
sans que personne lui eût indiqué ce chemin, mais seulement
par un instinct tout naturel.
Le même chasseur m’assura que dans l’accouplement, la
femelle de l’éléphant se met à genoux, et que le mâle ne peut
la couvrir, à moins qu’elle ne soit en chaleur.
Il étoit également très-expérimenté dans la chasse au lion. Il
connoissoit parfaitement les coutumes et les habitudes de. ce
redoutable animal : je le questionnai avec d’autant plus de curiosité
, que me proposant de passer encore quelque tems au
milieu des champs, sans autre toit que le ciel, et parmi des
bêtes sauvages , il m’importoit beaucoup de bien connoître leurs
habitudes -et leurs rus.es. '
On peut passer auprès d’un buisson dans lequelun lion'est
couché, sans qu’il se remue, pourvu que l’on marche d’un pas
assuré et que l’on ne se mette pas à courir.
Cependant -un lion affamé est plus dangereux et d’une humeur
moins paisible : mais il lui arrive bien rarement d’attaquer
un homme , au moins il hésite lorig-tems. Il mange un
chien préférablement à un boeuf, et un Hottentot plutôt qu’un
Européen , peut-être parce que le premier est toujours graissé ,
ce qui lui donne une espèce de fumet : en outre, il ne se sert
pas, comme nous-, de sel et d’épices dans : ses alimens ; de
manière que sa chair est bien moins âcre que la nôtre : le
lion préfère un Hottentot à un esclave ; il se contente de viande
de buffle quand il en trouve. Mon hôte fut lui-même témoin
d’un trait de discrétion de ce genre. Un lion qui se disposoit
pendant la nuit à attaquer des Hottentots endormis , prit simplement
des morceaux de buffle qu’il trouva pendus à des
branches d’arbres. Il n’y a pas de plus sûr asyle contre la poursuite
du lion, qu’un bon arbre bien élevé; mais le tigre sait
très-bien grimper dans un moment où il est poursuivi par les
chiens. Tant que le lion ne remue pas la queue , on peut être
tranquille : dès qu’elle s’agite, on court le plus grand danger;
car a coup sur il a faim. Pourvu'que vous en soyez séparé-par
un ravin, vous ne risquez rien de faire feu sur lui, il ne franchira
pas le fossé pour fondre sur vous : ou bien vous pouvez
encore gagner quelque éminence où il ne vous atteindra pas.
Toutes les bêtes féroces ont été chassées ou exterminées à
mesure que les colons se sont emparés du terrein et y ont fait
des constructions : il n’y avoit pas encore long-tems que notre
hôte avoit été inquiété par un de ces animaux.
Quand un lion veut attaquer un buffle il se met en embuscade
derrière quelques buissons, sur-tout auprès-des ruisseaux où
ces animaux vont boire; il saisit le moment favorable pour
fondre sur sa proie : il lui saute sur le dos avec une extrême
agilité, lui enfonce dans le col ses dents terribles et lui presse
les flancs avec ses griffes, jusqu’à ce que l’animal tombe épuisé
de foiblesse. Le lion a la vigueur de \e/ charger sur son dos et
de sauter avec ce fardeau , par-dessus des haies hautes de
deux âunes suédoises; les pieds du buffle traînent à terre. Malgré
son intrépidité, sa force et son adresse , il y a peu
d’animal plus aisé à détruire que le lion. Quand on peut savoir
à-p'eu-près le nombre d’une de leurs troupes, on braque autant
de fusils qu’il y a de lions, dans l’endroit où l’on suppose qu’ils
viendront. On attache un morceau de viande avec une corde
qui correspond aux détentes des fusils ; on a soin de les pointer
de manière- que le. coup parte et porte à la tête, dès que
l’animal touche à la charogne. Les autres , sans être effrayés
du sort de leur compagnon, fondent quelquefois sur le fusil
déchargé , et tombent successivement par les balles des autres
; de manière qu’en une seule nuit, toute la troupe est
détruite. Quand un lion n’est pas blessé à mort, il se garde
bien des endroits où l’on a placé des fusils, et il cherché même
à se venger sur des hommes, quand même il ne seroit pas pressé
par la faim.
Il nous survint ici' un nouveau contre-tems : les chaleurs de
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