
i .'8 C R O
fcandale de confacrer & de toucher le corps du
Sauveur avec des mains impures & fouillées. La
nuit fuivante les officiers de la police le furprirent
dans le lit d'une courtifane ; il partit le lendemain,
& le concile fe fépara. Cette aventure eft de Lan
1124 ou 1 n y .
CROCUS. (Hift. rom. & Hift. anc. germaniq. )
Vers Lan 1 6 1 , fous Lempire de Gallien & de Pof-
tume, le roi P rocus,à la tête d'une bande d’Allemands
, à laquelle s'étoient jointes quelques autres
nations germaniques, porta le ravage dans diverfes
contrées des Gaules. C'étoit un fi furieux deftruc-
teur , que l'effroi qu’il caufoit, a mêlé fon hiftoire,
de fables abfurdes. Sa mère é to it, dit-on, fée ou
rophéteffe, & afîurément ce n'étoit pas une fée
ienfâifante. Confultée par fon fils fur les moyens
d ’illuftrer fon nom, elle répondit qu'il falloit ren-
verfer tout ce qu'il rencontreroit de beaux édifices,
détruire beaucoup de v illes, & en maffacrer
tous les habitans. En effet, c’étoit donner la définition
d'un conquérant. Crocus tâcha de’l'être 5
il ruina de fond en comble l'ancienne ville de
Mayence : on La depuis rebâtie plus près de Co-
blentz. Les murailles de Metz tombèrent comme
par miracle à fon arrivée 5 mais ce fut lui qui fit
le miracle : il en voulut faire autant à Tre v e s ,
mais ellefe défendit, & l’ obligea d'aller chercher
ailleurs quelque conquête plus facile j il défola la
Gaule narbonnoife & les Aquitaines,exerça d’horribles
cruautés dans le Gévaudan, & v f it des martyrs.
Le peuple du pays s’étoit retiré dans une for-
terefïe lur la montagne au pied de laquelle eft
maintenant la ville de Mende. Saint Privat, évêque
de cette contrée, s'étoit retiré dans une caverne,
où il paffoit les jours & les nuits à prier Dieu de
dérober fon peuple à la fureur de Crocus. Les barbares
découvrirent fa retraite & le. menèrent à
leur barbare R o i , qui, fur le refus qu'il fit d'adorer
les idoles & de lui livrer fon peuple, le fit
alfommer à coups de bâton. Saint Privat mourut
de fes blefiures peu de jours après. Le lieu où il
fouffrit le martyre & termina fa carrière, fe peupla
tellement par l'affluence de ceux qui venoient honorer
fa mémoire, que, d'un petit bourg, il devint
une ville confidérable, la capitale & l'églife cathédrale
du Gévaudan , le liège épifcopal y ayant
été transféré d'un lieu nommé Jarry, qui n'eft plus
aujourd'hui qu'un village.
Crocus détruifit encore jufqu'aux fondemens le
fameux temple de Va flb, à Clermont en Auvergne,
dont l 'Hiftoire vante la magnificence & la ftruc-
türe merveilleufe. La Provence fut le terme de
lès ravages & de fes fureurs j il afliégeoit la ville
d'Arles lorfqu'il fut fait prifonnier par un foldat
nommé Marius, que Mézerav conjecture avoir
été cet aventurier, forgeron ae fon métier, qui
fut pendant deux fois vingt-quatre heures Empereur
, fans même en avoir le titre. Crocus fut traité
çomme il l’avoit mérité : op ne lui épargna ni hu-
C R O
miliations ni tourmens : on le promena par toutes
les villes qu'il avoit ruinées, & du moins il y avoit
de la convenance dans cette partie de fon fupplice.
Il étoit jufte qu'il fut couvert d'ignominie dans les
mêmes lieux , parla ruine defquels il avoit recherché
une funefte gloire : on lui rendit tous les maux
qu'il avoit fait fouffrir à tant d'innocentes victimes ;
& quand on fut las de le tourmenter, on lui trancha
la tête. Nous répétons qu’il avoit mérité fon
fort par le mal qu’il avoit fait 5 mais ce n'eft jamais
que chez des nations barbares qu’on voit
traiter ainfi les ennemis même les plus coupables,
&des Rois, & des guerriers pris dans les combats.
CROIX-CHEVRIÈRES ( Hift.de Fr. ) , famille
du Dauphiné, dont le premier nom étoit de Guerre.
Jean de Guerre, fécond du nom, fut le premier
de fa race qui prit le nom de la Croix , en vertu
d’une donation qui lui fut faite fous cette condition
par un gentilhomme de ce nom, & fon fils,
Félix de la C ro ix , étant devenu feigneur de Che-
vrières par la vente que lui en fit en 1560 la fa-
meufe Diane de Poitiers, ducheffe de Valentinois,
ces deux noms unis enfemble, formèrent le nom
de leurs defcendans. Les la Croix - Chevrières
acquirent encore dans la fuite d’autres biens de la
Maifon de Poitiers, entr'autres le comté de Saint-
Vallier.
i° . Jean de Guerre , ou le premier la Croix ,
fervit avec honneur les rois Louis XII & François
I , le premier à la bataille de Ra venne, en 1 f 12 ;
le fécond d'abord à la journée ou aux deux journées
de Marignan, en 1 y 1 5 , puis à la bataille de
Pavie en 1 f 2 5 , où il eu t, comme le R o i, Je malheur
de relier prifonnier. Il mourut des bleffures
qu'il avoit reçues au paffage de Sufe, en , 1536.
2°. Pierre de la Croix, fon fils aîné, frère aîné
de ce Félix qui vient d'être nommé plus haut,
s’étant fignalé, aux batailles de Renty, de Dreux,,
de Saint-Denis, de Ja^nac, fut tué à celle de Mon-
contour, en 1569.
30. Félix de la Croix-Chevrières, frère puîné
de Pierre, fut homme de robe, confeiller, puis
avocat-général au parlement de Grenoble,puis
confeiller d'Etat & intendant du Dauphiné. Il fut
nommé par le roi François I , le 8 février 1 $44.,
pour Lun des commilfaires qui firent le procès au
chancelier P o y e t , fous Henri IL II fut de la
chambre de juftiçe qui jugea le maréchal de Biez,
&Coucy-Vervins fon gendre, & qui ne paroît pas
avoir été jufte à leur égard. Mort en 1583.-
40. Félix fon fils aîné reprit le fervice militaire.
Colonel d'infamerie, il prit Morefte, place fur
la frontière du Dauphiné, du côté de la Savoie,
expédition dans laquelle il reçut, fept coups de
moufquet. Il fut tue en 1590, au fiége d'HToire en
Auvergne.
y°. Jean de la Croix-Chevrières, frère du précédent
, fait confeiller au parlement de Grenoble
le 2 j juillet 1 J78 3 avocat-général au même parlement
,
C R O
ment, le 29 novembre 1 y8y 5 maître des requêtes
& intendant des financés (dans l'armée que le duc
de Mayenne commandoit en Dauphiné ) , le 29
novembre 1 f 88 ; furintendant des finances dans
cette province pour le roi Henri IV , & confeiller
d'Etat, le 13 feptèmbre 1 59J, par des arrange-
mens fans doute relatifs à l'accommodement du
duc de Mayenne avec ce Monarque. Lorfqu’en
1600 , J-Ienri IV eût conquis la Savoie , Jean de
la Croix-Chevrières en lut nommé garde-des-
fceaux ; ce ne fut pas pour long-tems:la paix fe
fit, & Chevrières fut un des députés nommes pour
l'exécution des conditions de cette paix. U eut le
31 décembre 160 f , une charge de préfident à mortier.
au parlement de Grenoble , en dédommagement
des fceaux de la Savoie & en récompenfe
de fes fervices. La même année, le 27 mai, il
avoit été nommé ambafladeur extraordinaire auprès
du duc de Savoie j en 1607, il fut nommé à
l'évêché de Grenoble. Il avoit été marié & avoit
desenfaris. Le fécond de fes fils , nommé Alfonfe,
fut nommé, le 30 avril 16 1 1 , fon coadjuteur dans
l ’évêché de Grenoble. Le père mourut en 1619,
le fils en 1657. Le père étoit favant, homme de
lettres & jurîfconfulte. Il y a un Commentaire fous
fon nom dans Guy-Pape ; il en fit un auffi fur les
donations entre-vifs. Il lifoit beaucoup, & toutes
fortes de livrés 5 il difoit n'en avoir jamais lu de fi
mauvais, qu'il n'y eût trouvé quelque chofe de
bon. Cette maxime, qui tend à difpenfer du choix,
fuppofe la vie dé l ’homme trop longue :
Le fage eft ménager du tems & des paroles.
C R O 129
Par la même raifon, il doitLêtre des livres. Un
écolier qui feroit affez ignorant pour ne pas favoir
chercher les mots par ordre alphabétique dans
le Di&ionnaire, les chercheroit dans tout le Dictionnaire
indiftinétement, & finiroit par les trouver
, puifqu’ils y font > mais avec combien de peine
& quelle perte de tems ! Il en eft de même de celui
qui cherche dans un mauvais livre une bonne chofe
qui peut y être. On s'inftruira plus dans un bon
livre que dans cent livres médiocres & dans mille
mauvais. Tenons-nous en donc aux bons, & même
aux meilleurs, pour notre profit & pour notre
plaifîr.
6°. François-Oétavien, baron de Clerieu, petit-
fils du précédent, mourut au fiége d’Arras.
70. Jean de la Croix-Chevrières, frère de Fran-
çois-Oétavien, confeiller au parlement de Grenoble
, puis préfident à mortier , d'abord au parlement
de D ijo n , puis à celui de Grenoble, fut
auffi confeiller d 'E tat, & employé dans plufisurs
négociations importantes & fecrètes. Sa terre
d’Ornacieux fut érigée en marquifat en 164y.
8°. Pierre-Félix fon fils aîné., capitaine des
gardes de la porte & . confeiller d'Etat d 'ép é e ,
mort en 1699 , avoit fervi à Gigeri fous le duc
de Beauforc, & fe diftingua depuis dans diverfes
occafîons.
Plufieurs autres perfonnages de la même famille
ont fervi avec honneur, foit dans la ro b e , fok
dans Lépée.
Hiftoire. Ferne V i . Supplément. R