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Lorfqu’ on établit des plates-bandes de Terre
de bruyère dans les jardins payfagers * à l’ombre
des grands arbres, on leur donne une forme arrond
ie , ovale ou irrégulière, & alors on les appelle
des C orb e il le s . Foye\ ce mot.
Subftituez la Terre de bruyère au terreau fur les
couches de primeurs, & vous obtiendrez des petites
raves , des falades , du pourpier , & c . , de
bien meilleur goût.
Une planche deftinée aux femis ou repiquages
peut n’avoir que lix à huit pouces de profondeur
de Terre de bruyère ; celle deftinée aux.
plantations d’agrément doit avoir au moins un
pied : toujours on doit defirer qu’elle ait dix-huit
pouces. Voici comment on la forme.
Je fuppofe qu’elle foit au nord d’ un mur de dix
pieds de haut ; cette élévation eft le terme moyen
convenable & pour avoir de l’ombre & pour
avoir de l’air.
On creufera, en automne, à deux pieds de ce
mur , & dans une largeur de huit pieds, une folle
de deux pieds de profondeur, & on en tranfpor-
tera la Terre au loin.
, Au fond de cette foffe on mettra trois à quatre
pouces d’épaiffeur de pur fable, fi on en a à fa dif-
pofition5 fi on n’en a pas, on pavera ce fond de
tuiles ou de larges pierres plates : le b u t, c’ eft
d’empêcher les vers blancs (larves de hannetons),
les vers de Terre 8e les courtilières de monter
dansia Terre de bruyère, où ils fe plaifent mieux
que dans 1a Terre fo r te , 8e d’y nuire aux femis ou
aux racines des plants 8e des arbriffeaux. Il feroit
b o n , pour la même raifon, de mettre des tuiles
ou des planches contre les parois de la foffe.
Comme je l’ ai déjà dit plus haut, il eft affez
généralement d’ufage de mettre au fond de la
fo f fe , dans une épaiffeur de cinq à fix pouces,
les relies provenans du caffement de la Terre de
bruyère, relies compofés des racines ou des branches
d’arbres encore en état ligneux , & q u i, fe
pourriffant lentement, doivent fournir plus tard
un aliment aux racines les plus profondes des ar-
buftes qui y feront plantés > enfin, on remplit la
foffe de Terre de bruyère nettoyée, & on élève
cette Terre de fix pouces au-deffus de la furface
du fo l, pour compenfer le taffement qu’elle doit
éprouver dans le courant de la première année.
Dans cet état on peut planter, mais il eft mieux
de ne le faire qu’après une pluie un peu forte , ou
après avoir légèrement taffé la Terre avec des planches
fur lefqaelles une ou deux perfonnes. fe promènent
quelques inftans en appuyant les pieds.
Les travaux qu’exigent les plates-bandes de
Terre de bruyère ne diffèrent pas de ceux qu’on
applique aux autres cultures j feulement elles demandent
plus impérieufement des arrofemens pendant
les longues féchereffes ou les grandes chaleurs
, furtout quand elles ne font pas complètement
garnies.
Ce font furtout les cultures en Terre de bruyère
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en pots qui doivent êtrearrofées fouvent, parce
que la defficcation y eft bien plus rapide. Je dois
faire obferver1, à cette occafion , que toutes les
fois qu’on arrofe pour la première fois une Terre]
de bruyère fèche , l’eau n’y pénètre que très.]
lentement & très-difficilement ; qu’ on doit donc
s’y prendre à différentes reprifes, lorfqu’on veut
qu’elle foit complètement imprégnée d’eau.
Toutes les fois qu’on cultive un jardin dont la
Terre eft trop fo r te , on l’améliore plus en y
apportant de la Terre de bruyère qu’ en y apportant
du fable, puifque cette Terre renferme beaucoup
de matières végétales qui doivent fe changer
en humus.
Une plate-bande de Terre de bruyère établie
comme je viens de l’ indiquer, peut fubfifter un
nombre d’années indéterminé, en la rechargeant
tous les trois ou quatre ans , c’eft-à-dire, en
rapportant fur fa furface une couche de trois
à quatre pouces de nouvelle Terre de bruyere,
Les plantes qui fe cultivent le plus communément
dans les plates-bandes de Terre de bruyère
appartiennent aux genres fuivans :
Airelle.
Andromède.
Aralie.
Azalée.
Bruyère.
Budlège.
Calycant.
Céanothe.
Céphalanthe.
Chionanthe.
Cléthra.
Décumaire.
Fothergille.
.Galé.
Gordone.
Halezia.
Hamamelis.
Hydrangée.
Itée.
Kalmie.
Koelreuterip.
Ledon.
Liquidambar.
Magnolier.
Prinôs.
Rhododendron.
Rhodore.
Spirée.
Zanthorife.
Je le répète, toutes les plantes, fans exception,
profpèrent dans la Terre de bruyère tranfportée
dans les jardins & entretenue conftamment humide
: tous les légumes y font fuperbes & excel-
lens. J’ai vu des grains de froment y pouffer vingt
épis. On ne peut trop la vanter , car elle eft dans)
ce cas la véritable Terre promife, ( B o sc .)
T erre c a il lo u t eu se . C ’eft celle qui renferme
des pierres filiceufes plus ou moins arrondies
& de groffeurs inégales , mais dont la plus
confidérable ne furpaffe pas la tête d’ un enfant.
Cette forte de Terre fe confond, pour la culture,
avec la Terre graveleufe, lorfque les pierres y
dominent fur l’argile & le calcaire , & avec les
pierres pierreufes lorfque les pierres y font rares,
mais groffes. Foye^ G r a v ie r & Pie r r e .
Il eft de ces Terres qui font très-propres à la
culture des céréales, mais elles ont l’inconve*
nient d’ ufer très-rapidement le foc des charrues.
On les épierre de temps en temps pour en rendre
la culture plus facile, furtout lorfqu’ on y f
des
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des Pr a ir ie s a r t if ic ie l l e s . ffgjtto ce mot
& celui Ép ie r r e r . ( 5 ojc.)
T erre c a l c a ir e : Terre qui provient de
la décompofition des roches calcaires. Elle eft
très-commune en France. Comme par fa nature
elle influe beaucoup fur l’agriculture , je dois
m’étendre un peu fur fes caractères & fes qualités.
La chaux & l’ acide carbonique font les feujs
compofans néceffaires de la pierre calcaire, mais
prefque toujours de la filice & de l’argile lui font
unies dans des proportions fans nombre} plus elle
„contient d’argile, & plus elle fe décompofe facilement.
Il y a de la Terre calcaire qui paroît avoir été
'.formée en même temps que les fchiftes, quelle
. avoifine. Elle conftitue des montagnes dans les
pays granitiques. Sa rareté-la rend de peu d’importance
pour la maffe des agriculteurs. Foye%
Gr a n it , Sc h i s t e , Ma r b r e , Montagne ù
Roche.
I Les montagnes dites de calcairefecondaire, montagnes
qui entourent toutes les chaînes granitiques,
offrent une forte de Terre calcaire qui n’a
pas été affez étudiée fous les rapports agricoles.
On les reconnoît aux efpèces de coquilles foffiles
[qui s’y trouvent, telles que les ammonites, les
[bélemnites, les gryphites, les térébratules, les
nummulaires , & c . , & à la grande quantité d’argile
qui entre dans leur compofition. Souvent la
[ roche y eft à nu ou prefqu’à nu. Leur décompo-
I fition eft très-lente dans certains cas, très-rapide
I dans d’autres. Voye\[ Ma r b r e & Ma r n e .
I Dans la férié de leurs variétés fe trouve la craie,
I cette pierre fi commune dans le nord de la France
K & fi rare ailleurs, qui amène l’ infertilité partout
I où elle ,fe montre à la furface du fol.
I Enfin, les collines & les plaines dites de cal-
[ caire tertiaire , qui renferment des bancs de pierre
K calcaire où fe font voir des coquilles analogues à
I celles qui habitent encore nos mers, quoique tou- I tes fpécifiquement différentes. Ces bancs font
I prefque toujours recouverts de couches épaiffes K d’argile & de fable, enfuite de Terre végétale.
I Le Pl â t r e eft du calcaire uni à l’acide fulfuri-
■ que. Voyefc fon article.
La Marn e eft du calcaire mélangé avec de
l’argile. Voye£ fcn article.
On peut dire qu’ à quelques marbres près ,
toutes les pierres .calcaires font des marnes, car
toutes contiennent plus ou moins d’argile , &
fouvent auff beaucoup de filice. ■
Un des caraétères les plus marquans des pierres
calcaires eft de former de la chaux par la calcination.
Sous ce feu! rapport elles font d’une grande
utilité pour l’ agriculture, puifqu’avec la chaux on
bâtit les maifons, on aélive la fertilité des Terres
& on s’oppofe à la propagation du C h a r bo n &
de la C a RIE. Foy.e\. ces mots.
Agriculture. Tome F l .
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Ainfï que je l’ ai annoncé à fon article, C’eft en
rendant diffoluble PHum u s , que la chaux, comme ‘
jouiffant des propriétés des alcalis (voye% P o t
a s se & Soude ) , favorife la végétation, & la
végétation peut confommer tout l’humus qui eft
à fa portée. O r , lorfque l'humus eft entièrement
confommé, la Terre ne produit rien} donc il ne
faut pas prodiguer l’emploi de ,1a chaux fur les
Terres qui ne font pas très-riches en humus, &
l’ expérience eft en ceci en concordance avec la
théorie.
Mais la pierre calcaire, lorfqu’elle eft réduite
en fragmens, jouit auff,, quoiqu’à un degré fort inférieur,
de la propriété de rendre foluble l’ humus,
comme le fàvent les agriculteurs qui font ufage de
la Ma r n e , du Fa l u n . (Foyef ces mots.) Donc
les pays où la pierre calcaire eft à la furface de la
Terre doivent être peu fertiles , puifque leur humus
fe confommé à mefure qu’ il fe forme, & c ’eft
ce que confirme l’ obfervation dans la Champagne
pouilleufe Sc fur la plupart des montagnes de calcaire
fecondaire.
Les conféquences de ce fa it , qui n’avoit pas
encore été remarqué avant moi, c’e ft, i ° . que
tous les pays calcaires où la roche n’eft pas recouverte
d’argile , doivent être plutôt plantés en
bois ou mis en pâturages, que cultivés en céréales
ou autres plantes annuelles épuifantes; i ° . que
dans ces pays il faut mettre fur les Terres qu’on
vent cultiver en céréales ou autres plantes épuifantes,
ou beaucoup de fumier répandu avant les
femailles, ou feulement la quantité de fumier r.é-
ceffaire pour les récoltes actuelles, répandu à la fin
! de l’ hiver fur les céréales en état de végétation.
1 C'eft principalement dans ces fortes de Terres que
des récoltes enterrées produifent des réfultats miraculeux,
parce que l’engrais quelles fourniffent
agit au moment même où il eft le plus avantageux
qu’ il agiffe.
Les Terres calcaires font prefque toutes au
• nombre des T erres légères & des T erres
sÈches. Foyei ces mots.'
Il exifte certaines plantes qui ne croiffent
que dans les Terres calcaires , comme la brune
lie à grandes fleurs, le lin ftrié, la gentiane
croifette , la feabieufe colombaire , la coronille
glauque , & c . Parmi les objets de nos cultures ,
le fainfoin eft levfeul qui s’ y plaife mieux qu’a it
leurs : il m’a paru cependant que la navette & la
vefee y profpéroient d’ une manière remarquable.
Les vignes des meilleurs crûs de la Champagne ,
de la Bourgogne, s’y trouvent plantées. Partout j’ y
ai vu les pâturages peu abondans, mais d’excellente
qualité.
Dans beaucoup de lieux on brife la furface
des rochers calcaires primitifs pour la rendre plus
propre à la culture. Dans les vignobles de la
ci-devant Bourgogne, où elle fe pratique fouvent,
on appelle cette opération Miner. ( Foyc% ce
, mot & celui Defoncement. ) Si on ne la connoiG
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