
5o 4 CHRONOLOGIE.
foin de leurs voyages 8c de la liberté des chemins
, pour empêcher les courfes des Infidèles.
I l fallut pour cela prendre les armes 8c devenir
guerriers. C e t emploi attira quantité de noblefte,
& -changea les hofpitaliers en chevaliers. Depuis
ce teins leur but a toujours été le même , de
faire une guerre irréconciliable aux ennemis de la
Foi. Gérard leur donna des ftatuts , & eut Raymond
du Pui pour fuccefleur , vers l’an 1 1 18. La
ruine des affaires des Chrétiens au Levant obligea
les Hofpitaliers de for tir de Jérufalem après
la prife de cette ville. Ils fe retirèrent à Margat ,
"puis à Acre , qu’ils défendirent vaillamment l ’an
1290, 8c fuivirent Jean de Lufîgnan , qui leur
donna , dans fon royaume de Chypre , Limiffo,
où ils demeurèrent jufqu’en l’an 1310. Cette
même année ils prirent Rhodes le jour de lA f -
fomption , fous la conduite de leur grand-maître 3
Foulques de Villaret, Français de nation 5 8c la
fuivante , ils défendirent cette île contre une armée
de Sarrafins ,. avec le fecours d’Amé IV 3
comte de Savoie 3 comme nous Pavons dit en
parlant de l’O rdre de PAnnoneiade. Les Hofpita-
îiers tirèrent de là le nom de chevaliers de Rhodes.
Mahomet II affiégea inutilement cette île Pan
2,480. Le grand-maître, Pierre d’Aubulfon, la défendit
coura'geufement pendant un fiége de trois
mois. Depuis , Soliman i l la prit en 1522 , après
une. généreufe 8c glorieufe défenfe. Le grand-
maître, Philippe de Villiers-Pile-Adam, quis’étoit
illuftré pat cette défenfe, ayant fait voile avec
fes chevaliers & quatre mille habitans , tant de
cette île que des autres qui en dépendoient, fe
retira en. Candie, où, il paffa l ’hiver. De là il
alla en Sicile,. 8c trois mois après à Pvome, vers
le pape Adrien V I , qui donna pour retraite à
l’Ordre la ville de Viterbe. Sept ans après ,,fa-
v o ir , l’an 1530 , les. chevaliers s’établirent dans
l’ île de Malte , dont ils portent le nom. L’empereur
Charles-Quint la leur accorda pour mettre
fon royaume de Sicile à cou vert, & ils l’acceptèrent
du confentement de tous les autres princes
chrétiens „ dans les terres defquels leur Ordre
avoit des polfeffions. L’an i y6j Soliman II fit
afïiéger M alte , qui fut puiüamment attaquée
uatre mois durant , & encore plus vaillamment
éfendue par fon grand-maître, Jean de l’a Valette-
Parifot, 8e par fes. chevaliers. Muftapha, baffa de
Rude , fit, la; defcenté dans I’île le 17 mai. Piali,
bafîa , étoit amiral'ou capitan baffa. Le fameux
Dragut & le vieux Occhialï, qu’ils nommoient
Louchali , tous deux redoutables par leurs pirateries,.,
fe j oignirent quelque te ms après à la flotte
ottomane. avec les vaiifeaux. des corfaires d’A frique.
Gardas de Tolède , vice-roi de Sicile ,
avoir promis de donner du fecours à Parifot dans
le mois de juin ; mais il ne lui en donna qu’ en
féptembre , après que le fort Saint-Elme eût été'
pris, 8c que Saint-Michel & le Bourg eurent tous
deux, été prefque réduits en poudre. : ainlîce fut
la valeur infatigable des'chevaliers qui les fauva ,
plutôt que’ ce tardif fecours de Sicile. I es Turcs,
après avoirperduà ce fiége, en quatremois detems,
foixante & dix-huit mille coups de canon, quinze
iriille foldats & huit mille matelots, Eurent forcés
de fe retirer. Depuis, la ville 8c l ’ile ont été fort
bien fortifiées,
L’Ordre de Malte ou de Saint-Jean-de-Jéru-
falem comprend trois états : le premier , celui
des chevaliers ; le fécond , celui aes chapelains ;
& le troifième , celui des fervans d’armes. 11 y a
des prêtres d’obédience,qui deiferventleséglifes $
des frères fervans d’ office ou ferviteurs, 3c dés
donnés ou demi-croix 5 mais ces derniers ne font
pas proprement du corps de l’Ordre , qui ne renferme
que les trois états ou rangs qui viennent
d’ etre dits. Cette divifîon fut faite Pan 1 Ï30 ,
par le grand-maître, Raymond du Pui. Les chevaliers
doivent être nobles de quatre races du côté
paternel 8c maternel, 8c portent les armes. On a
vu fouvent des Princes 8c des fils de. Rois honorer
ce rang. Les chapelains ou prêtres conventuels
font nobles ou du moins de familles confidéra-
bles. Les dignités eccléfiaftiques , comme l’évêché
de Malte, le prieuré de Péglife de Saint-Jean &
autres prieurés de l’Ordre, leur font affeétées, 8c
ils peuvent etre élevés au cardinalat, quoique
membres d’un Ordremiiitaire. Lesfervansd’armés
font nobles (mais non pas de quatre races) , ou
du moins font iffus d’une famille élevée au deflfus
du commun. Quelquefois , en confidération de
leurs feryices,' on les fait chevaliers de grâce ,
comme il arriva au chevalier Paul,.vke-amiral de
France. Le gouvernement eft monarchique 8c aristocratique
j car le grand-maître eft fouverain fur
le peuple dé l’ile de Malte 8c fes appartenances ,
fait battre monnoie, accorde des grâces 8c des
: rémiffions aux criminels, & donne des provifions
des grands-prieurés, des bailliages 8c des com-
manderies. Tous les chevaliers de POrdre, quel-
qu autorité qu’ils aient, lui doivent obéir en-
u>ut ce qui n’eft pas contraire à la règle 8c aux
ftatuts de la religion. Voilà la monarchie. Dans
les affaires de grande importance, qui regardent
les chevaliers & la religion,Je grand-maître & le
facre conieil exercent enfemble une autorité ab-
folue j ce qui fait l’ariftocratie ou gouvernement
des principaux, car le grand-maître y a feulement
deux voix pour fa prééminence. Le confeil eft
ordinaire ou complet. Au coofeil ordinaire affif-
tent le grand-maître , comme chef, 8c les grands-
croix, qui font l’ évêque de Malte, le prieur dè
Péglife, les baillis.cpnventuels, les grands-prieurs
& les bail iis capitulaires. Le confeil complet eft
compofé de grands-croix & des deux plus anciens
chevaliers de chaque langue. Les chevaliers donnent
au grand-maître Je titre d’éminence y 8c fesfu-
jets lui donnent celui d’altejfe..
Les langues font les différentes nations dont
1 Ordre eft compofé , au nombre de huit, fàvôii.:
CHRON
Provence, Auvergne , France , Italie, Arragon,
Allemagne, Caftifie 8c Angleterre. Ces huit langues
ont leurs chefs à Malte , que l’ on nomme
■ piliers 8c baillis conventuels. Le chef OU pilier de
la langue de Provence (qui eft la première, parce
que Gérard, fondateur de POrdre, étoit Provençal)
a la charge de grand-commandeur j le pilier
de la langue d’Auvergne eft grand-maréçhal5 celui
de France eft grand-hofpitalier ; le chef de la langue
d’Italie a Ta charge d’amiral} la langue d’ Arragon
a pour pilier le grand-confervateur, qu'on
nommoit autrefois drapier ,• celle d’Allemagne a le
grand-bailli j celle de Caftille le grand-chancelier.
La langue d’Angleterre, qui ne fubfifte plus à
caufe du fchifme dans la religion , avoit- pour
chef le tareopelier ou général de P infanterie.'
Le plus ancien chevalier de POrdre, de quelque
langue qu’il fo it , entre au confeil ordinaire j 8c
les deux autres plus anciens chevaliers au confeil
complet, pour repréfenter cette langue 8c fon
pilier. Dans chaque langue il y a plufieurs grands-
prieuré«, qui font dans la langue de Franc«, ceux
de France , d’Aquitaine 8c de Champagne ; dans
la langue de Provence deux , celui de Saint-Gilles
& celui de Touloufe 5 8c dans celle d’Auvergne,
le grand-prieuré d’Auvergne. Il y a d’autres
grands - prieurés en Italie, en Efpagne 8c, en A llemagne.
Outre cette dignité , chaque langue a
encore des baillis capitulaires, qui font ainlî nommés
, parce qu’ ils ont féance après les grands-
prieurs, dansles chapitres provinciaux. La langue
de France a deux bailliages ; dont les titulaires
font le bailli de la Morée ou commandeur de
Saint-Jean dé-Latran à Paris, 8c le grand-tréforier
ou commandeur de Saint-Jean en PIfle, près de
Corbeil. La langue de Provence a le bailliage de
Manofquej celle d’Auvergne Je bailliage de Lyon
Chaque grand-prieuré a un nombre de cornman-
deries , dont les unes font deftinées aux chevaliers,
8c les autres indifféremment aux chapelains
8c aux fervans d’armes. Dans le grand-prieuré de
France ," il y a trente-fix commanderies pour les
chevaliers, & dix pour les fervans d’ armes 8c les
chapelains, outre la commanderie magiftrale que
le grand-maître de POrdre tient par fes mains,
ou donne à tel chevalier qu’il lui plaît. Mais il
faut remarquer que ces commanderies font appelées
commanderies de juftice ou commanderies de
0 LO GIE. 5i)5
les grands-prieurs, par un droit qui appartient
à leur dignité. Le grand-maître ( outre Ta commanderie
grâce , félon la manière de les obtenir. On les
nomme commanderies de jajfice quand on les pof-
fède par droit d’ ancienneté au par améliorif-
fement. L ’ancienneté fe compte au tems de la <
réception *, mais il faut aufïi que celui, qui prétend :
à une commanderie , ait fait cinq années de réfi-
dence à Malte , & quatre caravanes ou voyages
fur met. L ’améHorifiement eft lorfqu’après avoir
fait des réparations dans une commanderie dont
on jou it, on en prend une de plus grand revenu.
ïæs commanderies de grâce ont ce nom quand
elles font données par le grand-maître o-u par
qu’on appelle magiftrale) a droit de donner
une commanderie de cinq ans en cinq ans
dans chaque grand-prieuré. Chaque grand-prieur
a au Si le droit de donner une commanderie de
cinq ans en cinq ans. Oh ne prend point garde II
la commanderie vacante eft de celles qui font affectées
aux chevaliers, ou de celles qui appartiennent
aux fervans d'armes } & le erand-maître
; ou le grand-prieur peut donner à tel frère qu’ il
lui plaira , de quelque rang qu’ il fo it, cela étant
indifférent quand la promotion eft de grâce.
De la réception des chevalierï .
Les chevaliers de Malte font reçus dans l’Ordre
de Saint-Jean-de-Jérufalem, en faifant toutes
les preuves requifes par les ftatuts, ou avec quelque
difpenfe. La difpenfe s’obtient du Pape par
un b re f, ou du chapitre général de l’Ordre , &
eft enfuite entérinée au facré confeil. Les dif-
penfes ordinairement fe donnent pour quelques
quartiers ou la noble fie manque , principalement
du côté maternel. Les chevaliers fontreçus d’âge ou
de minorité, ou pages de fon éminence le grand-
maître. L ’âge requis par les ftatuts eft de feize ans
complets, pour entrer au noviciat a dix-fept, 8c
faire profeflion à dix-huit ans. Celui qui fouhaite
d’être reçu dans 3’Or dre, doic-fe préfenteren per-
fonne au chapitre, ou à l’ affembiée provinciale du
grand-prieure., dans Détendue duquel il eft né
A l ’égard du grand-prieuré de France, le chapitre
fe tient au Temple à Paris, le lendemain de la
■ Saint-Barnabe , c’eft-à-dire , le 12 juin , & dure
huit jours. L’aflemblëe fe fait à la Saint-Martin
d’hiver, au mois de novembre. Le préfenté doit
apporter fon extrait baptiftaire en forme authentiq
u e , & légaîîfépar l’évêque ou fon gr and-vie aire 3
le mémorial de les preuves, contenant les extraire
des titres qui juftifient la nobleffe du préfenté , 8c
des quatre familles du côté paternel & du côté
maternel, c’ eft-à dire, du père 8c de la mère, des
aïeuls & des bifaïeuls. Ces preuves doivent aller
au-delà de cent ans ; ainfi il faut quelquefois remonter
:ufqu’ aux trifaïeuls & quatrifaïeuls. Outre
le baptiftaire 8c le mémorial, le préfenté doit apporter
le blafon 8c les armes de fa famille, peints
avec fes émaux 8c couleurs fur du vélin. Lorfque
le préfenté a été admis > la commiffion pour faire
fes preuves lui eft délivrée par le chancelier du
grand-prieuré. Si le père ou la mère, ou quelqu’ un
des aïeuls eft né dans un autre grand-prieure, le
chapitre donne une commiffion rogatoire pour
faire les preuves néceffaires. Les preuves de no-
efle fe font par titres 8c contrats, par témoins,,
par épitaphes 8c autres mcmumens. le s commif-
faires font auffi une enquête, pour favoir fi les
parens du préfenté n’ ont point dérogé à leur nor
1 bkfFepat marchar.dife, trafic ou banque : fur quoi
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