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communiquer leurs femmes à leurs amis. Une
femme peut avoir jufqu’à fept maris ; fi elle devient
grofi'e, elle adjuge l’enfant à qui bon lui feroble,
& on ne peut àppeller'de fon jugement. Les habi-
tans de Calicut admettent l’exiftence d’un Dieu ;
mais ils prétendent qu’il ne fe mêle point du gouvernement
de l’univers, & qu’il a laifTé ce foin au
diable, à qui conféquemment ils offrent des facrifices.
I l fe fait à Calicut un grand commerce, qui confiée
en poivre, gingembre, bois d’aloès, cannelle,
& autres épiceries.
Ce royaume peut avoir environ 25 lieues de
long fur 25 de large. C ’eft un pays entrecoupé de
bois, de rivières & de marais; Il y croît beaucoup
de riz , que l’on vend à (’étranger. On y voit des
perroquets & des finges de toutes fortes d’efpèces.
Les arbres y font toujours verds , & le printems
dure prefque toutel’-année. Il y a un arbre fingu-
lie r , qui porte des efpèçes de dattes , dont on tire
\du v in , du fucre' & deThuile. On écrit dans ce pays
fur des feuilles de palmier. Le peuple va prefque
nud. Les hommes ont aulïi plufieurs femmes en
différens endroits , parce qu’étant prefque tous
marins, ils trouvent un ménage par-tout où ils
abordent. Les foldats font nobles. Dès l’âge de fept
ans, on les exerce au métier de la guerre. Ils fe
fervent aujourd’hui de m o u fq u e t s& font très-
courageux. (M, D. Md)
Ca licu t, ville d’A f ie , & l’une des plus grandes
de l’Inde , capitale du royaume de même nom, fur
la côte de Malabar, fondée par Céram Peroamal,
qui partegea toutes les provinces de fon empire
( l e Malabar ) entre fes parens & fes amis, ce qui
eft la caufe du grand nombre de petits fouverains
qu’on trouve dans le Malabar. Les Anglais y ont
un comptoir. Le commerce le plus confidérable eft
en poivre & en cardamane. 11 y a des chrétiens
Indiens, qui jouiffent des mêmes droits que les
nobles , & ne dépendent que de leur évêque. Cette
ville eft au bord de la m er, & contient environ fept
mille maifons , qui ont chacune leur jardin. Long,
'5 1 ,3 0 ; lat. i l , 21. (JM.D.Md)
CAL IFORNIE , grande prefquîle de l’Amérique
feptentrionale, au nord de la mer du fud.
Witfliet ( dit M. Buache, dans fes € onfidérations
géographiques, art. 111 , page 63 6* fuiv.\) , afliiroit
en 1598 , que l’Amérique feptentrionale touche
prefque l’Afie par fon extrémité occidentale, &
qu’on avoit cru- qu’on pouvoir aller du cap d’En-
gàno à 3 degrés fur là côte occidentale de la Californie1,
par terre aux régions de Sina & de la
Tartarie,
Il y a plus de cent quatre-vingts ans, dit-il, que
les meilleurs géographes de ce tems ont commencé
à mettre un détroit entre l’Afie' & l’Amérique ,
auquel ils donneient le nom d'A n i a n , dont l’entrée
méridionale étoit entre 180 & 190 d. de long,
èc qui s’étendoit depuis le 56e de lat. jufqu’au-
delà du 62%
On marqùoit à fon entrée, vers l’e ft, un cap
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Fortune, jufqu’où l’on défignoitune longue côte'î
qui venoit du câp Saint-Lucar de la Californie.
J’ai exprimé cette_ côte , &c. conformément aux
Cartes de 1570, d'Ortelius & autres, d’après-une
ancienne carte marine Hollandaife qui paroît faite
avec foin , & dont il donne le titre : Ameriçoe tabula
nova mùltis locis tant ex terrejlri peregrinatione,. quant
rectntïori naviga tione, ab exploratijjimis naucteris, 6*
multo quàm anteà exaâlior édita. .11 continue: l’attention
qu’on fit enfuite, fur-tout a la navigation
de François Dracke, en 1579, &c. fit retrancher
la partie la plus au fud de la longue côte en quef-
tion , dont il femble néanmoins qu’on auroit dû.
conferver une idée plus au nord.
Divers écrivains célèbres cherchèrent enfuite les
fondemens du détroit d’Ahian ; & leurs efforts
n’ayant rien pu produire, ce détroit devint fort incertain
, & peu-à-peu difparut des meilleures cartes1,
quoique les fayans convinffent qu’il devoit y avoir
un détroit au nord de la mer du fud, &c.
Cependant avant qu’on en vînt jufqu’à retrancher
entièrement le détroit d’Anian, retranchement qui
faifoit perdre toute idée du tableau des anciennes
connoilfances , ce détroit fut tranfporté dans là
carte originale de Texeira en 1649,, du 180e d. de
longitude où il étoit auparavant , vers le 200e.
Dudley mit en 1647, le cap Fortune, par confé-
quent le détroit d’Anian, près du 226% félon lui
229e. Enfin, ce détroit eft tranfporté près du 240e;
degré entre les latitudes de 5 1 a 53 par l’écrivain,
du vaiffeau la Californie, &c.
Aujourd’hui nous connoiffons un détroit vers
le nord, près des côtes de la Tartarie, &c. r ne
pouvons-nous pas dire que c’eft celui auquel nos
anciens ont donné le nom d’Anian ? Les reffem-
blances me paroiflent remarquables ; l’un & l ’autre
ont leur entrée au fud, vers le cent quatre-vingtie-
me degré ; ils fe trouvent entre les côtes orientales
d’Afie ou de la Tartarie, & celles du nord-oueft
de l’Amérique ; ils s’étendent jiifqu’au cercle polaire
, après quoi les terres tournent du côté de
l’Amérique feptentrionale, au nord - efl: ; & du
côté de la Tartarie y &c. au nord-oueft. Enfin nos
anciens marquoient dans leur détroit d’Anian ;
près du foixante ou foixante-unième degré de latitude,
du côté de l’Amérique, une grande rivière,
nommée Rio grandes Corientes 4> qui répond à la
rivière de Bernarda. Tout cela ne peut-il pas faire
conjecturer qu’ils ont eu réellement la connoif-
fance du détroit en queftion, & l ’idée d’une fuite
de côtes que leurs fucceffeurs ont trop rabaiffée,
& qu’ils ont trop remplie de diverfes chofes à l’a*
venture ?
Les cartes les plus anciennes que j’aie vqes , &
qui font toutes latines, marquent cependant ce dé-r
troit en Italien, Stretto di Anïan ; ce qui me fait;
foupçonner que le premier qui en a fait mention
efl quelque mathématicien d’Italie, ou après les découvertes
des deux Indes qu’on a fait à ce fujet des
cartes qui piquent aujourd’hui la curiofité, &c. Be^
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nêdetto Scotto, Génois, d it, dans fon DiCcoiifs de
17 19 , & c. ce qui fuit :
a Cette partie occidentale du Canada, qu i! met
dans une de ces cartes près du cent quatre-vingtie-
me degré, félon notre façon de compter, fut reconnue
par les Portugais en l ’année 1720, à la hauteur
de fbixànte degrés, pour être habitée de.gens
raifonnables ôc humains, & remplie de quantité
d’animaux & de bons pâturages. Ils n’abandonnèrent
cette terre qu’à caufe de la trop grande navigation
qui contient quatre mille cinq cent quatre
vingt-dix lieues, en y venant par la mer des
Indes , &c. Je crois devoir ajouter que dans quelques
unes des plus anciennes cartes, on repréfente
les terres de l’Amérique feptentrionale, comme
une continuité de celles du nord-eft de l’A fie,
& elles y font jointes par un ifihme allez large, qui
eft au nord du Japon ».
M. Buache parle encore, dans le même ouvrage,
d’une manière conforme fur la Californie.
« Il efl étonnant, dit-il, qu’on ait encore fi peu
de connoiffance de ce pays, quoique Fernand Cortès
, conquérant du Mexique, y ait fait lui - même
un voyage en 153 3 , & que depuis les Efpagnols y
en aient fait plufieurs autres qui n’ont abouti qu’à
en reconnoître les côtes, auxquelles ils ont donné,
des noms .avec beaucoup de diverfité : ils jugèrent
ce pays, dès 1584, être très-bon & fort habité: ils
fe font uniquement occupés à traverfer la mer du
fud pour leur commerce des Indes. Cependant il
paroît que quelques vaiffeaux, au moins dans les
çommencemens, ont pouffé au nord, & ont reconnu
la fuite des côtes du nord-oueft de l ’Amérique
jufqu’au -détroit: ç’efi de quoi je vais donner
une nouvelle preuve ».
L a e t, &c. fait une remarque, &c. en 1633. « On
appelle, dit-il, communément Californie, tout ce
qu’il y a de terre au-devant de la nouvelle Efpagne
& Galice vers l’oueft, qui eft certes , de fort grande
étendue , & attouche les dernières fins de l’Amérique
feptentrionale & le détroit d’Anian. Ce font
des régions fort amples & connues légèrement en
leur plus petite partie , & feulement près du rivage
»: Witfliet difoit la même chofe en 1598. Les
Efpagnols afiuroient dans leur relation de 1683,
que félon telles anciennes relations elle eft longue
de dix-fept cents lieues (1 ). La même remarque
fe trouve pofitivement fur plufieurs cartes dreffèes
depuis l’an 1620. Le lavant P. Riccioli, en 16 6 1 ,
citoit d’autres relations qui n’ayant apparemment
pas égard à la finuofité des côtes, &c. faifoient la
Californie longue de douze cents lieues, depuis le
cap Saint - Lucar jufqu’à celui de Mendocino ; ce
cap étoit différent de celui que nous connoiffons
aujourd’hui fous ce même nom, & qui n’eft qu’à
quatorze degrés environ du cap Saint-Lucar ; mais
l ’autre devoit être peu éloigné du port où les Riifies,
_ (i),Espagnoles à .dix-fept lieues 8e demie au degré ;
jainfi paffé 1940 grandes lieues de France,
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commandés par M. Tfchirikow', ont abordé en
1741. Puifqu’on mettoit ce cap vers l’entrée du détroit
que l’on croyoit féparer l ’Amérique de l’A fie ,
&c.
Il réfulte de-là clairement qu’on doit ajoutèr foi
aux cartes que nos ancien , ou les premiers géographes
modernes, ont dreffées, par le récit de
quelques navigateurs Efpagnols ou Portugais, qui
ont réellement vu cette iuite de côtes.
. La plus ancienne carte que j’aie trouvée jufqu’à
préfent, qui marque cette continuation de terres
jufqu au détroit d’Anian, eft une carte Italienne de
l’Amérique feptentrionale, faite es 1566, mais les
côtes du nord-oueft de l’Amérique y font tracées
avec moins de précifion que dans la Japonoife,
&c.
J’ai déjà remarqué que la prolongation de la Californie
au nord - oueft jufqu’au véritable détroit
d’Anian, a été dans la fuite baiffée de huit à dix degrés
, & qu’après cela, diverfes navigations ayant
fait abandonner cette prétendue pofitioa, l’on a
perdu entièrement l ’idée de la côte réelle que les
Ruffes ont retrouvée au nord de la grande mer.
M. Gréen accufe de fauffetc, mais fans preuv
e , la relation du voyage que Cabrino fit en 1542 ,
jufqu’au quarante-quatrième degré.
Les prétentions des Ruffes devroient engager les
Efpagnols à produire ce qu’ils ont de relations concernant
leurs voyages au nord de la Californie, &
jufqu’au fameux détroit d’Anian qui reprend aujourd’hui
fes droits d’exiftence , &c.
A parler exactement, la Californie ne s’étend au
nord qu’un peu au-delà du quarante - troifieme degré;
& les pilotes les plus entendus qui vont continuellement
du Mexique aux Philippines, ou de
ces. îles au Mexique, ont trouvé qu’elle n’étoit que
de cinq ou fix cents, lieues depuis le cap Saint-Lucar
jufqu’au cap Mendocino d’aujourd’hui. Quand
on eut ainfi réduit la Californie,à fes juftes bornes,
& qu’on eut reconnu, fur-tout en 1603 , par la navigation
de Séhaftien Bifcaïen, & de Martin d’A -
guillar , que la mer retournoit en orient un peu
au-delà du quarante - troifième.degré., plufieurs E s pagnols
.firent de. la Californie îiræîfe.
Cependant il y avoit long-tems que les premiers
géographes modernes, d’après les navigations de
François d’Unca, & Herriand de Ai arçon daqs la
mer vermeille en 1.539 & 1 3 4 0 , repréfentoient la
Californie telle .que nous la cOnnoiffôns aujourd’hui,
c’eft-à-dire, comme une .prefqu'ïle (1). D e
Laet .objferve que dès l’an 15 39 , il y. a-eu des Efpagnols
qui s’etoient imiginés, que ç|étoit une î le ,
& il dit.en 16.33 , avoir vu de vieilles .cartes qui la
repréfentoienr de cette façon..
Les Hollandais ayant pris en 1620, fur un vaif-
feau Efpagnol, une carte de l'Amérique , où la Ca-
(ij) Ici il cite Ortelius , Mercâtor, Hondrus , O liv ie r ,
Bertius , L a e t, Blaeu v_&ç. en un m o t , dit-il, tous les.
meilleurs des premiers géographes modernes.