
raire qu’on lui imposoit malgré lui. Il n’eût
cependant pas osé se proclamer ouvertement
l’auteur des poëmes d’Ossian : des
cris d ’improbation , des démentis formels
seroient partis de toute la Haute-Ecosse ;
mais il 11e fut pas fâché, h l’aule de phrases
ambiguës qui ne le compromettoient pas,
de placer sur sa tête une couronne que
s’e.fforçoient depuis long-temps de lui décerner
ceux qui seuls pouvoient alors distribuer
les palmes littéraires.
Une fois qu’il eut consenti à recevoir ces
hommages, il est à croire que son excessif
amour-propre ( car , malgré l’éloge que fait
Blair du caractère de Macpherson , on ne
peut se dissimuler, en lisant la préface de
l’édition de 1775, qu’il n’eût un amour-
propre désordonné ) lui exagérant la part
qu’il avoit eue à la rédaction et à la forme
actuelle des poëmes d’Ossian, il aura pu
se persuader qu’d étoit, jusqu’à un certain
point, fauteur de ce qu’on admiroit dans
cet ouvrage, et le laisser entendre à son
ami.
Mais si les antagonistes d ’Ossian ont argumenté
des contradictions apparentes qu’ils
avoient observées dans la conduite de Mac-
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pherson , ne pourroit-on pas leur demander
compte à eux-mêmes des nombreuses allégations
contradictoires qui se présentent
dans leurs plaidoyers, et qui, à un observateur
impartial, donnent l’idée d’un
parti embrassé par passion plutôt que
d’une intime conviction de la / vérité. En
effet, quand ils parlent de Macpherson ,
tantôt c ’est comme d’un misérable barbouilleur
de papier, et tantôt comme
d’un poëte d’un grand mérite , dont les
premières productions portent déjà le
cachet d’un vrai talent. Ici c ’est un homme
q u i, pour ne pas laisser découvrir sa supercherie,
11e néglige aucune précaution,
revoit, relit mille fois ses morceaux, afin
d’en retrancher tout ce qui pourroit le
moins du monde éveiller les soupçons , qui
va , suivant quelques-uns s jusqu’à corrompre
d’honnêtes montagnards, pour les
engager à de faux témoignages, et même
jusqu’à contrefaire, de sa propre main, d’anciens
manuscrits, pour en imposer au public.
Et ce même homme, qui a pris tant de peine
pour soigner l’écriture de ces manuscrits,
refuse obstinément de les montrer, qui a
mis tant de soin, à retrancher de son ou