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répondre à un raifonnement d é vo t par un trait de
fendaient ..-îyl a dame de Maintenon obtint du moins
qu ç les apparences d e la paix régne roient entre
les deux rivales , 8e qu’ elles épargneroient au R oi
le fp ed a c le & le chagrin d e leurs difientions. C e
traité fut c o n c lu , 8e en conféquence mademoifelle
d e Fontanges parut à un bal donné à V il e r s -C o t-
terets , parée des mains de m adame de Montefpan,
comme c e lle - c i l ’avoit fou v en t é té par mademoi-
felle d e la V a lliè re . ( Voye^3 dans ce v o lum e , l’art
icle l&ontefpan. )
Mademoifelle de Fontanges devint grofle ; le
Roi la fit duchelfe. Ses couches fuient nalheu-
reufes : on foupçonna madame de Montefpan de
l ’avoir empoifonnée > on peut aflurer hardiment
qu’elle en étoit incapable , quoique très-capable
de haine j mais moins encore quevd’ emportement
Sc de fureur. Mademoifelle de 1 ontanges ne fit que
languir depuis fes couches 5 elle tâcheit de fe partager
entre le Dieu devant lequel elle alloit pa-
rcitre /Scié Roi , qui fe détachoit d’e lle , 8e qu’elle
aimoit toujours , peut - être parce qu’elle tenoit
toujours à. la grandeur.
Hile fe retira dans un couventdu faubourg Saint-
Jacques 5 ne devant plus , difoit-elle , fonger qu’ à
mourir. « Le Roi, dit M. de laBeaumelle, envoyoit
»' trois fois la femaine le duc de la Feuillade favoir
m des nouvelles de fa fante. 11 n’envoya pas même
» un gentilhomme de la chambre à M. deCatinat. »
Voilà certainement un trait de critique des plus
déplacés.
On peut répondre à M. de la Beaumelle :
i ° . Qu’il ne fait point du tout fi Louis XIV n’envoya
point de gentilhomme de la chambre à M . de
Catinat , 8c que cela eft dit au hafard comme tant
d’autres chofes 5
i ° . Qu’il n’eftpas étonnant qu’ un amant ait plus
d’ empreffement pour une maîtrefle , que pour un
vieux militaire , quoique plus utile à l'Etat 5
3°. Que M. de Catinat, à qui Louis XIV avoit
donné de grandes marques d’ eftime , s’étoit tellement
éloigné de lui j qu'il n’eft pas furprenant qu'il
ait fini par en être négligé.
La ducheffe de Fontanges mourante demandoit3
pour dernière confolation, à voir le Roi chez elle.
Le Roi craignoit de réveiller ou de nourrir en elle
des fentimens auxquels il fàlloit qu’elle renonçât ;
il craignait de l’attendrir 8c de s’attendrir lui-même
en voyant ce beau vifage qui l’avoit autrefois
charmé , défiguré par les approches de la mort. Le
çonfefîeur crut que ce fpeèlacle même' ne feroit
pas fans utilité pour le R o i, 8e il décida pour la
vifite. Le jour où la malade l’attendit , fut un jour
d'inquiétude pour elle ; à chaque inftant elle demandoit
quelle heure il étoit. Le Roi arriva enfin ,
8cla reconnut à peine 3 tant elle étoit changée. Hile ;
le pria de payer fes dettes, car un des abus de fa !
puififance avoit été d’en faire ; elle lui recommanda
de marier fa foeur, qui bientôt après époufa M. de
Molac j une autre de les fceurs avoit été nommée
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abbeffe de Chelles. Les adieux du Roi 8c de fa
malheureufe amante furent fort tendres, comme
iis l’avoient prévu. Le Roi ne put retenir fes larmes.
« Je meurs contente , lui dit-elle , puifque
» mes derniers regards ont vu pleurer mon Roi. »
Elle mourut, 8c le Roi, accablé de douleur, fut
furt.out tourmenté de l’idée d’avoir été peut-être
un obftacle à fon falut 5 il croyoit la voir malheureufe
pour l'éternité 8c malheureufe par lui. Madame
de Montefpan ne diflimula point fa joie , 8c
en devint prefqu’odieufe à Louis XIV. Madame
de Maintenon le confola 8c lui devint chère.
Il ne refta prefque qu’une feule trace du règne
fi brillant 8c fi court de la duchefiTe .de Fontanges :
ce fut ce ruban de tête qui conferva long - tems
fon nom. Cette mode étoit née d’un de ces petits
incidens auxquels l’amour donne de l’importance.
A une partie de chafife, le vent ayant dérangé là
coèfüre de mademoifelle de Fontanges, elle la
fit attacher avec ce ruban , dont les noeuds, qui
tomb oient négligemment fur fon iro n t, lui don-
noient ou recevoient d'elle tant de grâces , que le
Roi la pria de ne pas fe coèfer autrement de tour
le jour. Le lendemain toutes les Dames parurent
coefées ainfi , 8c cette mode acquit plus de fiabilité
que les modes ordinaires.
FONTENU ( L o u is -Fr an ç o is d e ). (HijL.
litt. mod. ) M. l ’abbé de Fontenu, de l’Académie
des infcriptions 8c belles-lettres, étoit d’une ancienne
famille originairement établie en Poitou,
où elle a long-tems pofifédé la terre qui porte fon
nom j ou dont elle porte le nom, 8c dont le château
fut détruit dans le tems des guerres civiles.
L’aïeul de M. l ’abbé de Fontenu vint s’établir à
Paris, 8c fut maïtre-d’hôtel du roi Henri IV . II
époufa la nièce de Philippe de Frefne-Canaye, fi
connu par fes Mémoires 8cfes ambaflfades. ( F ’oye?
plus haut l’ article Canayè.) Un frère de M .l’abbe
de Fontenu fut conful de la nation françaife à
Livourne 8c à Smyrne, puis chargé des affaires du
Roi à la Porte, avec appointemens d’ambafladeur.
L’abbé de Fontenu naquit pofthume au château de
Lilledon en Gâtinois, le 16 oétobre 1667. il fut
élevé à Beauvais, fous les yeux de l ’évêque, M. de
Buzenval, fon proche parent, 8c de M. l’abbé le
Maire fon oncle, grand-chantre delà mêmeéglife
8c grand-vicaire de l’évêque.
M. l’abbé de Fontenu, âeftiné àfournir une des
plus longues carrières de la vie humaine, paffa une
grandepartie de fa jeuneflfe, jufqu’à près de trente
ans, dans les langueurs d’unephthifie déclarée : les
médecins l’avoient prefque condamné, du moins ils
laifloient fort peu d’efpérance, lorfque le malade
alla heureufement s’imaginer que fa plus grande
maladie confiftoit peut - être dans le traitement
même : on le tenoit toujours au l i t , extrêmement
couvert, dans une chamore exactement fermée, où
l’on entretenoit jour 8c nuit un très-grand feu , 8c
on lui recommandoit de boire le plus chaud qu’il
F O N loi
étoit poflible ; U prit fur lui d’efifayer d ’un régime
tout contraire ; il fit donner par degrés un peu
plus d’ air à fa ch amb re; il fe le v a , fit diminuer le
fe u , le fupprima enfin to u t - à - fa it , Sc .guérit en tres-
peu de jours. Depuis ce tems il n’ a jamais eu de
feu dans fon ap partement, même dans les plus
grands f ro id s , même en 1709, 8c les fenêtres en
étoient prefque toujours ouvertes ; depuis c e tems
aulfi il a toujours é té fon propre médecin.
C e tte averfion pou r le feu ne s’ étendoit pas
jufqu’ à la ch aleur: le climat de R om e ,- o ù il accompagna
en 1700 le cardinal J anfon, lui parut
très-favorable à fon tempérament, 8c il le re gretta
beaucoup fous ce point de vue nommément :
fes regrets eurent en co re b ien d'autres motifs, qui
tenoieht principalement au goût de l'antiquité. j1 ;
s’étoit préparé a c e voyage de Rome par. des etudes
fuivies. D éjà inftruit des langues {avau te s, il avoit
apprisplufieurs langues mode rnes, lurtoutl'italien.
11 s’étoit rendu familiers les principes de l ’archi-
te& u re , des fortifica tions, a e la peripeétive 5 il
avoit étudié la botanique 8c l’hiftoire naturelle. Il
ne quitta l ’ Italie qu’après en avoir vifité les principales
Villes : il en rapporta une coîle étion dè
médailles q u i , augmentée par lui dans la fu it e ,
compofa un cabinet cu r ie u x , l’ un des plus confi-
déraMes de Paris. A u mérite de l ’avoir formé , il
joignit le mérite plus rare d en faire le facrifice
au rétabliffement dé la fortune de fa foeur.., fort
dérangée par le fylième > il vendit c e cabinet à
M. le maréchal d'Etréès .
C e tte foe u r , avec laquelle il v iv o it depuis qu’ il
avoit perdu fon oncle ( l ’ abbé le Maire ) en 1708,
8c fa mère en 1 70 9 , faifoit de :fa maifon le rendez-
vous de la meilleure compagnie : là fe raffem-
bloient M. de T o u r r e il, M. de F o n tan e lle , le
P. Bourdaloue ? la marquife de L amb ert, le marquis
de la R iv iè re , Sec. 11 la perdit en 1728. inf1c1r iapvtoioitn sé té admis , en 1 7 :4 , à l’ Académie des 8c b e lle s - le t t re s , en qualité d ’é lè v e î
8c à la fupprelfion de ce tte clafiTe d’ elèveS en 17 16 3
il étoit! devenu l’ un des aflociés. Sur la fin de fa
v ie , dit le fecrétaire de l’Académife , il fembloit
rajeunir dans nos a Semblées ; il les appeloit La promenade
de fon efprity c ’ el^qu’il aimoit extrêmement
la promenade, 8c q u e , pour l’ intérêt même de fa
fanté, il s’ en é to it fait une grande habitude. Les
Mémoires qu’ il a lus à l’Académie ont fou vent é té
le but ou le fruit de fes promenades. Sès vo yag es
mêmè, il le s faifoit prefque tou s à p ie d , laiffant
fuivre la voiture pou r la retrouver au-befoin. C har-
gé de la tutèle honoraire de mademoifelle de Ca-
nify (madame la cbmtefTe de Forcalqüier ) , il alla
pendant plufieurs années paffet le temps de fes
vacances en Normand ie, ch ez M . le marquis de
C a n ify , o n c le , 8c tuteur , comme lu i, de made--
moifelle de C an ify . C e s voyages donnèrent lieu à
fon Mémoire furie s Càmps ae 1 éfar, nom que portent
plufieurs en d ro its , 8c de la Normandie,, 8c de
diverfes provinces de F rance , -niais dont il les dé-
F O N pouille pour la plupart, comme n’ayant dû ce nom qu’ à un préjuge populaire.
Plufieurs voyages q u 'il fit à la S ou rce près d ’O rlé
a n s , ont produit une Diflèrtation fur h periro
riviè re du L o i r e t , dont le cou rs, aifez borné , efi fi
riant 8c fi agréable. L'hifioire naturelle avoit pour
lui beaucoup d’ attrait. Lorfqu’ il c ro y o it y avoir
fa it quelque d é c o u v e r te , il allo it auflitôt la com muniquer
à fon ami M . de R é aùm u r , dont l’ é lo ignement
m ême ( c a r i l lo g e o i t à l’ autre extrémité
dé Paris ) lui é to it fa v o ra b le , en joignant au plaifir
d’ entretenir un am i, le plaifir de l’aller chercher
8c l ’avantage de faire de l ’ex erc ice .
L ’abbé de Fontenu n’exigeoit aucun fervice auprès
de fa perfonne 5 il ne fentoit pas-le befoin d’être
fervi : on n’a jamais eu des moeurs plus fimpies.
Sobre , 8c fiirtout fournis à toutes les ordonnances
de l’ Eglife, ni l’ âge ni les infirmités n’ont jamais
pu lui faire manquer un feul jourde jeûne 8e d’ abf-
tinençe.
Il aimoit à profiter du calme de la nuit, pour fe
travail, 8c il n’ efi: pas le féul homme de lettres
qui en ait ufé ainfi ; il travailloittous les jours jufqu’
à deux heures après minuit, ufageNqui, joint.à
celui d’être toujours fans fe u , devoit être fort
pénible l’hiver.
Peu de temps après la mort de fa foe u r , fon frè re,
dont nous avons parlé au commencement de ce t
a r t ic le , & dont il avoit été long-tems féparé , r e vint
de Conftantinople comme pour fe consoler
avec lui de leur perte commune 8c pour l’en dédommager.
Ses ènfans devinrent l’ ob jet de la ten-
drelfe 8c des foins de M . l’ abbé de Fontenu j il
furveilla leur éducation. D e deux de ces enfans ,
l ’ un a fervi avec diftinéticn dans le régiment des
Gardes. L ’ abbé de Fontenu eu t la douleur de voir
périr l ’a u tre , le chevalier de F o n ten u , enfeigne
de vaifleaux , tué à viagt-fept ans , d’ un coup de
canon au combat du C a p , où il faifoit les fonctions
de major dans l ’e fe a d red e M. d eK e r fa in .C e
jeune homme, déjà parvenu à fe faire une réputation
, emporta les regrets du corps de la Marine.
M . l’ abbé de Fontenu mourut après dix ois
dou ze jours de lan gu eu r , fuivis d’une longue agon
ie , le 3 feptembre 1 7 5 9 , âgé de quatre-vingt-
d ou ze- ans , moins un mois 8c tre iz e jours. Il n'a
jamais rien fait imprimer que c e q u ’il y a de lui
dans le R.ecueii de l’ A c ad ém ie ; mais il a laiifé
vingt volumes d’ une écriture fort fine 8c fort ferrée,
q u i , fé lo n ie fecrétaire de l’ A c ad ém ie , enferoienc
plus de cinquante s’ ils éto ien t imprimés ; « c’ eft
» le réfultat de fes le c tu r e s , de fes réflexions , de
» fes v o y a g e s . T h é o lo g ie , ph ilô fôp h iè , p h y fiqu e,
» a firon om ie, ana tomie, b o tan iqu e, liiftoire an-
» cienne 8c moderne, tou t lui par o it familier. « En
parcourant le ce rcle des fciences humaines , c’eft
furFhiftoire naturelle qu’il aime à fè-repoler.. Sa
modeftie égaioit-feS côiïnqilFaiïces, ‘8c fa charité ,
dont le fecre t fut trahi à fa mort par les larmes
, -dolît les pauvréis honorèrent fon convoi ; fa cha