chimiftes , & c’eft par cette opération qu’elles deviennent
utiles à l’homme : de-là leur nom qu’ elles
ont donné à cet alcali, dont on fait uh grand ufage
dans les arts & dans l’ économie domeftique. Voyeç
A l c a l i .
Pour retirer le fel de Soude des Soudes, on les
fait brûler lentement dans des foffes ou dans des
fours, on lelïive leurs cendres & on fait évaporer
l’eau j le réfilu qüi'refte au fond de la chaudière
eft du carbonate de Soude, mêlé de quelques autres
fels & de matières étrangères qu’on peut en fé-
parer par des procédés dont je parlerai plus bas.
La quantité de Soudes qui croiffent naturellement
en Europe fur le bord de la mer n’étant pas
fuffifanté pour fatisfaire à la confommation du fel
qu’elles peuvent donner par leur combuftion, il a
fallu en cultiver pour trouver le fupplément né-
ceffaire. *
Plufieurs fois on a tenté, en France, des fpécu-
lations -qui avoient la culture de la Soude pour
objet j elles ont réuflî dans les temps de guerre ',
lorfque nos communications avec l’Efpagne étoient
fermées, mais il n'a jamais été poflible de foute-
nir la concurrence, en temps de paix, avec les
cultivateurs de ce pays, principalement avec ceux
des environs d’Alicante, qui fourniffent la meilleure
Soude du commèrce.
Aujourd’hui que la chimie nous a appris les
moyens de décompofer directement le fel marin,
& de nous procurer en un jour plus de Soude que
toutes les cultures de l’Europe n’ en peuvent fournir
en un an, il eft moins intéreffant de cultiver
les planté» dont il eft ici queftion ; cependant j’ai
entendu dire à Chaptal, que les Soudes qu’on en
tiroit étoient plus propres que celles provenant de
la décompofition du fel marin pour quelques opérations
dè teinture, ce qui leur aflure une perpétuité
d’emploi.
Quoi qu’ il en fo i t , je dois donner ici quelques
détails fur la culture de la Soude en France & en
Efpagne.
Je n’ai vu cultiver la Soude qu’ à l’embouchure
de la Bidaffoa , & encore feulement en paflant $
ainfi je fuis obligé de parler d’après les"autres.'
C ’ eft principalement fur les bords de la Méditerranée
, depuis Perpignan jufqu’ à Marfeille,
qu’ on cultive la Soude en France.. Elle fe plaît
mieux, dans les terrains légers & foiblement falés
que dans tous les autres. ' ,
Je prends dans un Mémoire de M. Paris, l’ ün
des correfpondans de la. Société d’Agriculture du
département de la Seine, ce que je vais dire de la
culture delà Soude dans les marais falés de l’embouchure
du Rhône.
. Quoique, dans ces marais * on puiffe retirer dè
la Soude par la combuftion de plufieurs plantes, on
n’y cultive que la Soude commune ou barille., ou
falicot (falfola fbda ).
La femence de barille, femée dans les terres non
fàîees, y dégénère à chaque reproduction , de forte j
q ue , fi on ne veut voir diminuer les produits , il
faut la renouveler au bout de quelques années
c’ eft-à-dire, femer de nouveau de la graine de
plantes venues fans culture dans les marais, plantes
qu’on appelle Soude de barille ou Soude des haines
aux environs d’Arles. *
O r , pour .avoir de cette dernière en fuffifanté
quantité, on eft obligé de femer dans les marais de
la graine de Soude cultivée, qui, après trois reproductions
fpontanées, y donne de la graine
propre à être de nouveau fèmée avec avantage
dans lès terres arables, & qui fe vend en confé-
quence un tiers plus cher que celle récoltée dans
ces terres arables.
Cette pratique eft fondée fur l ’obfervation encore
inexpliquée, mais certaine, qu’ au bout de
quelques années la Soude cultivée dans un fol non
falé ‘àc loin de la mer ne donne plus, par fa combuftion,
que de la P o t a s s e . Voye[ ce mot.
Les engrais, furtout ceux des bergeries, ne doivent
pas être épargnés quand on en a beaucoup à
fa difpofitioni mais pour peu que le fol foit naturellement
bon, vingt charretées à trois chevaux,
par heCtare, fuffifent. Ils doivent être bien con-
fommés.
Si les terres font fortes, plufieurs labours font
indifpenfables pour affurer le fuccès de la culture
de la Soude.
On fème en février ou en mars dans les terres
qui ne font pas furchargées de mauvaifes herbes ;
dans les autres, on retarde jufqu’en avril pour
faire périr ces mauvaifes herbes par un dernier labour.
Plus tôt cette opération eft faite, & plus on
doit compter fur une abondante récolte.
Les cultivateurs ne font pas d’accord fur la
quantité de femence qu*ii convient d’èmployer,
& ils ne peuvent pas l’ être i car il eft rare qu'elle
foit entièrement bonne. Cinq hectolitres paroif-
fent cependant, terme moyen, la mefure exigible
pour chaque heCtare.
La femence fe*répand à la volée & fe recouvre
avec une herfe_,très-légère. Il eft bon de rouler
pour conferver l’humidité du fo l , ‘humidité très-
favorable à la. germination, & qu’on empêche
fouvent de fe perdre au moyen d’herbes de marais.
Le fuperflu de la graine de Soude fe donne , aux
environs de Narbonne, au rapport de Decandolle,
en guife d’avoine, aux boeufs de labour, quul’ai-
ment beaucoup, & dont elle conferve la force &
l’embonpoint.
La Soude redoute exceffivemertt le voifinage
des mauvaifes herbes, & exige des farclages répétés
, principalement pendant les mois d’avril., mai
& juin.
La récolte* de la Soude a lieu à la fin de juillet
ou au commencement d’aoûr, quelques jours plus
tô t , quelques jours plus tard, félon que la .température
printemps & de l’été a été chaude ou.
froide, félon l’époquê des femailles, la nature du
fol, &c. Cette récolte eft indiquée par le changement
de couleur des tiges & la maturité de la
moitié des graines. Si on a,ttendoit plus tard ^ les
produits en fel feroient moindres. Les pieds s’arrachent
à la main.
J’obferve, à cette occafion , qu’ il réfulte des
expériences de Théodore de Sauffure, que plus
les plantes font jeunes & plus elles donnent d’alcali
> ainfi récoîteria Soude atiffitôt qu’elle eft parvenue
à toute fa hauteur , fauf.à en laiffer une
partie pour graine, feroit fans doute très-profitable.
Après avoir arsachi la Soude on la dépofe fur
le fol en petits tas, & on l’y laifîe pendant quatre
à cinq jours, puis on la met en meules oblongues
qu’ on recouvre, en cas de pluie, de paillaffons ou
de nattes pour empêcher l'eau d'y pénétrer. Ainfi
difpofée, elle fermente & fe fèche. Ordinairefnent
elle eft. dans le cas d'être brûléè au bout de huit à
dix jours.
#Si on vouloit brûler la Soude trop verte ou trop
fèche, on auroit moins de produit5 ainfi il faut
choifir le terme moyen convenable : or, la pratique
l'indique mieux que tous les raifonnemens.
Pour brûler la Soude, on creufe, à quelque dif-
tanee de la meule, un trou dont la profondeur eft
à peu près égale aux deux cinquièmes du diamètre,
& dont la capacité fe calcule à raifon d’ un
mètre cube par quatre-vingts quintaux d'herbe.
Cette foffe eft au moins auili large à fon fond qu'à
fon orifice, Pour empêcher les eaux d’y entrer,
& pour en confolider les bords, on les. revêt
d’ un bourrelet d’argile mêlée de paille hachée, de
quinze à vingt centimètres de hauteur.
On garnit aufti d’ une couche d’ argile, mais fans
paille, le'fond de la foffe, lorfque le terrain eft
iablonneux.
Il faut à peu près trois quintaux & demi de
bois de corde, pour chaque mètre cube de capacité,
pour chauffer la foffe. Lorfque cette quantité
eft confommée & que les parois Jonc rouges, on
redouble la vivacité du feu en y jetant deux ou
trois fagots de menu bois.
Le brûleur, après avoir retiré de la foffe toute
la braife, au moyen d’une pelle en fe r , y defeend
chauffé en fabots humides, & fe hâte de balayer &
.enlever l$s cendres. '
Pendant ce dernier travail, l'aide* du brûleur
fait enflammer, fur les charbons ardens que celui
ci a retirés de la foffe, quelques plantes de
Soude qu’on a eu foin de faire fécher plus que-les
autres, & qu’on dépofe enfuitê dans la foffe avec
précaution pour leur conferver l’ air néceffaire à
une combuftion aCtive. Le brûleur continue à alimenter
le feu avec les plantes qu’on lui apporte de
la meule , & qu’il prend & place avec une fourche
fur l’orifice de la foffe , de manière qu’elles
ne tombent au fond qu’ en brûlant. Lorfqu alors
elles diftillent une matière rouge , femblable à du
métal en fufion , c’eft un indice de la réuïïite de
^opération*
Deux heures après qu’on a commencé à brûler,
on ceffe d’ alimenter le feu j & dès que les dernières
plantes qu’on y a jetées font réduites en
charbon, le brûleur, avec fa fourche, les étend
également dans tout le fond de la foffe 5 enfuice
deux journaliers & lu i, fi Ja capacité de la fofle
n’eft que d’ un mètre cube , & deux hommes de
plus pour chaque mètre cube dont cette capacité
eft augmentée, munis chacun, d’une _perche.de
faule v e r t , terminée en maffue , pétrifient la matière
en fai Tant lentement le tour de la foffe , 1 un
derrière l’autre. . . , , 0 a
Lorfque tous les charbons font incinérés & mêlés
avec la matière qui a découlé des plantes , on
fufpend cette, manoeuvre pour recommencer à
brûler comme on a fait la première fois j mais à
cçlle-ci on continue la combuftion pendant deux
à trois heuresfjj après lefquelles on pétrit encore.
On répète alternativement cette double manoeuvre
jufqu’à ce que la matière rempliffe la foffe ou
qu’on n’ait plus de plantes à brûler. ' | |
Il peut arriver qu’ à la première & même à la fécondé
fois qu’on pétrit, des cendres forment une
partie duréfidu de la combufiion des plantes. C e t
inconvénient ne doit pas décourager, pourvu que
la matière pâteufe domine > la cendre s’y mêle &
difparoît dans les pétriffages- fubféquens.
Lorfqu’on a achevé de brûler, on couvre ordinairement
la foffe avec de la terre qu on amoncelé
en forme de cône , pour qüe 1 eau de la pluie
ne puiffe pas pénétrer jufqu’ à la matière, quelle
diffoudioit. • . ,
Après avoir laiffé refroidir cette matière trois
jours au moins , on la divife en gros quartiers
qu’ on peut livrer de fuite au commerce.
• Les meules des plantes à brûler étant à quatre
ou cinq mètres de la foffe , le journalier oui eft.
chargé de les rapprocher du brûleur, avanfde les
mettre à fa portée, en fecoùe & bat chaque four-
chée. C ’ eft le feul moyen qu’ on emploie pour en
féparer la graine, qui fe détache facilêment.
Cette graine étant de différens degrés de matur
ité , eft de beaucoup inférieure a*celle qu’ on fe
procureront fi on réfervoit une portion du femis
pour s’en procurer, portion dont on n arracheront
les plantes que lorfque toute la graine feroit
mûre. ' g W
Un fol qui convient à la Soude donne , année
commune, par heCtare, outre quatre-vingt-dix
hectolitres de graines , _ênviron cent foixante
quintaux de plantes vertes, qui produifent, par
leur combuftion, vingt-deux quintaux de.matière
faline. 1
Lorfqu’on fème la Soude dans un fol marécageux
après One feule façon à l'araire, & qu on ne
donne plus aucune façon aux plantes, il faut,
pour en obtenir la même quantité , enfemencer
trois fois autant de terrain.
En 1809 , un heCtare de Soude convenablement
i cultivé a produit, aux enviions d’Arle s, J 390 fr.