
Reproduisant l’argument de Johnson sur
l’impossibilité que de tels poëmes eussent
été transmis intacts par la seule tradition
orale , et s’appuyant de la remarque faite
par Macpherson, que le langage d’Ossian
a vieilli , qu’on y trouve des expressions
actuellement hors d’usage, Mr. Laing demande,
qu’est-ce donc qu’un dialecte abandonné
qui se transmet par tradition orale ?
Comment le peuple peut-il conserver dans
sa mémoire et répéter des mots qui sont
pour lui sans signification. Dans les langues
qui ne sont pas fixées par l’écriture, les
expressions s’altèrent et changent dans chaque
province ; de nouveaux dialectes se.
créent, et chaque siècle donne à la langue
une forme nouvelle, quoique la syntaxe et
les racines puissent demeurer'' les mêmes.
Or le gaëhc est resté jusqu’à nos jours une
langue non écrite, et la différence entre cette
langue et le erse ou l’irlandais, montre qu’elle
a éprouvé des changements depuis la première
immigration des Gaëls irlandais en
Ecosse.
Mr. Laing soutient ensuite que Fingal
étoit un prince irlandais, et que son existence
en Ecosse est contraire à l’histoire ;
C 58i )
car ce qui prouve que la croyance aux
Fingaliens et aux prétendus rois de Mor-
ven , n’exisloit point autrefois en Ecosse,
c’est que les Bardes, qui mettoient toute
leur ambition à reculer jusques aux temps
héroïques la généalogie des chefs de leurs
Clans, n’ont jamais fait remonter l’origine
d’aucun chef écossais à Fingal et à ses héros.
Aucun Clan ne réclame ces guerriers parmi
ses ancêtres. Il y a plus, lors du couronnement
d’Alexandre I II, roi d’Ecosse, l’historien
Fordun fut chargé de parcourir la
Haute-Ecosse et l’Irlande, pour chercher la
généalogie des souverains écossais ; il publia
cette généalogie, dans laquelle se trouve
une longue liste de rois fabuleux, mais aucun
qui ait rapport à F in g a l, à Trathal, à
Trenmore et aux autres prétendus rois de
Morven. Il n ’en est pas davantage question
dans Monro, doyen des îles , dans
Lloyd , dans Mackenzie, dans Martin ou
dans les autres anciens historiens et voya-
geurs qui ont parcouru les Hébrides. Bu-
chanan seul parle des Fingaliens comme
d’une milice irlandaise, sur la haute stature
desquels on a composé des vers grossiers,
qui sont conservés encore chez les Gaëls