
Nous ne pouvons pas non plus oublier la romance
cTApollon & Daphné 3 qu'on a tant goûtée
& tant chantée.
M . Marmontel a fuccédé à M. d'Alembert fon
ami j dans la place de fecrétaire perpétuel de l'A cadémie
françaife, en 1783.
N'omettons , s'il fe p eut, aucun de fes avantages.
A tous ceux de l'efprit & du talent il joi-
gnoit ceux de l’extérieur : une taille élevée & bien
proportionnée , une phyfionomie belle , noble -5
d’un caractère impofant, qui prenôit aifément l’air
révère , & dans laquelle l'exprefiion du dédain
étoit quelquefois plus forte qu'il n'eût voulu 5 fa
gaîté même avoit de la gravité & de la dignité.
Tant qu'il a vécu dans le célibat , il a pafle pour
un amant heureux : on a parlé de fes bonnes fortunes
& des pallions ou des goûts qu'il a infpirés.
Marié , il a été le modèle des maris 5 il n'y en
eut jamais de meilleur ni de plus heureux : j'en attelle
les charmes 9 les vertus , les regrets amers 3
la douleur-profonde de'fon aimable veuve. « Il
33 croit j difoit M. de Saint-Lambert , que le ma-
30 riage & la paternité ont été inventés pour lui ;
33 il en jouit comme d’ un bien qui n’eft qu'à lui. »
11 a lui-même chanté fon bonheur.
D ’Adélaïde
Je n’o fe parler qu ’à d em i,
L ’h ymen e ft difcret & timide ;
Ma is heureux l'époux & l ’ami
D ’Adé la ïde.
Il a lailfé des enfans qui répondent parfaitement
aux foins qu'il s’eft donnés pour leur éducation.
Lorfqu'en 1797 on faifoit à l’envi * pour l'Afîem-
blée nationale , ces excellens choix qui répan-
doient la joie & l'efpérance dans le coeur de tous
les honnêtes gens, M. Marmontel fut élu à leur
grande fatisfa&ion. Je ne connois de lui qu'un
rapport fait dans le court exercice de fes fondions.
Ils'agiflbit deftatuer fur la multitude de livres que
de fréquentes confifcations qu’on pourroit appeler
d’ un autre nom, avoient accumulés. M. Marmontel,
dans fon rapport, rappela courageufement
l'obligation de reftituer le bien d’autrui. Il avoit
été nommé par la voix publique 5 il eut l'honneur
d'être exclu par trois brigands au jour trop fameux
de la tyrannie fructidoriekne.
Il eft mort prefque fubitement à Abloville, près
Gaillon, le 31 décembre 1799, à l’âge de quatre-
vingts ans. On a publié de lui quelques volumes de
nouveaux Contes' moraux poftnumes , qui ne font
pas des cadets indignes de leurs aînés.
MAROBODUUS, C A TU A LD A . {Rifi. germ.)
( Voye\ l'article Arminius ci-àeRus.) Maroboduus,
roi des Suèves-Marcomans , d’un côté, ennemi des
Romains3 de l'autre, rival du célèbre Arminius,
avoit été conduit à Rome dans fa jeunefle, &
avoit appris j dans cette v ille , à joindre la pojitique
romaine à la fierté germanique.- Ses intrigues
le mirent à la tête de fa nation, & il s'en fit
nommer R o i, titre beaucoup moins agréable aux
Germains, que ceux de cher & de défenfeur de la
liberté , dont la politique plus habile d'Arminius
fe contentoit.
Maroboduus n'étoit féparé des Romains à l'occident,
que par le Rhin 3 à l'or ient, les Hermun-
dures, nation puiflante, qui faifoit aufli partie des
Suèves, & qui étoit alliée des Romains, le fer-
roient de près : il vouloit s'agrandir 5 il engagea
fes fujets à paffer avec lui dans le pays des Bôïens
(la Bohême), & à le conquérir Jhr ces Boiens,
nation alors peu nombreufe & amollie par une
longue paix. Au moyen de cette conquête, les
Hermundures, qu'il avoit auparavant à fa droite,
furent à fa gauche ; ils occupoient une partie de
la Mifnie, de la Franconie & du Palatinat. Ref-
peélant toujours dans ces peuples lés alliés des
Romains, il fournit vers le nord de la Bohême
une multitude d’autres peuples qui n’avoient pas
le même avantage 3 il s'avança jufqu'à la Poméranie
& prefque jufqu'aux bords dé jà Mer Baltique.
Les Lombards, les Semnons, les Bourguignons
ouBurgundions faifoient partie de ces peuples
fournis par Maroboduus. Comme ces conquêtes
fe faifoient en s'éloignant des Romains , il
efpéroit qu'elles ne blefleroient point les yeux jaloux
de Rome.- Il comptoit aufli fur les ménage-
mens qu'il affe&oit en toute occafion pour les
Romains, & fur les négociations par lefquelles il
tâchoit d’endormir leur prudence & de rallentir
leur aélivité.
Il fe trompoit. L 'oe il du jaloux Tibère, alors
lieutenant d'Augufte en Germanie, étoit toujours
ouvert fur lui & fur fon Empire toujours croifîant.
C e t Empire, dans fa partie méridionale, s'appro-
choit trop de l’Italie 5 & quoiqu'Augufte parût
allez indifférent fur des accroiflemens qui fe faifoient
dans la partie oppofée, Tibère lui fit aifément
comprendre qu'il n'étoit pas de l’intérêt de
l'Empire de permettre des accroiflt mens même
éloignés, à unepuiflance voifine. En conféquence
Augufte autorifa Tibère à prendre, pour prétexte
de rupture avec les Marcomans, les plaintes de
quelques nations alliées, dont ils avoient envahi
quelques terres. Tibère marcha contr'eux à la tête
de l'armée romaine , la plus nombreufe qu'on eût
vue depuis les guerres civiles. C'éto it fait de Maroboduus
& de fon Empire naiflant 3 ils alloient
fuccomber fous la valeur & la difcipline des légions
conduites par un général brave, habile &
circonfpeél. La révolté de la Poméranie & de l'U-
ly r ie , qui éclata précifément dans le même tems,
fauva Maroboduus d’une perte prefque certaine ,
en forçant Augufte d’accorder la paix aux Marcomans,
& même à des conditions aflez avanta-
geufes.
Mais la puiflance de Maroboduus, dans la Germanie
, devenoit fufpeéte aux Germains, & déplaifoit
furtout au fier Arminius, qui, fous prétexte
de maintenir la liberté, ne fouffroit aucune
puiflance capable de balancer la fienne. Il raflenn-
bla tous les peuples de l’occident de la Germanie
dans une ligue commune , dont il fut le ch e f, a
la tête de fes Chérufques. Alors les nations du
nord, qui s'étoient vues obligées de fubir le joug
des Marcomans, nommément les Lombards & les
Semnons, s'emprefîerent de le fecouer & de
groflir la ligue occidentale. Il y eut entre Arminius
& Maroboduus un combat où la perte fut grande*,
mais ‘égale de part & d’autre, & qui ne parut
point d'abord decifif 3 mais Maroboduus, en refu-
fant le combat qu’Arminius lui préfentoit de nouveau,
en fe retranchant dans fon camp , puis en
fe retirant tout-à-fait dans la Bohême , fembla
s’avouer vaincu 3 & foit qu’il crût avoir acquis
des droits, ou par fes ménagemens, à la bienveillance
des Romains, ou par fa foiblefle, à leur
protection, il leur demanda des fecours contre
Arminius, qu’il repréfentoit comme l’ennemi commun.
Tibère répondit que Rome n’avoit point de
fecours à fournir à un prétendu allié, qui n'en
avoit pas fourni lui - même contre cet ennemi
commun, dans la guerre des Romains contre les
Chérufques. *
Mais l ’intérêt fur lequel Maroboduus avoit
compté, produilït une partie de fon effet. Arminius
étoit plus à craindre que Maroboduus 3 il
étoit plus ellentiellement ennemi des Romains : la
défaite entière des Marcomans eût trop augmente
fa puiflance. Déterminé par ces raifons,. Tibère ,
alors monté fur le trône, chargea Drufus fon fils,
de ménager un accommodement entre les Marco-
^man.s & les Chérufques. Le traité eft de l'an 17
de J .G . , troifîème dé l'empire de Tibère. C e pendant
la puiflance de Maroboduus vint fe brifer
contre un autre écueil. La dureté de fon gouvernement
le rendit odieux à fes peuples 3 ils fe fou-
levèrent, y étant furtout excités par les intrigues
fecrètes de Drufus, qui fuivoit la maxime de fon
père : Divide & impera. Ils appellèrent pour les
gouverner un jeune homme d'une haute naiflance,
nommé Catualda ou Catvalda, que les violences
de Maroboduus avoient forcé de quitter la Bohême
& de fe retirer chez les Gothons, fur les
bords de la Mer Baltique. Bientôt la défection
devint univerfelle : Maroboduus n'eut plus d'autre
reflource que de s'enfuir fur les terres de l'Empire,
d’où il implora la protection deCéfar, avec
plus de dignité peut-être que fa fortune préfente
ne fembloit devoir lui en laifler. Il ofa fe faire un
mérite auprès des Romains, de la préférence
qu'il leur donnoit fur tant de nations qui fe fe -
roient fait un devoir & un honneur de recueillir
& de relever dans fon illuftre difgrace un Monarque
autrefois fi puiflant, & que Tibère lui-meme,
dans un rapport qu'il faifoit au fénat, repréfenta
comme ayant été aufli redoutable à l’Empire, que
Philippe l 'avoit été aux Athéniens, & Pyrrhus ôc
A n tio ch u s aux peuples romains. T ib è re lui accorda
en effe t un afile 5 il vint s 'établir à Ravenne 3
il y v é cu t paifible pendant dix-huit an s , & les R o mains
eurent l’ injuftice de le méprifer, parce qu'il
trou voit dans la paix & dans l’oubli ou le fouvenir
modefte de fes grandeurs p a fle e s , un bonheur
que l’ ambition n'avoit jamais pu lui procurer.
T ib è r e , quand les Suèves fembloient v o u lo ir
fe rendre red ou tab le s, les menaçoit de tems en
tems du rétabliffement de Maroboduus 3 mais content
de leur en faire un épou vantail, il ne tenta
jamais la moindre entreprife en fa faveur.
L e tour de Catualda ne tarda pas à v e n ir .' il
fu t chafle dès l’ année fuivante, c’ eft-à -dire , dès
l’an 20 de J. C . , fixième de l'empire de T ib è r e ,
par V ib illiu s ou Jubillius, R o i des Hermundures.
C e fu t aufli aux Romains qu’il eut recours dans
fa difgrace j ils lui donnèrent aufli un afile. C e fut
dans là G a u le , à F ré ju s , qu'ils l’envoyèrent. Dès
ce moment on ne fait plus rien de fon hiftoire.
Le s C h é ru fq u e s , les C a t t e s , les Sicamb re s,
tous ces autres peuples germains qui comp o-
foient alors la ligue occidenta le & qui ont formé
depuis la ligue des F ran c s , haïffbient & mépri-
foient Marobodu us dans le tems même de fa
puiflance 3 ils le regardoient comme un homme
fans co u ra g e , Comme l'ennemi de la nation german
ique , comme un Prince vendu aux Romains :
Fugacem Marohoduum, pr&liorum expertem.........
proditorem patris, fatellitem C&faris. N ous voyon s
cependant T ib è re & Drufus fon fils le traiter en
en n emi, & T ib è re s'applaudir d’avoir détruit en
lui une 'puiflance formidable à l’Empire 3 & c’ eft
ainfi que le repréfente V e lie ïu s P a te rcu lu s , c e
grand p eintre de portraits. Il lui ac cord e même le
mérite d’avoir introduit dans fes troupes la difcipline
romaine.
M.aroboduus, genere nobilis, corporè pr&valenst
animo ferox 3 natione magis quam ratione barbarus ,
non tumultuarium, neque forîuitum , neque mobilem ,
fed ex voluntate parentium conftantem inter fuos occu-
pavit principatum, & certum imperium , vimque te-
giam complexus animo , fiatuit avocatâ procul a Romanis
gente fuâ3 eo progredi, ubi , cumpropter potentiora
arma refugifiet , Jua faceret potentifiima.........
Finitimos omnes aut bello domuit, aut conditionibus
juris fui fecit.
Corpus cufiodiâ tutitm imperii, perpetuis armorum
exercitiis penè ad romans, defciplins formam redacium,
breviyin eminens & nofiro quoque imperio timendum
perduxit faftigium i gerebatque fe ita adverfus Romanos
, ut neque bello nos lacejferet, & fi lactjferetur ,
fuperejfefibi vim ac voluntatem refiflendi déclararet. Le-
gati 3 quos mittebat ad Csfares 3 interdum ut fupplicem
commendabant, interdum ut pro pari loquebantur. Gen-
tibus hominibufque à nobis defcifcentibus erat apud eum
perfugium : totufque ex mate difiimulato agebat smulum.
MATHILDE , (Hifi. mod.) , fille de Baudouin,
comte de Flandre, & femme de Guillaunae-le