
l’été, jointes à la.fatigue de la marche, engendrent parmi les
boeufs une maladie nommée la démangeaison; plusieurs boeufs
de l’attelage de mon compagnon de voyage , en étoient déjà
attaqués ;, il fut obligé de les troquer contre d’autres qui parois-
soient plus, frais. Il faut avouer que ces pauvres animaux
n’avoient pas d’autre maladie que la fatigué. Ils, étoient si maigres
et si faibles , qu’ils ne pouvaient pas même en avoir d’autre.
Après que les miens se furent bien reposés, nous nous disposâmes
à gravir sur la montagne à neige; et comme nous allions
nous engager dans des pays déserts ou habités seulement par
des Hottentots, nous en prîmes ici quelques-uns avec nous pour
nous servir d’interprètes et de guides , et. nous eûmes- soin de
nous pourvoir de quelques provisions.
Notre bonne hôtesse nous prépara, pour ce voyage, beaucoup
de biscuit de froment,.du pain, un baril de beurre, un gros
mouton salé et confit dans sa peau.
Approvisionnés de tous les vivres nécessaires: et d’armes en
bon é ta t, nous reprîmes notre-route pour aller à Cabbeljaus-
rivier , sur laquelle est située la ferme de Van-Rhenen, riche
propriétaire du Cap : c’est le dernier établissement de ce canton-:
un valet en a l’administration.
Le 10, nous passâmes Cantous-rivier, qui forme les limites
de la colonie hollandoise. Il est défendu aux cultivateurs de
former des établissemens au-delà de cette rivière : il leur est
également bien défendu de faire la guerre'aux Caffres; car là
Compagnie n’auroit pas bon marché de- ce peuplé, aussi beau
que brave : d’ailleurs les campagnes des environs sont riches et
fertiles en herbes.
A Luris-rivier, nous trouvâmes une contrée aussi froide et
aussi montagneuse que celles de Houtniquas- ; les vallées et les
bords des eourans, [produisent de très-beau bois. Les Hottentots
creusent ici de ces grands trous dont j’ai déjà parlé, pour
prendre des éléphans et des buffles : ils plantent au milieu de ce
trou, un poteau fort-pointu, dans lequel la bête s’embroche (1).
Un capitaine de Hottentots établis i c i , vint nous rendre visite
le soir même de notre arrivée , et dressa sa tente à- quelque
distance de la nôtre ; il étoit distingué des autres par u.n manteau
dp peau de tigre et un bâton qu’il portoit à la main.
Le 1 1 , nous passâmes Golge-bos.ch ,. et nous rendîmes, sur les
bords, de Van-Stadss-rivier : nous y allumâmes nos feux pour
y passer la nuit. Les Hottentots Gonaqüas mêlés avec les. Caffres ,
vinrent nous visiter en troupes nombreuses ; nous les régalâmes:
de bon tabac ficelé de-Hollande,. Quelques-uns avoient des peaux
de tigres tués de leur propre main : leur valeur reconnue à la
chasse , leur avoit mérité le privilège de porter cette marque
distinctive. Us avoient presque tous une queue de renard, enfilée
dans un bâton pour essuyer la sueur. Comme ils sont propriétaires
d’un grand nombre de bestiaux, nous, eûmes du lait en
abondance : mais il étoit si sale qu’il fallut, avant de le boire
le passer dans un linge.
Le 12, après avoir traversé Van-Stades-rivier, nous arrivâmes,
à deux villages, considérables.formés de cabanes, disposées en
demi-cercle. Les babitans, au nombre de deux ou trois cents
au moins, venoient en foule admirer nos voitures. Notre tabac
étoit une-espèce d’aimant pour ces bonnes gens : après en avoir
reçu un petit -morceau, ils s’en aboient très-contens chez.eux
ou dans la campagne. La plupart avoient des peaux de veau
et non pas de moutons, comme presque tous les autres Hottentots,
Leur simplicité m’amusoit beaucoup : parmi les objets que
nous avions apportés du Cap pour capter leur bienveillance
et récompenser leurs services , les miroirs attiroient sur-to.ut
leur attention et nous procuroient des scènes très-plaisantes : il
s’y regardoient l’un après l’autre, quelquefois, plusieurs en- 1
(1) Voyez page i 3o.