
U6- A N G qui a dix-huit collèges , & celle de Cambridge
qui en a feize. Ges collèges font très-bien rentés &
ont de très-habiles profeffeurs. On ne reçoit aux
études de ces collèges que ceux qui font de l’é-
■ glife Anglicane. Par malheur la marche des études
dé ces univerfités tient encore un peu trop à
la barbarie fcholaftiqiie du x v e fiècle. Cette nation
a produit des hommes illuftres dans tous les arts,
8c a contribué plus qu’aucune autre au progrès
des fciences ; ce qu’on doit attribuer principalement
à deux caufes, la liberté de la preffe , 8c
les récompenfes accordées par le gouvernement
à tous les favans 8c aux grands artiftes. Chez cette
nation , le génie ne trouve pas comme ailleurs
de ftériles admirateurs mais un excellent ouvrage,
une découverte utile procurent auffi-tôt, 8c de la
gloire 8c une fortune honnête à leurs auteurs.
Soit dans les mathématiqués, la phyfique, la
médecine, la politique, la philcfophie, foit dans
les autres fcienCes 8c les arts, 1 A ngieterre a produit
de ces hommes étonnans, de ces génies créateurs
qui ont étendu les limites de I’efprit humain.
Leurs poètes font riches en images , ont de l’énergie
; mais peu formés fur les bons modèles de l’antiquité
: on leur reproche avec raifon un goût barbare.
Leurs hifto riens font peut-être plus philofo-
phes que ceux d’aucune autre nation. Il ferrible en
voyant cette liberté mâle avec laquelle ils jugent
les rois 8c les peuples, qu’il ne foit permis qu’à
l’Anglais de tenir la plume de l ’hiftoirè. La plupart
de leurs théologiens n’ont point l ’efprit hébété par
dès fuperftitions ridicules ; leur ftyle clair, énergique
8c hardi, peint toujours ce qu’il veut peindre
, 8c ne eeffe jamais de parler à la raifon. Enfin ,
jùfqu’à leurs romanciers ont une phifionomie originale
, qui les rend fa parieurs par la vérité des portraits
, par la force du f ly le , par la fécondité des
événemens , par l’intérêt de l’ouvrage, à tous ceux
des autres nations ; il ne faut pour prouver ce que
j’avance-, que citer Clarifie, Grandiffon, Paméla ,
T om - Jones y 8cc. roman? immortels qui feront
toujours des chef-d’oeuvres aux yeux de tous les
peuples policés'.
Les Anglais jufqu’ici médiocres, 8c même barbares
dans la peinture, commencent cependant à
fe diftinguer ; on voit chez eux quelques morceaux
©il refpire le patrietifme national, 8c qui font très-
eltimés ; mais le goût ne s’épure que lentement
chez cette nation : il eft à parier même qu’elle n’en
aura jamais. Ces efprirs naturelle mentTom b res 8c
bers, effarouchent les grâces : fi l’on en excepte Pope
, Addiffon , qui eux-mêmes ne font pas toujours
exempts de ce défaut, il en efl des peintres comme
des gens de lettres : on voit dans les beaux ans
la lourdeur tenir fbuvent la place de la légèreté ;
des plaifanteries baffes 8c ignobles, fubflituées a là-
fine plaifànterie8c prefque touiours ira rire triftè
& convulfif remplacer la gaieté. Une foule de leurs
tableaux font des fujets bifarres, prodigieufement
chargés d’a&ions 8c de figures, exécutés fans en-
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tente de couleüt'S, ni de la perfpeélive : ces charges
peu naturelles 8c du plus mauvais goût, font cependant
bien éloignées de la manière joyeufe de C a lot.
Je ne parlerai pas de leurs fujets d’hiftoires ; ils
n’ont encore rien à comparer aux écoles des nations
voifines : j’cbferverai que jufques dans leurs
peintres à portraits, on voit en tout une manière
roide, qm iemble caraélérifer cette nation.
La fculpture fait encore moins de_progrès : leurs
ftatues , loin d’avoir ce gracieux, cette nobleffe
qu’on voit dans les relies précieux de l ’antique ;
leurs ftatues, clis-je, ne préfentent que de la maigreur,
des formes fèches 8c froides, 8c toujours
cette roideur qui tient au terroir. L’Anglais fi fupé-
rieur à tant de nations par cette énergie de caractère
, cette noble hardieffe de penfer, eft inférieur
à toutes dans les arts qui exigent de la moleffe 8c
des grâces. Je ne fais par qu’elle fatalité les fujets
les plus1 enjoués changent de nature entre leu'rs
mains , attriftent l’imagination , 8c portent à l’ennui.
Dans la manière noire*, ils furpaffent de beaucoup
les autres nations de l’Europe ; il feroit à fou-
haiter que le deffin répondit à l’exécimon. Quant
à la gravure 8c à la cifelure, il y a préfentement
en Angleterre des artiftes, tant du pays que des
.étrangers, qui travaillent avec beaucoup de fuccès.
Je dirai peu de chofe de leur architeélure civile ,
parce qu’excepté le dôme de Saint-Paul de Londres
, la bourfe , 8c quelques poiits, il n’y a pref-.
que rien à en dire.'On ne connoît pas dans toute
l ’Angleterre , un feul monument qu’on puiffe citer
comme un modèle .' leur coutume de faire bâtir
pour vingt, trente, quarante, cinquante , foixante
ans , 8cc. 8c la cherté excefîive des matériaux ,
ainfi que de la main-d'oeuvre, font fans doute les
caufes principales de ce peu de progrès dans l’ar-
chiteélure civile ; mais- je dirai que dans l’architecture
navale, la France feule exceptée, ils effacent
toutes les nations.
En 1768 , le roi a fondé à Londres une académie
des arts , qui eft compofée de quarante peintr
e s , fculptéurs & architectes. Neuf d’entr’eux ont
lé nom de vifueurs, c’e ft-à -d ire , direéleurs des
écoles de defîin. Il y a aufîî quatre profeffeurs d’ana- "
romie,d’architeâure, de peinture 8c de perfpeélive;
8c l’on y reçoit, outre les membres , un certain
.nombre de graveurs comme affcciés. Dans les autre
s arts utiles, l’Angleterre a beaucoup de maîtres
[célèbres, 8c fes manufactures, ainfi que fes ouvriers
, méritent à bien des égards leur réputation.
L e s : Anglais ont établi les premiers en Europe ,
ces beaux tapis de foie 8c laine, travaillés avec tant
d’a rt, 8c fi fort approchant de la nature. Leurs manufactures
de glaces font très-importantes , quoi- ■-
que cependant inférieures à celles de France, qui
font les premières du monde.
Les draps forment la branche la plus confidéra-
bles des manufactures de laine. Ils font plus folides
8c mieux travaillés que ceux de France ; mais ceux-
ci font à meilleur marché, oc effacent ceux d’An-
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gïeterre par le luftre 8c l’éclat des couleurs ; ce
qui les fait préférer dans bien des pays aux draps
Anglais. Les teintures font très-bonnes , excepté
en noir p ourtanton eft obligé d’envoyer en Hollande
les marchandifes Anglaifes , pour y être teintes
en cette couleur. Les teintures en écarlate y
font très-belles. Les manufactures de foie font très-
confidérables ; les ouvrages qui en fortent font
meilleurs à la vérité, mais de beaucoup plus chers
que ceux de France, dont ils n’ont point la beauté
extérieure. Les chapeaux de caftor 8c de poil de
lapin, le velours de coton fabriqué à Manche fier,
les poteries de Worcejler, la porcelaine de Chelfea,
plufieurs efpèces de cuirs, des montres, de l’acier
, de l’étain : ce font les marchandifes les plus
recherchées des étrangers.
Quant aux impôts , nous ne craignons point
d’avancer qu’aucune nation n’eft auffi grevée que
le peuple Anglais ; il y a des taxes fur les biens-
fonds , fur le produit des terres, fur les denrées,
fur les manufactures , fur les comeffibles,, fur le
veftiaire , fur l’air , les fenêtres , fur l’eau , fur
les maifons , fur les bières, les diffillations de
toutes efpèces, fur toutes les denrées étrangères,
8cc. 8cc., fur les rentes 8c les effets commerça-
bles , fur les chemins , fur les matières premières ,
8c les mêmes matières ouvragées ; 8c généralé-
ment fur tout ce qui entre dans les ports d’A ngleterre
: quant aux droits de fortie , qui font très-
forts , ils ne font prefque rien , excepté fur les
matières premières , telles que les laines , &c.
parce que le gouvernement a .fenti. qu’il étoit
plus fag'e d’en empêcher l’exportation, afin d’encourager
les manufactures nationales.
On nomme fubfides, la fomme entière qui eff'
accordée par les communes pour le fervice d’une
année: ils font diviles en fubfides annuels 8c perpétuels.
Les impôts annuels confident en une taxe fur
les fonds de terre, 8c en une taxe fur le malt.
La taxe fur les biens de terre a pris la place des
anciennes mxes auxquelles on avoit.recours lorf-
que les beforns de l’état l’exige oient. Elle n’a rapporté
depuis 1693 , jufqu’à 1730, que 4 fols par
livre fterling de revenus annuels de biens fonds
8c immeubles ; en fuite en tems de paix 2 fchellings ,
8c en tems de guerre 3 8^4 fchellings par livre
fterling.
A l’égard de FEcoffe, il a été arrêté dans le
IXe article du traité de réunion, qu’au lieu de la
taxe fur les biens de terre, elle donnéroit 48,000
livres fferlings lorfque l’Angleterre, donnéroit
L 997-733 livres fferlings, 8c que ce rapport feroit
toujours obfervé à l’égard des différentes femmes
auxquelles fe montoit la taxe en Angleterre.
L’Ecoffe paye les autres impôts dans un bien
moindre rapport que l’Angleterre ; il y en a cependant
quelques-uns dont elle paye la moitié. La taxe
fur ies biens de terre fe leve de la forte : la fomme
que chaque comté doit fournir lui eft affignée
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d’après l ’eftimation qui a été faite des terres eu
169A; chaque pofTéfieur de biens fonds & de mai-
fons remit alors une évaluation de fes revenus,
qui fut acceptée fans examen , d’où il fuit que
ces évaluations font peu vraies pour la plupart.
Depuis ce tems les biens immeubles ont changé
beaucoup, car prefque toits ont été améliorés, &
ont donne par conféquent de plus forts revenus.
D ’autres fe font détériorés., 8c rapportent moins
aChielIement qu’autrefois. De là vient que plufieurs
propriétaires ne paient pas plus de 6 pence* ou flit-
vers par livre fterling, c’eft-à-dire , 2 8c demi pour
cen t, 8c d'autres paient 10 fchellings, c’eft-à-dire,
10 pour cent. Si l’on faifoit un nouvel état des revenus
des biens fonds , la taxe fur les terres de 2
fchellings, qui rapporte aéhiellement tout au plus
un million fterling , rendroit alors au-delà du double.
La levée de ces impôts occasionnent 60,000
livres fferlings de frais. Tous les catholiques qui
ont'des biens immeubles, paient cette taxe double.
La taxe fur le malt, eft de 6 fols fferlings fur
chaque boiffeau de malt, 8c une fomme proportionnée
qui eft prife fur certaines efpèces de grains,
ainft qiie fur le cidre 8c le poiré. Le parlement a
fait lever cet impôt fans interruption de 1697, par
les officiers de la douane. /
Les impôts perpétuels font, i°. les droits qu’il
faut payer a la douane pour toutes les mareban-
diffs qui entrent 8c qui fortent. Cet impôt a produit
tous les ans , depuis 1700 jufqu’en 1723 ,
1 >407,593 livres fferlings ; en 1768 , il a produit
2 ,195,000 livres fferlings.
20. L accife qui a été introduite en 1643 > Sc que
l’on paie, tant pour les comeffibles, que pour p laceurs
autres efpèces‘de marchandifes confommées
dans le pays ; ( de là vient que le drap Anglais1 eft à
meilleur marché à Hambourg qu’à Londres, ) l’ac-
cife, dis-je , produit par an jufqu’à quatre millions
fferlings.
30. L ’impôt fur le fe l, eft de 3 fchellings 4 fols
par boiffeau.
4°. Les ports de lettres fixés ea 1643 en même
tenis que les poftes.
50. Le choit fur le papier timbré.
6°. L ’impôt fur les maifons, qui depuis'1766 eft
de 3 fchellings par maifon en Angleterre, 8c d’un ’
fchelling enEçoffe. Si elle a fept fenêtres 8c plus, 011
paie 2 fols pour chaque fenêtre ; fi elle en a vingt-
quatre , on paie 2 fchellings pour chacune ; quand
elle en a quarante à cinquante , on paie par an 4
8c même 5 livres fferlings pour toute la maifon.
De là vient qu’il n’y a nulle part des fenêtres plus
grandes & en plus petit nombre qu’en Angleterre.
70. L’impôt qui fe paie pour obtenir la permrf-
fion d’avoir des carroffes de louage, des fiacres
des chaifes à porteur, de vendre de la bierre , Sec.
dans les villes de Londres & de Wefhninffer.
8°. L’impôt d’un penny par livre fterling, fur
les revenus des places 8c penfions accordées par
la couronne : il rend au-delà de 100,000 livres ffer