foie pas fur les bords du Rhône, nous ne boirions
pas les excellens vins de Côte-Rôtie. Les obfer-
vateurs qui font allés à Malte ne'manquent pas de
citer , fous le même rapport, l’induftrie des habi-
tans de cette île. Voye\ l’ouvrage de mon ami Roland
de la Platière, intitulé : Lettres écrites de
Stiijfe , d'Italie y de Sicile & de Malte , 6 volumes
in - i l . Amfterdam, 1780.
Dans les terrains de fécondé formation, il eft
très-fréquent que la pierre calcaire de la furface
foit en lames minces, qu’on appelle La v e . Souvent
la charrue foulève les laves, & la Terre
en eft quelquefois fi chargée qu’on ne la voit pas.
Quelques cultivateurs enlèvent les plus larges &
les dépofent fur le bord des champs, en font des
M er g e r S ( voyei ce mot ) ; mais j’ ai vu plu-
fieurs de ces épierremens diminuer d’une manière
notable le produit des Terres fur lefquelles
on les faifoit » lurtout lorfqu’èlles étoient expo-
fées au midi.
Les aftolemens des Terres calcaires dans lefquelles
il y a peu ou point d’argile * ne font
pas toujours faciles à établir ; aufli eft-il rare
qu’elles foient bien cultivées, comme ont pu
s’en affurer tous ceux qui ont traverfé la ci-devant
Champagne , la ci - devant Bourgogne & tant
d’autres parties de la France. Ce que j’ai dit aux
articles des Terres légères & des Terres fèches
s’y applique affez pour que je puiffe renvoyer à
leur article,
A mon avis , I’É cobuag e ( voye% ce mot)
n’ eft dans le cas d’être vraiment utile que dans
des terrains marécageux & même bourbeux,
parce quie là il y a furabondance d’humus. Dans
les Terres calcaires il eft plus nuifible que dans
aucune autre, puifque d’ un côté il détruit la plus
grande partie de la petite portion d’humus qui
s’ÿ trouve, & que de l’autre il favorife, par la formation
de la potaffe & de ia chaux à laquelle il
donne lieu, la diffolubilité du refte ; aufli ai-je
conftamment vu cette opération porter la ftéri- «
Iité dans les Terres de la chaîne de calcaire fecon-
daire qui partage la ci-devant Bourgogne du nord
au midi, chaîne eu fe trouvent les propriétés
de ma famille, & où j’ai paffé les-belles années de
ma jeuneffe. (B o s e . )
T erre chaude : Terre légère & expofée au
midi, & qui, par ces deux câufes réunies , donne
plus tôt les produ&ions que celle qui eft forte &
expofée au nord.
C ’eft une chofe très-avantageufe qu’une Terre
chaude pour l’établifîement d’un jardin ou pour la
culture des primeurs dans les environs des villes 5 mais d ins la grande culture elle eft fouvent plus
nuifible qu’utile , parce qu’elle eft peu productive
dans les années où les pluies font- rares.
Une Terre trop chaude peut être améliorée par
des plantations d’atbres qui l'omi-ragent ; elle peut
encore l’être * dans certaines localités, par des irrigations.
Voyei, pour le furplus, C r a ie , A rgile , Sa-
ele & T er r e sèche. ( B o s c .)
i T erre c o u r t e . C ’eft, dans les départemens
au nord de Paris, une Terre argileufe, peu pourvue
d’humus , qui îvpolè fur une argile plus dure
ou fur le tuf. Ces fortes de Terres font infertiles
dans les années fèches & dans les années pluvieufes.
On doit leur donner de fréquens labours avant de
lesenfemencer. V ’o y .T erre a r g ileu se . (B osc.)
T erre c r a y e u s e : Terre qui provient de la
décompofition des roches de craie. Elle ne fe
trouve en France qu’au nord de Paris, & principalement
dans la ci-devant Champagne & dans la
ci-devant Normandie. Voye[ les Dictionnaires de
Minéralogie & de Géologe, au mot C r a ie .
Il n’y a qu’une nuance dans la différence de
compofition des craies & des roches calcairesj
mais cette nuance fuffit pour qu’on puiffe les
diftinguer au premier coup d’oeil : elles font plus
tendres & plus blanches. Voye% T erres calc
a ir e s , R oche & Mo n ta g n e .
L’économie; domeftique tire lin grand parti des
craies pour bâtir, pour faire des crayons, pour
nettoyer les métaux , pour peindre, & c . Dans
beaucoup de lieux on creufe des maifons 8c des
caves dans leurs maffes. Elle fupplée fort économiquement
la chaux, lorfqu’eile eft réduite en
poudie, pour amender les Terres abondantes en
humus.
On ne doit pas confondre la craie avec le
C r a y o n , qui eft fouvent une Ma r n e . Voye[ ce
mot.
Les Terres crayeufes font infertiles par trois
raifons.:; i° . elles contiennent fort peu d’humus;
celui qui fe forme par la décompofition des plantes
qui y croiffent naturellement, ainfi que celui
qui y eft porté par les cultivateurs, difparoiffent
promptement 5 2°. elles n’abforbent que difficilement
l’eau des pluies , & la: perdent très-rapidement
par l ’évaporation} $°. elles repoufient, à rai*
fon de leur couleur, les rayons du foleil, au lieu
de les abforber; de forte que les graines y germent
plus tard & y mûriffent moins promptement
que dans les Terres ci’une autre nature.
De plus.,- les Terres crayeufes ont généralement
très-peu de profondeur, parce qu’elles font d’une
telle ténuité, que les eaux les entraînent dans les
vallons. On les place parmi les Terres légères, à
raifon de cette circonftance ; mais il s’en faut de
beaucoup qu’elles foient P réco c e s . Voye1 ce
mot..
C e qui fait que. les Terres crayeufes perdent,
leur humus, c’eft qu’elles le rendent, comme les
alcalis , comme la chaux , rapidement diffoluble,
& qu’alors il eft plus promptement entraîné par
les eaux pluviales. Voye^ C a l c a ir e , Humus &
T er r e a u .
Toutes les Terres crayeufes que j ’ai vues, &
; j’ai, y u la' plus grande partie de celles des pays que
je viens débiter, quelque bien labourées qu’elles
euffent é té , offroient, quelques jours après une
forte pluie , l ’afpeét d’un banc de pierre, c’eft-à-
dire, que leur furface étoit devenue une croûte
compare. Il en réfulte que les eaux & les influences
atmofphériques ne peuvent plus agir
ou fur le germe des graines, ou fur les racines des
plantes qui fe trouvent deflbus. Aufli quelles récoltes
que celles des céréales de la Champagne
pouilleufe, où ces effets font les plus marqués ?
Dans les bonnes années , des feigles de fix pouces
de haut & écartés de fix pouces. Voyej T erres
blanches.
Quelque ftérile que foit la Champagne pouilleufe
y il eft cependant poflible de l’ améliorer,
comme le font voir les environs du petit nombre
de hameaux qui s’y trouvent ; mais les habitans
font fi pauvres, mais ils font fi ignorans, mais ils
ont des beftiaux fi fôibles !
Le fyftème de culture qui y eft généralement
adopté, confifte à femer fur un feul labour, tous
les trois, quatre & même fix ans, tantôt du feigle,
tantôt de l ’avoine, tantôt du farrafin , & à biffer 1
lê refte du temps la Terre en pâturages, où paif- i
fent des moutons de la plus petite taille. Rarement
on fume, faute de moyens, celles de ces
Terres qui font éloignées de la maifon,
La véritable manière de tirer parti des Terres,
dans ce trifte pays, feroit de réduire les grandes
exploitations à un petit nombre d’arpens, à tenter,
par tous les moyens, de divifer le terrain
par des haies, d’y planter un grand nombre d’ arbres
pour y porter de"l’ombre, d’y creufer des
folles perpendiculairement aux pentes, pour arrêter
l’entraînement de l’ humus ; d ’y femer tous
les deux ans du farrafin ou de la navette, ou de la
vefcè, pour l’enterrer au moment de la floràifon ;
de varier les aftolemens autant que poflible, & de
faire en forte qu’elles ne foient jamais dégarnies
d h~rbe pendant l’été. Voyei T erre légère &
sablonneuse.
Mais que faire du refte des Terres de la Champagne
pouilleufe, car le défaut d’ eau de fource
ou de puits ne permet d’établir des hameaux que
dans un petit nombre de lieux ? Les planter en
bois, répondrai-je.
Cepèndant, objectera-t-on, cela a été tenté un
grand nombre de fois, & n’ a pas réufli. II eft vrai ;
mais parce qu’on a mal procédé, & la preuve,
c’eft que M. Pinteville-Cernon a réufli en procédant
mieux.
Aucun arbre ne peut profpérer dans les plaines
nues de la ci-devant Champagne , fans le fecours
de l’induftrie humaine , tant par les caufes que je
viens d’ énumérer, qu’en raifon de la violence
des vents qui s’y font quelquefois fentir, & fort
peu d’arbres s’accommodent de la craie. Les quatre
qui y viennent le moins mal, font lé faille mar-
%u , le bouleau, le mahaleb & le pin fylveftre.
Quoique, outre fa faculté de croître dans la
craie, le faule marfeau fourniffe au premier printemps
un miel abondant qui a fa it , au rapport
de M. Affaire, la fortune du pain d’épice de Reims,
il n’ eft pas encore apprécié à toute fa valeur
dans la ci-devant Champagne. On ne l ’y emploie
pas , par exemple, à la nourriture des beftiaux ,
ufage auquel il eft fi propre. Voyei Sau le .
Certainement le botlleau & le mahaleb ne viennent
pas beaux dans la craie, mais enfin ils y viennent,
& , en les coupant tous les fix à huit ans ,
ils donnent des fagots d’ une grande valeur là où
le bois eft rare.
C ’eft fur le pin que M. Pinteville-Cernon a
calculé pour transformer des Terres prefque de
nul revenu, des Terres de $ francs l'arpent en
capital, en Terres très-produêlives, c ’eft-à-dire,
de igo francs l’arpent de revenu. Comme la
route qu’il a prife pour arriver à cet étonnant.
réfultat a été longue & difpendieufe, je crois
qu’il vaut mieux , dans la même pofition que lu i,
procéder de la manière fuivante.
# Les Terres qu’on voudra ainfi utilifer feront di-
vifées de douze pieds en douze pieds.par des foffes
parallèles, de deux pieds de profondeur, & dirigés
du levant au couchant. On plantera en automne,
fur les bords de ces foffés, dont la Terre
aura été répandue fur les intervalles, des faules marfeaux
, des bouleaux & des mahalebs de deux ans
d’âge, fur deux rangs diftans d’un pied en tous fens ,
& dans l ’intervalle on placera des topinambours.
On mettra un peu d’engrais dans les trous deftinés
à recevoir ces plantes. Au printemps fuiVant,
dès que les gelées ne feront plus à craindre, on labourera
légèrement, on fumera fortement les
intervalles des foffés, & on les femera avec un
tiers de graines de pin fylveftre & deux tiers
d avoine, de manière que ces graines ne foient
pas trop dru. Pour peu que le printemps & l’été
1 oient favorables, c’eft-à-dire, qu’ il pleuve de
loin en lo in , les plantations & les femis réufli-
ront} les jeunes pins s’élèveront à la faveur de
l’ombrage que leur donnera l’avoine. Cette dernière
fera coupée fort haut à l’époque de fa maturité^
Les beftiaux feront févèrement éloignés.
L ’année fuivante , les marfeaux & les topinambours,
même un peu les bouleaux & les mahalebs,
auront pris âffez de force pour brïfer les«yents &
ombrager quelques pieds de largeur des intervalles;
les pins continueront à croître, & au bout de trois
à quatre ans ils fe défendront eux-n.êmes. A cette
époque les marfeaux pourront déjà être coupés
tous les deux ans pour la nourriture des beftiaux;
à fix ou huit, on pourra éclaircir les places les
plus ferrées, & à dix à douze, commencer à tirer
parti de la plantation pour faire des échalas de
refente, échalas d’ une grande durée ; à trente ans
les pieds de pins font déjà propres à la charpente
légère, & peuvent valoir 6 à 8 francs pièce; à
quarante, ils vaudront le double.
Une telle plantation ainfi formée peut durer
Mmm ij