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Jlobert Fit?, - Hamon s’affocia douze chevaliers
choiliSj dont fon frère Richard fut le premier ,
& fe mettant avec eux à la tête d’une armée , il
entra dans le pays de Galles , fournit les habitans,
qu il rendit tributaires de l’Angleterre , tua Rhèfe
leur R o i, conquit tout le comté de Glamorgan, & !
partagea fes conquêtes entre lui & les douze che- j
valiers fes affbcies. Fitz-Hamon en eut le furnom
de Grand. Henri I , frère & fuccelfeur de Guillaume
le-Roux j lui donna le commandement de
les armees contre la France. Il mourut d’un coup
de pique qu’il reçut à la tempe dans cette guerre.
Voici les titres que prenoit Fitz-Hamon, & qu’ on
lui donnoit : Robert Fit^ - Hamon , par la grâce de
Dieu 3 prince de Glamorgan-, comte de Çorbeil 3 baron
de Thorigny & de Granville , ftigneur de Glocefier ,
Brifiol 3 &c conquérant du pays de Galles , coufin du
R ° i j 6’ général de fon armée en France. Fitz-Hamon
ne laifla qu’une fille qui époufa Robert , fils naturel
de Henri J , roi d’Angleterre , & de laquelle
defeendent plufieurs des plus illuftres Maifons
d Angleterre. Richard hérita des biens de Nor-
rnandie ^ nommément de Granville , dont il por-
toit déjà le nom. II fe croifa dans fa vieilleffe j
mourut dans le voyage de la Terre-Sainte.
Son fils , nommé comme lui Richard de Granville
^ epoufa Adeline , fille aînée de Robert de
Beaumont, comte de Meulan en France , & premier
comte de Leicefter en Angleterre3 & d’Eli-
fabethde Vermandois , petite-fille de Henri I, roi
de France, qui defeendoit de Hugues Capet ,
comme Richard defeendoit du duc Rollon. Ainfi
la Maifon ducale de Normandie & royale d’An- i
gleterre fe trouva unie avec le fang royal de F rance.
De là defeend directement cette antique & noble
Maiion des Granville, établie dans les comtés de
Devon & de Cornouaille, Maifon toujours vaillante,
toujours utile & fidelle à fes Rois.
x On remarque , parmi les Granville, un troi-
fième Richard, d’ une valeur tellement héroïque,
qu’ elle femble n’appartenir qu’aux tems fabuleux.
Amiral d’Angleterre fous le règne d’Elifabeth,
il rencontre , n’ayant alors qu’un feu! vaifleau ,
toute la flotte efpagnole , qui portoit julqu’à dix
mille combattans j il n’en avoit pas plus de cent.
Malgré cette énorme difproportion , il livre cet
incroyable combat, dont Gauthier ou Walter Ra-
leigh a donné une relation particulière..
Bevil de Granville prodiguafon fang &■ fes biens
pour la défenfe de Charles I , dans les guerres de
ce Prince contre le parlement. Il fut tué à la bataille
de Lanfdown, où il combattoit une pique à
la main.
Jean fon fils aîné, trentième comte de Corbeil,
trentième baron de Torigny & de Granville depuis
Robert, fils de Rollon , dans un efpace de nuit
cents ans, créé par Charles I I , le 20 avril 166 j, ,
comte de Bath, vicomte de Lanfdown, & comble
par le même Prince de beaucoup d’autres grâces,
les avoit toutes méritées par les feryiees. qu’ü
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avoit rendus & les maux qu’il avoit foufferts pendant
la guerre civile. A la mort de fon père il
avoit pris le commandement de fon régiment,
n étant encore âgé que de feize ans > il avoit reçu
plufieurs bleifures en differentes occafions 5 il avoit
été laiffé pour mort à la bataille de Newbury. il
eut la plus grande part, avec le général Monck,
au rétabliflfement de Charles II.
Charles, fils de Jean, vicomte de Lanfdown &
baron de Granville, fervoit avec le duc de Lorraine
lorfque ce Prince, aidé de Sobieski, fit
lever le fiége de Vienne , en 1683. 11 aflïfta aux
principaux fiéges & combats de cette guerre.
L Empereur le créa comte de l’Empire , avec la
permiflïbn de porter dans fes armes l’aigle romaine.
Jean, fécond fils de ce comte , fe diftingua dans
. differentes occafions, & fur terre, & fur mer.
GRIBEAUVAL (Jean-Ba p t is t e V a q u e t t e
de ) , ( Hifi. mod.) , lieutenant-général des armées
du Roi, grand-croix de l’Ordre royal & militaire
de Saint-Louis, premier infpeéteur du Corps-Royal
de l’artillerie, étoit né dans la ville d’Amiens le
1 y feptembre 171ƒ. H entra, en 1732, comme volontaire
dans le régiment de Royal artillerie. En
: jHhjg jl fait officier pointeur} il s’attacha particuliérement
à la partie des mines>;& en l y f i i!
fut nommé capitaine des mineurs. Il Détoit lorfque
M. d’Argenfon, minière de la guerre, le
chargea d aller prendre des renfeignemens fur l’artillerie
prufiïenne, où divers changemens venoient
de s’introduire. Dans ce voyage il connut le grand
roi Frédéric II & en fut connu. Ce Monarque avoit
adopté le fyftème de Bélidor fur les mines. Gri-
beauval étoit peu favorable'au globe de com-
preffion de Bélidor, ou du moins il préféroit un
autre fyftème. E h bien ! lui dit un jour Frédéric
après avoir difputé contre lui fur ce fu je t ,; ’e/z appelle
a t expérience , 6? f i Voccafion s ‘en préfente ja -
mais , j e veux fu r le terrain meme vous ramener a
mon avis. M. de Gribeauval accepta le défi, fans
prévoir les occafions qu’il eut dans la fuite de le
loutenir.
De retour en France, il fut fait lieutenant-colonel
en. 1757. La guerre de fept ans étoit alors
commencée. M» le comte de Broglie amena Mi. de
Gribeauval avec lui à Yiénne,; & le fuffrage de
cet ingénieur, déjà diftingué dans l’Europe, ne fut
pas fans influence fur le choix que l ’Impératri.ee-
Reine fit du général Daun pour le mettre à la tête
de fes armées. C e général fut l ’obligation qu’ il
avoit a Gribeauval, il voulut la reconnoître en
le faifant entrer au fervice de la pour de Vienne
& en Remployant dans fon armée', comme général
de bataille, & commandant de l’artillerie, du
'genie & des mineurs. Ce fut principalement dans
c.ette guerre que Gribeauval fe couvrit de gloire.
Ses deux plus mémorables exploits font le fiége
de G la tz , en 17J5?, dont il dirigea les favantes
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opérations, & du fuccès duquel le général Lati-
don fe plaifoit à lui faire hommage ; mais furtout 1a fameufe défenfe de Sehweidnitz attaqué par le
roi de Pi*ufTe en perfonne en 1762 , la dernière
année de la guerre. Gribeauval montra bien alors
qu’il n’avoit pas oublié le défi que ce grand Roi
lui avoit fait dix ans auparavant aü fujet du globe
de compreffion. Quatre globes de comprelfion ,
employés dans ce fiége par le roi de Pruffe, furent
abfolument fans fuccès s mais fur cette défenfe de
Sehweidnitz, ce font les ennemis même que combattoit
Gribeauval qu’il faut entendre. On regar-
doit d’abord le fiége de Sehweidnitz comme une
entreprife de peu d’importance, & qui ne pouvoir-
arrêter long-tems. Un an auparavant les Autrichiens
avoient emporté cette place en deux jours
de fiége & en quatre heures d’affaut. Les Prufliens
ne comptoient pasj en 17 6 2 , qu’elle dût leur
coûter davantage à prendre. Le roi de Pruffe ne
crut pas d’abord que cette expédition méritât fon
entremife : c ’étoit un général, nommé Tanfien,
qui faifoit.ee fiége , & il avoit cru être modefte
en demandant douze jours pour réduire la place.
Vo ic i ce qu’il écrivoit au roi de Pruffe, après
douze jours de tranchée ouverte : « Je vousavois
» promis de vous rendre maître de Sehweidnitz
» en moins de douze jours } mais je ne favois pas
« que j’aurois affaire à ce diable de Gribeauval. »
Je demande encore douze jours à votre majefté.
Au bout de ces douze autres jours, rien n’étant
encore avancé, le Roi vint lui-même diriger le
fiége, & prit fort à coeur cette entreprife} il écri-
voit le }. 3 août au marquis d’Argens: : ce Je vous
« annoncerai, pour vous reftaurer, que mon eii-
» treprife fur Sehweidnitz va jufqu’ ici à merveille}
« il nous faut encore onzejours heureux, &cé tte
»:> épreuve fera rempliè. »
i Le 19 août, il écrivoit au même marquis d’ Argens
: « Pour vous parler tOut-à-fait naturelle-
« ment , je crois què nous aurons encore une crife
»» avant là réduétion de .Sehweidnitz. »
Le marquis d’Argens, dans une lettre du 2 feptembre
, dit : > J’efpère que dans le tems que
« votre majëfté recevra cette le ttre,.Sehweidnitz 1
*> fera. pris. ;Vous avez e u , Sire,' la bonté ;de:nous
»'bromettrè' 'dès :pçftiiiphsl; » ( Pour leur-donner
avis défia priféde cètte place.)
; Le roi de Pruflè lui répond le 6 feptembre :
m. Vous avez peut-être cru m’envoyêr ma réc'bm-
«rpeijfé pour mon fiége de Sehweidnitz : vous
«.vous êtes trompé, mon' cher. Je-fuis auffi mal-
« adroit à prendre des places qu’ à faire des vers;
«-Un Certain Gribeauval ,'iqui ne fe mouche pas
« duj pied, .& dix: mille Autrichiens nous ont, àr-
«ISrêtés-njufqu’à préfent; Cependant; je dois vous
«'.dirënqué le çoinmandaht & fa garnifon font à;
3î;lqgoniie : -on'leur donnera- inceffaimn}ent lê 'V;ia-
«-tique.' Nous fommes à la paliffadé , & une mifie:
« qui jouera dans quatre jou^s,. ouvrira la contr-ef-
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33 carpe, & fera brèche à l’enveloppe ; ce qui
33 mettra fin à cette difficile opération.»»
C ’étoit encore fe flatter trop tôt : la mine ne
joua point ou joua mal.
Le marquis d Argens écrit le 21 feptembre : «Je
»3 ne faurois me perfuader que Sehweidnitz ne foit
3» pas pris lorfque votre majefté recevra ma let-
33 tre. Elle a bien raifon dè dire que M. de C-ri-
»»- beauval ne fe mouche pas du pied. Comment '
>» cet homme fe défend-il pendant deux mois dans
33 une place qui nous a été enlevée dans deux
33 heures ? »■ ' ‘
J^e Roi répliqué le 16 : c< Je vous dois fans doute
33 bien des exeufes, mon cher marquis, devons
»j avoir annoncé avëc trop de préfomption la fin
33 de notre fiége au 12 de ce mois. Nous y fommes »3 encore} les mines nous ont beaucoup arrêtés.
3» A préfent nous fommes maîtres du chemin cou-
»? v e r t} & comme voilà le plus grand ôbftacle levé,
»3 je me flatte que le refte ira plus vite. Il nous
»3 faut employer fix femaines à reprendre une place
»3 que nous avons perdue en deux heures. Cela
s» ne fait pas l’éloge de notre habileté ou de notre
»i courage..... Je ne veux plus être prophète , ni
33 vous annoncer le jour de la réduction ; mais je
»3 crois que Cela pourra durer encore quelques
>3 jours. Le génie de Gribeauval défend la place
33 plus que la valeur des Autrichiens. C e font des
»3 chicanes toujours renaiffantes qu’il nous fait de
33 toutes les façons. >s.
. Le lendemain, 27-, il écrit encore : « Je vou-
33 drois pouvoir vous dire , mon cher marquis ,
33 que Sehweidnitz eft pris, mais il ne i’eft pas
33 encore. La chicane des mines nous a arrêtés
33 quatre femaines. Nous fommes à préfent aux
33 paliflades. Hier l ’ennemi fit fauter une mine qui
3* nous a détruit un logement: toute cette journée
1 33 a été employée à le rétablir. Enfin il faut avoir
; « patience, car ce «Gribeauval fe défend comme
»3 il doit.
x , 33 Nous n’ avons ic i, dît-ilencore dans la même »3 lettre , ni Neptune, Ai Apollon contre nous ,
» mais un Gribeauval..... Il ajoute : I l nous manqut
3» un Achille. »3
Mais Achille n’eut point l’honneur dé prendre
T r.oye} i l mourut à; la peine} la valeur rié^ut rien
1 contre cette ville ; reine de l’A lîe } elle fuccomba
i fous Faftificei - •
Crédita res , captique ctolis lacrymifque coatti.
Quos neque Tydides, nec Eariflæus Achilles ,
Non anni domuere d'ebem , non mille carinA.
Le marquis d*Ai'gens écrivoit encore'au R.oi le,
jÿo èlo bre -r’û V o u s 1 demandez un Achille, pour 133 prendre Schweidriîtz : Eh' l ne 1 etes-vous pas? Ce
j 33-n’eft pas cela qui vous manque, c’eft un inge-,
j 33- nieur auffi bon que ce Gribeauval, dont votre,
|»3 majefté fa it!’éloge avec tant d impartialité. Le'
« génie, cette partie effentïelle d e là guerre, E