
pluvieux font des circonftances favorables au Ternis
de la graine du Sainfoin, attendu qu’elle lève
plus vice , qu’ il y a alors moins de pertes à
craindre, & plus de vigueur à efpérer dans le
jeune plant.
Mais à quelle époque doit on femer ? Dans le
midi de la France, c’eft toujours en automne, parce
que le .plant n’ayant à craindre ni des gelées ni
des pluies continues, fe fortifie pendant l'hiver.
Dans le nord, à rai Ion de ces craintes, c’eft: prefque
toujours au printemps, c’eft-à-dire, à la fin de
mars ou au commencement d’avril.
Un bon Hersage & un R oulage bien appuyé
concourent pui fi animent à la réufiite d’un fernis
de Sainfoin , en ce qu’ils enterrent tous tes grains
& retard nt l'évaporation de l’humidité de la fur-
façe de la terre, humidité néceflaire à la germination.
Vo^e\ les mots indiqués.
Par un temps favorable, la graine de Sainfoin
ne tarde pas i lever.
Lorfqu’ un fernis de S .infoin , fait avant l'hiv
e r , n’a pas r uffi, ou n’ a réufli qu’en partie ,
on peut le recommencer au printemps fur un firnple
herfige. Si ç’ tft au printemps, il faut le rempla-/
cer par une autre plante , fauf à recommencer
l ’année fuivante.
Les progrès d’un fernis de Sainfoin font peu
marqués la première année. Celui fait au printemps
offre rarement plus de trois feuilles lorf-
qu’on coupe la céréale qui le protégoit. On doit
en éloigner les beftiaux , & ne lui pas faire fentir
le tranchant de la faux. Celui fait avant l’hiver
pourra donner, fans grands inconvéniens, une foi-
ble récolte à la fin de l’été fuivant.
Dans le climat de Paris, on peut déjà couper
deux fois le Sainfoin femé i’imnée précédente.
Cependant il vaut mieux ne le couper qu’ une fois
pour favorifer i’accroiff ment des racines, ac-
croiffement qui eft toujours proportionné au nombre
des feuilles. On s’en tient ordinairement à ces
deux récoltes} mais dans le midi de la France,
& encore mieux en Efpagne & en Italie, on le
coupe trois, quatre & cinq fois par an , félon la
nature du fol. Il eft même des terres fufceptibles
de recevoir des irrigations, où on peut en tire r ,
dit-on, jufqu’à dix récoltes , produit prodigieux,
fans doute, mais croyable quand on confidère la
pui fiance de la chaleur & de l'humidité fur la
végétation.
La fauchaifon du Sainfoin doit avoir lieu au
moment où la plus grande partie des épis commence
à fleurir > fi on attendoit que les graines
fufllnc formées, on perdroit une partie des feuilles
qui fe feroient 'éjà d?fléchées , & la plupart des
tiges feroient fi dures que les beftiaux ne pour-
roient pas les manger, les moutons furtout. Il
faut recommander aux faucheurs de couper un
peu haut, afin de ne pis entamer le collet des
racines \ car toutes les fois que ce collet, qui fort
quelquefois d’ un pouce & plus de terre , eft enlevé
> le pied meurt-. Cette pratique- d'ailleurs ne
nuit pas aux produits, & eft avantageufe au fol,
puifque la bafe des tiges n'eft pas mangée par les
beftiaux , & que^poairiftant fur pied, elle fournit
de l’humus pour les récoltes futures.
C ’eft ici le lieu de dire que, plus que les autres
fourrages, à raifon de cette- dilpofition i
élever hors de terre le collet de fes racines, le
Sainfoin gagne beaucoup à être terré la faconde
ou la troifième année rie fon exiftence, c’eft-à-
dire, recouvert, pendant l’hiver, d'un à deux
pouces d’épaiffeur de terre. J’ai vu des effets prodigieux
, tant pour l’abondance*des coupes que
pour la durée , refulter de cette utile opération.
V T errage,
L'emploi du plâtre en poudre fur les Sainfoins
qui font au tiers, de leur croi(Tance, eft très-avantageux
à i’accélération de cette croifîahce & à
1 abondance des produits. On ne doit donc pas le
négliger toutes les fois que le prix du plâtre le
permet. ( Voye^ P l â t r e . ) Je dois dire cependant
que leur nature plus fèche rend l'effet de cet
amendement moins puiflant fur eux que fur le
trèfle & la luzerne.
La floraifon du Sainfoin a lieu en juin ; elle
contribue beaucoup à Tembelliffement d’un pay-
fage. Aufii doit-on faire entrer cette plante, dans
la compofition des prairies des jardins en terrain
fecj Couvent même on doit en compofer entièrement
ces prairies , quelque peu agréables qu’eiles
foient, pendant les quinze jours, qui fuiventleur
fauchaifon.
Autant que poflible il faut choifir un beau jour
pour faucher les Sainfoins , afin qu’ ils puiffent être
féchés en peu de temps. Plus ils reftent fur la
terre, 6c plus ils noirciffenr, & plus ils perdent
de leurs feuilles & de leurs fleurs. Cette confi lé-
ration doit aufii engager, en toutes-circonftances,
de les botteler de fuite, même un peu avant qu’ ils
foient complètement-deffechés , fauf à laifler un
peu plus long-temps les bottes ifolées ou réunies
en petits groupes, pour que le refte de leur humidité
s’évapore.
Quelques cultivateurs ftratifient leurs Sainfoin«,
avant leur complète delïiccation, avec de la paille
de froment ou d'avoine, & par-là ils favorifent
leur defliccation, & la communication de leur
odeur à la paille, ce qui augmente l'appétence des
beftiaux pour elle. Ils font donc très-fort dans le
cas d’ être imités par tous ceux qui font jaloux de
perfectionner leur économie çlomeftique.
C ’eft dans des fenils ou dans des greniers bien
abrités de la pluie qu’ on conferve le Sainfoin, il y
doit être le moins tafle poflible : fa confervation
en geibier n’eft p.oint avantageufe , au moins dans
le nord de la France.
On ne doit pas chercher à garder plus de deux
ans le produit des récoltes de Sainfoin , parce
que plus il eft vieux, & plus il perd facilement fes
feuilles, & plus fes principes nutritifs fe de te-
riorenc.
Les tiges de Sainfoin.refufées par les beftiaux
peuvent s'employer à chauffer le four , mais le
plus communément on les raffemble fur le fumier
Sont elles augmentent la malle.
Beaucoup de cultivateurs fe contentent de la
première coupe de leurs Sainfoins, qui eft réellement
la meilleure, & les font paître enfuite par
I-urs beftiaux. Prefque toujours cette pratique ell
l'effet d'un mauvais calcul de leur part ; car, en la
fuivant ' ils tirent annuellement moins de nourriture
de ces Sainfoins, & ils durent. moins long-
temps , par le principe que les feuilles concourent
à l’aucmei tation des racines, 8c les racines a
l'augmentation des feuilles. Il elt cependant des
cas où il eft bon d'employer ce moyen ; c eft lorf-
que la fécondé ou la troifième récolte eft trop
foible pour mériter les frais du fauchage , ou
qu'elle eft trop tardive, ou trop accompagnée
de pluies pour qu'on puiffe efpérer de la del-
fécher convenablement.
De tous les beftiaux, ce font les moutons qui
nuifent le plus aux fernis de Sainfoin , parce qu'i.s
mangent le collet de la racine, & font par la
périr les pieds.
La fécondé coupe des Sainfoins eft affez S p i ralement,
celle qu'on confacre à la réproduclion
de la graine ; auffi, ainfi que je l’ai remarqué plus
haut, un Quart, un tiers & même moitié de celle
qu'on achète ne vaut-elle ordinairement rien,
parce que les graines des plantes dont la végéta-
tion a été interrompue , font peu nourries &
fouvent avortées. V o y e ^ G raines.
Quelques perfonnes facrifient la première coupe
des vieux Sainfoins, quelles veulent rompre, à cet
important objet ; mais le même inconvénient en
elt la fuite /quoi qu’à un moindre degré , puifque
la vieillefie amène toujours la foiblefle, & de
plus la graine de ces vieux Sainfoins eft toujours
mélangée , avec quelque foin qu on la nettoie ,
d’une partie de celle des mauvaises herbes qui ont
crû au milieu d’eux.
Je voudrois donc que, dans chaque grande exploitation,
on confacrât, dans un bon terrain, un
efpace fuffifant’ .au fernis d un Sainfoin t dont la
première récolte feroit toujours réfervée pour la
reproduction de la graine. Ainfi on en auroit conf-
tamment de la meilleure qualité pofîjble , & on
trouveroit au centuple , dans de plus belles productions
, la petite dépenfe qu’occafionneroit de
plus cette méthode. Voye[ G r a i n e .
Comme les graines de chaque epi du Sainfoin
mûriflent fucceflivement , le point ou il
faut les récolter eft celui ou il y en a la moitié
de mûres : plus tard on perdroit les premières, qui
font toujours les meilleures, parce qu arrivées a
leur terme, elles tombent facilement. Il faut donc
S A I ' .22y
fe réfoudre à perdre la portion de ces g»ainci qui .
eft encore impropre à la reproduction.
Pour éviter la perte des graines les plus mures ,
il eft bon de couper les Sainfoins deftines a en
donner le matin, avant la chute de la rofée, & les
mettre de fui.ee lur des chars garnis de toiles pour
les tranfporter dans la grange ou fur le grenier,
où on les retournera deux fois par jour pour achever
leur defticcation qui eft pron pte, s y trouvant
moins de feuilles.
" On bat le Sainfoin pour graines quand on en a
le temps, mais feulement huit ou dix jours apres
fa récolte. Le fléau ou la perche peuvent également
être employés à cette operation , qu il elt
avantageux de ne pas pou lier à 1 excès, puifque
les graines qui Ce détachent difficilement ne valent
rien. IToyei Battâgê. • , . ■ .
La graine détachée le vanne à l’ordinaire, quoi-, que plus difficilement que celle des céréales, <i
raifon des afpérités qui garniffent fa furface. Lorf-
qu’ tlle eft débarraffee de toutes les matières étrangères
, on la vanne une fécondé fo is , par petites
parties , pour féparer la mauvaife, qui eft plus
bianche Ce plus légère que la bonne. Cetce dernière’
, quand la coupe a été faite, à propos ,
doit faire les deux tiers de la totalité..
Mais ce n’ eft pas véritablement la graine qu’ on
voit après ces vannages , c’ eft la goufle. Rarement
on met la graine à nu, parce que ce feroit une
opération coûteufe, nuilible à fa confervation,
6c qui favorileroit fort peu fa germination.
Cette graine tenue dans un lieu fe c , à l’abri
des ravages des fouris, fe conferve bonne pendant
piufieurs années.
La mauvaife graine de Sainfoin bouillie dans
Ll’eau, & mêlée avec du fo n , des raves, des
pommes de terre , & c . , fe donne aux vaches ou
’ aux cochons, qu’elle concourt à nourrir &z même
i à engraiffer.
| Les volailles, & furtout les pigeons, aiment
la graine de Sainfoin dépouillée de fa goufle.
On peut utilifer de même, mais avec moins
d’avantage, après les avoir hachées menues, les
groffes tiges de Sainfoin refulees par les moutons
, & celles provenant de la coupe pour
graines. :
On voit par ce que je viens de dire, combien
la culture de Sainfoin, lorfqu’elle eft bien combinée
, peut être fru&ueufe pour les cultivateurs
en général, 6c en particulier pour ceux des pays
fecs & montueux , furtout s’ils font calcaires , &
combien font mal confeillés ceux qui dédaignent
de s'y livrer. Elle a puiffamme-nt aidé au fuccès
de M. Yvart, dans les terres fablonneufes de fon
exploitation de Maifons près Paris.
Quoique j’aie annoncé que le pâturage du Sainfoin
nuifoic à fa repouffe, je n’ai pas voulu m’op-
pofer à ce qu’ on mît les beftiaux après la première.