
leur tribu au frivole désir de paroître avec
éclat dans les salions de Londres, elle eut
applaudi à ceux qui se privoient d’une portion
de leurs jouissances présentes pour
faire le bonheur de leurs subordonnés.
Alors peut-être eut-on moins vu de Chefs
écossais mettre leur gloire à rivaliser de
luxe et d’ostentation avec les parvenus des
grandes villes, mais le voyageur, en parcourant
les montagnes et les îles de l’Ecosse,
auroit été partout édifié du touchant
spectacle, dont j ’ai eu le bonheur d’être
par fois le témoin , celui d ’un propriétaire
de grands domaines, entouré d’une nom-
br euse population de paysans qui le chérissent
, et qui liés à lui par le souvenir
de ses bienfaits récents et du dévouement
de leurs pères à ses ancêtres,
ont consex’vé dans des circonstances bien
différentes, le même amour , la même
admiration qu’avoient jadis leurs devanciers
pour le Chef de la tribu.
Combien lord Selkirk n’auroit-il pas mieux
employé ses talents à plaider auprès des
propriétaires highlanders la cause de la morale
et de l’humanité, en prenant la défense
des malheureux montagnards dépossédés de
C 299 )
4’antique héritage de leurs pères, au lieu d’é-
garer le sentiment de ces Chefs en flattant
par des arguments spécieux et par une
doctrine d’égoïsme le penchant , déjà
trop naturel, qui porte les hommes à
ne suivre que leur intérêt. Alors il
eût véritablement fait tout à la fois un bel
ouvrage et une action bonne et patriotique.
Il est cependant nécessaire de dire ic i, en
rendant justice aux intentions pures et libérales
de lord Selkirk, qu’ayant une fois admis
que l’émigration étoit nécessaire et même
indispensable , et cette émigration existant
de fait, il a rendu un grand service en cherchant
à la régulariser et à lui donner une
nouvelle direction, en la transportant des
Etats-Unis, où jusqu’alors elle avoit eu
lieu, vers les colonies anglaises de l’Amérique
septentrionale, ce qui tendoit à conserver
encore au gouvernement britannique de
braves et de loyaux sujets. Il avoit lui-même
accompagné une troupe de montagnards
émigrés qu’il destinoit à occuper des terres
achetées par lui pour cet objet dans l’île de
Saint-Jean où du Prince Edouard, dans le
golfe de Sairit-Laurent près des côtes de
la Nouvelle-Ecosse. Il a alloué à chaque