
banjos (1) vinrent à notre bord avec des interprètes, et leur
suite.
Les banjos se placèrent sur le lit qui leur avoit été préparé ,
sur lequel on avoit étendu un épais tapis de paille du Japon,
avec une couverture d’indienne. On avoit placé auprès de ce
lit un marche-pied pour y monter plus aisément ; une toile à
voile tendue au-dessus du ciel, le garantissoit de la pluie. Nos.
Japonois ayant ôté leurs souliers, se placèrent sur le lit, et
s’assirent sur leurs talons à la mode du pays. Quoiqu’ils dussent
être accoutumés à cette position, j’observai qu’elle leur étoit
pénible à la longue , car il leur arriva plusieurs fois de la quitter
pour s’asseoir à l’européenne. Ils n’avoient d’autre amusement
que de fumer, de prendre du thé et de boire un peu d’eau -
de -vie d’Europe. Leur conversation n’étoit ni longue ni verbeuse.
Le capitaine leur faisôit servir deux flacons e t- deux gobelets
de crÿstal ciselés, avec différentes liqueurs et un peu de
pâtisserie sur un plat’; mais à peine goûtoient-ils de tout cela.
Leur occupation pendant tout le tems que le vaisseau resta à
la rade , étoit de visiter toutes les personnes et toutes les marchandises
qui passoient du vaisseau à terre, ou de la factorerie
au vaisseau ; de recevoir les ordres du gouverneur de la ville ,
de signer les passe-ports et autres papiers des gens qui accom-
pagnoient les marchandises , les comestibles, &c.
Chaque jour que l’on débarque ou que l’on embarque des
marchandises, les banjos, les sous-banjos,des interprètes y-les
écrivains et les visiteurs restent à bord jusqu’au soir, retournent
ensuite à terre p a t laissent les Européens libres sur leur vais- '
seau. Ces jours-là on hissé le pavillon, tant sur le vaisseau qu’à
la factorerie holl'andoise : quand les deux navires arrivent heureusement
, on travaille sur chacun alternativement d’un jour l’un.
( 1 ) Koempfer et Charlevoix écrivent bugios , Haguenaar écrit bonjove,
Rédacteur.
Les
Les Japonois surveillent avec la meme attention les barques
et les chaloupes du vaisseau5 ce, sont leurs barques et leurs
matelots qui conduisent les Européens et leurs marchandises ;
Et afin que leurs propres gens ne puissent pas faire la contrebande
J non plus que les Hollandois , a la faveur des tenebres
de la nuit, ou quand il ne se trouve aucun officier de. leur
nation à bord, ils disposent des vaisseaux de garde à une. certaine
distance ; et des bateaux d’.ordonnance commandés.1 exprès,
font, toutes les heures, le tour du vaisseau, et le cotoiènt de
très-près. ■
Non. contens de toutes ces précautions y ils obligent les Hollandois
de leur remettre la poudre , les boulets, en un mot,
toutes leurs armes, sans oublier la caisse de livres dont j ai
parlé plus haut. Comme l’argent et toute espèce de monnoie.
est défendue , on dépose le numéraire jusqu'au départ. On. leur
donna donc un peu de poudre six tonneaux de balles , six
fusils avec leur bayonnette, en les assurant que c etoit tout ce
.qui nous réstoit de nos munitions. Ils mirent tbus ces objets
dans un magasin , pour nous les rendre fidellëment à notre
départ.
Ils ont renoncé depuis quelque tems à démonter le gouvernail
et à enlever les voiles et les canons. Les peines que leur (
donnoit ce transport, les ont dégoûtes de toutes ces précautions.
Quoiqu’il ne soit pas permis aux Européens d’avoir des armes ,
ils nous laissèrent nos épées.
Quand ils crurent nous avoir bien desarmes , ils commencèrent
par passer en revue tout l’équipage ; et cette détestable
cérémonie se récidivoit matin et soir, chaque jour que I on de— \
barquoit ou que l’on embarquoit des marchandises. Ils comptent
par dixaine les hommes et les marchandises, et prennent des
notes bien exactes de ceux qui sont allés à te rre , de ceux qui
restent à bord , et des malades.
Tome I. S s s