
au fervice de France en plufîeurs occafions.
Mort le 7 juin 1673. C ’ eft lui qui avoit époufé
cette fameufe Olympe Mancini, nièce du cardinal
Mazarin , laquelle, après avoir eu grande part
au crédit de fa Maifon-, indépendant même de
celui du Cardinal, joua un fi grand rôle dans
toutes les intrigues de la cour de Louis XIV. Elle
finit fes jours dans la difgrace , ayant été obligée
de quitter la France & de fe réfugier à Bruxelles,
par 1 importance trop grande qu’on voulut mettre
a des queftions innocentes, mais indiscrètes ,
qu'elle & plufîeurs perfonnes de la co u r , par
efprit d’intrigue ou par curiofité, s’aviferent de
faire à de prétendues forcières, qui fe trouvèrent
être des empoifonneufes.
3 2.0. Elle fut la mère de ce fameux prince Eugène
( Eugène-François ) , qui la vengea, & qui
punit cruellement Louis XIV de n’ avoir pu démêler
fes rares talens & prévoir fes hautes defti-
nées à travers les écarts & les légéretés de fa
jeunefîe 5 Eugène, le vainqueur ou le héros de
Carpi, de Chiari, de Luzara, d’Hochftet, de
Caflano, de T u r in , d’Oudenarde, de Malpla-
quet, &c. j Eugène qui, gouvernant l’ Empire qu’il
rendoit victorieux, chargé de titres & de dig-ni- I
te s , chevalier de la Toifon-d’O r , généraliflïme 1
des armées de l’Empereur, & préfident de fon
confeil de guerre,confeiller d’Etat & gouverneur
des Pays-Bas, étoit moins un fujet qu’ une puif-
fence formidable à Louis X IV , un génie Etal à
fa gloire , un des triumvirs de Francej la ligue contre la Eugène qui, non moins terrible aux Turcs
qu’aux Français, & partout vainqueur, efi encore
le héros de Zenta ( 1697 ) , & de Peterwara-
d em C 1716 )} Eugène pafioit pour le premier capitaine
de l’Europe, & les Anglais, quoiqu’ils
euflent.Marlborough, difoient que depuis Jules-
Céfar on n avoit point vu d’aufli grand général
qu’Eugène. ( V à l’article Marlbôrough, dans
le Dictionnaire, la reponfe que fit le prince Eugène
à un miniftre anglais , qui l’appeloit le plus
grand, capitainet du fiée le. ) Malgré cette jufte admiration
qu’Eugène infpiroit à les ennemis , quand
le maréchal de Villars n’eut plus que cé feul général
à combattre, il parut avoir de l’afeendant 1712 ® rei^porta fur lui l’importante
victoire de Denain, qui entraîna la réduction de
plufîeurs places perdues par les Français les années
précédentes.
En 1713 Villars eut encore d’ autres avantages
qui déterminèrent enfin l’ Empereur à la
paK. Eugène & Villars en furent les arbitres : ils
la lignèrent à Raftadt le 6 mars 17 14 , & elle fut
auÆ conclue avec l’Empire, à Bade, le 7 fep-
tembre fuivant. r
. En 17*4 fe prince Eugène reparut à la tête de
cent mille hommes pour faire lever le fîège de
Phuisbourg & Philisbourg fut pris prefqu’ à fa
vpe , cjrconôance qui ne contribua pas peu à iBuf-
trer cet exploit :
I l e fl beau d ’affronter gairaent
Le trépas & le prince Eugène.
C e grand Prince a été chanté par Rouffeau &
par Voltaire : c’eft n’ avoir pas été mal partagé en
trompettes, de la Renommée. Alexandre n’eut pas
le même avantage , & ce n’eft pas fans raifon
qu’il envioit au vaillant Achille fon Homère.
Eugène mourut le 21 avril 17365 il étoit né le
18 o&obre 1663. 11 avoit été deftiné à l’état ec-
clefiallique, & polfédoit des abbayes ; il avoit été
connu d’abord fous le nom de chevalier de Cari-
gnan, puis fous celui d ’abbé de Savoie, mais le
nom du prince Eugène eft immortel. 33°* Loms Thomas de Savoie, comte de Soif-
fons, l’ aîné des frères du prince Eugène, né le
oCtobre i6 y 7 , mourut le 2 y août 1762, des
bleflures qu’ il avoit reçues devant Landau y il
etoit au fervice de l’Empereur y il avoit été maré-
chal-de-camp au fervice de France. 34°* Cn autre de leurs frères.( Louis - Jules ) ,
dit le Chevalier de Savoie, mourut à vingt-trois ans,
au fiége de Vienne, en 1683. 3i° ; Eugène-Jean-François de Savoie, comte
de Soiflbns , petit-neveu du prince Eugène, &
q ui, portant déjà fon nom avec éclat, promettoit
d’égaler un jour fa gloire, venoit d’être préfenté
par Ton grand-oncle à l’Empereur & à toute la
famille impériale, d’être nommé major - général
des armées de l’Empire, & d’en remplir dignement
les fonctions fous fon grand-oncle J ï la campagne
de Philisbourg, en 1734, lorfqu’ il mourut
a vingt ans, le 24 novembre de la même ahnée ,
f r ip a n t ainfi toutes les efpérances qu’ un mérite
déjà extraordinaire & des qualités vraiment héroïques
avoient fait concevoir de lui à tout le
monde. En lu i, ou plutôt dans la perfonne du
prince Eugène fon grand-oncle, mort après lui,
finit la branche des comtes de Soiflbns.
36°. Dans la branche des ducs de Nemours ,
Philippe de Savoie, tige de cette branche, fils
du fécond lit du duc Philippe (mentionné fous le
n°. 22) , & frère confanguin d elà duchefle d’An-
goulême, fut nommé à cinq ans à l’évêché de
Genève, en 1495. Des évêques nommés à cinq
ans pouvoient aller à la guerre. Philippe accompagna
Louis XII dans fon expédition contre V e -
nife, & combattit fous lui à la bataille d’Agnadel,
en iyo_9. Il quitta fon évêché e m y i o , s’attacha
dans la fuite au fervice de l’empereur Charles-
Quint 5 il auroit dû dormer la préférence à François
I fon neveu.Ce Monarque, aidé de. fa.mêre,
foeur de Philippe, attira ce Prince à fon fervice,
& le fixa en France par le don qu’il lui fit en iy z8 ,
du duché de Nemours.
37°. Jacques de Savoie fon fils , duc de Nemours,
eft, fi l’on veut, le héros du roman de la
pxincefle de Clèves, à laquelle, pour rentrer dans
la vérité hiftorique, il faudrait fubftituer cette
vertueufe duchefle de Guife, Anne d’Eft, femme
du duc François, q ui, du vivant même de fon
mari, ne put fe défendre d’ aimer Nemours (comme
le duc de Guife fe lui reproche un peu maritalement
dans le François 11 du préfident Hérault) ,
niais qui, moins févère qu’ on n’ a imaginé la prin-
cefle de Clèves , fe permit de l'époufer après la
mort du duc de Guife. Bien moins févère encore,
une princefle de la Maifon de Rohan, mademoir
felle de la Garnache (voye^ dans 1e Dictionnaire,
l’article Rohan3 vers la fin), fe contenta d’une pro-
mefle de mariage qui, dans la fuite ne fut pas
jugée valide, & eut de lui un fils qui fut déclaré
illégitime. Nemours étoit brillant, aimable, généreux
, plein d’efprit & de favoir ; il fut l'ornement
de la cour de Henri II & de fes deux fils > mais
un ornement utile, & qui' les/ fervit dans fes
guerres tant civiles qu’étrangères, avec beaucoup
de gloire & de fucces. il fe jeta dans Metz en
iy y 2 , & le défendit fous. 1e duc François de
Guife fon rival , contre toutes les forces de
Charles-Quint. En i y 54 il fe fignala au combat
de Renti j en iy y y il alla fervir en Italie , & fut
d’un combat célèbre de quatre Français contre
quatre Elpagnols ( Brantôme dit treize de part &
d’autre). En iyÔ2 il ménagea la reddition de
Bourges. Envoyé én Dauphiné, il prit Vienne,
battit 1e baron des Adrets 5 il fit mieux, il 1e ramena
au fervice du Roi. Il,partagea, en ly é y ,
avec les Suifles, l ’honneur d’avoir fauvé ce même
roi Charles IX à. la retraite de Meaux, comme
Charles 1e reconnut formellement par ce propos,
que fans fon cottfin le duc de Nemours & fes bons
compères les SuiJJes, fa , vie ou fa liberté - étoit en
très-grand branle, il fe trouva enfuite à la bataille
de Saint-Denis. Il mourut à Annecy, le îy juin
1 y S y. Henri de Savoie „réputé fon bâtard, & que
mademoifelle de la Garnache fa mère appeloit
prince de Genevois , rie laifla qu’ un bâtard, Samuel
de Nemours.
Vo ic i 1e portrait que fait Brantôme de Jacques
de Savoie, duc de Nemours : « Un des plus par- m faits & accomplis Princes, feigneurs & gentils-
» hommes qui fut jamais.. . . . Très-beau Prince
33 & de très -..bonne grâ ce , brave <k: vaillant,
» agréable, aimable & a c co ftab le , bien difant,
m bien écrivant autant, en rime qu’ en profe y s’ ha-
33 billant des mieux : fi bien que toute la cour, en
33 fon tems ( au moins la jeuneffe ) , prenoit tout
33 fon patron de fe bien habiller fur lu i, & quand
»» on portoit un habillement fur fa façon, il n’ y
33 avoir non plus à redire que quand ôn fe façon-
33 noit en tous fes geftes & aérions. Il étoit pourvu
3» d’ un grand fens & d’ efprit, fes difeours beaux,
33 fes opinions en un confeil belles & recevables.
33 De plus, tout ce qu’il faifoit, il 1e faifoit fi bien,
33 de n bonne grâce & fi belle adrefle, fans autre-
>3 ment fe contraindre, comme j’en ai vu qui le
33 vouloient imiter s fans en approcher , mais fi
33 naïvement , que l’on eût dit que tout cela étoit
>3 né avec lui.
>3 II aimoit toutes fortes d’exercices, & il y
, »3 étoit fi univerfel, qu’il étoit parfait en tout. 11 33 étoit très-bon homme de cheval, très-adroit 8c
' 33 de belle grâce, fût ou à piquer ou à rompre 133.lances, ou à courir bague ou autre exercice ,
; pour plaifîr ou pour la guerre y bon homme de
»3 p ied , à combattre à la pique & à lepé e ; à la
| » barrière fes armes belles en la main: il jouoittrès-
33 bien à la paume, aufli difoit-on : Les revers de
: 33 monfieur de Nemours y jouoit bien à la balle, au
33 balon 5 fautoit, voltigeoic, danfoit, & le tout
[39 avec fi bonne grâce, qu’on pou voit dire qu’il
! 33 étoit très-parfait en toutes fortes d’exercices 133 chevalerefqaes y fi bien que, qui n’a vu M. de
»3 Nemours en fes années gaies, il n’ a rien vu , &
33 qui l’a vu le peut baptifer par tout 1e monde ,
33 la fleur de toute chevalerie, & pour ce fort aimé
33 de tout 1e monde, & principalement des Dames,
33 defquelles (au moins d’aucunes) il en a tiré des
>» faveurs & bonnes fortunes plus qu’iln’en vouloir,
« & plufîeurs en a-t-il refufées qui lui en euflènt
as bien voulu départir. 33
38°. Charles-Emmanuel, duc de Nemours, fils
de Jacques & d’Anne d’E f t , duchefle de Guife ,.
fut un zélé Ligueur, comme 1e duc de Guife le
Balafre, cardinal de Guife & 1e duc de Mayenne,
fes frères utérins. Quand fes deux premiers furent
maflacrés a Blois , il fut arrêté comme leur frère
& comme Ligueur. Il s’échappa de fa prifon , &:
combattit dans la fu ite , pour la Ligue , contre
Henri IV , aux batailles d’Arques & d’ ivri. Gouverneur
du Lyonnois , il 1e fut aufli de Paris , &
défendit cette capitale contre Henri IV encore.
Quand ce Monarque en-fit 1e fiége en iy9.o, ce
fut lui- qui en fit fortir les bouches inutiles ( mot
inhumain introduit par la guerre) , & qui alloit
faire périr de faim & de mifère les vieillards ,
fes femmes & fes enfans fans la généreufe pitié
de Henri IV , q u i, contre l’ avis de fon confeil,
voulut qu?on leur livrât paflage, & permit qu’ on
feur fournît des vivres.
Il paroîtque ce Charles-Emmanuel étoit comme
le duc de Savoie du même nom (nG. 2 8 ) , ambitieux
& chimérique dans fes vaftes projets y il ef-
péra devenir roi de France en époufant l’infante
d’Efpagne, Ifabelle - Claire - Eugénie. Le duc de
Mayenne fon propre frère l’ayant forcé d’abandonner
qui avoir aufli quelque étendue : c’étoit de lé former
cette elpéranee, il conçut un autre projet
des provinces Lyonnoisde fon gouvernement, c’eft-à-
dire, du Lyonnois , Beau-jolois, F o re z , Mâeon-
nois & Dombes, une principauté qui auroit relevé
de l’Efpagne. Les pénétrèrent fes vues
& s’aflurèrent de fa perforine. La Ligue s’irrite dé
cet affront fait à un de fes chefs ; l’Efpagne prend
en main fa querelle 5 le duc de Savoie & lé gou-
!jj verneur de Milan lui envoient des fecours contre
■fes Lyonnais : ceux-ci alors fe féparent ouyerte- ment de la Ligue & fe déclarent hautement pour
j Henri IV y ils abattent & traînent- dans fes boues