
des rivières & du Zuider-zée, par des fortes digues
qui font entretenues avec beaucoup de foins & à
grands frais, fans quoi le -terrein feroit bientôt
fubmergé. La nature a fait la Hollande pour avoir
une attention perpétuelle fur elle-même. Tout y
eft entrecoupé de canaux qui fervent à deffécher
les prairies & à faciliter le tranfport des denrées
d’un lieu à l’autre. On ne voyage nulle part ni fi
fûrement, nifi commodément, ni fi fréquemment,
foit de jo u r , foit de nuit, de ville en ville ; 8c l’on
lait toujours , à quelques minutes près , l’heure à
laquelle on arrivera.
D ’un bout de la Hollande à l’autre, régnent
fans interruption, dans les grands chemins, les
villes , les bourgs 8c les villages , des allées & des
avenues d’arbres tirées au cordeau , taillées de
toutes'les manières,& bien mieux foignées que
ne font les avenues des palais des rois. Les boiugs
& les villes fe touchent p'refque & parodient bâtis
de T a n n é e . Ce qu’on appelle villages en Hollande,
feroit nommé ailleurs des villes , des bourgs magnifiques
: prefque tous ont leur églife , leurs ma-
gifirats, leurs foires annuelles, leurs maifons poulies
orphelins, & beaucoup de privilèges & de commodités
que n’ont pas plufieurs villes de France.
Dailleurs tout le pays en couvert de maifons de
campagne, q u i, loin de rien rapporter aux propriétaires
, coûtent beaucoup pour l’entretien.
Chacun y eft maître de ion bien : la monnoie
y eft invariable, le commerce libre ;8c c’eft le
plus folide appui de la province. La religion pro-
teftante eft la'dominanre, mais on y tolère toutes
les religions du monde.
La Hollande touche du côté du midi aux états de
Brabant, du côté du leyant aux provinces de
Gueldres, d’Utrecht, & au Zuider-zée ; au nord
elle confine au Zuider-zée & à la mer du nord, qui
la limite aufii au couchant. On lui donne environ
quatre cens quarante mille journaux de terre. On
n’y refpire point un air fain : la plus grande partie
du fol y eft en pâturages & en praires. Le bétail
& les bêtes à cornes y abondent ; & le beurre,
ainfi que les fromages, le boeuf falé, forment le
principal commerce des campagnes. Le meilleur
beurre de la province eft celui de Delft ; les meilleurs
fromages font ceux de Gonde & d’Edam.
Toutes les teries qui avoifinent la Zélande produi-
fent de bons grains ; dans les parties intérieures,
la terre eft tourbeufe & n’eft bonne qu’au chauffage.
Les objets de fon induftrîe font fes étoffes de
toutes efpèces, fes toiles, fes draps, fes ratines,
& c . Le nombre des fleuves, des rivières, & des
lacs eft prodigieux, ce qui doit toujours contribuer
à rendre ce pays très-humide, puifcju’ils font tous
liés entr’eux par .des canaux qui etabliffent une
communication entre les bourgs & les villages.
Quant à la population & à l’agriculture, il n’y
a que deux pays dans le monde , abftra&ion faite
de leur étendue, qui puiffent le difputer à la Hollande
j je veux dire la Suiffe 8c la Chine. On
K O L
compte dans cette province trente-fept villes , huit
bourgs , environ quatre cents villages , & au-delà,
d’un million & demi d’habitans. Nulle part la propreté
n’eft portée à un plus haut point, foit dans-
les villes , foit dans les maifons. Jufques dans les-
villages mêmes, les meubles font nets 8c relui-
fans au-delà de ce qu’on pourroit fe l’imaginer. Les-
écuries à vaches y font belles, fpacieufesy8c fi
propres, que beaucoup de propriétaires y fixent
leur demeure, pour ne point gâter le poli de leurs
appartemens.
Quoique le terrein y foit ingrat, & qu’il ne produire
point de v in , & peu de bled , il n’y a point
de pays au monde plus abondant 8c plus riche. C es
laborieux républicains o n t, par le commerce r
rendu toutes les nations tributaires. A peine trouve-
t-on un point fur le globe où n’ait pénétré 8c ne
pénètre encore Tinduftrie hollandaife ; on voit
chez eux régner la ’plus étroite économie ; & cependant
leurs magnifiques magafins renferment les
fruits , les marchandifes & l’or des deux mondes £
La forme fage & fière de fon adjninflration a fa
créer un peuple navigateur de ces hommes qui r
fous le defpotifme Efpagnol, languiffoient enfeve-
lis dans leurs marais ; ils ont forcé par-tout la terre
à leur accorder tout ce qu’elle pouvoit leur donner
; 8c par leurs éclufes aufîi étonnantes que hardies
, ils ont fait des conquêtes fur l’Océan même-
Leur fage vigilance s’eft étendue fur "l’homme de
toutes les clafles ; les hôpitaux font moins des
abris pour la pareffe , la fainéantife & le v ic e , que
des aiÿles pour Tinduftrie 8c l’ndigence. Les vieillards
, les hommes infirmes, les bandits , les libertins
, tout eft forcé de puiler dans un travail continuel
, des fecours contre les befoins de la vie-
En Italie, en Efpagne, en France, une charité
ftupide étend la pareffe & le vice', loin de les détruire
; chez le Hollandais , une bienfaifanee éclairée
travaille autant à remédier au mal qu’à le
prévenir ; & les délits même commis contre la
fociété, tournent encore au profit de la fociété-
Des loix fages forment fans celle de fages citoyens.
Nul coup d autorité pour écrafer l’innocence ioible
& malheureufe ; tout homme eft fous la fauve-
garde de la nation : la bonne foi règne dans le
commerce, & lui donne une nouvelle vie ; on ne
voit pas, comme chez nous , de ces banqueroutes
multipliées , qui conduifent l’homme fans honneur
à l’opulence ; une vie aâive & fôbre, une marche
auflî patiente que pénible, des moeurs enfin, voilà
tout le fecret pour s’enrichir. Les femmes concentrées
dans leur ménage, fe font gloire de pré-
fider à l’éducation de leurs enfans ; elles ne rou-
giffent point d’entrer dans tous les détails domef-
tiques ; économes , réfervées, modeftes , labo-
rieufes, on les voit partager avec leurs maris le
fardeau de la vie : enfin ce peuple étonnant eft
pour ainfi dire le faéleur des nations : en travaillant
pour fo i , il ne paroît occupé que du foin de
porter par-tout l’abondance ; il ne.lemble né que
pour rapprocher toutes les parties du globe, échanger
le fuperftu d’un climat contre le luxe dun
autre climat, 8c en s’enrichiflànt aux dépens de
toutes les nations, il a des droits encore à leur re-
connoiffance. Tels font les traits fous lefquels nous
euffions- aimé à peindre la Hollande il y a à peine
quelques années ; aujourd hui on peut lui reprocher
la corruption de fon gouvernement, fon goût
barbare & fauvage encore au fein de fes richelies,
fon apathie fociale, civile & politique » fa paf-
fion pour l’or qui lui fait tout facrifier, & enfin la
mefquinerie d’idées & de conduite, fi j ’ofe ainfi
m’exprimer , qui ne fait de cette nation , jadis républicaine,
qu’une efpèce de communauté de marchands
8c de négocians. Nous nous réfervons , au
mot Provinces- Unies, de peindre ce peuple dont
la décadence eft déjà fenfible, & d’indiquer les
caufes qui le rendent aujourd hui fi différent de
lui-même. (M. D. Ml)
Hollande , ou Provinces-Unies des Pays-
Bas. Voy. Provinces-Unies. Voyeç Pays-Bas.
Hollande ( la Nouvelle ) , pays dans les terres
auftrales, au midi des Moluques, en-deçà 8c en-
delà du tropique du Capricorne.
D ’après ce que Ton en connoît jufqu’à préfent,
cette terre s’étend depuis le io e degré de latitude
méridionale , jufqu’au ^4®.
Ce pays , dont la cote orientale a été furnom-
mée par Cook , la Nouvelle Galles méridionale , eft
beaucoup plus grand qu’aucune autre contrée du
inonde connu. La côte , réduite en ligne droite ,
n’a pas moins de 27 degrés , ou près de deux mille
milles ; de forte que fa furface en quarré doit être
beaucoup plus grande que celle de toute l’Europe.
Au fud des 33 & 34 degrés., la terre eft en général
baffe & unie : plus loin au nord elle eft remplie
de collines ; mais on ne peut pas dire que
dans aucune partie elle foit véritablement mon-
fueufe. Les terreins élevés pris enfemble, ne font
qu’une petite portion de fa furface , en comparai-
foii des vallées & des plaines. Le fol eft fouvent
fabloneux, 8c la plupart des favanes , fur tout au
nord font femées de rochers ftériles. Sur les meilleurs
terreins, la végétation eft moins vigoureufe
que dans la partie méridionale du pays ; les arbres
n’y font pas fi grands , & les herbes y font moins
épaiffes. Les arbres même font à environ quarante
pieds de diftance les uns des autres. Le fol , dans
plufieurs endroits, pourroit être fufceptible d’amélioration
, mais la plus grande partie n’eft guère
propre à une culture régulière.
Comme ce pays n’eft connu que fur les côtes,
& qu’on n’a pu encore s’enfoncer dans l ’intérieur
des terres , Cook a remarqué, au plus fort
même de la faifon féche , une quantité innombrable
de petits ruiffeaux & de foürces , mais point
de grandes rivières. La côte du côté du nord, à
2.5 degrés fud , eft remplie de bonnes baies 8c de
havr.es, où les vaifleaux peuvent être parfaitement
à l’abri de tous les vents.
On ne trouve guères que deux efpèces d’arbres,
qu’on puiffe appeler bois de charpente ; le gommier
, d’où diftille la réfine , 8c l’autre reffemble à-
peu-prés à nos pins. Le bois de ces deux arbres eft
extrêmement dur & pefant. On y remarque auflî
trois différentes fortes de palmier, dont deux produisent
un choux, & tous les trois une efpèce de
noix qui firent, fur les matelots qui voulurent en
manger, l’effet violent de l’émétique. Outre ces
arbres, on en voit auflî un grand nombre qui doi>
nent des fruits, 8c dont l’elpèce eft entièrement
inconnue en Europe.
Les plantes & les Amples s’y trouvent dans une
prodigieufe quantité, ainfi que plufieurs efpèces
d’herbes potagères. A l’égard des quadrupèdes , on
y a vu des chiens , un animal appelé kanguroo , un
autre reffemblant au phalanger de M. de Buffon ,
18c une quatrième efpèce peu différente du putois.
Plufieurs perfonnes de l’équipage de Cook dirent
y avoir vu des loups. On y a auflî remarqué des
chauve-fouris, dont Une efpèce étoit auflî greffe
qu’une perdrix. Les oifeaux de mer, & les oifeaux
aquatiques , font les mouettes, les cormorans, les
boubies , les noddies , les corlieux, les canards,
les.pélicans qui font d’une grandeur énorme, &c.
Les oifeaux de terre font des corneilles , des perroquets
, des catacouas, 8c d’autres du même genre
& d’une beauté exquife ; des pigeons, des tourterelles
, des cailles , des outardes , des hérons, des
grues , des faucons , & des aigles. Parmi les reptiles,
il y a des ferpens de différentes efpèces , des
feorpions , des mille-pieds , 8c des lézards. Les in-
feéles font en petit nombre ; les mofquftes & les
fourmis font les principaux.
La mer, dans ces pay s , fournit aux habitans
plus d’alimens que la terre. Cook y fit jeter rarement
le filet, fans prendre cinquante à deux cents
livres de poiffôn. Excepté le mulet 8c quelques-
uns des coquillages, les autres ne font pas connus.
en Europe. La plupart font bons à manger, & pin-
fleurs font excellens. Les bancs de fables & les
récifs font couverts d’une quantité incroyable de
tortues vertes, 8c d’huîtres de toutes efpèces, même
d'huîtres perlières. Il s’y trouve auflî des pétoncles
d’une grofleur énorme , des écreviffes de mer ,
des cancres, 8c des caimans dans les rivières 8c les
lacs falés. ,
Le nombre des habitans de la Nouvelle-Hollande
paroît être tres-petit en proportion de fon
étendue : à peine voit-on quelques cafés éparfes
dans une enceinte immenie. Les hommes font
d’une taille moyenne , & en général bien faits : ils
font fveltes , doues d’une vigueur, d’une aélivité 8c
d’une agilité remarquables. Leur vifage n’eft pas
fans exprefîion ; ils ont la voix extrêmement douce
8c même efféminée. Leur peau eft tellement couverte
de boue & d’ordure, qu’il eft très-difficile
d’en connoître la véritable couleur.
Cette craffe les fait paroître. prefque aufîi nou s
que des nègres. Leurs traits font bien loin d’être