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Ta p rofe , & qu'il faille éviter, que celui qui eft
forme par la répétition de la même voyelle 8c la
prolongation du même fon. Par exemple , il al la a
-^miëns. Un écrivain du fécond ordre commence
un gros volume d’un gros ouvrage affez protégé,
par ces mots , NV & élevé, c’ eft manquer abfolu-
ment d’oreille. Mais obfervons que la feule répétition
de la même voyelle ne forme pas un hiatus
dans la profe, s’ il n’y a prolongation au même fon j
ainfi dans cette phrafe : 11 a été m trois jours à
Moud un, le fécond hiatus té en, n’ en eft point un 3
malgré la répétition de Yey parce que le fon e3
& Je fon en n’eft pas le même. Dans cette autre
phrafe : Il n’a aucun inconvénient , Y hiatus eft nul
encore > parce que le fon a 8c le fon au font différons
î & fi , pour éviter cet hiatus prétendu , je
difois : Il na nul inconvénient 3 la répétition de la
nazale 8c le fon dur n'a nul 3 offenferoient bien
plus l’ oreille $ mais dans ce cas particulier, on peut
aifement éviter le défaut de la fécondé phrafe, 8c
jufqu’ à l’ ombre de 1 hiatus dans la première, en
difant : I l eft fans inconvénient.
Revenons à l’abbé de Canaye5 il connoiffoit les
fcrupules de l’abbé de la Bletterie fur Y hiatus, &
pour s’en moquer il s’amufoit à déchirer fes délicates
oreilles par cette phrafe : L’abbq, vous qui
p 0fledez fi fupérieurement l’Hiftoire romaine ,
pouv ez-vous me dire bien précifément en quelle’
année Çaïus-Servilius Ahala alla à Athènes} T e lles
ét°ient les douces malices & fes innocentes
gaîtés. .
Le b°nheur domeftique dont a joui M. l’abbé
de Canaye^ bonheur dont on ne jouit guère fans
le mériter j mais qu’ on peut mériter fans en jouir,
paroît véritablement digne d’envie dans le tableau
qu’en a tracé le fecrétaire de l ’Académie.
« Les liens qui attachoient M. l ’abbé de Canaye
« à la fociété, avoient été fucceflivement rompus
» par la mort de la plupart de fes amis , & les
*> agrémens qu’il trouvoit dans l’ intérieur de fa
» maifon l’avoient empêché de chercher à faire de
m nouvelles liaifons au dehors. C e n’eft pas que
sa fon ame fenfible n’éprouvât le befoin d’aimer,
» mais il pouvoit le fatisfaire fans fortir de chez
*> lui : une nièce ( madame la marquife de Mefnil-
»3 Glaife) qui lui épargnoit,.depuis près de cin-
33 quante ans, l’ obligation bien pénible pour lui
>3 de fe mêlèr de fes affaires, qui lui prodiguoit
»3 les foins les plus touchans 8c les plus aflidus,
33 partageoit toutes fes affeélions avec un neveu
>3 (M .'le chevalier de Mefnil-Glaife, aujourd’hui
33 (e n 1783) capitaine aux Gardes-Françaifes)
~ élevé foüs fes y eu x , formé par lui-même, oc-
33 cupé-fafis ceffe, ainfi que fa mère, plus encore
33 .par fentiment, qué pour acquitter la dette de
33 la reconnoiffance, à faire le bonheur d’ un oncle
33 qui à fon tour ne s’ oocupoit que du leur’.
33 Ç ’eft vraifemblablement autant à leurs foins
» .tendres 8c empreffés, 8c à la régularité confiante
» de fa y ie , qu’ à fonexcellente conftitution, que ,
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33 M. I’ abbé de Canaye a dû la fanté ferme 8c vf-
33 goureufe dont il a joui jufqu’ à la fin de fa longue
33 carrière. 33
Il eft mort le 12 mars 1782, dans la quatre-vingt-
huitième année de fon âge , étant né le 7 décembre
1694. Nous ajouterons^ fon é loge , qu’il fut
dans tous les tems l’ami de M. de Foncemagne &
de M. d’Alembert j c’eft un titre pour la mémoire
de tous les trois.
CAN G E (D ufresne d u ). Le favant du
Cange (voyeç fon article au mot Erefne (du.) dans
le Dictionnaire ) étoit d’une ancienne famille de
Picardie. On croit que Jean Dufrefne, fergent
d’armes du roi Philippe-le-Hardy, vers l’an 280,
étoit de cette famille, ainfi qu’un autre Jean Du-
frefne , chaffé par les Anglais de la ville de Calais
en 1347, époque de ce mémorable fiége décrit
par Froiifard, 8c célébré par M. du Belloy. Un
troifième Jean Dufrefne fervoit comme écuyer en
1 4 1 1 , 8c fervit aufli en 1422 dans la garijifon de
Montargis. Les Anglais le dépouillèrent de fes
terres 8c domaines en 1440. Il fe vit réduit alors,
ainfi qUe fa famille, à-une mifère dont un titre particulier
leur fait honneur avec raifon. Un Simon
Dufrefne, peut-être fon fils, y eft qualifié povre
écuyer, auquel il ne reftoit que fon cheval 8'fon harna£
qu il employait au fervice du Roi.
Un Antoine Dufrefne, grand-oncle du favant
du Cange, fervit pendant les dix premières années
du règne de François I , fous le feigneür d’Hu-
mières 8c le duc de Vendôme en Picardie.
Divers autres titres nous montrent les Dufrefne
de race en race , fermant bien & loyaument les rois
de France.
Du Cange avoit plufieurs frères, dont un, nommé
Jean, feigneür de Préaux, eft le premier auteur
du Journal des audiences , &' eft aufli auteur
d’un commentaire fur la Coutume d’Amiens.
CANINIUS. ( Hift. rom. ) C ’eft le nom de cet
homme que Céfar fit conful pour une demi-jour-
née feulement, 8c dont Cicéron a dit qu’il fut fi
fobre 8c fi vigilant, qu’ il ne mangea ni ne dormit
pendant tout fon confulat, & que fon exemple
parut fi b eau, que tout le monde lefuivit. Céfar,
qui avoit voulu, quoiqu’abfent, obtenir le confulat,
s’en étoit mis en pofleflion avant que de rentrer
dans Rome > ce qui étoit déjà un grand ren-
verfement, & des lois, 8c même dés formes, qu’o'n
fe pique encore quelquefois d’obferver lorfqu’on
rënverfe les lois. Dans la fuite , pour montrer encore
mieux fon pouvoir , il l’abdiqua, & mit pour
confuls à fa'place ^ avantla fin de l’année, Quintus-
Fabiùs-Maximus 8c Caïus Trebonius. L’ objet de
ces changemens étoit de favorifer fes amis & de
multiplier fes créatures, en augmentant le nombre
de ceux à qui ce court confulat valoit le titre,
lés droits, les honneurs des confulaires. Ce fut
dans ce même objet que Fabius-Maximus, étant
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mort le dernier jour de fon exercice, Céfar fit
nommer Caninius pour remplir le peu d’heures qui
reftoient de la durée de ce confulat. Cicéron, dans
une lettre à Curius, rit & pleure de tout ce détordre
& de cette ftbverfion de toutes les lois.
ltk 3 Caninio confule , fcito neminem prahdiffe. Ni-
hiltamen eo confule mali fa£lum eft. Fuit enim miri-
ficâ vigilantiâ, qui fuo toto conjulatu fomnum non
vident. Use tibi ridicula videntur, non enim ades.
Qus ftvideres , lacrymasnon teneres. Quid,fi cetera
Jcribam ? Sunt enim innumerabilia generis ejufdem :
qus quidem ego non ferr'em , ni f i me in philofophis
vortum contulijfem , & nifi haberem focium ftudiorum
mtorum Atticum noftrum.
CANTELMI. {Hift. mod. ) La Maifon de Can-
telmi,l’une des plus illuftres du royaume de Naples,
a été folennellement reconnue par les deux Charles
I I , régnant en même tems, l’ un en Angleterre,
l ’autre en Efpagne , pour être defeendue des anciens
rois d’Ecoffe y 8c voici comment on rapporte
!cette généalogie.
. Everard, dernier desfilsdeDuncan,roi d’Ecoffe,
affafliné par Macbeth dans le onzième fiècle ,
8c dont l’aventure a fourni à Shakefpeare le fujet
d’ une tragédie fi terrible, le fils de ce Duncan fe
retira d’abord en Angleterre, auprès d’Edouard
le confeffeur ; dé là il paffa en Normandie, à la
cour des ducs qui étoient fes parens, 8c il s’y
établit. Son petit-fils Roftaing pofféda de grands
biens en Provence & s’y fixa j il prit le furnom de
Cantelme ou Cantelmi, qui avoit déjà été donné
à fon aïeul Everard, 8c qui étoit un éloge de fa
. force d’efprit ou de la fermeté de fon caractère.
'Les defeendans de Roftaing Cantelmi, attachés au
comte de Provence , fuivirent Charles d’Anjou,
comte de Provence par fa femme , à la conquête
du royaume de Naples, où ils firent dans la fuite
de grands établiffemens.
i° . Charles d’Anjou, vainqueur f r o id e Naples,
donna d’abord à Jacques Cantelmi la terre de Po-
p oli, qui fut depuis érigée en duché au feizième
fiècle par le roïa’Efpagne, Philippe I I , en faveur
: de-cette même Maifon de Cantelmi.
2°. Roftaing Cantelmi-, feigneür de Popoli, fils
de Jacques, fe fignala dans des guerres contre les
Sarrafins, où fa vie fut plus d’une fois en danger.
3V. Un autre Jacques Cantëlmi, qui vivoit vers
la fin du quatorzième fiècle , fut le premier comte
de Popoli.
4°. E t Jean-Jofeph-Bonaventure Cantelmi, mort
en iy é o , fut le premier duc.-
50. Dans la branche des princes de Pettorarîo ,
ducs de Popoli, on remarque André Cantelmi,
mettre-de- camp-général 8ç gouverneur de Flandre
pour le roi d’Efpagne > il fe diftingua dans la guerre
des Pays-Bas entre la France 8c l’Efpagne, fous le
règne de Philippe IV , qui répond à une partie de
ceux de Louis XIII 8c de Louis XIV en France.
André commanda en chef dans la Catalogne, qù
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il fut défait par le comte d'Harcourt à Lorens ou
L iorens , le 22 juin 1645-, puis afliégé dans Eala-
guier, qui fut emporté ; il mourut de douleur de
ces mauvais fuccès le 5 novembre fuivant.
6°. Son neveu , Fabrice Cantelmi, duc de Popoli
, fut fait prince de Pettorano par le roi Philippe
IV.
70. Roftaing Cantelmi, duc de Popoli, un des
fils de Fabrice, fervit avec la plus grande diftinc-
tion en Efpagne, en S icile, en Afrique, en Flandre.
Retiré dans le royaume de Naples en 1696, il
eut le commandement général des troupes de ce
royaume. A la mort de Charles 11, il fut des premiers
à reconnoître Philippe V pour roi d’Efpagne.
Louis X IV le - némma chevalier de l’Ordre de
Saint-Louis j Philippe V le confirma dans fon commandement
des troupes du royaume de Naples, &
le fit capitaine de fes gardes 8c Grand-d’Efpagne.
Il fervit au fiége de Barcelone en 170^, fignala
fa valeur a la bataille d’Almanza le 2 y août 1707,
reçut l’Ordre de la T oifo n d ’oren 17 14 , fut fait
confeiller du confeil de guerre & du confeil des^
finances en 171 y , & nommé gouverneur du prince
des Afturies en 1 7 1 6 , fes honneurs croiffant ainfi
toujours d’année en année.
8°. Le cardinal Jacques Cantelmi fon frè re ,
après avoir pafle par différentes nonciatures ordinaires
8c extraordinaires, fut nommé cardinal
en .1690, par le pape Alexandre VIII. Non moins
zélé que fon frère pour la caufe de Philippe V , il
fe déclara aufli des premiers pour ce Prince, qu'il
eut la fatisfaêlion de recevoir en 1702 à Napies,
dontil étoit archevêque. II mourut le 11 décembre
de la même année, à cinquante-fept ans.
90. Jofeph Cantelmi, fus de Roftaing 8C neveu
du cardinal, fut gendre du maréchal de Boufflers.
CAPPEL. ( Hift. litt. mod. ) C ’eft le nom d’une
famille dé Paris, qui a produit, dans le feizième
fiècle, quelques perfonnagesdiftingués dans la ma-
giftrature & dans les lettres. Le plus célèbre fut
Jacques C âppel, avocat du roi au parlement, reçu
le 4 février 1 y 34. Il étoit petit-fils de Denis Capp
e l, procureur au châtelet, 8c d’Yolande Bailly.
Telle avoit été la fécondité de çette femme 8c
celle de fa race , qu’ elle avoit vu ou pu voir jufqu’à
deux cents quatre vingt-quinze enfans iiïus
a’elle. Elle avoit eu plufieurs maris. Son petit-fils,
l’avocat du R o i, dont les talens oratoires nous
paroiffent médiocres même pour le tems, quoi
qu’en dife Ribier ( Lettres 8c Mémoires d’E ta t ,
année 1 y 37 ) , eft furtout connu par une harangue
qu’il prononça au lit de juftice de cette année 1 y 3 7,
tenu contre l’ empereur Charles-Quint, harangue
qui fut trouvée belle alors 8c long-tems encore
après. Il y prétendit q u e , malgré les traités de
Madrid 8c de Cambrai, par lefquels François I
avoit renoncé à la fuzeraineté de la Flandre, de
l’Artois Sc^du Charolois, poffédés par Charles-
Quint, cette fuzeraineté n’ avoit pu ceffer , attendu