
défagrément d’entendre les Cantons lui reproch
er les calomnies dont les agens du Pape avoient,
ofé noircir le R o i , lui déclarer que les recours
de la République helvétique j étant dus a la juftice
6e non au menfonge , feroient accordés au Roi
& refufés au Pape 5 qu’ on ne verroit jamais les
Suifles réunis fous les mêmes drapeaux avec les
Lanfquenets leurs ennemis & leuis rivaux , qui
étoient en grand nombre dans l'armée de la ligue
impériale 8c papale 3 qu’ils alloient ordonner au
' cardinal de Sion de fortir de la Suiîfe pour toujours..
Cependant ce tte décifion n’ avoit point é té unanime
: les intrigues du cardinal de Sion avoient
prévalu dans plulïeurs Cantons. 11 avoit gagné
ce lu i de Zu rich , qui avoit dc claré, dès le 2 f mai j
qu’il n’ en treroit point dans l'alliance que le Roi
pourroit renouveler avec les Cantons. D ’ ailleurs,
le maréchal de F o ix , dans les lev ées qu’ il Ht faire
en S u ifle , témoigna pour certains Cantons une
prédile&ion dont les autres fe vengèrent en acceptant
l'a rgent du cardinal de Sion & en four-
nifiant des fecou rs à la ligue : de c e nombre j
furent Lu ce rn e, U n , Schwitz 8c Underwald : j
d e là vient q u e , dans ce tte g u e r re , on vo it les
Suifles fervir prelque également dans les deux armées
ennemies, contre la teneur*du traité de
Fribourg.
L a u t r e c , tant qu’il eu t de l ’avantage fur les
conféd érés , parut s’attachera p rolonger la guerre 51
il fembla prendre plaifîr jufqu’ à quatre fois àlaifler
échapper les ennemis de fes mains, content de
le s v o ir fuir devant lu i , & comme s il eu t été
fur de les retrouver quand il voudroit. Le s Suifles
de fon armée lui demandèrent en murmurant les
gratifications qu’ on avoit coutume de leur donner
après le gain d'une bataille 3 ils difoient qu’ il n’av
o it pas tenu à. eux que la guerre n 'e û t é té te r minée
> que le caprice du général ne de voit pas
les frulîrer des avantages que le fo r t offroit- à leur
valeur. Lautrec avoit mérité ce s affronts , & tout
c e qui arriva dans la fuite dut le faire repentir de
ion opiniâtreté. Le refte de cette guerre du Miia-
nez ne fut plus pou r lui qu’un tiflii de difgraces.
Le s Suifles que le s confédérés attendoient & que
les intrigues du cardinal de Sion leur avoient
p ro cu ré s , étant arrivés à C o i r e , demandèrent
un corps de ca va le r ie , q u i , afîurant leur marche ,
facilitât la jonc tion. Profoer C o lo n n e détacha |
auflitot quelques efcadrons de chevau-légers , q u i, '
palfant a vec beaucoup de rapidité fur les terres de :
la fe ign eu r ie , trompèrent à la fois la v ig ilan c e , & ■
des V én itien s, & des Français: c e fut en vain que
le vaillant Créqu y de P o n td o rm y , avec deux :
compagnies de gendarmes 8c d ou ze cents hommes ;
dfinfanterie , alla occuper près du lac d’ iftria un :
pofte par où les Suifles dévoient pafler : ce p o lie
fu t fo r c é 3 les Suifles a rrivèrent avec c e petit ayan- j
tage au camp des confédérés. L e cardinal de Sion ;
é to it à la tê te des Suifles.
Les confédérés ayant reçu ce renfort, ne fe
bornèrent plus a une fimple défenfe. Bientôt.une
révolution a laquelle l’a dre fie du cardinal de Sion
contribua autant que leur bonheur, vint encore
relever leur courage. .Les Suifles voyoient depuis
I ‘Pnp~t^ms.avec indignation, qu’au mépris des recès-
de leurs diètes, au m :pris de la décence publique
oc des.liens patriotiques , leurs fujets, entraînés
par des intrigues particulières, fe partageoient à
leur gré entre les différentes puiflances, & s’ex-
pofoient fouv.ent à tremper leurs mains dans le
de leurs concitoyens : il y avoit alors douze
mille Suifles dans l’armée des confédérés, &
treize mille dans l’armée françaife, tous prêts à
eool"gsr. La République helvétique youlut
abfolument faire cefler ce fcandale 5 elle, envoya
des ordres a tous les Suifles des deux armées de
revenir dans leur pays. Le cardinal de Sion , qui
veilloit a to u t, fut inftruit de cette réfoluti on &
uit en tirer parti. Le courier dépêché à l’armée
françaife fignifia l’ordre de la République : auflitot
tous les Suiflès obéirent & quittèrent l’armée ;
mais le courier qu’on envoyoità l’armée des .confédérés,
arreté & gagné par le cardinal de Sion,
ne publia point l ’ordre dont il étoit chargé : ainfi-
tous les Suifles de l’ armée confédérée relièrent.
C était déjà beaucoup : ce ne fut pas tout encore.
L ordre que les.Suifîes de l ’armée françaife avaient
reçu , ne leur apprenoit pas qu’ on eût adrefle um
pareil ordre a ceux de l’ armée pontificale. Le car-'
dinal de Sion profita de leur' ignorance ; il leur
perfuada que la République avoit reconnu la juf-
tice de la caufe des confédérés ,: que c ’étoit. aux
feuls Français qu’elle refufoit.des troupes, ^ qu’en-
prenant parti dans l’armée des confédérés, les
Suifles rempliroient le véritable efprit de l’ ordre
qu’ ils avoient reçu. Ces raifons, appuyées de l’ar-
gent du Cardinal, perfuadèrent les Suifles, qui
; pafîerent prefque tous du camp des Français au
. camp des confédérés. Le maréchal de Lautrec,î
i leur ayant en vain rappelé leurs fermens & repro-
| cqè leur infidélité 3. fe vit réduit à une guerre
• défenfive.
Cependant les confédérés avoient à rendre^
. compte à la République helvétique de fes ordres
interceptés & violés^ de fes foldats trompés &
débauchés. Les confédérés s’étoient flattés de
lui faire approuver cette fupereherie, d’en tirer
encore de nouveaux fecours , & de la détacher
entièrement duparti.de la France. Ils lui députèrent1
dans* ce defîein l’évêque de Vérone & quelques-
feigneurs milanais du parti des Impériaux. Ces
ambaffadeuns, étant arrivés fur la frontière de la
Suiflè, crurent qu’ après les fujets de plainte qu’ on
,avoit- donnés, à la République , l ’intérêt de leur
fureté exigeoit qu.’ ils priflent des pafle-ports avant
yde pafler outre. L’évêque de Vérone feul fut
plus hardi : les caractères d’évêque & d’ambaf-
fadeur réunis en fa perfonne lui perfuadèrent qu’il
n’avoit rien à craindre j il fe trompa. Les Suifles
le firent arrêter, pour être entré, difoient-ils,
fans paffe port dans un pays allié des Français. Ils
étoient juftement indignés de la furprife faite à
leurs fujets v Le cardinal de Sion, en réunifiant tous
•les Suifles des deux armées dans l ’armée impériale
par le ffratagême hardi dont on vient de
p arler, n’avoit rien fait, fi l’on v e u t , d’illégitime
contre les Français fes ennemis, d’après la
maxime :
Dolus an virtus,quis inhofte requirat é* ,
Mais il avoit manqué, eflentiellement à la République
dont il étoit membre, 8c cette République
fentit vivement une injure qui rappel oit & agra-
voit tous les torts païfés du Cardinal. Les Cantons
même qui lui avoient été-les plus attachés, tels
que Lucerne, U i i , S ch litz & Underwald ^ l’abandonnèrent.
Les advoyers de Lucerne, dans
une lettre du-3 octobre 152 1 , l'appellent le faux
& traître Cardinal, & fe plaignent amèrement
de quelques levées qu’ il leur avoit extorquées.
On ne donna point de pafle-ports aux ambafladeurs
que les confédérés avoient envoyés avec l’évêque
de Vérone : on ne voulut point les entendre 5
on accorda au contraire aux Français feize mille
hommes qu’ils demandèrent, & déformais les
Suifles furent entièrement pour eux & pour eux
feuls.
Depuis ce tems on ne rencontre plus le'cardi-
nal de Sion dans aucune intrigue politique y ce qui'
fait croire qu’il mourut vers l’époque dont il s’agit.
SCHEUCHZER (Jean-Ja c q u e s , Jean-Ga s p
a r d & Je a n ) , (Hiß. litt, mod. ) , eff: le nom de
trois favans médecins de Zurich, père , fils &
•frère, dont on a beaucoup d’ ouvrages fur la médecine
Sc la phyfîque. Jean-Jacques & Jean étoient
frères ; Jean-Gafoard étoit fils de Jean, & mourut
déjà illuftre à vingt-fept ans, en 1729. Son père
& fon oncle lui furvécurent : le premier mourut
en 1733 i le fécond en 1738.
SCHRIVER ou SCRIVERIUS ( P i e r r e ) ,
(Hiß. litt, mod.), lavant hollandais, qui prit pour
devife lire & écrire. On lui doit de bonnes éditions
de jÿufieurs auteurs andens, tels que V é -
g è c e , Hj^in, Frontin^ Apulée, Martial, Sénè-
qûe 5 il a de plus beaucdup écrit fur l’hiftoire &
des antiquités bataviques. 11 mourut en 16603 âgé
dé quatre-vingt-cinq ans, après avoir été onze
ans aveugle. L’univerfité de Leÿde aflifta. en corpk
à fes funérailles ; Gronovius prononça fön éloge
funèbre.
! SCHOEPFLIN. ( Hiß. litt. mod. ) , Jean-Daniel
Schoepflin naquit le 6 feptembre 1694 à Salzbourg,
•dans le margraviat de Bade Dourlac 5 il étoit de
la communion luthérienne. Ses études à Dourlac,
à Bâle, à Strasbourg furent une fuite de fuccès 8c
de triomphes. En 1717 il fe fit-connoître- dans le
monde par Un panégyrique latin de Germanicus,
Prince dont la mémoire, révérée dans l’ Univers,
Peft encore plus particuliérement dans l’Allemagne
, qui.femble triompher de l ’avoir eu pour vainqueur.
Ce difcours fut imprimé par ordre de la
ville de Strasbourg. Cette ville le fixa chez elle
par une chaire d’ éloquence & d’hiftôire , à laquelle
il fut nommé à vingt-fix ans, lé 22 novembre
1720. Elle dérogea en fa faveur à la loi qui
n’admettoit aux chaires que des perfonnes ne es
à Strasbourg. D è s-lo rs la reconnôiflance de
M. Schoepflin adopta Strasbourg pour patrie, &
rien ne put jamais l’en arracher. C e fut en vain
que dans la fuite, & en ditférens tems, & à di-
verfes reprifes , la ville de Francfort-fur-POdei- lui
offrit une chaire d’hiftoire 3 que la czarine Catherine,
veuve de PierreI, l’appeloit perfévéramment
à Pétersbourg pour y remplir une pareille chaire,
avec le titre d hiftoriographe de la cour j que la
Suède, à l’envi de la Ruflie fa rivale, lui offroit
aufli une pareille chaire dans l’univerfité d’ Upfal 3
que rUmverfité de Leyde lui faifoit les mêmes
avances 3 il ferma l’oreille à tant d’invitations fi
flatteufes, Ôc n’ oublia jamais l’ engagement qu’il
croyoit avoir pris avec Strasbourg.
lllemeos primus, qui me fibi junxit 3 amores
Abfiulit, ille habeat fecum,.
On vit paroître de lui une foule deDiflertatiort s
hifforiques & critiques, entremêlées de morceaux
d’ éloquence & de littérature ; il n’étoitpas rr.oin$
l’orateur que Thiftoriographe de Strasbourg. En
1725 il prononça, en préfence du roi Staniflas, au
nom de l’Univerfité, un difcours de félicitation
fur le mariage de la reine de France, fille de Staniflas.
En 1729 autre difcours fur la naifîance de
M. lé Dauphin. Tous les ans il célébroit l anni-
verfaire de la naiflance de Louis X V par un nouveau
panégyrique, auquel la maladie du Roi à
Metz , en 1744, & lés victoires de la France en
174y , fournirent dés matériaux intéreflans.
Eli iy('6 3 quoiqu’âgé de foixante-treize ans j il
retrouva des forces & des talens pour, célébrer la
cinquantième année révolue du regne de ce Monarque.
La ville de Strasbourg, fentant, d'après fes re-
préfentâtions j de quelle utilité les voyages pou-
voient être pour fon proféfleur d’hiftoire, lui accorda
deux années pour les voyages de France,
d’Italie & d’Angle terré, & voulut prendre fur elle
tous, les frais de ces voyages. Pendant fon ab-
fencé, qü’il fut meJttre a profit pour les lettres ,
Strasbourg lui conféra un des meilleurs canonicats
de la communion luthérienne. Paris, qui connoif-
foit depuis long-tems le prix de fes travaux, &
q ui, en voyant l’auteur, connut encore mieux
toute l'étendue^de fon' rriérite de fes edrinoif-
fances, voulut, auffi lui témoigner fon eftime :
l'Académie des belles-lettres', où il s’êtdit fait des