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jn e s , dans leurs çérèmonies religieufes, je ne fais
duelle reffemblance antique.
Ave c quelle force la nature avoit*elle donc
imprimé chez ces peuples l’amour, difons plutôt la
paillon des arts, pour que tant de ficelés de tyrannie
n’aient pu encore l ’éteindre entièrement ! Les
Grecs modernes s’enflamment au bruit des inilru-
mens ; ils fe paflionnent pour la danfe ; ils idolâtrent
la poèfie; ils font encore enthoufîaftes des
beaux arts ! Vous les voyez s’arrêter avec un charme
inexprimable devant upe colonne ou des ruines
antiques! Leur imagination toujours brillante les
transporte dans ces beaux fiècles de la gloire de leur
nation : ils foulent, avec une forte de refpefl, cette
terre jadis habitée par ce peuple d’artiftes , de héros
de Poètes & de Grands hommes. Ils fon t,
comme leurs pères, babillards & fins , fpirituels &
conteurs ; ils aiment lés fables, les allégories îpge-
nieufes & ceux qui ont quelqu éducation, sém-
Jbràfent en lifant Homère, Pindare , leurs orateurs
& leurs poètes ! . . . Mais cet élan momentané s e-
teint bientôt à la vue d’un gouverneur Turc , dont
les exafflons honteufes Scies loix arbitraires font
toute la légiflation ! ï ,
Si l’on retrouve encore daps la Grece moderne
ce fane fi beau, fi pur, ces formes élégantes, qui
nous rappèient ces belles ftatues antiques ; n 1 on
y retrouve cet enthoufiafme des arts, cette rpeme
envie de favoir & de connoître , cette fenfibilitè
d’imagination qui s exalte à la vue des belles c o-
<cs, combien ces hommes dégénérés font loin de
ces braves Athéniens, de ces fameux Spartiates, de
ces guerriers redoutables , qui portoient jufqu a
Pivreffe le l'entiment de la gloire , de la valeur &
de la liberté I Ce ne font plus que de vils efclaves,
fans reflort, fans courage, incapables même de
foutenir le bras qui tenteroit de les arracher à 1 esclavage.
Ce pays fe dépeuple de jour en jou r, oc
va enrichir, deTes nombreufes émigrations, laRuf-
f ie , l’Allemagne & l’Italie. La guerre entre la Porte
& la Ruffie (en 1772 & 1774), a achevé d’écrafer
cette malheuréufe contrée. Lés Turcs ne pouvant
empêcher la défection , fufeitèrent les Albanois ,
ces féroces défeeridans des anciens Scythes, en
leur offrant l’appas du pillage ; les Ruffes réduits à
un trop petit nombre, firent de vains efforts pour
arrêter les Albanois; les villes & la campagne fuient
faccagées par ces barbares, qui tuèrent & brûlèrent
tout ce qu’ils rencontrèrent, fans diftinâion
de Turcs ou de Grecs : fünefte effet du defpotifme,
qui ne peut rétablir la tranquillité dans les pays
qui lui font fournis, qu’en les dévaftant !
• Les habitans aéluels de la Grèce font eompofes
des anciens Grecs , qui mêlent rarement leur fang
à celui des autres peuples ; des Juifs qui y font en
grand nombre , & qui achèvent d?appauvrir, par
Tufure, cette miférable contrée ; & enfin des Ma-
hométansl Ceux-ci font la moindre partie, & ont
des mofquées, les Juifs des fynagogues, & les ori-
gjnaires du j?ays fuiyeot le rit gree : mais rjçq n é*
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gale les fables ridicules 8c les fuperftitions honten^
les dont les prêtres 8c les moines ont chargé la religion:
il femble qu’il s’entendent avec le Turc pour,
achever de dégrader & d’anéantir cette nation in-,
fortunée, Leur patriarche a fon fiège à Conftanti-j
nople.
La langue eft à l’ancien grec, ce qu’eft 1 italien
au latin ; harmonieufe & remplie de tours heuretixl;
elle pourroit être très-riche, fi jamais les arts 6c
les fciences venoient à renaître dans ce beau climat
!
On doit à un Anglais (M . Atkins) , d’avoir
fondé à Athènes une chaire , où l’on apprend aux
jeunes Athéniens la langue de leurs ancêtres. Aujourd’hui
ceux des Grecs, qui ont eu quelque éduy
cation, font familiers avec ces chefs-d’oeuvres qui
font l’admiration de tant de fiècles. Ils fe diftin-
guent encore par la pureté 8c l’élégance avec laquelle
ils parlent cet idiôme harmonieux, qui femble
principalement la langue de l’éloquence & de
la poéfie 1 M. le comte de Choifeul-Gouffier, vient
de fouiller encore dans ces précieufes ruines, dans
ces fuperbes débris des monumçns antiques ; il en
a rapporté des plans ineftimables dont il s’empreffe
d’enrichir fk patrie 1 Mais c’eft envain que l’Europe
policée porte fans ceffe fon admiration chez les
defeendans de çe peuple célèbre ; c’eft envain que
les artiftes vont fur ces fufts de colonnes brifées,
fur ces marbres épars., y refpirer le goût pur 8c
fain de l’aqtique : cette admiration ftérile , en retraçant
à ces peuples infortunés le tableap de leur
grandeur paffée, ne fait que leur rappeler avec plus
d’amertume encore l’impuiffance de s’arracher au
joug honteux qui les opprime !
Et comment leur rendre affez d’énergie, pour
faire defirer fortement leur liberté ?
Comment reffufeiter une nation paralyfée par le
defpotifme! Sera-ce le gouvernement turc qui fera,
revivre les arts, les fciences , le commerce & l’agriculture
, lui q u i, par principe, eft ennemi de
de toupies arts, §c de toutes les fciences , qui voit
fes riches campagnes fans cultivateurs & fans mpif-
fons, fes villes fans manufactures, & qui femble
dans fa vafte domination ; éçrafer tous les germes
de l’induftrie 1 Jufqu’à quand reftera-t-elle enfeve-?
lie dans l’efclavage cette terre infortunée ! Ne for-
tira-t-il jamais un vengeur des cendres de tant de
grands hommes! O Frédéric! O Jofeph! O Car
thçrine ! On a efpéré que vous rappelleriez en^
cère une fois les beaux arts exilés de leur terre natale
! L’Europe l’a attendu en filence ! L’efpérera-
t-elle en vain ? Et verra-t-elle éclore enfin ce jour
heureux, où les enfans des Miltiades, des Thémif-
tocles, où les defeendans des Homère & des Dén
mofthènes redeviendront, par vos foins, un peuple
digne de fes ancêtres !
Les denrées que l’on tire de la Grèpe, fur-tout
celles des îles de l’Archipel, dont il/e fait un grand
commerce, confiftent en huiles, vins délicieux,
foies çrues, miel, cirp, coton 9 froment ? 6cc. &c.
L'ïlf
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. L’ile de Candie eft renommée pour fes oliviers ,
qui ne meurent que de vieilleffe, parce qu il n y
gèle jamais. _ '
Chio eft célèbre pour fon maftic & pour les
vins qui font recherchés dans toute l’Europe.
Andros, Tine , Thermie & Zia , pour leurs
Metelin, anciennement Lesbos , pour fes excel-
lens vins & fes figues. .
Naxie, pour fon émeril ; Milo, pour fon fouftre,
Samos, pour fon ochrë ; Syphanto, pour fon coton;
Skino, pour fon froment; Amorgos, pour
une efpèce de lichen, plante propre à teindre en
rouge, & dont les Anglais font une affez grande
confommation, &c. Voye^ chacun de ces articles
fous la dénomination qui lui eft propre, pour en
avoir des détails plus étendus : mais on ne peut
lire avec trop d’attention l’ouvrage de M. G u y s ,
de l’académie de Marfeille, & fes obfervations,
auffi ingénieufes que profondes, fur les Grecs
anciens & les Grecs modernes ; cet écrivain aimable
femble rendre à cette nation fon luftre antique
; elle acquiert, fous fa plume, un plus grand
degré d’intérêt encore, lorfqu’en nous développant
les caufes qui l’ont fait dégénérer, on voit combien
ce peuple fpirituel, ce peuple, père des arts,
jufques dans fon altération politique, foupire encore
après fa grandeur éclipfée L...
Je me reprocherons de n’avoir indique qu en paf-
fant le magnifique ouvrage de M. le Comte de
Choifeul Gouffier, il mérite, fans doute, notre
reconnoiffance & celle de toute 1 Europe. Cet ob-
fervateur, auffi profond qu’infatigable,a,pourainfi
dire, tranfporté la Grèce dans nos climats; elle
refpire aujourd’hui parmi nous ; nous nous promenons
dans fes ruines fuperbes ; nous refpirons
fon air fi pur, nous habitons ce foL enchanteur ,
ce fol où repofent les chefs-d’oeuvres des arts, 8c
les cendres de tant de grands hommes, 8c le fenti-
ment d’admiration que ce. tableau nous infpire,..,
ne fert qu’à redoubler notre reconnoiffance pour
cet illuftre voyageur. ( Article de M. M a s s o n
v e Mo r v i l l i e r s .')
G r è c e A s i a t i q u e ; on a autrefois ainfi nommé
la partie de l’Afie où les Grecs s’étoient établis,
principalement l ’Eolide , l’Ionie, la Carie & la
Doride , avec les îles voifines. Ces Grecs afiatiques
envoyèrent le long de la Propontide, & même juf-
• qu’au fond du Pont-Euxin, des Colonies qui y établirent
d’autres colonies : de là vient que Pon y
trouve des villes qui portent des noms purement
grecs, comme Héraclée , Trébifonde, Athènes.
G r è c e (grande ) , dénomination anciennement
donnée à la partie orientale & méridionale de l’Italie
, où les premiers Grecs envoyèrent un grand
nombre de colonies , qui y fondèrent plpfieurs
villes confidérables , comme nous l’apprend D e nis
d’Halicarnaffe. La grande Grèce comprenoit la
Pouille , la Meffapie , la Calabre , le pays des Sa*
GéQgraphief Tome J. Partie i l,
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lentins, des Lucaniens , des Brutîens des Cro-
toniates & des Locriens.
Cette dénomination de grande Grèce ne s’eft introduite
vraifemblablement que quand la république
Romaine a été formée, & a poffédé un éta t,
dont les Latins, les Volfques & les Sabins faifoient
partie ; car ces peuples étoient Grecs d’origine, 8c
leurs pays pouvoient être naturellement compris
dans la Grèce italique : mais comme ils avoient
fubi le joug des Romains, 8c parloient une langue
différente de celle des Grecs , on réferva le nom
de . Grecs à ceux qui avoient confervé leur langue
originale , qu’ils mêlèrent pourtant enfuite avec la
latine. Auffi nous voyons que du tems d’Augufte ,
on parloit encore à Canufe un jargon qui étoit un
mélange de grec 8c de latin :• Canujini more bilinguis,-
Quelques modernes comparant l’étendue de la
Grèce italique avec celle de la Grèce proprement
dite, qui comprenoit l’Achaïe, le Péloponnèfe , 8c
la Theffalie, ont cru que le nom de grande Grèce
lui avoit été très-mal appliqué : mais les obferva-
tiôns aftronomiques du père Feuillée, de M. Ver-
non 8c autres, prouvent* le contraire. En effet, il
réfulte de ces obfervations, que la longueur & la.
largeur qu’on donnoit ci-devant à la Grèce propre,
excédoit de plufieurs degrés fa véritable étendue ;
en forte que ce pays fe trouva plus petit de la moitié
qu’on ne le fuppofoit.
On peut donc aujourd’hui établir pour certain ;
que la Grèce italique a été jadis nommée grande
Grèce avec beaucoup de fondement, puifqü’elle
étoit en réalité .plus grande que la véritable Grèce,
6c cela même- fans qu’il foit befoin d’y attacher la
Sicile , quoique cette île étant pleine de colonies
grecques , pût auffi être appelée Grèce, comme
l’ont fait Strabon 8c Tite-Live.
Il eft vrai néanmoins que la grande Grèce diminua
infenfiblement, à mefure que la république
Romaine s’agrandit. Strabon obferve qu’il ne reftoit
plus de fon tems que Tarente, Rheges 8c Naples
qui euffent confervé les moeurs grecques , 8c que
toutes les autres villes avoient pris les manières
étrangères ; c’eft-à-dire, celles des Romains, leurs
vainqueurs.
Au refte , la Grèce italique a produit, ainfi que
la véritable G rè ce , quantité d’hommes illuftres :
: entre les philofophes, Pythagore , Parménide , Zenon
8cc. : entre les poètes, Ibicus 8c quelques au-
! très : mais ces Grecs d’Italie ayant avec le tems
cultivé la langue latine, s’en fervirent' dans leurs
poéfies ; Horace, par exemple, 8c Pacuve , tous
deux nés dans la Pouille , étoient Grecs , quoiqu’ils
foient du nombre des poètes latins. (Æ.)
GREENWEILER, près de Sarbruck, eft la ré*
fxdence du Rhingrave, prince de Salm. {R.)
G R ÉENWICH, petite ville d’Angleterre,dans
la province de K en t, à deux lieues n. o. de Londres
, fur la Tamife. Long, fuivant Harris 8c Çaffini,
17 d, 28' 3/; ; lojig. 51' d. 28' JJ|
Greenwich eft remarquable par fon obfervatoirej
■ S f f f