
\ j D I S C O U R S
chaque ville ou de chaque province , il eft indifpenfable encore quelle en
faffe connoîrre la fituation, le climat, & quelle indique comment, expofées
à l’âpreté d’un air glacial, à la douceur d’un ciel tempéré, ou à la chaleur
d’un foleil brûlant, ces polirions différentes influent fur les produ&ions
du terroir & fur les moeurs de leurs habitans. Ce globe que nous habitons,
placé .dans l’immenfné de l’Univers, a une correfpondance intime avec les
planètes & les affres qui l’environnent; L ’homme a ofé porter un oeil
attentif fur cet ouvrage myftérieux & fublime ; il a calculé ces globes de feu ,
leur màffe, leur viteffe, leurs diftances refpeûives ; il a fondé les'caufes des
ténèbres & de la lumière, de la vicifiitude des faifons, du flux & reflux,
des tempêtes, des orages & de ces phénomènes affreux où la nature en
convulliôn femble annoncer la chûte du monde.
Les befoins mutuels des peuples, le défir de connoître, fi naturel à;
l ’homme, {a foif de pofféder, plus exigeante, plus impérieufe encore, lui
ont fait franchir ces abîmes effrayans, qui déroboient un peuple à un autre
peuple : fur un frêle vaiffeau, il affronte les élémens, & va chercher dans
un autre monde, d’autres richeffes, d’autres hommes, d’autres moeurs. Mais
dans cette courfe audacieufe & lointaine, qui pourra guider fes pas incertains?
En proie à l ’inconftance d’un élément terrible , de quelque côté
qu’il jète les y eu x , il n’apperçoit que des mers immenfes; il ne découvre
qu’un ciel plus immenfe encore. Il a donc dû étudier dans leur Courfe
l ’aftre fécond du jour & le tranquille flambeau de la nuit. Il lui a fallu
obferver ces étoiles innombrables , lire dans le ciel même les véritables
mefures du globe qu’il habite ; & le réfultat de ces pénibles obfervations
a été de lui tracer une route fûre où il n’en connoiffoit point encore !
Ainfi la Géographie afironomique eft la defcription de la Terre, confidérée
par rapport au ciel. Son but eft de montrer la correfpondance qui exifte
entre les parties de l’une & celles de l’autre, de fixer tous les points du
globe , de l’équateur aux pôles, & de l’oueft à l’eft d’un méridien quelconque
, dans toute fa circonférence. C ’eft pour y arriver que l’on a d’abord
déterminé les degrés de. latitude & de longitude ( w y q ces mots), objets
fi importans pour la navigation : enfin c ’eft par la Géographie aftronomique
que l’on eft parvenu à roelurer d une maniéré plus precife la furface des terres
$c des mers ( i ) .
d e l a G é o g r a p h i e P h y s i q u e .
A v a n t que l ’homme , dans l’enfance du monde, eut laiffe fes foibles
( 1 ) Il femble que c’eût été la place de parler ici de l’hydrographie , mais il eft inutile de multiplier
nos divifions. On trouvera d’ailleurs , dans ce Di&ionnaire, les obfervations nautiques les plus eflen-
fielles, & tous les détails hydrographiques que nous pourrons nous procurer.
S U R L A G Ë O G R A P H I E. r e traces
fur le gtôbe, la nature déjà y avoit imprimé fes pas fflajeftueux ;
elle avoit élevé ces grouppes de montagnes, dont la tête impofante rompt
l ’impétuofité des vents, & devient le berceau des fources, des torrens ,
des rivières; elle avoit creufé ces profondes vallées qui fervent de lit aux
fleuves, préfentent un afyle plus tempéré-à l’homme, & d’abondans pâturages,
à fes troupeaux ; elle avoit créé: cet océan imfnenfe', & lui avoit
donné des loix : enfin elle avoit peuplé les airs ,„ les terres , les mers d’un
monde d’habitans : l’homme arrive avec toute fa foibleffe ; une enfance
lente , une raifon tardive, une vie pénible, tel eft le partage qu’il apporte
en naiffant.
Il n’eft pas de l’objet de la Géographie de le peindre dans ces com-
mencemens ; occupé des moyens de contraindre la terre à le nourrir,
& difputant. cette nourriture aux autres animaux , ce n’eft que par de
continuels combats, par un travail continuel, qu’il foutient fon exiftence
miférable & débile : mais doué d’une fagacité qui fupplée à fes forces , chaque
fiècle ajoute à fon expérience; il s'enrichit de fês lentes & pénibles obfervations
, & le plus foible des animaux devient le roi de la nature.
Nous ne nous étendrons pas non plus fur la formation du globe , ni
fur les différentes efpèces de matières qui entrent dans fa compofition,
ou qui fe rencontrent dans fon intérieur. Le naturalifte les claffe , le chymifte
les analyfe, le géographe doit fe borner à indiquer les lieux où fe trouvent
ces fubftances, Ainfi, avant de parlér , relativement à chaque pays, des
etabliffemens & des conventions qu’ont formés entr’eux les peuples fauvages
& les habitans polices qui y ont fixé leur demeure, il doit, autant qu il
le peut, faire connoître, i° . la nature du fol; 2°.des eaux qui l’arrofent ;
3°. les produftions végétales; 4°. les animaux qui l’habitent ; & fous cet
afpeft général, l’homme entre lui-même dans cette dernière claffe.
On fent bien que des terres élaborées par les eaux, ou ravagées par le
feu , qui n offrent qu un granit endurci ou que des fables arides, préfentent
a l ’habitant, à l’induftrie, au commerce, des produirions & .des avantages
différens. C ’eft à cette première connoiffance que s’attache le géographe
dans la partie phyfique.
Si de la defcription de la furface, il defcend dans l’intérieur, il diftinguera
les minéraux de toute efpèce , & les indiquera au philofophe, qui les étudie
pour eteridre fes lumières, & aux arts qui favent s’en prévaloir pour les
beloins ou les agrémens de la fociété.
^ a'Sà.CeS terres ftue ^ géographe décrit, ces montagnes dont il indique
la direction & la hauteur, renferment des richeffes d’un tout autre mérite
que ne le peuvent être les métaux les plus précieux : ce font les fources des
fleuves & des rivières-C’eft par la préfence toujours agiffante des nuées qui
s y raffemblent en brouillards , ou qui s’y réfolvent en pluie, & qui s’infiltrent
à travers les terres, que ces fources font entretenues. La nature