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mot qu apparemment il a dit le premier, mais qui
eft devenu trivial, & que M. Duclos, qui le ré-
pétoit fouvent , difoit etre la devife naturelle des
gens occupes : Ceux qui viennent me voir me font
honneur} ceux qui n y viennent pas me font plaijtr.
M. Morin fut reçu docteur en médecine vers
Tan 1662. Après quelques années de pratique, il
fut reçu expeciant à l’Hotel-Dieu. Quand il tut devenu
médecin penlïonnaire de cet hôpital, il rece-
voit l’argent de fa penfion, & le remettoit dans le
tronc après avoir bien pris garde à n’être pas découvert.
C ’é to it, dit M. de Fontenelle, payer les
pauvres pour les avoir fervis.
Sa réputation perça, & mademoifelle de Guife
voulut 1 avoir pour médecin. «« Sa nouvelle di-
M gnité , comme l’appelle M. de Fontenelle, lui
,3 Ëit Port a charge, & on eut bien de la peine à la
» lui^ faire accepter : elle lui fut à charge, en ce
M qu’ elle l’obligea de prendre un carrofîè} mais il
M ne relacha rien du refte de fon auftère régime. »
Au bout de deux ans & demi la Princefie tomba
malade , & Morin crut qu’ il étoit de fon devoir
de lui annoncer la mort. La Princefie, loin de lui
favoir mauvais gré de fon zèle pieux , tira de fon
doigt une bague qu’ elle lui donna pour dernier
gage de fon affeétion, & lui laiffa par fon tefta- i
ment deux mille livres de penfion viagère.
A peine fut-elle morte, que M. Morin fe dé-
barrafla de fon càrrolïe, & fe retira fans aucun
aomeftique à Saint-Victor, « ayant cependant aug-
*>mente fon ordinaire d’un peu de riz cuit à l’eau.»
En 1699, il entra dans l’Académie des fciences ,
en qualité d’aifocié botanifte.
Quand M. de Tournefoit alla herborifer dans
le Levant, en 1700, il pria M . Morin de faire en
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fa place les démonftrations des plantes au Jardin
royal, « & le paya, de fes peines, en lui rappor-
» tant de l’Orient une nouvelle plante qu il nomma
» Marina oritntalis, » comme il nomma la Dodarte ,
la Fagonne, la Bignonne , la Phelypée, en l’honneur
des hommes célèbres ou puiflàns qui portoient
ces noms, ce C e font là de ces fortes de grâces que
« les favans peuvent faire, non-feulement à leurs
» pareils, mais aux grands. »
Sur la fin de fa v ie , M. Morin conlentit enfin à
prendre un domeftique. Il mourut le 1 mars 171 c,
fans maladie, & uniquement faute de forces 5 car,
comme le remarque M. de Fontenelle , qui né fi
foible, qu’on fe hata de l ’ondoyer dans la crainte
de n avoir pas le tems de le porter à l ’églife, a
cependant pouffé beaucoup plus loin fa carrière
en vivant dans le monde, & comme tout le monde,
la diete auftère de M. Morin, fort propre à prévenir
des maladies, ne l’étoit pas à donner beaucoup
de vigueur.
. On a trouvé dans les papiers de M. Morin un
Index d’Hippocrate, grec & latin, plus ample &
plus corre a qu’aucun autre} ouvrage, dit M. de
Fontenelle, qui demande une affiduité & une patience
d’hermite.
Il en eft de même d’un journal de plus de quarante
années, où il marquoit exa&ement l’état du
baromètre & du thermomètre , la féchereffe ou
1 humidité de l’air, le vent à fes thangemens dans
le cours d’ une journée 3 la pluie, le tonnerre Si
jufau’aux brouillards, &c.
Il a laiffé une bibliothèque de près de , vingt
mille écus, un médailler & un herbier, nulle autre
acquifititfn. •* Son efpritlui avoir, fans comparaifon,
« plus coûté à nourrir que fon corps. »
N A T N A U
^ N a r c i s s e ( s a in t ) . ( m ß . e c c iif ) L ’ hiftoire
de ce faint patriarche de Jérufalem eft embellie
ou défigurée par beaucoup de miracles. Il
change de l’eau en huile par une fimple bénédiction.
11 pardonne à fes ennemis, à fes calomniateurs
} mais ils meurent tous d’une mort où éclate
vifiblement la vengeance divine. Il lui eft révélé
qu’ il aura pour fucceffeur dans le fiége de Jérm-
falem faint Alexandre, évêque de Flaviade} le lendemain
faint Alexandre arrive par hafard à Jérufalem,
& faint Narciffe le nomme fon coadjuteur.
Le plus grand & le plus avéré de tous les miracles
de faint Narciffe eft qu’ayant été appelé à quatre
vingts ans au gouvernement de l’ églife de Jérufalem,
il la gouverna bien, & qu’il la gouverna
pendant quarante ans ,' n’ étant mort qu’à cent
vingt ans, èn 216. 11 avoit aflifté à cent ans au concile
de Céfarée dans la Paleftine. C e fut lui qui
conféra le facerdoce à 1 illuftre Origène.
N A T T A (M a r c -A n t o i n e ) , grand jurifeon-
Fulte du feizième fiècle, natif d’MH en Piémont,
étoit magiftrat à Gênes. 11 a laiffé plufieurs ouvraf
es de théologie & de jurifprudence. Son Traité
h Dto eft célèbre & rare, moins comme ouvrage
de théologie, que comme monument typographique.
Il fut imprimé à Venife en 1559* Ses autres
ouvrages font un recueil de conciles : Conciliorum
tomi tres; De immortalitate anime. , libri ƒ> De Paf-
fione Dornini. Un Traité qui femble appartenir à
la politique : De Docîrinâ vrincipum , Libri 9 i un
autre qui tient au goût & à la philofophie : De
pulchro.
N A T T IER ( Jean-Mar c>, ( Wft- mod. ) , peintre
ordinaire du R o i, peintre célébré. Louis®IV
preflentit fa gloire future en voyant fes deflins de
la galerie du Luxembourg : Continue% , Nattier
lui dit-il, & vous devienareç un grand-homme. CeS
deflins ont paru gravés, en 17 10 , en un volume
in-folio. Le czar Pierre', par un trait de dépit, ne
loua & n honora pas moins Nattier. C e Prince,
pendant fon féjour en France, . fit propofer à cet
artifte de le fuivre en Ruflie. Nattier ne voulut
point quitter fa patrie. Piqué de fon refus, le Czar
fit enlever le portrait que Nattier avoit fait de l’impératrice
Catherine , fans lui donner le tems d y
mettre la dernière main. Nattier peignit la famille
royale, & à fa fuite tous les Grands du royaume}
ce qui l’obligea de facrifier à ce genre de travail
le goût de prédilection qu il fe fentoit pour les
fujets d’hiftoire. La première proteciion que l’ on
doit aux talens eft de leur laiffer la liberté de
choifir leurs fujets. Né à Paris en 1685, mort en
17 66.
N AVÆUS. (Hifi. litt. moi. ) C ’eft le nom de
deux théologiens du dix-feptième fiècle ; l'u n ,
doéleur de Douai ( Matthias); l’autre, de Louvain
(Jofeph), ce dernier fort ami des coryphées
du janfénilme de fon tems, Arnauld, Quefnel,
Opftraët ; le premier, auteur de fermons & de
quelques ouvrages théologiques ; le fécond, connu
par un livre qui a pour titre ; Le fondement delà vie
chrétienne, & pat fa part qu’ il eut aux réglemens de
l ’hôpital des incurables de L ièg e , & à l’etabliiie-
ment de la maifon des Repenties. Celui-ci mourut
à Liège en 1705, à cinquante-quatre ans.
NAUSEA ( F r é d é r ic ) , ( Hifi. litt. moi.) :,
évêque de Vienne en Autriche, nomme en 1541
par l’ empereur Charles-Quint. On diftingue fon
Traité de la Réfurreélion : De J. C. & omnium mor-
tuorum refurreüione. Il a écrit auffi fept livres des
chofes merveilleufes, dont le nombre efi fort grofli
par la crédulité de l’auteur & de fon fiècle. On a
du même prélat un Abrégé de la vie du pape Pie I I ,
& de celle d e l’ empereur Frédéric 111. Divers écrits
polémiques contre les Proteftans , & jufqu’à des
poéfies. Mort en 1 j 51 à Trente , pendant la tenue
du concile.
' NAUZE (M . DF. i a ) . Louis de Jouard, fleur
de laN au ze , de l’Académie des inferiptions 8ç
belles-lettres , & l'un de fes membres les plus
fages în les plus favans, étoit d'une famille noble
de Villeneuve-d’Agénois en Guienne ; il fit fes
études au collège des Jéfuites d A g en ; il entra
dans leur Société malgré fes parens, & il en fortk
malgré les Jéfuites, qui ne lui rendirent fa liberté
que fur fes inftances opiniâtres, volentem & acriesf
petentem dimittimus, dit le P. reéleur dans le congé
qu’ il lui expédia; ils le regrettèrent, & même
après fa fortie ils ne défefpérèrent pas de le ramener
à eux ; mais la Maifon d’Antin fe l’attacha,
gç il s’ attacha furtout à elle. 11 éleva les deux derniers
ducs d’Antin, père & fils, Louis premier du
nom, mort en 1743 ; Louis II fon fils, mort fans pof-
térité en 17571 il eut la douleur de les perdre tous
deux, & de leur furvivre l,ong-tems. Sonhiftoire
d'ailleurs n’ eft plus que celle de fes travaux, &
fes travaux favans, profonds, joignant au mérite
de l'érudition celui d’ une grande fagacité, furent
fans éclat, ainfi que fa perfonne. 11 infpiroit à tout
le monde l’eftime & le refpeéf v il jouilfoit d une
grande confidération ; mais fa modeftie redoutoit
la réputation , & il dn eut peu. On ne pehfa jamais