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pérant de parvenir à le rendre maîtres du château,
Adalbero ht venir de Liège la châffe de Saint-Hubert
; qu après une proceffion bruyante à l’errrour du
château, il fut pris miraculéufement en 1 141. Il ne
falloir rien moins qu’un tel prodige pour légitimer
fes prétentions.
L ’hiftoire ne fait pas mention du tems auquel les
évêques de Liège en furent dépoffédés. On voit
feulement qu’en 1435, Jean D e lo s , feigneur de
Hçinsbergues, étoit duc de Bouillon ; il eu nommé
en cette qualité, entre les princes qui, la même année,
accompagnèrent Philippe - le-Bon , duc de
Bourgogne, au traité d’Arras. Olivier de la Marche,
dans fes Mémoires, en parlant de ce traité fait
entre Charles VII & le duc de Bourgogne, rapporte
que cette convention & affemblée faite à Arras, de
la part de monf. de Bourgogne, il y fut en personne,
y étant accompagné du duc Arnould de
Gueldre, de l'évêque de Liège, du duc de Bouillon,
qui fe nommoit de Heinsbergues, de Jean
Monfieur, héritiér du duc de Cleves ; Pontus Heult,
Rerum. Burgund. , dit, Philippum fequebatur Arnol-
dus Geldritz dux, Bullonis dux , Joannes filius natu
maximus ducis Cliviez , Antijles Cameracencïs & Loe-
dienfis. Snffrid, Cronic. duc. Braban. & en l'Hifloire
des évêques de Li'ege, fait fouvent mention de ce Jean
de Heinsbergues, qu’il appelle exctllentijjimum prin-
cipem , & remarque qu’en 142 1, lui & fes en fans ,
entre îefquels étoit l’évêque de L ièg e , firent un
traité de paix avec le duc de Brabant.
Après ce Jean de Heinsbergues, il paroît que le
duché de Bouillon paffa à Robert de la Marck, premier
du nom.
En 1486, Robert I I , fon fils, duc de Bouillon,
ayant eu quelques difcuflïons avec Maximilien, archiduc
d'Autriche, fe mit avec fes places, fous la
profeélion de Charles V I I I , lequel, par fes lettres
du 13 juillet de la même année, promit de l’aider &
fecourir comme les feigneurs de fon propre fang &
lignage, contre tous ceux qui voudroient lui faire
la guerre , entr’autres contre l’archiduc d’Autriche ;
& s’engagea de ne faire aucun traité fans l’y faire
comprendre.
Cette proteélion n’empêcha pas que l’archiduc ne
vînt afîiéger Bouillon,& ne s’emparât du duché qu’il
garda jufqu’après la paix de Senlis, faite en 1493 ,
entre Charles VIII & Maximilien , devenu roi des
Romains, & Philippe, archiduc d’Autriche fon fils.
Par ce traité de paix,dans lequel Robert de la Marck,
duc de Bouillon, fut compris , on convint que tous
ceux qui avoient fervi en cette guerre, de part &
■ d’autre, rentreroiënt en la jouiffance de leurs terres
Sc leigneuries, pour en jouir comme ils en jouif-
foient avant l’empêchement furvenu, à catife des
guerres depuis l’an 1470.
Il furvint apparemment quelques nouvelles difficultés
entre l’archiduc & le duc de Bouillon ; car le
traité de Senlis n’ eut fon entière exécution à leur
égard, qu’en conféquence d’un autre traité particulier,
fait entr’eux le 27 Décembre 1496, par lequel
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il fut fpécialement convenu qu’en fuivant la paix de
Senlis, ledit Robert de la Marck feroit réintégré ès
terres & feigneuries de Florenges & comté de Chi-
ny, & auffi en la terre & feigneurie de Bouillon, ce
qui fut exécuté, & le traité de Senlis depuis confirmé
& ratifié après la mort de Charles V III, par le
roi Louis X I I , fon lucceffeur, par traité fait à Paris
le 2 août 1498.
L ’année d’auparavant , il y avoit eu un autre
trairé de paix, entre le duc de Lorraine & ce même
Robert de la Marck, duc de Bouillon, conclu par
l’entremife de Louis X I I , qui, pour cet effet, leur
avoit envoyé le maréchal de Vaudricourt.
Au traité de Cambrai de l’an 1308, entre Louis
X I I , l’empereur Maximilien I , & Charles, archiduc
d’Autriche, le même duc de Bouillon eft compris
parmi les alliés & confédérés de la France.
En 1518 , le même duc de Bouillon , & Evrard
de la Marck fon i t è r e , évêque de Liège, firent un
traité de confédération & d’alliance défenfive, avec
Charles d’Autriche, roi d’Efpagne, àSaint-Trcn,
le 27 Avril.
Enfin, il fit un traité d’alliance avec François Ier,
à Remorentiii, le 14 février 1520.
C ’eft ce dernier traité, & comme nous l’avons
ci-devant d it , un jugement rendu par la cour
fouveraine de Bouillon, contre Emeric, feigneur
d’Hierges, protégé par Charles V , qui occafion-
nèrent la première guerre entre cet empereur &
François Ier.
En 15 2 1 , Charles V envoya le comte de Naffau
à la tête d’une armée , pour s’emparer du duché de
Bouillon. Il affiégea& prit la ville & le château;
y fit mettre le feu après les avoir pillés ; & en
15 22, il donna ce duché à l ’évêque de L ièg e , qui
étoit refté fon allié en conféquence du traité de
1518.
Le maréchal de la Marck le reprit en 1532
M. de Thou , la Poplinière , Belléforêt, Du-
pleix, & après eux Mezerai, rapportent unanimement
que , dans le tems des conquêtes que fit
l’armée d’Henri II , le maréchal de la Marck , qui
étoit Robert I V , duc de Bouillon , jugeant que
l’occafion étoit favorable pour recouvrer fon duché
de Bouillon , ( dont, fuivant les mêmes auteurs ,
le maréchal étoit le véritable feigneur & propriétaire
) , il fupplia le roi de l’aider à le reprendre
; que le roi lui prêta quatre mille hommes
d’infanterie , douze cents chevaux, & quelques
piêcès d’artillerie , dont il fe fervit avec tant d a-
dreffe & de v aleur, qu’il reprit la ville & le château
, & enfuite le refie du duché, trente ans après
que fon aïeul en avoit été dépouillé par Charles V ,
qui î’avoit donné à l’évêque de Liège.
Depuis 15 2 le maréchal de la Marck, & Robert,
fon fils 8c fon fucceffeur , pofîédèrent ce duché
jufqu’en 1559.
Mais Philippe II , roi d’Efpagne , ayant infifté
lors des conférences tenues, pour parvenir au traité
de Château-Cambrefis, à ce que le château de
Éouillon fût remis â l’évêque de Liège , en 1 état
qu’il étoit avant le commencement rie la guerre,
cette refiitution fut prom fe par Henri I I , qui en
écrivit à la ducheffe douairière de Bouillon, le 25
mars 15 5 8, en la « priant, pour 1 amour de lu i , oc
» pour ne pas empêcher la paix , de vouloir bien
fe prêter à la remife de ce duché, lui promettant
•n qu’il lui en feroit, à elle 8c à fes enfans , fi bonne
3? & honnête récompenfe, qu’ils auront jufie-caule
•5, & occafion de eux demeurer contens 8t fatisfaits».
Le roi ne s’eri tint pas à cette feule promeffe , il en
fit expédier un brevet en forme , fous la même
date, tant il étoit perfuadé de la légitimité des
droits de la maifon de Bouillon fur ce duché.
La ducheffe de Bouillon fe rendit à ces inflances,
à condition cependant que les droits de fes enfans ,
tant pour raifon de la propriété de ce duché, qu’à
càufe des fommes à eux dues par les communautés
du pàys de Liège , feroient réfervés pour être jugés
par des arbitres. Cela fut ainfi convenu par l'article
14 de ce traité, conclu en 1559.
Charlotte de la Marck, feule héritière de la
branche aînée de fa maifon , époufa , en i 591,
Henri de la Tour-d’Anvergne, vicomte de Tu-
■ renne , auquel elle apporta en dot les fouverainetés
de Sédan 8c Raucourt, 8c fes droits fur le duché de
, Bouillon : elle mourut quelques années après ,
ayant inflitUé fon mari pour fon héritier.
L ’évêque 8c les états de Liège ayant toujours re-
fufé de convenir d’arbitres avec la maifon de Bouillon
, ainfi qu’il avoit été réglé par le traité de
Château-Cambrefis, il fut ftipulé par celui de Ver-
v in s , en 1598, qu il en feroit nommé dans fix mois :
cette ffipulation refia encore fans effet, malgré les
follicitations des ducs de Bouillon.
Dans le nombre des mémoires qu’ils firent imprimer
, il y en eut un , intitulé : Difcours des
droits & prétentions de Frédéric-Maurice, premier au
nom , duc de Bouillon ; ( il étoit fils de Henri de la
Tour-d’Auvergne ) , contre l'évêque & le chapitre de
l'églife de Liège , & les états & communautés dudit
pays , imprimé pour la première fois en 1 6 3 6 ,8c
remis , fuivant une note en marge , au chapitre de
Liège , le 26 décembre de la même année.
C e mémoire fit plus d’effet que les précédens ;
il amena le chapitre 8c les états à tranfiger avec ce
prince fur les créances qu’il avoit à exercer contre
eux. La tranfaélion eft du 3 feptembre 1641.
c Nous avons fous les yeux cette tranfaélion, 8c le
mémoire de Frédéric-Maurice, fur lequel elle intervint.
‘ Ce mémoire contient deux parties. Dans la première,
Frédéric-Maurice établit fes droits de propriété
fur le duché de Bouillon , contre l’évêque
de Liège ; la fécondé contient un état détaillé dtf*
toutes les créances de fa maifon , fur les états 8c
; communautés du pays de Liège.
L’évêque de Liège, ni les états , ne voulurent
entrer dans aucune explication fur la première
partie du mémoire, relative à la propriété du duché ;
àufii la tranfaélion n’en parle-t-elle pas direéiement
ni indireéïement, les états fe bornant à difeuter les
différons objets de créances, tels qu’ils étoient détaillés
dans la fécondé partie du mémoire du duc de
Bouillon. Les parties arrêtèrent, de concert, que
toutes ces créances feroient réduites à une fomme
de 150000 florins, quoiqu’elles excédaffent 200000
florins. La tranfaéhon ne porte que fur ce feul &
unique objet ; on y ftipule que c’eft pour l’extinction
de toutes les prétentions que le prince de Sédan
peut avoir c-ontre lefdits états, ou aucuns membres
d’iceux , réfultans & provenans des obligations
& titres rappelles en ladite tranfaélion ; on n’y
dit pas un mot de la ceffion du duché de Bouillon,
ni des droits de fouveraineté fur ce duché (comme
quelques auteurs modernes l’ont prétendu ) parce
qu’il n’en étoit pas queftion , les états n’ayant
voulu tranfiger que fur les créances.
Parla procuration, donnée par Frédéric-Maurice
au fieur Hilderniffe , pour ftipuler pour lu i dans
cette tranfaélion , ce prince avoit pris la qualité de
duc de Bouillon ; il eft vrai que le fonde de procuration
fe prêta à n’inférer dans la tranfaélion
que le titre de prince de Sédan-Raucourt, &c. à
condition que l’évêque de Liège , qui auroit voulu
prendre le titre de duc de Bouillon , ne feroit pas
partie dans l’aéle ; 8c qu’en fin de cet aéle on inférer
oit la claufe, voir que le titre , repris dans la
préfente tranfaélion , de part 8c d’autre , ne portera
aucun préjudice ni conféquence , autre que de droit
leur appartient : ilreftoit donc d’autres difeuftions
fur lefquelles on ne tranfigeoit pas.
Ce même Frédéric Maurice , duc de Bouillon ,
quelque tems après cette tranfaélion , céda à la
France, à titre d’échange , les fouverainetés de
Sédan & Raucourt. On ftipula dans l’aéle d’échange,
qui ne fut figné & arrêté que le 20 mars 1651 ;
que le duc de Bouillon fe réfervoit les droits qu’il
avoit au château de Bouillon , 8c aux portions de
ce duché , ufurpées fur fes prédécelïeurs par le roi
d’Efpagne & l’évêque de Liège: & que dans le
cas où les parties de ce duché , occupées par l’évêque
de Liège , feroient reprifes fur lu i , elles lui
feroient rendues.
Louis XIV reprit effeélivement, en 1676, le
château de Bouillon & les autres parties du duché
détenues par l’évêque de Liège.
Godefroy-Maurice, alors duc de Bouillon, lui
repréfenta fes droits fur cette fouveraineté, droits
que Frédéric-Maurice, fon père, s’étoit expreffé*
ment réfervés par le contrat d’échange : en conlê-
quence, il pria fa majefté de lui permettre d’en
reprendre poffeffion.
Louis X IV nomma des commiffaires ; & fur lë
» compte qu’ils lui rendirent de la juftice de la demande
du duc de Bouillon , & en exécution de la
claufe particulière du contrat de 1651 , dont nous
venons de faire mention , le r o i , par un arrêt de
fon confeil, en date du premier mai 1678 , permit
au duc Bouillon de fe remettre en poffeffion de ce