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feptèntrfonale, fur les côtes de la terre de Labrador
& de la baie d'Hudfon, pays extrêmement
froids.
Ce font les fauvages des fauvages, & lesfenls
. 1 Amérique qu’on n’a jamais pu apprivoifer; petits
, blancs, gros, & antropophages , leur taille
H excede guère quatre pieds, & ils ont la tête énorme
a proportion du corps. Quoique fans poil &
lans barbe, tous, même les jeunes gens , ont un
air de vieillefle. Ceux de la baie d’Hudfon ont,
comme les Groenlandois , le vifage plat, le nez
petit, mais non écrafé, la prunelle jaunâtre, l’iris
noir, & le teint olivâtre.
Les Eskimaux n ont ni des hordes entièrement
noires, comme on l’a foutenu, & comme on a
prétendu 1 expliquer, ni des habitations creufées
fous terre. Comment vivroient-ils dans des creux
où ils feroientfubmergés à la moindre fonte de neiges
? Ils vivent dans des huttes, refpirant un air glacial
, fans autre feu que celui d’une groffe lampe allumée
au milieu de la cabane. Il eft faux auftî qu’ils
mangent tout crud racines > viande, & poiffon*Ces
peuples perdent la vue de bonne heure par l’éclat
des neiges, & font tres-fujets au fcorbut. On voit
chez les autres peuples des manières humaines,
quoiqu’extraordinaires , mais dans ceux-ci tout eft j
féroce & prefqu’incroyable.
Malgré la rigueur du climat, ils n’allument point
ce feu, vivent de chafie, & fe fervent de flèches
armees de pointes faites de dents de vaches matines
, ou de pointes de fer quand ils en peuvent
avoir. Leur nourriture la plus ordinaire eft la chair
de loups ou veaux marins ; Us font auffi très-friands i
«e 1 huile qu on en tire. Ils forment de la peau de
ces fortes de bêtes, des facs dans lefquels ils ferrent
pour le mauvais tems une proyiftoii de cette
chair coupée par morceaux.
Ils ne quittent point leurs vêtemens ; Us fe font
®e j6 jtCS tun^(ïues peaux d’oifeaux , la plume
en-dedans, pour fe mieux garantir du froid , &
ont par-deffus, en forme de chemife, d’autres tuniques
de boyaux ou peaux d’animaux, coufues par
bandes, pour que la pluie ne les pénètre point.
Les femmes portent leurs petits - enfans fur leur
dos , entre les deux tuniques , & tirent ces pauvres
innocens par -defTous le bras ou par-deffus
1 épaule pour leur donner le teton.
Ces fauvages confîruifent des canots avec des
cuirs , & Us les couvrent par-deffus, laifîànt au
milieu une ouverture comme à une bourfe, dans
laquelle un homme feul fe met ; enfuite liant à fa
ceinture cette efpèce de bourfe , il rame avec un
aviron a deux pelles , & affronte de cette manière
la tempete & les gros poiffons.
Les Danois ont les premiers découvert les
Eskimaux. Le pays qu’ils habitent eft rempli de
havres, de ports, & de baies, où les barques de
Quebec vont chercher en troc de' quincaillerie ,
les peaux de loups marins que ces fauvages. leur
apportent pendant l’été* E x t r a it d'une, lettre de.
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S a in t t -H e le n e , du 30 oSlobre 17^ r. V o y e£ auffi
vous voulez la relation du Groenland , inférée
dans les voyages du Nord, & ceux du baron de
la Hontan. Les Eskimaux font le peuple fauvage
de 1 Amérique que nous connoiffons le moins juf-
qu’à ce jour. (72.)
ESLINGEN, ou Esslingen , ville impérial*
du cercle de Souabe , au duché de Wirtemberg ;
elle eft fituée fur le Neckre. On y diftingue l’hôtel
de-ville , l’hôtel de la nobleffe , & le riche hôpital
de Sainte-Catherine. Il s’y trouve une maifon
des Orphelins, deux collèges, plusieurs églifes ;
& trois faubourgs, dans l’un defquels eft l’arfénai
du cercle de Souabe. Les habitans fuivent la con*
feflion d’Augsbourg. L’évêque de Conftance & le
prince de Furftemberg. y ont chacun un-hôtel, &
le duc de Wirtemberg y en a trois. Elle eft fous
la prote&ion de ce fouverain. Ses environs pro-
duifent Fexcellent vin de Necker, ou Neckar. Cette
ville eft à lo'fi. n. e. de Tubingen , 2 f. e. de Stutv
gard,. 14 f. de Hailbron , & 16 n. o. d’ülm. L o n g :
27, 50i la t . 48,40. (R . )
ESMOUTIER, petite ville de France, dans le
Limoufin. Elle eft fituée- fur la rivière de Vienne *
fur les confins du gouvernement de la- Marche;
Elle a une églife collégiale & un couvent ; il s’y
fait du trafic en pelleteries , en cuirs , & en vieux
linges pour les papeteries. Elle eft à 7 lieues de
Limoges. Long. 19, 22; la t. 43,43. (j?.)
ESPAGNE, royaume confidérable de l’Europe ;
borné par la mer Méditerranée du côté de l'Afrique
par le Portugal à l’occident, au nord par
1 Océan, & du côté de la France par les Pyrénées
: il a. environ deux cent quarante lieues de
long fur deux cents de large , & fix cent vingt
de circonférence, & forme une prefqu-’île, fituée
entre le 3 6e degré de latitude jufqu’au 44e, & de**
puis le 9 de longitude jufqu’au 21e.
L’Efpagne a eu différèns noms ch.ez les anciens*'
elle a été appellée par les Grecs H é fp c r is , c’eft-à-
dire,pays d’occident, à caufe de fa fituation à
leur égard : elle a porté aufii le nom S ib é r ie , qui
paroit venir du fleuve lberus aujourd’hui YEbreÿ,
ou plutôt du mot chaldaïque Alberin, qui veut
dire f i n , extrémité j parce que les anciens regar-
doient cette région comme l’extrémité du monde.1
Les premiers peuples qui l’habitèrent, furent les
C eltes & les Iberes. Du mélange de ces deux nations,
fe forma le nom de Celtibértens.. Enfuite les
Phéniciens attirés par le commerce, y vinrent
faire des établiffemens mille cinq cents ans avant
Jefus-Chrift, & y fondèrent plufieurs colonies,
telles que C a d i x , M a la g a , &c. Le favant Bochard
prétend que le nom de S p a n ia , d’où vient celui
d ’Efpag ne fe tire d’un mot Phénicien , qui veut
dire la p in , parce qu’autrefois il y en avoit un
grand nombre. On trouve encore quelques mon-
noies de l’empereur Adrien., fur lefqifélles le. la-,
pin dénote-l’Efpagnè.
Après les Phéniciens vinrent, les anciens.
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fcllloîs ; qui bâtirent Rhode, aujourd’hui R o f e s ,
Emporia, aujourd’hui Am pur ia s , &c. Les Grecs
y fondèrent auffi des colonies, enfuite les Char-
thaginois^qui s’emparèrent d’une grande partie de
Ce royaume, & bâtirent Tarragone , Carthagcne,
Barcelone. Enfin ce peuple conquérant, dont le
deftin étoit de donner des loix au monde entier,
fe rendit maître, fous Scipion , de ce que poffé-
doient les Carthaginois, & le refte de ce pays ^habité
par les Cantabres , nation belliqueufe , après
bien du fang verfé, fut conquis fous Augufte. Pour
voir la fuite des révolutions de ce royaume,
écoutons ce qu’en dit le peintre brillant du fiècle
de Louis XIV.
« L’Efpagne foumife tour-à-tour par les Carthaginois
, par les Romains, par les feoths , par les
.Vandales, & par les Arabes qu’on nomme M a u r e s ,,
tomba fous la domination de Ferdinand , qui fut
à jufte titre furnommé roi (L’Efpagne , puifqu’il en
réunit toutes les parties fous fa domination ; l’A-
ragon par lui-même , la Caftille par Ifabelle fa
femme , le royaume, de Grenade, par là conquête
fur les Maures, le royaume de Navarre par
üfurpation. Il mourut'en 1516.
Charies-Quitt fon fucceffeur forma le projet de
la monâ/chie univerfelle de notre continent chrétien
, & n’abandonna fon idée que par l’épuife-
ment de fes forces & fa démiflion de l’empire en
£5 5 6- . -
Levafte projet de monarchie univerfelle, commencé
par cet empereur, fut foutenu par Philippe
U fon fils. Ce dernier voulut, du fond del’Efcu-
yial, fubjuguer la chrétienté par les négociations
& par les armes ; il envahit le Portugal ; il défola
la France ; il menaça l’Angleterre : mais plus propre
a marchander de loin des efclaves qu’à combatte
® de près fes ennemis, il ne put ajouter aucune
conquête à la facile invafion du Portugal. Il fa-
crifia, de fon aveu, quinze cents millions, qui
font aujourd’hui plus de trois mille millions de
notre monnoie, pour affervir la France & pour
regagner les fept Provinces Unies ; mais fes tré-
fors n aboutirent qu’à enrichir les pays qu’il voulut
dompter : il mourut en 1598.
Sous Philippe III, la grandeur efpagnole ne fut
’qu un vafte corps fans fubftance, qui avoit plus
de réputation que de force. Cô prince, moins
guerrier encore, & moins fage que Philippe II,
vertus de roi : il ternit fon règne &
affoiblit la monarchie par la fuperftition , ce vice
des âmes foibles , par les-nombreufes colonies
quil tranfplanta dans le Nouveau - Monde, & en
chaffant de fes états près de huit cent mille Maures
, tandis qu il auroit du au contraire les peupler
d'un pareil nombre de fujets : il finit fes jours
en 1621. '
Philippe IV , héritier de la fbibleffe de fon père,
perdit le Portugal par fa négligence, le Roufiillon
par la foibleffe de fes armes,& la Catalogne par
J-abus du defpotifme : il mourut en 1665. »
. . E S P
Charles II perdit une grande partie de ce qui lui
reftoit encore des Pays-Bas , ainfi que la Franche-
Comté , & mourut en 1700 fans laifler de pofté-
rité , appelant par fon teftament au trône d’Efpa-
gne, Philippe duc d’Anjou, petit-fils de Louis XIV
roi de France. La guerre qui s’éleva en cette occa-
fion entre la France & la maifon d’Autriche^ Sc
qui dura treize années , fut terminée par le traité
d Utrecht, lequel afîiira la couronne d’Efpagne à
Philippe. V du nom. Ce prince abandonna Gibraltar
8c l’île Minorque à l’Angleterre, & la Sicfe
au duc de Savoie. L’empereur Charles VI foa
compétiteur fut obligé de fe contenter des Pays-
Bas , des provinces d’Italie pofledées jufqu’alors
par l’Efpagne. En 1717, Philippe V enleva à
l’empereur la Sardaigne & la Sicile: mais, ayant
accédé en 1720 à la quadruple alliance, il renonça
à fes droits à la couronne de France, aux
Pays-Bas Efpagnols , aux provinces d’Italie, ainfi
qu’a la Sardaigne & à la Sicile. Toutes ces ftipu-
lations furent confirmées par le traité de Vienne,
de 1725, par lequel Charles VI, de fon côté, renonça
à la couronne d’Efpagne. Philippe rompit
de nouveau avec l’empereur en 2733 , & fe ren-_-
dit maître des royaumes de Naples & de Sicile ,
qui paffèrent à fon fils Dom Carlos. Nouvelle
guerre en 1739, entre l’Efpagne & l’Angleterre.
Ferdinand VI procura à fon frère germain, par.
le traité d’Aix-la-Chapelle de 1748, les duchés de
Parme, de Plaifance, & de Guaftalla. Son frère,
Dom Carlos, lui fuccéda au trône d’Efpagne en
1759 , aujourd’hui régnant, fous le nom de Charles
III.
Le roi d’Efpagne a le titre de R o i C a th o liq u e ;.
qui fut donné à Ferdinand V en 1500, par le pape
Alexandre _ VI. Le prince royal prend , depuis
1388, le titre de P r in ce des A fu r ie s : les autres
enfans de la famille royale font appellés Infants.
■ n L’Efpagne, dit un de nos plus grands écrivains,
devroit être un des plus puiffans royaumes
de l’Europe, mais la foiblefîe de fon gouvernement,
rinquifition , les moines , la fierté;
oifive des habitans, ont fait paffer en d’autres
mains les richeffes du Nouveau-Monde. Ainfi, ce
beau royaume , qui imprima jadis tant de terreur
à l’Europe , eft par gradation tombé clans une dé-,
cadence dont il aura peine à fe relever.
Peu puiffant au-dehors, pauvre & foible au-
dedans, nulle induftrie ne fécondé encore dans
ces climats heureux les préfens de la nature. Les
foies de Valence , les belles laines de l’Andalou-
fie & de la Caftille, les piaftres & les marchan-
difes du Nouveau-Monde , font moins pour l’Ef-
pagne que pour les nations commerçantes ; elles
confient leur fortune aux Efpagnols, & ne s’en
font jamais repenties. Cette fidelitéSingulière qu’ils
avoient autrefois à garder les depots, & dont
Juftin fait l’éloge, ils l’ont encore aujourd’hui i
mais cette admirable qualité, jointe à leur parefle,
forme im mélange dont il réfultè des effets qui leur