
néral de Tannée romaine, marcha en forces contré
lui. C e général; qui ne manquoit point de talens ,
fut accufé de chercher à prolonger la guerre pour
fe rendre n é c e f là i r e& de s'abftenir exprès de
vaincre de peur d'avoir vaincu. 11 força Civilis
de lever le liège de Vetera , mais il ne le pour-
fuivit point. Bientôt fa politique fe tourna contre
lui & lui enleva le fruit des avantages même qu'il
n'avoit pu s'empêcher de remporter : fes troupes
fe mutinèrent, & la fédition fomentée par les
intrigues fecrètes de Civilis devint fi forte, que
Vocula fut réduit à fe fauver pendant la nuit,
travefti en efclave.
Civilis fe déclara pour lors & entraîna une grande
partie de la Gaule. Ce fut alors que T u to r , Claf-
ficus & Sabinus fe rangèrentirfon parti. Claflicus
engagea un des faélieux à tuer Vocula, qui avoit
été retrouvé. Civilis & fes amis étoient parvenus
à corrompre jufqu'aux légions romaines, qui,
ayant toujours été attachées a Vitellius, aimèrent
mieux obéit à Civilis que de fe foumettre à, Vef-
pafîen qu'elles étoient accoutumées à combattre.
Civilis recommença le fiége de Vete ra, & les légions
qui défendoientce camp, fe voyant abandonnées
par les autres, furent obligées de fe rendre.
. Sabinus fe fit proclamer Empereur de la Celtique,
mais il fut battu. Claflicus entra dans le camp
romain, revêtu des ornemens impériaux, & reçut
le ferment des officiers & des foldats, non pour
lui, mais pour l'Empire des Gaules, c'eft-à-dire,
pour Civilis. Tutor & Claflicus étoient à fon
égard ce que Mucien & Antonius Primus étoient
dans le même tems à l'égard de Vefpafien.
Civilis eut enfuite à combattre un autre général,
Pétilius Cerialis, dont il n'eut pas aufli bon marché
que de Vocula . Quand les légions qui s'étoient
ou données ou rendues, à Civilis, fe virent en pré-,
fence d'autres légions romaines, ellés reprirent
l'efprit romain x & fe tournèrent toutes du côté de
Cérialis. C e général triompha aifément des lieu- j
ténans de Civilis ; il prit Trêves, Civilis, joint avec
Claflicus , vint le furprendre dans fon camp près
de çette ville , & il eut d'abord cet avantage momentané
que produit toujours la furprife à ceux
qui l'emploient, mais il finit par être repoufla
avec perte ; il vint enfuite occuper ce camp de Vetera,
d'où il avoit chafle les Romains. Il crut qu'à
la vue de ce théâtre de fes exploits & de fes fuc-
cès , fes foldats en fer oient plus animés à de nouveaux
fuccès encore. En effet,ils s'y défendirent
.d'abord avec grand courage, même pendant quelque
tems avec avantage 5 mais ils finirent par en être
chafles, & obligés de mettre le Rhin entr'eux Scieurs
ennemis. ■ ,
: Ce ftit alors q u e , pour élargir encore ce fofifé,
Civilis rompit une levée que Drufus avoit faite
pour retenir la pente naturelle du fleuve qui le.
portoit vers le rivage des Gaules. Par ce moyen le
courant retomba dans le canal de la Lecqije, &
fortifia la barrière du Pchin.
Cependant Tutor & Claflicus lui ayant amené
des renforts de la Germanie , l'infatigable Civilis
voulut encore tenter la fortune ; il attaquables Romains
à la fois dans quatre poftes différens , &
fut d'abord vainqueur partout-. Mais Cérialis accourant
avec toute fon armée au fecours de fes
poftes forcés , la fortune changea , les Germains
furent précipités dans le Rhin. Civilis , quoique
percé de coups, fe tint ferme fur fon cheval, qui
pafla le Rhin à là nage & le fauva. Claflicus &
Tutor paflerent ce fleuve dans des nacelles. A
quelque tems de là Cerialis defcendant le Rhin
de Bonn à Nuys, Civilis penfa le furprendre ; il
mit fon armée en défordre & lui prit plufieurs navires
j il reparut quelque tems avec une flotte
puifîante qu'il étaloit avec orgueil à l'embouchure
de la Meufe. La flotte romaiue étoit en préfence.
Les deux armées navales paflerent à côte Tune de
l'autre, & fe lancèrent des traits : on fe menaça^
mais on ne combattit point.
C'eft un perfonnage bien difficile, que çeluid'un
chef de rebelles ; s'iLcefle^d'être heu reux&triomphant
, il perd tout crédit dans' fon parti, fouvent
même il devient fufpeCt, & . c'eft à le rendre tel
que fes ennemis s'attachent. Les Romains ren-
doient alors à Civilis artifices pour artifices : tous
les moyens de corruption dont il avoit ufé envers
eux , ils les employoient contré lui. Ën ravageant
les terres des Bataves, ils avoient grand foin de
refpe&er les fiennes, pour perfuader à ces peuples
que Civilis étoit d'intelligence avec les Romains.
Civilis voyoit que les difpofitions des Bataves
ne lui étoient plus favorables 5 que la guerre,
dont le poids écrafe toujours à la longue , com-
mençoit a leur déplaire ; que les principaux chefs,
jaloux de fa g lo ire , fongoient à faire à fes dépens
leur accommodement avec Rome : il réfolut 4e !es Prévenir , & il fe mit à négocier avec C e-
rialis^ j il fe vanta même dans la fuite de l'avoir
fauvé d'une perte certaine, dans une occafion où
un débordement dû Rhin ayant inondé fon camp,
ce général reftoit fans vivres , fans vaifleaux qui
puflent lui en apporter, fans aucun moyen de travailler
à des retranchemens néceflaires. C'étoit le
momen.t, difoient alors les Germains, d’opprimer
ces légions qui leur avoient fait tant de peine, &
d’acquérir par leur ruine une gloire égale à celle
d Arminius. Civilis , au contraire, employa toute
fon adrefle aies détourner'de ce projet, préférant
à une gloire incertaine ou fragile un accommodement
certain & folide. Il fe ménagea 'donc une
entrevue avec Cérialis ; ils fe virent fur un pont
du Waal, ayant une arche rompue entr'eux deux.
Ils convinrent aifément de leurs conditions : C ivilis
, T u to r , Claflicus & cent treize fénateurs de
T rê v e s , qui avoient fuivi leur parti, furent rétablis
dans ions leurs biens, & jurèrent de ne jamais
tirer 1 epee que pour la defenfe de l'Empire romain.
il ne fut plus parlé de l'Empire des Gaules.
Qn ignore le refte de l'hiftoire & la fin de ces
trois
trois conjurés, Civilis, Tutor & Claflicus. Leur
entreprife étoit noble , mais elle n'eut pas d'autre
ifliie que d'affermir & d’augmenter la domination
qu’ils avoient voulu renverfer. Quant à la fin de
.Sabinus, événement très-mémorable, on peut la
voir à fon article dans le Dictionnaire.
CLASSICUS. ( Voye[ l'article Civilis) . .
CLAUDE ( la reine) , (H iß. de Fr.) étoit la
fille aînée du roi Louis XII & de la célèbre Anne
de Bretagne. On a prefque tout dit de la reine
Claude, en n'en difantprefque rien : fon obfcurité
fait fa gloire. C e fut une fainte, qui , négligée
par François I fon mari, maltraitée par fa belle-
mère Louife de Savoie, duchefle d'Angoulême ,
ne fe plaignit p o in t, n'exigea rien , ne regretta
rien,;fervit Dieu , fecourut les malheureux, & ne
fit jamais de mal. On la nomma, pendant fa v ie ,
la bonne reine, &c perfonne n'en parle aujourd’hui :
on ne fait pas même fi c'eft elle qui a donné fon
nom, ou dont on a donné le nom à la reine des
runes. Voilà lesvfemmes qui ne font point célè-
res. Qu'une femme fans pudeur ( Louife de Savoie
) ait fait pendre un vieillard innocent ( Sem-
blançay) j quelle ait forcé un héros défefpéré
f le connétable de Bourbon ) à déchirer le fein de
fa patrie, à faire fon Roi prifonnier > qu'on ait tremblé
fous elle , on ne l'oubliera jamais.
Quand j ’ai dit que la reine Claude étoit négligée
par François I , j'ai voulu dire feulement qu'elle
n'avoit ni crédit ni faveur > le crédit étoit entre
les mains de la duchefle d'Angoulême ; la faveur
étoit pour la comteflede Chateaubriant. D'ailleurs,
le Roi eut de la reine Claude, en dix ans de mariage,
trois fils &: quatre filles.
Dès le 28 juin iy i y elle lui avoit fait une donation
entre-vifs du duché de Bretagne , des comtés
de Nantes, de Blois, de Montfort & autres
terres.
Claude naquit à Romorentinle 13 oétobre 1499,
fut mariée le 18 mai 15 14 , & mourut le 2y juillet
1 J24, à Blois. Bordigné, du Bouchet & quelques
autres parlent de fe» miracles : bornons - nous à
parler de fes vertus.
CLAUDIA ou C LODÏA (Hiß. rom.) , digne
foeur de ce tribun Clodius, l ’ennemi de Cicéron
& de tous les gens de bien, le violateur des myf-
tères de la bonne déefle. Elle avoit, dit-on, commencé
par être violée par lu i, ou peut - être par
fe livrer à lui : c'eft ainfi qu'elle préluda aux aé-
fordres de fa v ie , qui ne cédèrent qu'à ceux de
Meflaline, dontle nom eftrefté enpofleflion d'être
l ’emblème de la débauche. Claudia fut diftinguée
des autres femmes de fon nom, par le furnom infamant
de quadrantia ou de quadrantarid , tiré d'une
pièce de monnoie fort vile qu'elle recevoit, dit-on,
de chacun de fes aman$ pour prix de fes faveurs.
I l femble que ces deux femmes ( Claudia & Mef-
Hißoire. Tome lVI. Supplément,
faline ) priflent plaifir à n’ omettre aucune des
circonftances de baflefîe & d’opprobre qui appartiennent
au métier de proftituée. Juvénal nous repréfente
aufli Meflaline demandant de l'argent aux
foldats & aux autres débauchés qui entroient dans
le lieu de proftitution où elle fe rendoit la nuit en
quittant la couche impériale :
Excepit blanda intrantes atque Ara popofcit.
C'étoit fans doute, dans fon intention, aider â
fon déguifement > car ce ne pouvoit être , ni par
befoin, ni par intérêt. Cette femme, qui gouver-
noit fi.abfolument l ’Empereur, devoit difpofer des
finances de l'Empire. La conduite de Claudia rend
croyable celle de Meflaline, &abfout Juvénal d'hyperbole.
Cette Claudia voulut infpirer ou vendre
de l'amour à Cicéron} car c'eft furtout à corrompre
les perfonnages graves & vertueux, que ces ma-
chiavèliftes d'amour mettent leur gloire. Cicéron
fe moqua d 'e lle , & ne lui épargna point les railleries
dans fa harangue pour Coelius. Claudia ,
quoique déshonorée dès la maifon paternelle, n'en
epoula pas moins le conful Quintus-Metellus-Celer,
un des plus honnêtes hommès de la république.
Que pouvoit faire une pareille femme d'un mari
honnête homme ? Elle Tempoifonna j ce qui lui a
fait donner par Quintilien le furnom de quair an-
taria Clytemnefira, furnom qui n'eft pas tout-à-fait
jufte , & qui a befoin de cette correction que Ju-
* vénal nous fournit :
Hoc tantum dijfert quod tyndaris ilia bipennem
Infulfam & fatuam dextrâ l&vâque tenebat,
| A t nunc res agitur tenui pulmone rubetA.
C LER C ( LE ). ( Hifi. du Luther an. ) La ville de
Meaux fu t , en France , le berceau du Luthéra-
nifme. Ce fut là que les Luthériens firent en France
leurs premières profanations > ce fut là qu'on vit
pour la première fois des bulles & des mandemens
déchirés & des placards affichés, où le Pape étoit
traité d’Antechrift. Un cardeur de laine, nommé
Jean le Cle rc , fut un de ceux quife diftinguèrent
le plus par ces traits de izèle. Le parlement les fit
fultiger dans les carrefours de Paris , les fit marquer
d'un fer chaud à Meaux, & les bannit du
royaume à perpétuité. Jean le C lerc trouvant qu'il
avoit encore trop peu fouffert pour l'Evangile ,
alla brifer des images à Metz : on lui coupa
poing & le n e z , on le couronna d'un fer chaud ,
& on le jeta au feu ( en 1525 ) . Il fut le premier
martyr du Luthéranifme en France. Théodore de
Bèze l’appelle le Rejlaurateur des églifes de Meaux
& de Met£.
C LUGNY . ( Hifi. de Fr. ) Nom d’une ancienne
famille de Bourgogne, originaire d'Autun, qui a
fourni un grand nombre de magiftratseftimés, foit
Q