
j 6 x BRANDEBOU
fecotirs d‘un allié opprimé nfétoit que fard , fauffes
deitts & pompons j fous les cornettes de nuit c'étoit
la Siléfie qu on vouloir envahir. Mars , pour un |
réfutareur de Machiavel,- n'eft-ce pas être un peu !
trop machiavéliffie , que de couvrir ainfi d'un noble i
& faux prétexte toute 1 injuft-ke d'un conquérant ?
Àu reftê, le Rot de Pruffe acquit, dans cette
guerre. beaucoup de gloire militaire. 'Il étoit entré,
d e s la fin de 1740, en Siléfie, prévenant tout le
monde, & n'ayant point encore d'allié opprimé
ni d'Empereur malheureux à défendre. I l prit pof-
feffion de Breftaw le I er. février 1741 > ae Ürieg
après fix jours de fiége : il gagne en perfonne, le
4 avril, la bataille de Molwks fut les Autrichiens
commandés parle comte de Neuperg , 8c le 17 mai
1741 la bataille de Czafkw for les mêmes Autrichiens
commandés par le prince Charles de Lorraine.
M. de Voltaire triomphait 3 il avoir prédit
cette gloire de fon héros r
Tout du plus loin que je vo.qs vis,
Je m’écriai : Je vous prédis
A l'Europe toute incertaine.
Vous parûtes. Vingt potentats
Se troublèrent dans leurs Etats
En voyant ce grand phénomène.
Quand il eut appris la viétolre de Molwits , if
infolta à ces propriétés de malheur, à qui les vers
& l’efprit du Roi de Pruffe étoient fofpeéts , &
qui avoient cru l'idée d'un Roi lettré inconciliable
avec I idée d'un Roi guerrier :
Eh bien 1 mauvais p lai fa-ns, critiques obftinés,
Prétendus beàux-efprits à médire acharnés 3
Qui, parlant fans péri fer, fiers avec ignorance,
Mettez légèrement les Rois dans la balance ;
- Qui, d’un ton déçifif, àulîi hardi .que faux,
AtïiiÉez qu’un fa-vant ne peut être un héros j
• Ennemis de fa gloire & de la poélîe,.
Grands critiques des Rois, allez en Siléfie.
Voyez ccnt bataillons près de Neiff écrafés 3
C’eft là qu’efl: mon héros. . . . . . . . . . .
C'effluhmêmec’eft lui. . . . . . . . . . .
Quifait tout, qor fait teint, qui s’élance à grands pas
Du Parnaffe à l'Olympe, Sides-jieui aux combats......
Qui parle, agit, combat, écrit, règne en grand-
bons me.
RG-PRUSSE.
cluant, en 1742, avec la Pleine de Hongrie, & æ
l'instigation, des Anglais, le traité de Ereflaw, par
lequel la Reine -, abandonnant une partie de fes
Etats pour en fauver le refte , cède à perpétuité
au Roi de Pruffe toute la Siléfie & le comté de
Glatz , États dont il avait conquis la plus grande
partie , mais que la Reine pourvoit tenter de reprendre
Ccmme'ïe Roi de Pruffe étoit dans les mêmes
intérêts que nous , qu'il avoir les mêmes amis &
les mêmes ennemis , noua applaudirions alors à
fes fuccèsj nous l’appelions alors, d'après M. de
V o lta ire , U Salomon du Noté. 11 avoit en effet
toute la fageffe qui joint la prudence à la valeur, .
& qui enfeigne à faire a propos, pour fes intérêts^
la guerre & la paix. 11 eeffa», pour un;tems , noi*
de mériter, mais d'obtenir nos éloges , en- con-
avec le fecours des Anglais, & qui étoient'
plus affurés à Frédéric par un traité.- Mais en
1744 l’e Roi dé Pruffe , cherchant encore à s'agrandir
de quelques provinces aux dépens de la
Reine de Hongrie, fuppofa q ue, par desffuçcès
qu’elle venoit d'avoir,elle redevenoit trop redoutable,
& il rentra en guerre contr'elle 5 car c'étoit
ou la manie du tems ou la politique artifieieufe de
ceux qui vouloient accabler la foibleffe de la
Maifon d'Autriche , d’affeéler de voir toujours en
elle cette même Maifon d'Autriche fi puiffante
fous Charles-Quint., fi turbulente fous Philippe II
lorfquelle joignoit l’Efpagne avec le Portugal, 8c
toutes les richeffes des Indes aux Etats fi réduits
; & fi difpetfés qui lui reffoient depuis la paix d'LK
trecht. Le Roi de Pruffe alléguait que, comme' un
des piincipaux membres de l’Empire, il ne pouvoit
fe difpenfer de donner du fecours à l’empereur
Charles V I I , encore méconnu, & alors dépouillé
par la Reine de Hongrie. Voilà donc Frédéric redevenu
notre allié, & reprenant tous fes droits à
notre admiration 8c à nos éloges. 11 fê jette fur la
Bohême3 il prend la ville de Prague le 1 y feptem-
bre 5 mais le prince Charles la lui fit évacuer le 27
novembre. Le 4 juin 1745: il baç ce même prince*
Charles à la bataille de Fridberg 5 il bat encore les*
Autrichiens à la bataille de Prandnitz,, le. 30 fep-
tembre. Le prince d’Anhalt, qui, d’un autre coté,
commandoit une partie des troupes pru (Tiennes, a.
aufli des foccès préparés 8c facilités par l'attention-
du Roi de Pruffe à pourvoir à tout. Frédéric chaffe
: de Drefde & de la Saxe le Roi de Pologne, qui,
par le' tràité de Francfort , s'étoit ligué avec la
Reine de Hongrie. M. de Voltaire s'applaudiffoit
de voir le Roi fon fouverain 8c le Roi Ton ami de
nouveau réunis dans un même intérêt 3 il tâchoit de'
leur faire croire qu'il les mettoit tous deux for 1»
même ligné : ,
Car vous êtes tous deux amis; ‘
Tous deux vous forcez des murailles,
Tous deux vous gagnez des batailles
Contre les mêmes ennemis.
Je vois de Berlin à Paris
Cette déeffe vagabonde ( la Renommée )
De Frédéric & de Louis
Porter fes noms au bout du» Monde :
Ces noms que la gloire a tracés
Dans un cartouche de lumière,
Ces noms qui répondent allez
Du repos de l’Europe entière
S’ils font toujours entrelacés
BRANDEBOURG-PRUSSE.
Ils ne le furenrpas lo n g - tem s ; car le i t décembre
ï 745 le Roi de Prude fit un nouveau traité
a v e c la Reine de Hongrie , qui lui confirma de
nouveau la ceffion d e la Siléfie 8c du comté de
, & à laquelle il garantit fes États d’A lle -
>nagne , & il accède de fa voix élec torale à celles
. . s ?-utres E lecteurs qui v en d en t d 'é le v e r à FEm-
pïre le grand-duc de T ofcane y F rançois, mari de
V . elne “ H on g r ie, car l'empereur Charles V II
e .o it mort a Munich le zo janvier 17.4 c. On ne voit
plus en effet le Roi de Pruffe figurer dans c e tte
g le r re jq u i fut terminée en 1748 p a rle trait« d ‘ Aix-
- la-Chapelle.
M. de Voltaire, honoré de quelques faveurs de
> ° lfis A V j moins.par l'inclination naturelle de ce
monarque, que par la proteâipn de madame d’E-
tiûles-pompadour , étoit moins retenu en France
parces legeres faveurs, que par la confiante amitié
'r -ü ’ r na,t e f! e r e & madame la marquife du
Ghatelet, qu'il a tant célébrée dans lès écrits, 8c
vivante, & après fa mort. Ilia perdit en 1740 &r
ce lien rompu, le Roi de Pruffe, qui n'avoit encore
vu M. de Voltaire qu'en paffant pour ainfi
dire , dans quelques vifites que Voltaire avoit été
lui faire a Ve le l, à Strasbourg, à Berlin, Séc, pro-
iita des cirçonftances & de quelques défngrémens
que \ dtaire éprouvoit alors en France, & auxquels
il 1« favoit fort faillible, ; il redoubla d'inf*
■ ta' 1Çds pour obtenir que M. de V o lta ire vînt s 'é tablir
ch e z lu i , & y trouver de la lib erté , des
hon n eurs , des richeffes & des diftimftious plus
natte ules encore, L e traitement é to it r é g l é , tou t
e to it convenu ; mais M. de Voltaire auroit voulu
ne le point féparer de madame Denis fa nièce qui
ten o it fa maifon à Paris ; il demandoic aaffi pour
«Hé un traitement particulier. L e R oi de Pcuflè
q ui tenon de fon p ère quelque goût pour l'épargne
ce 1 éc o n om ie , ne voulut point de ce tte furcharge
« s en défenda it en difant qu'il n 'avoit defiré que
M. de V oltàire & le fecours de fes lumières , de
Ion elprit, de fes talens ; qu'il étoit bien le maître
de le faire fuivre d e madame-Denis, mais qu'il ne;
1 en prjoitpas , & que cet article lui étoit étranger.
- 1 d® Voltaire héfitoit encore lorfquè le Roi ;
pour l'aiguillonner, imagina de faire, à la louange!
de M. d'Arnaud, qui étoit alors en Pruffe, des’
vers dans lefquels il comparoir M. de Voltaire au
lolejl couchant, & M. d'Arnaud au foleil levant.
-Le calcul du Roi fut jufte. Je tiens l'anecdote fu i- !
vante deM. Marmontel, quiétoitpréfentàlafçènel
que re vais rapporter. M. de Voltaire étoit dans’
ion l i t , ou il aimoit à travailler , & où il reftoit
quelquefois fort tard. M. Thitiot arrive, apportant
la piece de vers fatale, & en fait la lecture, croyant
ne pas devoir laiffer ignorer à fon ami un point où
il avoit tant d'intérêt. Voltaire s'élance hors du
fit,, démarchant tout n u, en chemife, à grands pas,
dans la chambre, il crioit avec fureur : De quoi fe
mêle-t-il, 6 défaire des vers, & d'y dire de pareilles
otifes ? C ejl bien à lui à régler Us rangs fur le Par-
7 es
naffe! Qu‘ilfe mêle de régner s’il en a U talent. Quand
il eut bien exhalé toute fa colère, il fe remit au
ut; mais dès ce moment fon parti fut pris irrévocablement
de partir pour la Pruffe, fans plus infifter
fur l’article de madame Denis, qui relia dans Paris,
où nous l’avons vue pendant plufieurs années enc
o r e , & d'où elle ne partit, pour aller rejoindre
fon oncle , que lorfqu'elle apprit fa rupture avec
le Roi de Prude, & fa détention à Francfort à la
demande de ce Prince. Les caules de cette trop
rameule rupture furent, comme on fait, une querelle
de M. de Voltaire avec M. de Maupertuis
au fujet de M. Koenig, & D diatribe du doSeur
Akakia OÙ le Roi fe crut infults dans la perfonne
du prefident perpétuel de fon Académie, 8c qu’il
fit briller par la main du bourreau , après avoir eu 1 attention perfide de tirer de M. de Voltaire un
faux defaveu de la diatribe, laquelle évidemment
ne pouvoit être que de lui. D’ après cet éclat, le
monarque 8c le poète écrivirent l'un contre l 'autre
deschofesqui auroient pu porter coup contre tous
les deux fi leur gloire diverfe, mais fuprême chacune
dans fon genre, n'eût étouffé dans leurs coeurs
(Ufqu'aux moindres traces de leur reffentiment mu-
tu e l, 8c ne les eût ramenés l'un à l'autre , pleins
d eftime, de tendreflè 8c d'admiration. Il ne man-
quoit a leur pleine & parfaite réconciliation que
d habiter enfemble de nouveau ; mais quand Mfde
Voltaire eut une fois goûté de la liberté dans fa
maifon des Délices, fï bien célébrée par la meil-
Ieure peut-être de fes pièces fugitives, 8c dans fa
retraite de Ferney, où il a trouvé le moyen de
faire tant de bien, il ne lui fut plus poifble de
vivre a la cour des Rois > il étoit roi lui - même à
Ferney, & fon empiré s’étendoit au loin fur les
efprtts, même fur celui du Grand-Frédéric.
M. de Voltaire, plus âgé que lui de dix - huit
ans, mourut long-tems avant lu i, 8c le Roi de
Pruffe fît fon éloge funèbre, procédé d’ un bon
exemple dans un R o i , 8c dans un Roi qui avoir
©te quelque tems mécontent de lui.
. M. de Voltaire avoit vu le Roi de Pruffe ajouter
infiniment a fa gloire dans la guerre qui fe ralluma
en b | | 8c dans laquelle.îuccps nl eut des momens de d autant plus brillans, qu'ils avoient été pré-
cédés par des momens de détreffe dont nul autre
que lui n auroit pu fe tirer, 8c qui firent de plus en
plus admirer les reffources de cette âme aétive 8c
ardente. Dans cette nouvelle guerre on avoitchangé
d amis 8c d'ennemis. En France, on avoit, par un
jyltème politique tout nouveau, imaginé de réunir
les Maifons de France 8c d'Autriche; 8c par un
relte de 1 erreur qui attribuoit encore tant de force
a la Maifon d'Autriche, on croyoit que rien ne
pourroit refifter a ces deuxPuiffmces ainfiréunies
L Impératrice- Reine fe fîattoit bien de reprendre
a bilefie, 8cla France, ayant commencé par battre
les Anglaisfur mer, au combat fameux du marquas
de la Oaliflomete, par prendre Port- Mahon 8c
par gagner, en 17 J 7 , la bataille d'Hafrembake
D d d d d z