qui fe placent contre un mur expofé au midi
ou au levant, & qu’on garnit d’un châflls en perches
propres à recevoir des paillaffons ; ces couches,
chez quelques cultivateurs., ne font que de
la terre bien labourée & furchargée d’ engrais plus
ou moins décompofés, de forte qu’elles ne communiquent
aucune chaleur propre au plant qu’on,
leur confie.
C'eft à la fin de février qu’on répand la graine
de Tabac fur ces couches, ordinairement à la vo-,
lée,quelquefois en rayons.
La graine de Tabac ne doit pas être recouverte
de plus de deux à trois lignes de terreau ou de crotin
de cheval, afin qu’elle puiffe reffentir les influences
de la chaleur folaire; mais lorfque le plant a
acquis deux à trois pouces de haut, on recharge
la couche , avec un tamis, de terreau défféché,
dans une femblable épaiffeur, & on arrofe en-
fuite. Par cette pratique on réchauffé le plant, &
on accélère beaucoup fa végétation. Elle eft donc
dans le cas d’être recommandée. On couvre, pendant
la nuit, ces couches de paillaffons qui empêchent
l’effet des gelées ou feulement du froid. U
vaudroit mieux employer de grandes caiffes ren-
verfées, & encore mieux deschâflis vitrés, comme
plus propres à remplir l'objet. On arrofe, on éclaircit
& on bine le plant au befoin.
Rarement la culture du Tabac a lieu en grand
dans le midi de la France ; mais la plupart des cultivateurs
qui ont de bonnes terres légères & fraîches
, & beaucoup d’engiais à leur difpofition, lui
confacrent environ un.arpent, plus fouvent moins
que plus, c’eft-à-dire, la quantité que la famille
peut travailler de fes feules mains, & dont elle
peut raffembler les produits dans une des pièces de
fon domicile.
Un des grands avantages de la culture du Tabac
dans les lieux très-populeux, c'eft queprefque tontes
les opérations qu’elle exige, après les labours,
peuvent être faites par des femmes & des enfans ;
auffi beaucoup de cultivateurs la conlidèrent-ils
plutôt comme un moyen d’occuper leurs enfans,
qui fans cela fe livreroienc.au dévergondage, que
comme moyen de revenu, quoiqu’elle foit fouvent
la plus productive de toutes celles qu.’ ils font.
Vers la fin d’avril ou le commencement de juin,
fuivant que le plant eft avancé & l’atmofphère
convenablement difpofée, on le tranfplante dans
un champ qui a reçu deux labours d’hiver & une
forte fumure, & qui n’en a pas porté depuis quatre
à cinq ans. Tantôt cette tranfplantation a lieu
en lignes parallèles, tantôt en quinconce ; la dif-
tance entre chaque pied varie de deux à trois
pieds : moindre dans les mauvais terrains, plus
grande dans les bons.
En difpofant les lignes de Tabac , on laiffera, à
chaque troifième rang, un efpace double pour le
paffage des ouvriers > car lorfqu’ on ne prend pas
cette précaution, quelque foin qu'apportent ces
ouvriers dans le travail du binage, ils déchirent
toujoursquelques'feüilles, & ce font conftamment
les plus belles.
On exécute la plantation du Tabac , autant que
poflible, avant, pendant ou après la pluie, en fai-
fant, avec une bêche, des trous de fix pouces en
tous fens, en mettant un pied en motte dans le
trou, en entourant fes racines d’ une ou deux poignées
de terreau, & en les recouvrant de la terre
retirée du trou. Huit jours après , on vifite le
champ pour remplacer les pieds morts au moyen
de ceux qu’on a rélêrvés à cet effet.
Quelques cultivateurs, pour activer d’ autant la
croilfance de leurs Tabacs, font, en buttant, immédiatement
avant le pincement du. fommet des
tiges, un petit auget autour de chaque pied, &
mettent dans cet auget une poignée de colombine
ou de terreau confommé. '
Queiqu’ avantageux qu’ il foit , pour l’abondance
du produit, de bien fumeç les terres deftinées au
Tabac, il ne faut cependant pas le faire avec
excès, parce que le fumier pourroit tranfmettre
fon mauvais goût aux feuilles. Prefque partout on
préfère le fumier de mouron à celui de cheval &
à celui de vache, probablement parce qu’on a remarqué,
comme cela eft réellement, qu’îl eft moins
fujet à ce grave inconvénient.
Le pincement ou écimage de la partie fupérieure
de latige, reffeuillaifonde la*partie inférieure ( i)
& la fuppreflion des bourgeons axillaires ont lieu
en août.
On donne trois & même quatre binages, dans le
-courant de l’é t é , aux plantations de Tabac , en
chauffant légèrement chaque pied. Je dois avouer
cependant que, faute de temps, ou par ignorance
? rT CT ^ terre> mais on les réferve pour la première ré
I L° tC‘ P^us mauvaifes font alors jetées fur le fumier, f
I « meilleures employées à faire du Tabac de fécondé qiialid
de leurs bons effets, il arrive fouvent qu’on ne
fait qu’une partie de ces opérations, ou qu’on les
exécute d'une manière incomplète.
Les grandes féchereffes font fort à craindre en
tout temps pour les cultivateurs de Tabac, nuis
principalement celles qui fuivent la tranfplantation;
a.ufll ceux qui n’ont que de petites cultures & qui ont de l’eau à leur proximité, ne fe refufent-
ils pas toujours à les arrofer.
Les grêles font rares en Amérique , dans les
cantons où on cultivé le plus le-Tabac; mais elles font fréquentes en France : ‘auffî les cultivateurs
des environs de Clairac, ainfi que ceux des environs
de Scheleftat, les redoutent-ils beaucoup,
les plus petites leur faifant perdre en quelques minutes
la récolte de la plus belle apparence. Il n’y
a pas moyen de s’oppofer à cet événement. Quelques
perfonnes, pour feconferver quelque chofe,
coupent de fuite toutes les feuilles gâtées; ce qui
donne lieu à une nouvelle pouffe dont les produits
font de beaucoup inférieurs à ceux de la première,
'mais qui cependant ont quelque valeur.
Les vers blancs (larves de hannetons) font fou-
vent beaucoup de tort-aux plantations de Tabac.
On peut diminuer beaucoup leurs ravages par le
moyen employé dan's les pépinières , c’eft-à-dire ,
en plantant des pieds de laitue dans l’intervalle
des rangées, en les vifitant tous les jours, & en
fouillant la terre autour de ceux de ces pieds que
la fanaifon dev!eurs feuilles annonce être attaqués,
pour tuer les vers qui s'y trouvent. Voye^ Ha n n
e to n .
L’orobanche rameufe, Iorfqu’elle fe propage
dans les champs de Tab a c, en fait périr un grand
nombre de pieds ; mais comme elle eft annuelle, on
peut s’en débarraffer pour un grand nombre d’années,
en arrachant, dès qu’elle fe montre , les
pieds fur lèfquels il s’en trouve. Ce facrifice n’eft
rien quand on le compare aux pertes qui peuvent
être la fuite de la multiplication de cette parafite,
V'oyei O r o b a n ch e .
C ’eft ordinairement vers le milieu de feptembre
qu’ on fait la récolte des Tabacs, plus tôt ou plus
tard, félon que la faifon a été favorable. On fe
guide d’après les indications énoncées plus haut,
& on procède poficivement comme en Caroline.
Les tiges coupées s'apportent le foir ou le lendemain
matin àvla maifon, & fe fufpendent de fuite,
deux à deux, à des cordes ou à des gaulettes dif-
pofées à cet effet dans un lieu non habité. Je fais
cette remarque, parce que les feuilles de Tabac ,
en tout temps, & furtout quand elles font fraîches ,
exhalent une odeur irritante qui fatigue beaucoup
ceux qui l’afpirent » & un gaz délétère qui conduit
à la mort Ceux qui relient expofés pendant quelques
inftans à fon a&ion dans un lieu fermé. Ces
inconvéniens ne fe montrent point en Caroline,
où le Tabac eft toujours défféché dans des lieux
fpéciaux & très-aérés; mais il n'en eft pas de même
dans le midi de la France, où c ’eft une grange,