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ruilïeau : il eft race qu’un propriétaire ou fermier
ait d’autre abreuvoir que celui qu’il a fait creu-
fer. Les grandes îrivières mêmes ne font navigables
qu’à quelques milles de leur embouchure. On a
cependant, établi des canaux de communication
entre quelques rivières, afin de faire fleurir le commerce
intérieur. Les principaux canaux font le Brid-
cewaier, le Birmingham , le Droivwich, le canal de
Çowentry, & celui d'Oxford. Les chemins font
beaux & bons.
.. La 'population de toutes les ries Britanniques
monte a environ huit millions d’habitans. La ville
de. Londres feule en contient près du dixième.
On y compte vingt-huit anciennes villes épifco-
pales j & environ huit c en ts tan t villes que bourgs
de commerce. Les Juifs font au nombre de dix à
douze mille. Il parut en 1753 ’ un a^e Par^e-
ment qui permettoit aux Juifs étrangers, réfidens
en Angleterre, de fe faire naturalifer ; mais comme
cet aéie fit beaucoup de mécontens, on fut contraint
de le révoquer.
L’Anglais ( dit B ard ai, écrivain de cette nation )
l’Anglais a l’efprit grave & réfléchi ; il s’eftime lui-
même beaucoup, & il apprécie infiniment le génie
, les moeurs, le caraSère & les ufages de fa nation
$ foit qu’il falue ou qu’il écrive, il ne s-nbaifje
qu’avec une peine infinie, & il ne peut fouffrir les
expreffions de peliteffe dontfe fervent lès nations
yoifines, foit pour témoigner leur refpeéi, ou pour
marquer leur attachement : tel eft l’Anglais qui n’a
point pratiqué l’étranger, & n’eft jamais forti de
Li-lc-
La nation Anglaife efl fort appliquée à la navigation
, & c’eft ce qui fait la principale & la meilleure
défenfe de l’Angleterre. L ’Anglais eft bon
foldat , tant fur terre que fur mer. Le danger
ne fait nulle impreflion fur fon ame. On le
voit l’affronter avec la plus grande indifférence.
Superbe dans la profpérité ; vindicatif, impatient,
inquiet dans l’adverfité ; qu’on le pouffe à b out, il
devient féroce, & fait moins fupporter la peine
qu’il 11e fait mourir.
En général, la nobleffe Anglaife réunit la poli-
teffe aux^plus excellentes qualités ; mais le peuple
eft fie r , greffier. La populace eft la plus infolente ,
la plus audadeufe de toute l’Europe , peut-être
même de toutes les nations.
Malgré la licence effrénée de la populace Anglaife
, elle a prefque toujours tout le refped &
tous les égards poffibles pour la nobleffe titrée du
royaume, tels que les ducs, les comtes, les barons
, parce que ces titres font moins le réfultat de
la vénalité ou de l’intrigue, que la récompenfë du
mérite perfonnel.
. La haute nobleffe jouit de fort grands privilèges ;
celui qui la pofsède a voix & féance au parlement,
auffi-tot qu’il eft devenu chef de famille & qu’il
eft majeur. Il ne peut être arrêté que pour un crime
grave, & fur une fentence de la chambre haute,
qui feule eft en droit de le juger. Lorfqu’il voyage
A N G pour fe rendre au parlement ou lorfqu’îl en revient
, il peut chaffer librement fur toutes les terres
du roi. Celui qui l ’infulte eft puni d’après l'aâe
fcandalum magnatum du parlement comme coupable.
Aucun officier de juftice ne peut faire des recherches
dans fa maifon fans l’ordre du r o i, & cet
ordre doit être figné par fix confeillers intimes.
Lord ( dominas , feigneur ) eft le nom général des
nobles. Parmi la nobleffe héréditaire, on compte
les barons, vicomtes, comtes, marquis & ducs. En
17 6 7 , il y avoit foixante-neuf barons, treize vicomtes
, quatre - vingt - trois comtes , un marquis ,
& vingt-quatre ducs. Ces cinq claffes forment les
barons du royaume ou pairs.
Celui qui a le titre d’une claffe fupérieure, pprte
en même tems tous les titres des claffes inférieures.
Si le père eft duc ou marquis, le fils aîné prend lè
titre de comte, le fécond celui de lord, le troifième
s’appelle efquire, & tout court mafter, c’eft-à-dire,
monjieur. Le fils aîné d'un comte s’appelle lord *
tous les autres fils, & les fils des vicomtes & des
barons font comptés parmi les efquires ou la baffe
nobleffe. Voici donc la gradation légitime des degrés
de nobleffe.
Le fils aîné d’un baron, le fils cadet d’un comte,
le fils aîné d’un vicomte, le baron ; le fils èadet
d’un marquis, le fils aîné d’un comte, un vicomte ;
les fils cadets des ducs , le fils aîné d’un marquis |
les comtes ; le fils aîné d’un duc, un marquis, un
duc.
Le fils aîné hérite après la mort du père de tous
les titres 8c de tous les fonds de terre. Les titres ne
font point attachés à la poffeffion de certains biens,
mais au fang de ceux que le roi en a revêtus. De-là,
le grand nombre de châteaux, de biens nobles &
de leigneuries, & tandis qu’il n’y a point de baronnies
, de marquifats , ni de comtés , excepté celui
d’Arundel ; les autres titres de comtés font attachés
aux provinces. Lorfque le roi veut conférer à quelqu’un
le titre de duc, il lui fait choifir le nom d’une
province, d’une ville , d’un bourg, &c. La coutume
eft de choifir des noms qui ont été portés
par une famille illuftre, mais il faut qu’elle foit
éteinte ; car deux pairs ne peuvent porter en même
tems le même nom ; dans tous les cas cependant,
on eft toujours libre de conferver fôn nom, ou de
l’ajouter au nouveau titre qu’on prend.
Les premières charges du royaume donnent la
haute nobleffe perfonnelle. Les évêqites font en
cette qualité toujours regardés comme barons.
Il y a un tribunal d’ârmoiries , établi par Richard
III. Ce collège fient un regiftre des armes de toutes
les familles & de leurs noms, au moyen de quoi
on peut toujours favoir quand & à quelle occafion
ces armes ont été accordées.
Le poffeffeur d’un fief n’a que le domaine direél ,
qui confifte à pouvoir punir de petits crimes. Lorf-
u’if tient cette juftice, les poneffeurs de francs-
efs en font les affeffeurs, & portent le jugement ;
lorfqu’un roturier pofsède un bien noble, il a cette
jurifdiélion,
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jurtfdiéUon, & le domaine direct auflî bien qu’un
lord. s
La plupart des terres ne confiftent d’ailleurs qu’en
champs, cabanes, maifons, moulins, étangs à poif
fons , bois , mines' à charbons & autres ; mais il
n'y a ni dîmes , ni droits , ni autres cafuels.
Les champs , maifons , cabanes font affermés
aux payfans pour cinq , dix , vingt ans, & le revenu
de femblables baux forme celui des biens ;
ce qui fait que les payfans Anglais fe nomment
tous fermiers ( farmers ). On entend par gentlemenfarmer
ceux qui ont de groffes fermes, ou un bien ‘
noble tout entier, pu bien -encore ceux qui fe font
enrichis, & qui vivent comme des gentilshommes.
Les Anglais fe diflinguent dans les arts, fur-tout
dans les fcienc.es , & leur induftrie eft connue chez
toutes le,s nations. L ’amour cîe la gloire , l’appas du
gain, la crainte extrême de la pauvreté, contribuent
principalement à les rendre laborieux ; mais
il leur manquera toujours dans les arts, ce goût
pur & délicat qui appartient fur-tout aux Grées chez
Je s anciens, & aux Français chez les modernes.
La langue Anglaife eft eompofée. des anciennes
langues Tectoniques 8c Celtiques, de la langue
Gauloife, de la Françaife, du G re c , du Latin , du
Saxon, prefque du Normand, du Danois, 8c de toutes
les langues Norvégiennes, de l’Italien, & enfin
de prefque toutes les langues du monde. Elle a
Fheureux privilège encore de pouvoir s’enrichir des
mots étrangers, & créer des expreffions nouvelles.
Avantage inconnu fur-tout en France : il femble
que la liberté Anglaife influe jufques fur la langue
même,, en lui accordant les moyens de peindre
une idée avec plus de précifion , plus de force &
plus d’harmonie.
Les Bretons, ainfi que les autres nations de l’Europe
, ont effuyé différentes révolutions. Céfar fut
le premier qui tenta de les fubjugiier; il réuflit à les /
vaincre : mais cependant ce royaume ne fut entièrement
réduit en province Romaine, que vers la.fin du
règne de Vefpafien, environ l’an 79 de Fère chrétienne
; ce qui fubfifta jufqu’au règne d’Honorius
( l’an 408 ) , que les Romains abandonnèrent cette
î l e , 462 ans après la première defeente de Céfar.
Les Bretons méridionaux , prefque toujours/ di-
vifés entr’eux , & fatigués par les. Picles & les
Ecoffais, q u i, depuis le départ des Romains, ne
ceffoient de défoler le midi de File , invitèrent les
Saxons du nord-oueft de la Germanie à s’allier avec
£U X ;
' Les Saxons firent leur premier débarquement
dans File de Thannet en 449. Quelques tems après,
il arriva de nouveaux auxiliaires , corhpofés de
Jutes, de Danois & de quelques Angles. Avec cette
dernière troupe, débarqua dans File la belle Rowe-
na, fille de Hengift, l’un des généraux Saxons.Vor-
tigern, qui avoit été reconnu 8c proclamé roi de la
Bretagne méridionale, l’époufa ; & en confidéra-
îiori de ce mariage, céda à fon beau-père le pays
de Kent à titre de royaume.
Géographie* Tome U
A N G 105
Les Bretons & leurs alliés marchèrent contre les
Pi&es & les Ecoffais qu’ils défirent ; mais ces perfides
alliés voyant avec des yeux de cupidité le pays
de ceux qu’ils venoient de défendre, invitèrent
la nobleffe Bretonne à un grand feftin dans la plaine
de SaFisbury, & la maffacrèrent inhumainement.
Maîtres alors de la plus grande partie de l’île , les
Saxons, partagèrent leurs conquêtes en fept petits
royaume ; c’eft ce qu’on appelle dans Fhiftoire,
YHeptarchie des Saxons. Quant aux Bretons qui ne
voulurent pas fe foumettre aux Saxons , les uns fe
retirèrent dans le pays de Galles , les autres dans
celui de Cornouailles : les habitans de ces deux
provinces fe difent encore aujourd’hui Bretons, ÔC
ils appellent un Anglais un Saxon.
De Vhèptarchie des Saxons•
I. Du royaume de Kent, capitale Cantorbery.
C e royaume, fut érigée vers Fan 455 g^l 457, 8c
contenoit à-peu-près la même étendue, de pays que
la province de Kent ; il fut gouverné fucceflîve-
ment par dix-fept rois, fubfifta 366 ou 368 an s ,
& finit en 823 par la défaite de Baldred, dont les
états furent réunis au royaume de V/eflfex.
II. Le royaume de Suffex ou Saxe du fu d , capitale
Chicheftej-, avoit environ 25 lieues du f. e.
au n. o . , & 15 du f. au n. Il commença vers Fan
491 , 8c finit en 600, après avoir fubfifté 109 ans ,
fous trois rois. Le dernier de ces rois fut tué par
celui de IVeflfex, 8c dès-lors les deux royaumes
furent réunis.
III. Le royaume de W eftfex , ou Saxe de Foueft,
capitale "Winchefter, renferaioit les provinces de
B a rk , de Southampton, de W llt , dé Sommer-
fet, de Dorfet 8c de Devon. Il avoit 50 lieues de
l’eft à Foueft, & 26 du f. au: n. : dans la fuite prefque
toute la province de Cornouaille fut auflî lou-
mife aux rois de Weftfex. Ce- royaume qui avoit
commencé vers l’an 5 19 , ne finit qu’à l’avènement
des Normands en 106.6 , c’eft - à - dire , qu’il
fubfifta 547 ans , fous trente-fept rois.
IV. Le royaume d’E ffex, ou Saxe de l’eft, capitales
Çolchefter & Londres, étoit compofé des provinces
d’E ffex, de Middlefex, & de la plus grande
partie de celle de Harford, avec une étendue de
26 lieues du f. o. au n. e . , & de 13 lieues du f. au
n. C e royaume qui avoit commencé vers Fan 527,
fut détruit & ufurpé après l’an 747, par les rois de
Weftfex. Il fubfifta environ 220 an s , Ibus douze
rois.
V . Le royaume de Northumberland, capitales
Léeds & Y orck , comprenoit les provinces de Lan-
cafter , d’Y o r c k , de Durham , de Cumberland ,
de Weftmorland, & la partie de l’Ecoffe qui le
termine au golfe d’Edimbourg, c’eft-à-dire, que
fon étendue étoit de 65 lieues du f. e. au n. o , &
de 42 lieues de l’eft à Foueft. Il avoit commencé
en 547, & finit en 792 , fous vingt-un rois. Il y
eut enfuite un interrègne de trente-trois ans ; & en
I 8 27,1! paffa fçus la domination des rois de Weftfex.