
Jamais bien connu quel homme étoit Sickinghen , !
s'indigna de fa reponfè , f e , pour l’en punir, fup- j
prima fes penfîons. Sickinghen alors fe crut libre
de tout engagement à l’égard de la France ; il
permit à Robert de la Marck & à l’évêque de Liège
ton frère, de le comprendre dans le traité qu’ils
faifoient alors avec le roi d’ Efpagne, en haine de
la France, qui venoit de les mécontenter fur divers
points. ( Voye%, dans le Dictionnaire, l’ article
la Marck.) L’évêqüe de Liège obtint depuis,
par le crédit de l’ Ffpagne, le chapeau de Cardinal,
fe le roi d’Efpagrie n’eut point, auprès des Electeurs
, de minières plus zélés ni plus intelligens,
ni en tout d’agens plus utiles dans cette affaire de
la concurrence à l’ Empire, que les deux la Marck
fe leur ami Sickinghen.
Une modération eftimable nuifît à François I
dans cette affaire. Vers le tems de la mort de
Maximilien, les principales villes de Souabe’ faifoient
la'guerre au duc de Virtemberg, Ulric ,
qu’elles dépouillèrent de fes Etats. Cette expédition
terminée, les troupes viCtorieufes craignant
d’être licenciées, cherchèrent un chef à qui elles
puffent fe donner. La conjoncture de la diète
d’élection & de la concurrence des rois de France
& d’Efpagne leur étoit favorable. Fleuranges ( qui
n’avoit point fuivi les la Marck ^ fon père & fon
oncle, dans Içur défeCtion ) ofa donner à François
I le confeil de prendre ces troupes à fa folde,
fe de les faire approcher de Francfort pour déterminer
les fuffrages en fa faveur. François eut
affez de modération pour ne pas y confentir. Le
roi d’Efpagne fut moins Scrupuleux ; il foufcrivit
d’ abord au confeil que les la Marck lui donnèrent,
de foudoyer ces troupes. Sickinghen fe mit à leur
tête avec Cafimir, marquis de Brandebourg, & la
crainte de cette armée de Souabe n’eut jpas une
légère influence fur l’éleCtion.
Robert de la Marck fe brouilla dans la fuite avec
le roi d’Efpagne, devenu l’empereur Gharles''-
Quint, pour quelques atteintes portées à fa foii-
veraineté de Bouillon, dont Robert étoit très-
jaloux 5 il envoya un défi à l’Empereur. En i $n
Fleuranges joignit fon défi particulier à celui de
fon père ; c’eft ainfi qu’ on avoit v u , en 1388, un
Ample duc de Gueiares défier le roi de France,
Charles V I , qui avoit dans fa cour vingt feigneurs
plus puiffans que ce foible affaillant. Le cardinal
de la Marck trouva cette faillie d’audace fi dé-
raifonnable, qu’il abandonna fon frère , & leva des
troupes pour le fervice de l’ Empereur. Sickinghen
refta aufli pour lors attaché à Charles-Quint.
Le retour de la Marck vers la France fut un
événement heureux pour Fleuranges, qui, toujours
attaché au R oi', fe voyoit déshérité par le traité ;
que la Marck avoit fait avec l’Empereur. C e traité
portoit qu’aucun des fils de la Marck n’auroit part
à fa fucceffion, & ne rentreroit dans fes Etats s’il
ne s’engageoit au fervice de Charles-Quint. Deux
d’entr e u x , Jamets & Sauflÿ, intimidés par cette
menace, avoient fuivi leur père ; mais Fleuranges
n avoit pas cru pouvoir violer le ferment de fidé:-
l ÿ ^lu A avoit prêté au Roi. Se voyant juftifié par
1 evenement, il fe hâta de féconder le reffentiment
de fon père contre l’Empereur. A la tête de quinze
nulle hommes d infanterie & de quinze cents chevaux
levés en France contre les défenfes pu-
bliques du R o i, & avec fa permiflion fecrète , il
alla mettre le fiége devant Vireton, petite ville du
Luxembourg, fur les confins de la Lorraine. L’Em-
pereur envoya demander à François I s’ il appuyoit 1 infolence du duc de Bouillon : le Roi defavoua 1 entreprife des la Marck , & leur ordonna fi for-
tement de licencier leurs troupes, qu’ils ne purent
fe difpenfer d obéir. Cependant l’Empereur, re-
gardant le défaveu du Roi comme un menfonge
politique arraché par la crainte, profita du licenciement
des troupes de la M^rck pour prendre
une vengeance facile de l’infulte que ce feigneur
lui avoit faite. Le comte de Naffau fut chargé ,
avec Sickinghen, & même le cardinal delà Marck,
de mettre tout a feu & à fang dans les Etats de
Sedan & de Bouillon ; ainfi Sickinghen viola les
deux fer mens qu il avoit faits de ne jamais porter
les armes, ni contre le roi de France, ni contre la
Maifon de la Marck.
Les efforts que fit cette généreufe Maifon delà
Marck, abandonnée-à elle-même, firent juger de
ce qu’elle auroit pu faire fi elle eût été appuyée
par la France comme elle s’y attendoit ; elle fut
' ep|® obligée de céder, Robert de la Marck abaiffa
fon orgueil jufqu’à demander une trêve, & il eut
bien de la peine à en obtenir ùïie de fix femaines
par le crédit de fon ancien ami Sickinghen.
La guerre devint générale. Charles-Quint &
François I , après avoir long-tems cherché à rejeter
l’ un fur l ’autre le tort de l ’aggreflion fe
déclarèrent enfin. Le comte de Naffau & ce Sickinghen
firent enfemble le fiége de Mézières
place où s’étoit enfermé le chevalier Bayard. On
ne croyoit guère pouvoir entamer la place qu’ à
l’orient, du côté des Ardennes, la Meufe formant
de cette place une efpèce de prefqu'île, & paroif-
fant la rendre inacceffible vers le nord, le couchant
& le midi. C ’ étoit en effet du côté du levant
que fe faifoit 1 attaque ; mais Sickingen, paf-
fant la Meufe avec quinze mille hommes détachés
de l’armée de Naflau, alla pofer des batteries fur
une éminence’ qui commandoit la ville vers le
fud-oueft. La place, battue ainfi en deux féns
contraires , fut bientôt ouverte de tous côtés : la
nature ni l’ art ne faifoient plus rien pour elle
mais Bayard y reftoit. Toujours informéde tout ce
qui fe paflbit chezdes ennemis , il fut qu’il y avoit
quelque méfintelligence entre le comte de Naffau
& Sickinghen j il voulut l’augmenter en leur
infpirant une défiance mutuelle. Il écrivit à la
Marck une lettre qui ne devoir point être remife
à fon adrefle.
« Le comte de Naflau, lui difoit-il, m’a-fait part
» du deffein qu’ il a pris de quitter le fervice de
M l'Empereur pour celui du Roi. Vous êtes l’ami
» du, comte de Naflau , vous êtes le mien ; aver-
» tiflez-le de terminer cette affaire avant l ’affront
93 qu’on lui prépare. Douze mille Suiffes, avec
33 huit cents hommes d’armes , arrivent ce foir à
33 trois lieues du camp de Sickinghen ; demain ils
33' l’attaqueront, & la perte eft infaillible; en
33 même tems je dois fondre, à la tête de ma gar-
33 nifon, fur le camp du comte de Naflau. C ’eft j
33 cet affront qu’ il faut qu’ il prévienne en cori-
33 fommant fon ouvrage. 33
Bayard charge de cette lettre un payfan, lui dit
de paffer à travers le camp de Sickinghen , & de
s’y cacher de manière qu'il foit vu & pris. 11 le
fut; Sickinghen lut la lettre fe trembla. Cette défection
du comte de Naffau , dont il crut avoir
furpris la preuve, & que fa haine pour Naffau lui
fit d’abord regarder comme indubitable, l’arrivée
prétendue des Suiffes, l’approche plus réelle d’une
armée françaife qui s’ avançoit pour faire lever le,
fiége, la réfiftànce opiniâtre de la place, quelques
autres circonftances. encore que fa défiance
rapprochoit rapidement, tout lui periuada que
Naffau avoit juré fa perte, & que , s'il reftoit dans
fon pofte ( lui Sickinghen ) , il allcit fe trouver
ferré entre la place & deux corps d’armées fupé-
rieurs au fien. Il prit le parti de repaffer la Meufe
& d ’aller fe pofter près du comte de Naffau pour
obferver fa conduite, Naffau, furpris de ce mouvement
, envoya demander à Sickinghen ce qu’il
fignifioit. I l f i g ni fie, répondit Sickinghen avec colè
re, que le comte de Najfau n en tfi pas encore ou il
penfe y qu’il n'aura pas le plaifir de me voir périr avec
mon armée , & que peut-être fa trahifon lui coûtera
cher. En même tems il rangea fon armée en bataille,
& par cette démarche il obligea le comte
de Naffau, qui n’entendoit rien à cette bizarre
énigme, d’ y ranger aufli la fienne. A la faveur de
ce tumulte, le payfan, porteur de la le ttre, fe
fauva , & courut rendre compte à Bayard du fuc-
cès de fon artifice. Celui-ci, voyant fes deux ennemis'prêts
d’en venir aux mains , s’écria : Donnons
le fignal de la bataille , fe il fit faire une décharge
d'artillerie furies troupes dé Naffau. Naf-
feau craignit à fon tour d’être preffé à la fois , &
par la garnifon, & par Sickinghen, qu’il foupçon-
noit d’intelligence avec le chevalier Bayard ; il
étoit poflible que dans ce chaos de défiances & d’incertitudes
les deux généraux de Charles-Quint
s’ entre-détruififlent imprudemment; mais ils s’expliquèrent,
& l’évafion du payfan put les aider à deviner
la vérité. Au moyen du décampement de-Sickinghen
qui laiffoit libre le paffage de la Meufe, les
■ Français introduifirent dans laplace un grand convoi
& un corps de troupes confidérable; ainfi Bayard
tira un avantage réel de fon ftratagême. Alors le
comte de Naflau défefpéra de prendre cette place
que tous les Français , excepté Bayard, avoient
défelpéré de pouvoir garder. Le liège fut levé.
Depuis cetté époque en ne rencontre plus
Sickinghen dans aucune expédition militaire ni
dans aucune intrigue politique.
SIGEFROI & GODEFROI. ( H i f i . du Nord. )
Sigefroi, roi des Danois ou Normands du tems
de Charle magne 3 ne voyoit pas avec moins d'inquiétude
l'agrandiffement dé la" puiffance françaife
du côté du No rd , que les Sarrafîns du côté
de l'Efpagne, & les Grecs du côté de l'Italie ;
il avoir cependant toujours paru vouloir entretenir
la paix avec la France , mais fes fujets in-
feftoient toutes les mers, obfervoient toutes les
côtés. C e peuple tiroit de la marine une fource
nouvelle de puilfance , inconnue à toutes ces
nations barbares, qui, forties du fein de la Germanie,
n'avoient prefque jamais conçu d'idée d’a-
grandiffement que par terre. Sigefroi parloit toujours
de paix à Charlemagne, mais il étoit l'ami
de Vitikind : fa cour avoit été la retraite de ce
général fixon dans toutes fes difgraces , & les
'.Etats.de Sigefroi ferv,oient d’ aille à tous les Saxons
. chalTes de leur pays par le fort de la guerre : il
avoit fouvent envoyé à Charlemagne des ambaf-
fadeurs qui avoient compara dans les divers par-
lemens que tenoit ce Prince ; mais ces ambaffa-
deurs étoient des efpions choifis de concert pat
Sigefroi & par Vitikind, pour épier les endroits
& les momens foiblés ; ils n'avoient jamais de
rapports favorables' à faire ; ils voyoient Charlemagne
dans toute fa puiffance & dans toute fa
gloire ; ils le voyoient plus grand dans fes parle-
mens & dans fes confeils, qu'à la tête de fes armées
donner de.s lois aux nations vaincues , prendre
des mefures figes pour l'exécution de tous fes
deffeins, & furtout gouverner fes fujets avec
une douceur & une juftice qui invitoient tous les
coeurs à voler au devant de fon -joug : c’étoient
autant de raifons pour éviter d'entrer en guerre
ouverte avec un Prince qui joignoit ainfi au talent
de vaincre , le talent plus rare de régner ; ces
raifons déterminèrent toujours Sigefroi à la paix.
Godefroi fon fucceffeur, qui régnoit dans le
tems de la réduôiion des Saxons en 804, füivit
la même politique.! & voyant la barrière'qui fé-
paroit fes Etats de la France, renverfée par la
tranfplantation entière des Saxons, il n'en fut que
plus empreffé à marquer- au vainqueur la plus
grande condefcendance ; il fe hâta de conclure un
traité par lequel il s'obligeoit à faire fortir de fes
Etats les Saxons qui pouvpientsyêtre réfugiés.
. SÎMPLICE, SIMPLICIUS. (Hifi. eccléfi) Saint
Simplice, évêque’ d'Autun au quatrième fiècle
a fourni le premier exemple, du moins authentique,
d'une épreuve parle feu chez les Chrétiens
Cette épreuve eft rapportée par Grégoire de Tours
dans fonTraité delà gloire des Confeffeurs. Simplice
ét;oit marié lorfqu il fut fait évêque : ü
femme ne put fe réfoudre à le quitter. Sûre dé fa