fa femme au pouvoir d'une foldatefque effrénée.
Cette femme, pour toute g râ ce , lui demandoit la
m ort, & fe jetoit d’elle-mêmc. fur lapo nte de fon
épée. Le foldat Alain, qui étoit refté avec' l u i d e mandoit
aufli de mourir avec lui & de mourir de
fa main, pour échaper aux outrages & à la cruauté
des rebelles..Arrivé à fon dernier moment, Gé-
ronce accorda cette funefte grâce à fa femme &
à fon ami} il coupa la tête à fon foldat Alain , puis
à fa propre femme, Sc fe perça le coeur au meme
inftant.
C e Maximus, ce fantôme d’Empereur qu'il avoit
c ré é , tomba de lui-même, n'ayant plus cet appui }
il auroit pu vivre : on lui avoit laifïe la vie par
mépris, comme à un imbécille, indigne également
de vivre & de mourir } mais cet imbécilïe s'avifa
d'être ambitieux 5 il reprit la pourpre, fut pris Sc
décapité.
La mort de Géronce eft de l'an 411 .
G ODE T-DE SMARAIS ( P a u l ) , (H iß. de
Fr. ) , évêque de Chartres, directeur de madame
de Maintenon après l'abbé Gobelin, étoit né au
mois de janvier 1648, à T a lc y , paroifle du dio-
cèfe de Chartres Son père , François Déclarais,
chevalier, feigneur d'Aroifle, baron d'Hertrayen
Normandie, fut tué, en 16y 2 , à la bataille de Saint-
Antoine. Sa mère étoit de la Maifon de Lamarck. 11 fut élevé par fa tante, femme de M. de Pienne,
gouverneur de Pignerol & chevalier des Ordres
du Roi.
Le plus grand événement de fa jeunefle fut un
voyage qu'il fit à Rome fous le pontificat d'Alexandre
VII. Le plus grand événement de fa vie fut
d'être directeur de madame de Maintenon, & le
plus beau trait de fon caractère fut de l'être fans
devenir un prélat courtifan.
Ecolier en théologie au féminaire de Saint-Sul-
p ic e , il y fut connu de M. Tronfon, qui en étoit
Supérieur. Supérieur lui-même dans la fuite du
collège des Trente-Trois, il y connut l'abbé Gobelin
, qui s'y étoit retiré. C e fut fous tes aufpices
de ces deux eccléfiaftiques , fi révérés alors par
leur doétrine & leur piété, qu'il entra dans le
monde & dans l'églife. C e fut l'abbé Gobelin qui
le fit connoître à madame de Maintenon.
L'abbé Defmarais avoit aufli connu à Saint-Sul-
pice l’abbé de Fénelon j ils avoient été rivaux
d'étude, autant qu'un eccléfîaftique , deftiné à n'ê-
tre qu'un faint, pouvoit être le rival d'un homme
aufli brillant & aufli aimable que Fénelon.
En fe retrouvant chez madame de Maintenon ,
ils devinrent rivaux de faveur. Cette femme docile
, à qui l'abbé Gobelin défendoit de briller
dans la converfation, & qui permettoit à des hommes
dont elle fentoit l'infériorité, de lui impofer
tous les jougs de la r e l ig io n fe partageoit entre
la fainteté auftère de Godet - Defmarais , & la
piété tendre de Fénelon. La dévote combattoit
en elle les penchans de la femme d'efprit & de
goût j elle oppofoit dans fon coeur l'ami qu'elle
refpe&oit, fans pouvoir le goûter, à l'ami qu'elle
craignoit de trop aimer.
L'éditeur des Lettres de Godet-Defmarais à
madame de Maintenon, qui forment le quinzième
& dernier volume des Mémoires & Lettres de
cette Dame, établit ce parallèle encre les deux
rivaux :
« L'abbé de Fénelon étudioit les myftiques qui
” l’égarèrent > l'abbé Defmarais étudioit l'Ecri-
M ture-Sainte, qui n’égare jamais: »
Ce jeu de mots, qui paroît d'abord heureux ,
perd beaucoup de fou mérite quand on vient à
fonger à la foule d'hérétiques qui fe font égarés en
commentant & en interprétant l'Ecriture-Sainte.
Mais enfin Fénelon s'égara j il n'en fut que plus
grand par fa foumiflion & par le noble parti qu’il
fut tirer de fa chute. Godet-Defmarais ne prit pas
un vol fi élevé , mais il ne tomba point.
Des deux eccléfiaftiques que madame dè Maintenon
aima le mieux, Fénelon & le cardinal de
Noailles, l'un fut quiétifte, l'autre réputé janfé-
nilte j l'abbé Defmarais les combattit tous deux ,
en triompha, & refta maître de la confcience de
madame de Maintenon. Il la dirigea depuis 1689
jufqu'en 1709.
En 1690 il fut fait évêque de Chartres} ce qui
lui donnoit naturellement la direction de Saint-
C y r , où il remplifloit déjà depuis quelque tems
diverfes fonctions du faint miniftère pour des retraites
& des confeflîons extraordinaires. En : 69Z
il fut facré dans cette même Maifon de Saint-Cyr,.
qu'il fournit, l ’année fuivante, à la règle de faint
Auguftin.
Il avoit prêché autrefois à Paris avec plus de
[accès que d*applaudiJfement, dit l'éditeur de fes
Lettres. Cela s'entend.
Sa correfpondance fpirituelle & directoriale
avec madame de Maintenon eft plus édifiante que
lumineufe ou inftruCtive. Chaque lettre eft vague,
quoique le titre annonce un objet déterminé. Qui
en voit une les voit toutes. L'auteur poflede l ’Ecri-
ture-Sainte & en multiplie les citations, mais fou-
vent fans choix & fans à-propos.
L'hiftoire de fon épifeopat eft d’ailleurs un tiflu
de bonnes oeuvres. Saint,- il fe donna un faint pour
fucceffeur. Il demanda & obtint pour coadjuteur
M. de Mérinville fon neveu. 11. mourut le 26 fep-
tembre 1709. Son coeur eft à Saint-Cyr, & on en
put dire, comme du coeur de M. Arnauld à Port-
Royal :
Cor nunquam avulfum nec amatis fedibus abfens.
Son épitaphe qü’ on lit à Saint-Cyr, l'annonce
comme un inftituteur fpirituel de cette Maifon.
Hic jacet cor lll. & Rev. D. D . Pauli de Godet-
Defmarais , Carnutenfis epifeopiy qui régis, huic domui
primus dédit legem vit a & difciplins. Obiit Carnuti>
16 kaL oH. an. 1709, statis 61.
GONTIER ou GONTHIER ou GUINTIER
( Jean ): ( Hifl. <de Fr.) L'anatomie, ainfi que
toutes les fciences, fit des progrès fous François I.
» On éleva des amphithéâtres publics pour la dif-
feûion des cadavres, opération trop négligée depuis
Galien. Jean Gontier, médecin de François I ,
fut celui qui renouvela cet utile ufage ; ce fut lui
qui forma V é fa l, ce médecin célèbre de Charles-
Quint & de Philippe I I } ce Véfa l, dont le père ,
l’aïeul, le bifaïeul, le trifaïeul s'étoient illuftrés
par l'étude de la médecine, & furent tous effacés
par lui. Sur leurs pas les Euftaches, les Fallopes,
les Botals ajoutèrent aux découvertes anatomiques.
Gontier eft le premier qui ait donné une
defeription aflez exaéte des mufcles} il en a même
apperçu plufîeurs qui avoient échappé aux recherches
de Galien. C'eft lui qui a donné le nom de
pancréas au corps glanduleux attaché au péritoine.
C'eft lui qui a découvert l'union de la veine & de
l'artère fpermatiques, des deux conduits qui répondent
de la matrice àux mamelles.
Gontier ne concevoit pas qu'on pût avoir la
cruauté de tenir fecret un remede utile. Nam fe-
rinum ftb omnique humanitate & candore animi alie-
num videtur ea velle occultare qus ad communem ho-
minum falutem pertinent. De Peft. com. præf.
Il étoit né en 148 7, à Andernach. Il mourut à
Strasbourg en 15 74 , après avoir éprouvé diverfes
perfécutions au fujet delà religion.
Il a traduit beaucoup d'écrits de Galien & d’autres
auteurs, & compofé des Traités latins fur la
pefte, fur les femmes grofles & les enfans* L'empereur
Ferdinand lui donna des lettres de no-
blefle.
GRABEN. (Hifi.de Charlem.) C e mot rappelle
un établiflementdont les guerres germaniques donnèrent
l'idée à Charlemagne, & qui eût a lui feul
immortalifé fon règne & changé la face de la
Terre s'il n’avoit pas été abandonné. Le feul
projet prouve au moins combien les grandes chofes
étoient familières à ce Prince , dans un tems où
perfonne n’avoit encore fongé au bien public. Il
vouloit faire communiquer l'Océan germanique &
la Mer-Noire par le Rhin Se par le Danube, en
joignant ces deux fleuves par des rivières intermédiaires
} & fi l'on veut que les canaux de Drufus
& de Corbulon > dont l'un joignoit le Rhin avec
iTflel, & l'autre avec la Meufe, aient contribué
a lui infpirer ce projet, on voit par-là quel utile
ufage il favoit faire de fes connoiflances dans
l'Hiftoire* Les rivières qu'il s'agifloit de joindre
par un canal, étoient, d'un cô té , le Rednitz $ de
l’autre, l’ Athmul. Le Rednitz fe jette dans le Mein,
aux environs de Bamberg} le Mein, dans le Rhin,
près de Mayence } le Rhin, dans l'Océan. L'Athmul
fe jette dans le Danube, à Kelheim } &: lè
Danube , dans la Mer-Noire. Du Rednitz à l’Ath1-
mul il n’y a que deux lieues de difiance : le canal
de jonction dèvoit avoir trois cents pieds de lar-*-
geur fur ces deux lieues de longueur : le travail
fut pouffé jufqu’à deux mille pas ; des pluies continuelles
le firent abandonner } les terres s'ébou-
lo ien t } le fol étoit fans confiftance } mille obfta-
cles qui n'en feroient point aujourd’hui, parurent
alors invincibles : le découragement fe mit parmi
les travailleurs, & un des plus beaux établiflemens
que l'efprit humain eût encore conçus , ne put
avoir lieu. Les veftiges du canal fubfiftent encore
près du village de Graben, qui en a tire fon nom,
fe mot allemand graben lignifiant un foffé.
Charlemagne eût fans doute repris ce projet,
dans un tems plus favorable, f i , en le formant ,
il avoit été animé des grandes vues de bien public
qui auroient dû préfider à une pareille entreprife »
s'il avoit vu les diverfes provinces de F rance, de
Germanie , de Pannonie, tous ces vaftes pays
qu'arrofent le Danube , le Don & l e s autres rivières
d’Europe & d’Afie, qui fe déchargent mé-
diatement ou immédiatement dans la Mer-Noire ,
excités, vivifiés, enrichis par le commerce le plus
aétif & une communication directe & facile, établie
depuis le fond du nord de l’Europe jufqu au
centre de l'Afie. Voilà les objets qui auroient dû
s'offrir aux regards de Charlemagne & parler a
fon coeur. Il ne v i t , dans ce grand & bel ouvrage,
qu'une facilité pour la guerre de Pannonie, qu un
moyen de faire defçéndre des troupes des bords
de l ’Océan germanique jufqu'aux rives de la Save,
de la Drave & du Raab} de leur procurer aifément
& à peu de frais toutes les provifions nécefîaires}
& comme il parvint, fans ce fecours, a terminer
heureufement la guerre de Pannonie s ü ne penfa
plus à cet ouvrage} il perdit par-là l'occafion de
faire, pour toute la fuite des fiècles , plus de bien
au Monde , qu'il n’avoit fait de mal par fes conquêtes
paffagères.
II tenta aufli d'unir la Mofelle à la Saône.
GRANVILLE , ( Hifi. d* Anglet. ) nom d’une
illuftre Maifon anglaife, defeendue^ des anciens
ducs de Normandie, & tirant fon origine de Rol-
lon , le premier de ces Ducs, par Robert, comte
de C o rb e il, fils puîné de Rollon. C e Robert eut
deux petits-fils célèbres dans l'hiftoire de Normandie
& dans celle d'Anglèterre, Robert Fitz-
Hamon, comte de C orb e il, & Richard, qui prit
le nom de Granville, l’une des feigneuries de fon
père en Normandie. Ces deux frères accompagnèrent
Guillaume-le-Bâtard leur parent, à la con-
uête d'Angleterre, & contribuèrent à la victoire
'Haftings , qui réduifit ce royaume fous l ’obéif-
fance de Guillaume. C e conquérant, en recon-
noiflance de leurs fervices, les combla d’honneurs
& de biens. Fitz-Hàmoti, l ’aîné ,oeut les feigneu-
ries de Glocefter & de Briftol y Richard de Granville
eut des poffeflions immenfes dans les comtés
de De von, de Cornouaille, de Sommerfet & de
Buckingham} elles ontpafle àlàpoftérité. Sous le
règne de Guiilaume-le^PvOux, fils du conquérant,