
6 o i H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
■" évêques d’Oftie & d’Albane d’y entrer ; & aïant
A n . S j f . commencé par la douceur , ils finirent par les menaces,
ôc leur dirent d’un ton très-rude : Il y va de
votre tête iî vous refufez de facrer Anaftafe. Les
évêqües répondirent qu’ils aimoient mieux fouf-
frir la mort & être mis en pièces ; ils reprirent
même les députez de l’empereur, & leur remontrèrent
par l’autorité de l’écriture l’injüftice de leur
prétention. Alors les François fè mirent à parler
en fecret en leur langue Tudefque : après quoi ils
parurent appaifez.
Le mardi matin les évêques s’aifemblerent dans
la grande églife de Latran, avec le clergé & le peuple
, qui cria à haute voix : NoUs voulons le bienheureux
pape Benoift ; c’eft lui que nous defirons.
Les députez de l’empereur étonnez de cette union
du peuple , &: voïant qu’ils ne pouvoient faire
élire Anaftafe, aflemblerent les évêques & quelques
uns du clergé , dans une chambre du palais
patriarcal, La difpute y fut grande : mais les R o mains
apportèrent de fi puiflfantes raifons, que les
François fe rendirent, & dirent aux évêques : Prenez
celui que vous avez é lu , & le menez en telle
églife qu’il vous plaira : nous allons chaifer de ce
palais Anaftafe, que vous dites être dépofé. Paf-
fons trois jours en jeûnes & en prières, puis nous
ferons ce que Dieu nous infpirera. Les évêques
s’écrièrent que l’on commençât par chaïfer Anai-
tafe : & auffi-tôt on le fit fortir honteufement du
palais patriarcal, & tout le peuple en rendit grâces
a Dieu.
Alors
L i v r e q u a r a n t e -n e u v i e ’m e ^ <103
' Alors les évêques tirèrent Benoift de l’églife • -
où on le gardoit, & le menèrent au palais de La- A n . 8 ; j .
tran , dans la bafilique du Sauveur : puis ils le mirent
fur le cheval que montoit ordinairement le
|>ape Léon , & le menèrent comme en triomphe
a faintc Marie majeure, où ils paiferent troisjours
& trois nuits en jeûnes & en prières. Enfuite tous
ceux qui avoient fuivi le parti d’Anaftafe vinrent
dans la même églife baifer les pieds de Benoift,
avoiiant leur faute & le priant de les recevoir. Il
les reçût à bras ouverts, les embraifa & les con-
fola. Les députez de l’empereur s’y rendirent auffi,
& lui parlèrent en fecret avec amitié. Tous étant
ainfi réunis, les évêques remenerent Benoift au
palais de Latran , chantant des hymnes & accompagnez
d un grand peuple, & le remirent dans
le throne pontifical. Enfin le dimanche premier v. tapir;
jour de Septembre 8jy. ils le menèrent à l’églife
de faint Pierre, où il fut facré folemnellement,
en préfence des députez de l’empereur Louis &
de tout le peuple. Il tint le fiege deux ans &
demi.
Cependant l’empereur Lothaire étoit malade ; x x v i i .
& n’efperant pas d’en guérir , il fe retira dans le
monaftere de Prurn , où renonçant au monde , Ann, Berlin, fa
il fe fit couper les cheveux & prit l’habit monafti- * ?
que. Il partagea les états qu’il avoit au-deçà
des Alpes a fies deux fils qui étoient auprès de
lm j Lothaire & Charles : celui-ci eut la Provence
jufques vers Lyon , & Lothaire le refte juf-
ques aux embouchures du Rhin & de la Meufe j
Tome X . £ e e e