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essentielle pour son but. Il n’avoit songé
qu’à se munir d’un bon bâton pour résister
aux attaques dont il se prétendoit menacé
par Macpherson. Il revient en effet bien
convaincu qu’il n ’existe dans la Haute-
Eeosse ni manuscrits , ni poëmes traditionnels,
ni rien qui ait rapport à Ossian ou à
F ingal, niais en revanche fort disposé à
ajouter foi aux revenants, aux apparitions,
au second Sight et aux nombreuses su-
perstitions des montagnards Ecossais. Dès
lors il attaque avec plus de confiance encore
l’authenticité d’Ossian; il objecte et le
rafinement des moeurs si différent de l’état
à demi sauvage où il a trouvé les Hébridiens
actuels, et l’impossibilité qu’une tradition ait
pu, sans se dénaturer entièrement, traverser
un laps de temps tellement considérable,
que, si l’on ajoùtoit foi à l’idée qu’Ossian
est contemporain de Sévère, il surpasseroit
l ’énorme durée de quatorze siècles, enfin
l’absence dans les poëmes d’Ossian de toute
mention de culte et de cérémonies religieuses,
tandis qu’Homère , Virgile, et les
poètes Scandinaves s’accordent tous à chanter
dans leurs épopées, non-seulement les
actions des grands hommes, mais aussi Fiaisîoire
des Dieux d’après leurs mylhologies respectives.
Il impute une omission si remarquable
à l’ignorance où étoit Macpherson
de la religion des anciens Calédonien^ , et
à la crainte d’èlre découvert un jour s ’il se
hazardoit à imaginer pour ces temps si peu
connu,s une mythologie nouvelle.
Les partisans d’Ossian ne laissèrent pas
ces objections sans réponse. Si Ossian dans
ses vers ne fait aucune mention de la
croyance et des rites religieux de ses héros,
c’est que, disent-ils, les Druides ayant été
abolis , persécutés et proscrits par les ancêtres
de Fingal, il existoit dans sa race une
haine et un mépris pour la religion des
Druides, qui rendent raison du silence
d’Ossian à cet égard, enfin il n’y avoit plus
alors d’initiés dans ces mystères. D’ailleurs
la vénération pour les chefs des tribus
et pour les guerriers étoit telle qu'on vou-
îoit qu’ils ne fussent éclipsés dans les vers
composés à leur honneur par aucun être
supérieur à eux. Cette coutume s’est même
sonservéejusqu’à nos jours. Car, dans les
poésies les plus récentes, on ne voit point les
Highlanders mêler la religion ' O aux louangOes
qu’ils prodiguent à leurs seigneurs.