
encore par l'obscurité, offroient le spectacle
le plus imposant. J aimais à rattacher à ces
lieux déserts l ’idée des anciens héros qui
les avoient habités, et des Bardes qui cban-
toient leurs exploits. Je me plaisois à me
figurer ces poëtes inspirés | parcourant ces
v allées obscures et profondes, laissant
égarer leur imagination mélancolique à
l ’aspect des scènes imposantes de cette nature
sauvage ; et croyant voir dans les
brouillards , dans les nuées légères qui
voltigent autour de ces hautes montagnes,
les ombres de leurs pères et de leurs héros
, errer encore après leur mort près
des lieux qu’ils avoient long-temps habité.
Il me sembloit intéressant de retrouver dans
une contrée qui présente des traits si frap-
pans et si sublimes, l’aliment d’une poésie
si bien adaptée aux lieux qui lui ont donné
naissance.
Arrivé sur les bases mêmes de ces montagnes,
je pus encore , grâces à un foible
reste de clarté , juger de leur forme et de
leur position. Elles sont situées à peu près
au centre de l’île, et forment une chaîne dans
la direction de l’ouest à l’est. Cçtte chaîne est
divisée en autant de montagnes distinctes à
sommets pyramidaux. L ’une des plus élevées,
suivant Pennant et Jameson qui l ’ont visitée,
senomme Bein-na-Gaillich.Quant à la composition
de ces monts, à en juger parleur grande
élévation et leur position centrale , je les
supposois de formation primitive ; et les
débris de granit et de syénite répandus à
leur p ied, sembloient confirmer celte opinion.
Mais le jour me manquoit pour faire
à cet égard des observations exactes et même
pour choisir parmi ces débris, de roches des
échantillons convenablés. J’éprouvai un vif
regret a ne faire qu’entrevoir une contrée
si intéressante et si peu connue, à être obligé
de quitter Sky , sans avoir pu suivre les diverses
formations que renferme cette île , et
sans avoir déterminé la place qu’occupe,
dans ce système de roches , les immenses
masses basaltiques qui en forment la plus
grande partie.
L ’obscurité m’empêcha aussi de trouver
dans un petit lac qu’on m’avoit indiqué au
pied des monts Cullens , une plante dont je
désirois me procurer quelques pieds ; c’est
l ’Eriocaulon decangulare, plante de la famille
des joncs, qui ne se trouve point dans le reste
dePEurope, mais qui est abondante dans